Chapitre 36 - Repas de l'enfer

PDV Alec

— Le marié avancera dans l'allée accompagné de sa mère, et ira s'installer devant le prêtre, puis la mariée fera son entrée à son tour, au bras de son père. Le prêtre récitera les formules d'usage, puis les mariés échangeront leurs voeux, et enfin leur union sera scellée par un baiser. Après l'union, tout les invités seront conviés à un vin d'honneur qui sera donné dans une salle attenante, puis la fête et la fin de soirée incluant le repas seront menés dans le lieu choisi par les parents des mariés. explique l'organisatrice d'une voix très sérieuse.

Je retiens un soupir d'ennui, écoutant à moitié ce qu'elle nous raconte. Voilà bientôt deux heures que nous peaufinons les détails pour l'organisation de mon mariage avec Lydia, et le moins qu'on puisse dire c'est que cette tâche est pour moi la plus rébarbative de toutes. J'observe mon père se déplacer et agir comme si les lieux lui appartenaient, décidant de tout conjointement avec le père de Lydia. A aucun moment notre avis ne nous a été demandé, nous sommes seulement les acteurs de cette mascarade, même le choix des fleurs a été retiré à ma fiancée... Je me garde bien de discuter quoi que ce soit, et mon amie fait de même, nous ne voulons en aucun cas mettre nos pères en colère sous peine de subir leurs foudres.

Après une longue journée à programmer cette journée à la seconde près et avec une précision quasi militaire, Lydia et moi sommes conviés à un repas de famille chez mes parents. Nous prenons le temps de repasser chez nous afin de nous préparer pour la soirée et pour nous changer. En entrant dans l'appartement, je vais immédiatement m'effondrer de fatigue sur le canapé en poussant enfin le long soupir que j'ai retenu durant toute cette satanée journée. Lydia rit doucement, puis passe dans la cuisine avant d'en revenir avec une bière qu'elle me tend tout en s'asseyant à mes côtés. J'accepte la bouteille avec un sourire, puis j'en entrechoque doucement le goulot contre la sienne avant d'en avaler une longue gorgée. Nous restons quelques minutes à siroter nos bières, contemplant seulement le plafond au dessus de nous, avant qu'un nouveau soupir passe mes lèvres.

— Si tu savais à quel point j'ai envie d'aller à cette soirée... soufflé-je ironiquement.

— Oh t'en fais pas, je sais: autant que de te prendre un coin de table dans l'orteil. Moi c'est pareil. réplique t'elle en m'adressant un sourire compréhensif.

Je pouffe en entendant la réponse de mon amie, puis je viens loger ma tête contre son épaule en soupirant de désespoir. Cette soirée enfermé avec mon père s'annonce comme l'une des pires de ma vie. Après 2 ans sans le voir, je ne suis pas certain de parvenir à supporter son comportement ou ses remarques à mon égard. Si en plus on ajoute à ce la le fait que les parents de Lydia seront également présents, et qu'il faudra que je compose avec leurs propres remarques, autant dire qu'il va me falloir des trésors de patience pour survivre à la soirée.

— Courage sweetie, je serais là avec toi, et puis il y aura aussi ta mère, tu sais que tu peux compter sur nous. me souffle Lydia en appuyant sa joue contre mes cheveux.

Un sourire triste se dessine sur mon visage. Oui je peux compter sur la présence de ma mère et de ma meilleure amie pour m'apaiser, mais cela n'enlève rien au fait que je suis et serais toujours pies et poings liés face à mon père. Depuis que je suis revenu sous son aile, il a la main mise sur moi et ma vie...

Vous vous demandez probablement comment j'ai pu accepter aussi facilement de me plier à sa volonté après tout ce qu'il s'est passé entre nous il y a deux ans. Le lendemain de ma rupture avec Magnus, mon père m'a convoqué dans son bureau pour me féliciter d'avoir enfin rejoint le droit chemin. Puis il m'a accordé son pardon tout en me précisant que de mon côté je devrais être exemplaire si je ne voulais pas le voir s'en prendre à mes proches, ma mère et Izzy en tête de liste. En menaçant ainsi la vie des deux personnes les plus importantes de ma vie, il s'est assuré de ma loyauté envers lui, car je sais à quel point il a le bras long et qu'il n'hésiterait absolument pas à faire tuer sa propre fille ou sa femme pour me faire entrer dans le rang. Je crois que pour lui c'est une façon de me faire payer ma rébellion, et croyez moi ça fonctionne à merveille, voila deux ans que je vis dans la peur de faire un pas de travers et de mettre la vie des personnes que j'aime en danger.

