- Alors grande sœur, on ne vient pas accueillir son petit frère comme il se doit?

Je n'arrive toujours pas à bouger. Le plus vieux de mes petits frères, Alexander, se tenait devant moi. Il n'a pas changé d'un poil, mais je n'en suis pas vraiment surprise. Il est un peu lèche-cul sur les bords et maniéré. Je sais aussi qu'il n'est pas aussi pacifiste qu'il le dit.

- Tu as perdu ta langue? Oh! Mais qui vois-je?

Son regard se transpose sur le garçon que j'héberge. Non, non, non, non. Je me mets à paniquer intérieurement.

- Un invité... qui êtes-vous?, susurre-t-il à son encontre.

Il s'approche de lui et je bondis instinctivement devant Louis. Je recule afin de le protéger. Mon cœur bat à tout rompre. S'il fallait qu'il lui fasse du mal, je ne me le pardonnerai jamais. Il ne mérite pas ça. Même Cerbère s'est mis devant nous et s'est mis à grogner. D'ailleurs, il était où lui depuis tout ce temps? Je secoue la tête pour chasser cette interrogation et tout en gardant mon frère à l'œil, je dis à mon nouvel ami :

- Louis, baisse les yeux et file dans ta chambre immédiatement et n'en ressors pas tant que je ne te l'ai pas demandé. MAINTENANT.

Il baisse la tête et obéit en s'en allant précipitamment, Cerbère sur les talons. Je continue toujours de barrer le chemin à Alexander. Je lui avais parlé un peu plus durement que je ne l'aurais voulu, mais je ne voulais absolument pas qu'il lui arrive quelque chose. Mon frère est capable de soumettre quelqu'un qu'en le regardant les yeux. Et je n'ai pas envie de voir Louis faire des bêtises contre son gré.

- Lucifer, pourquoi tu ne partages pas ton nouveau jouet humain?, me demande-t-il que je laisse aller Louis. Je t'ai connu beaucoup plus généreuse que ça.

J'ai envie de lui hurler que ce n'était pas mon nouveau jouet. Mais je n'ai pas envie d'embarquer dans son petit jeu. Avant, je m'y serais abaissée mais plus maintenant. J'ai quelqu'un à protéger. Il ne s'agit plus que de moi.

Il est vrai que par le passé, j'avais agi d'une certaine façon et ça lui plaisait. Quand j'étais au Paradis, Alexander et moi étions soudés. Nous faisions les 666 coups ensemble