Après quelques instants à seulement profiter du silence apaisant de notre appartement et du contact réconfortant de l'autre, Lydia part se préparer dans la salle de bain, tandis que je passe dans la chambre pour enfiler un costume conforme aux exigences vestimentaires de mon paternel pour ce genre de soirée. Alors que je m'apprête à nouer ma cravate, mon portable abandonné sur le lit sonne annonçant l'arrivée d'un nouveau message. Laissant pendre les pans de ma cravate autours de mon cou, je me saisis de mon téléphone pour y découvrir un message de mon meilleur ami:

Jace: Hey beau brun! On sort au Pandémonium ce soir avec Clary, Izzy et ses hommes, que dis tu de nous y rejoindre avec ta fiancée histoire qu'on s'amuse un peu avant de te faire passer la corde au cou? Considère ça comme une sorte d'enterrement de vie de garçon.

Je souris en secouant la tête j'ai pourtant bien prévenu Jace que je ne voulais pas d'un enterrement de vie de célibataire puisque même en étant marié à Lydia je ne me considérerai jamais en couple, et qu'en plus je doute que mon père me laisse vivre pareille soirée de débauche, mais cette tête de mule semble bien décidé à me sortir de ma vie monotone l'espace d'une soirée. J'avoue que retrouver mon meilleur ami, et ma soeur me ferait le plus grand bien, surtout après la soirée le futur repas de famille. C'est donc avec un large sourire que je lui réponds:

Alec: C'est tout à fait ce dont je vais avoir besoin pour oublier le repas de ce soir avec mes parents et ceux de Lydia. On viendra tout de suite après, ne vous mettez pas trop minable en nous attendant!

Jace: Je ne peux rien te promettre mon pote, mais je vais essayer de retenir les autres autant que je pourrais.

Alec: C'est ça ouais j'y crois! Jace c'est toi le pochtron de ce groupe!

Jace: Je vois pas du tout de quoi tu parles... Bon courage pour votre repas à toute!

Je repose mon téléphone sur le lit, l'esprit plus joyeux qu'il y a quelques minutes, puis je me tourne vers le miroir pour reprendre le nœud de ma cravate. Lydia sort de la salle de bain à cet instant et croise mon regard où brille encore ma joie. Elle me sourit en venant vers moi, me faisant signe de me tourner vers elle avant de s'atteler à nouer le tissus autours de mon cou.

— Qu'est ce qui te rend si joyeux tout à coup?

— Jace nous propose de le rejoindre au Pandémonium ce soir avec Clary, ma sœur et ses chéris.

— Oh super idée! C'est tout à fait ce dont on aura besoin après ce repas de l'enfer! s'exclame t'elle, ses yeux bleus pétillant soudainement de joie.

— C'est ce que je lui ai dis oui. D'ailleurs à ce propos on va finir par être en retard. dis-je en consultant l'heure sur ma montre.

— Dans ce cas allons-y, ne leurs donnons pas de raison de nous pourrir plus la vie.

Nous attrapons rapidement nos affaires dans l'entrée où nous enfilons nos chaussures avant de quitter l'appartement et de filer jusque dans l'Upper Est Side où vivent mes parents.

— Alors Alexander, parlez-moi un peu de vous, comment occupez-vous vos temps libres? Quelles sont vos activités? questionne le père de Lydia en se penchant vers moi alors que le dessert vient d'être servi.

Merveilleux! Cette soirée de torture ne pouvait pas mieux finir que par un interrogatoire en règle de mon futur beau-père au sujet de mes activités de loisirs. Tout le repas n'a été qu'un enchainement de flatteries mutuelles entre mon père et les parents de Lydia, puis tous les trois ont une nouvelle fois planifié une partie de notre avenir en décidant le lieu de notre lune de miel sans nous demander notre avis. Lydia, ma mère et moi sommes restés silencieux la plupart du temps, ne répondant que quand nous y étions obligés, ce qui nous convenait parfaitement puisqu'aucun de nous n'est réellement enchanté de cette soirée, de ce futur mariage ou encore de notre future vie de "couple". A plusieurs reprises mon regard a croisé celui de ma mère qui semblait désolée pour moi, mais comme toujours je l'ai préservée en lui adressant une sourire rassurant.

L'ensemble de cette soirée, et des paroles qui y ont été échangées, notamment celles de mon paternel ont mis ma patience et mon self contrôle à rude épreuve. Il a de nombreuses fois fallu que je pense à la sécurité de ma mère, ma soeur et les personnes que j'aime pour ne pas envoyer chier ce père qui semble si fier de m'exhiber comme un animal de concours face aux Branwell.

— Oh eh bien je pratique principalement le tir à l'arc en amateur, cela me détend. Je fais également un peu de sport et de musculation. réponds-je en levant les yeux vers mon interlocuteur, puis déviant le regard vers mon père, j'ajoute: J'ai même pratiqué la danse il y a quelques années, mais je me suis rapidement rendu compte que cette merveilleuse discipline n'était pas faite pour moi.

Suffisant pour révéler que son fils aime et a pratiqué cet art qu'il considère comme indigne des hommes, mais pas assez pour me mettre en péril face à lui. J'ai depuis quelques temps développé cette capacité à lancer quelques piques à mon père pour lui rappeler que si je lui obéis, c'est sous la contrainte, tout en espérant secrètement qu'un jour je serais en mesure de me libérer de son emprise sans craindre de représailles.

— La danse? C'est... Original... répond le père de Lydia avec une légère grimace.

Ouais, original comme ta façon de juger les gens sans les connaitre ou la manière dont tu as presque vendu ta fille en mariage afin de grappiller quelques miettes de la renommée de mon père, connard.

— Moi je trouve ça super que mon futur époux sache danser, ainsi notre ouverture de bal sera merveilleuse! lance ma fiancée en venant de blottir contre moi et déposant un baiser sur ma joue.

Ce faisant, je sens ses doigts glisser sur mes mains serrées en poing sous la table. Elle me force à ouvrir la main et noue ses doigts aux miens, m'apportant tout le soutient dont j'ai besoin face au dégoût que je lis dans le regard de nos pères.

— Mh tu as probablement raison ma chérie, au moins tu n'auras pas à te faire marcher sur les pieds pour ta première danse.

C'est ainsi que se finit ce repas de l'enfer, après avoir aidé ma mère à ranger et nettoyer pendant que mon père et les parents de Lydia se prélassent dans le salon parlant encore du mariage, ma fiancée et moi les saluons avant de nous éclipser. Nous empruntons un taxi pour nous conduire jusqu'à Brooklyn, et c'est aux alentours de 23h que nous entrons enfin dans le Pandémonium.

Nous ne tardons pas à retrouver mes amis qui m'avaient prévenu qu'ils avaient réservé un espace VIP. Isabelle est la première à nous apercevoir, elle se lève pour venir m'enlacer étroitement à m'en briser les os, comme seule elle sait le faire avant de me libérer pour faire une bise polie à Lydia. Raphaël et Simon nous saluent à leur tour, puis à peine ai-je serré la main de ce dernier qu'il se fait brusquement bousculer sur le côté. Une tête blonde apparaît à sa place et se jette dans mes bras, me serrant de toutes ces forces.

— Hey doucement Jace tu vas me casser en deux si tu continues, déjà qu'Izzy a bien failli me fêler une côte. ris-je en refermant néanmoins mes bras autours de mon meilleur ami.

Ma soeur me tire la langue en se rasseyant tandis que je glousse légèrement devant sa réaction enfantine.

— M'en fous! T'avais qu'à pas partir aussi longtemps sans qu'on se voit! bougonne Jace dans mon cou sans me relâcher.

— Enfin tu sais bien qu'on a fait des skype presque tous les jours c'est quand même pas comme si on ne s'était pas vu du tout! le réprimandé-je gentiment.

— Mais c'est pas comme de t'avoir en vrai idiot. Me refais plus jamais ça, tu m'as trop manqué. marmonne t'il en me relâchant pour plonger son regard vairon dans le mien.

— Tu m'as manqué aussi mon pote. Promis je pars plus, ou alors je t'embarque dans ma valise avec moi! gloussé-je, entraînant le reste du groupe dans mon sillage.

Je salue enfin Clary qui a patiemment attendu derrière son compagnon, puis je présente Lydia avant de nous installer sur les grandes banquettes pour discuter et rattraper le temps perdu.

Après plusieurs tournées d'alcools divers, Isabelle se lève d'un bond pour proposer à tout le monde d'aller danser. Je tente de refuser, ce lieu me rappelant encore trop Magnus et les danses que nous y avons partagé par le passé, mais c'est sans compter sur la détermination de ma soeur qui me tire violemment par le bras pour me mettre sur mes pieds avant de me trainer sur la piste de danse. Le reste de nos amis nous suivent et je suis bientôt contraint de suivre le mouvement et d'esquisser quelques pas. Après une ou deux minutes d'hésitation, je me laisse finalement libre cours à ma passion, et je commence à me déhancher en suivant le rythme de la musique. Jace et Izzy se joignent rapidement à moi et nous nous amusons comme si nous étions subitement revenus à nos années lycée, chantant les paroles des chansons à tue tête, échafaudant des chorégraphies grotesques et riant comme des gosses.

Un rythme plus langoureux se fait entendre après un long moment de musiques très rythmées. Jace et Izzy ne tardent pas à retrouver leurs compagnons pour échanger des danses plus sensuelles que je regarde de coin de l'oeil avant de sentir une main se glisser sur mon épaule. Je me retourne sur Lydia qui m'offre un sourire avant de m'ouvrir les bras en haussant les épaules. Je lui souris à mon tour, puis la saisissant par les hanches, je la rapproche de moi, la guidant sur des pas mesurés et pleins de langueur. Elle vient appuyer son visage dans mon cou et se laisse emporter par la danse que je lui propose.

Depuis que j'ai quitté Magnus, je n'ai jamais cessé de danser. C'est la seule chose que je ne suis pas parvenu à laisser derrière moi en quittant New York. Après mon retour à Harvard, j'ai dans un premier temps dansé seulement en soirée lors des divers évènements étudiants du campus, puis après m'être lié d'amitié avec Lydia, et lui avoir partagé ma passion pour la danse, elle m'a parlé d'un studio de danse à deux pas de l'université qui propose des locations de salles de danse. C'est ainsi que j'ai pu réellement donner libre cours à mon besoin dévorant d'exprimer mes sentiments à travers la danse. Dans un premier temps j'y suis allé seul, j'avais besoin d'évacuer la rage et la tristesse omniprésente dans mon coeur. Puis quelques mois plus tard, j'ai fini par accepter que mon amie m'accompagne après de nombreuses suppliques de sa part. Depuis, elle est la seule que j'autorise à me regarder danser. Elle me conseille du mieux qu'elle peut, elle m'aide à m'améliorer et ces nombreuses heures de danse avec Lydia à mes côtés ont finalement pansé quelques peu mon coeur meurtri par la trahison de Magnus.

Je sais que je ne pourrais jamais me remettre complètent de cette rupture, et qu'entretenir ma passion pour la danse n'est au fond qu'un moyen de lui garder une place dans mon coeur, mais que voulez-vous? J'aime Magnus du plus profond de mon âme, alors je ne veux pas oublier ces instants exceptionnels que j'ai passé au creux de ses bras, même s'il ma brisé le coeur par la suite, car ces moments d'amour ont été les plus beaux de ma triste vie.

Après plusieurs longues minutes à danser dans les bras de Lydia, le rythme de la musique accélère à nouveau, et la foule de danseur se met bientôt à se trémousser autours de nous. Je relâche ma meilleure amie, et cette dernière me fait signe qu'elle retourne s'installer dans notre espace privé après avoir embrassé ma joue. Je lui réponds par hochement de tête, mais ne la suis pas. La musique qui passe dans la boite couplé à mes souvenirs des instants passé dans ce lieu me donnent envie de rêver un peu et de me laisser aller.

Je me mets en mouvement, suivant le rythme de la musique tout en laissant peu à peu ma mémoire me donner des flashs des moments passés ici avec Magnus. Notre rencontre alors que je le dévorais du regard pendant qu'il dansait, nos sorties avec notre groupe d'amis, cette fameuse soirée où nous avons dansé l'un contre l'autre jusqu'à être enfermés dans notre bulle, nous obligeant à rentrer en urgence chez lui, cette soirée où nous avons partagé notre première relation sexuelle... Puis il y a eu cette soirée après notre retour des Hamptons où Camille à débarqué de nulle part, tel un oiseau de bien mauvaise augure. Quand j'y repense, à ce moment là, je n'aurais jamais cru possible que Magnus me trahisse en couchant avec Camille et ce sous mon nez. Je croyais qu'ayant lui même été trompé de la sorte, il ne serait jamais assez cruel pour infliger pareille humiliation à son tour. Il faut croire que je me suis trompé...

Alors que je me perds dans mes pensées teintées d'amertume, un frisson parcoure mon échine, comme une sorte de mauvais pressentiment, comme le poids d'un regard reposant sur ma nuque. Relevant les yeux, je scanne la foule autours de moi, me demandant ce qui a pu me donner cette impression d'être observé. Je ne remarque rien d'inhabituel durant quelques instants, puis mon regard est soudainement comme aimanté, et mes yeux s'accrochent violemment à une paire de prunelles ambrées qui me dévisagent depuis le bar. Mon coeur se serre brutalement dans ma poitrine, et ma respiration se coupe momentanément tandis que je reconnais le propriétaire de ces yeux que j'ai si souvent admiré dans le passé. Magnus...

*****

Coucou tout le monde!
Voici le chapitre 36 dans lequel il n'y a pas énormément d'action... J'espère néanmoins qu'il vous a plu.
Vous l'aurez compris le prochain chapitre on aura le PDV de Magnus et la suite des retrouvailles.
Passez une bonne semaine et à lundi prochain 😘

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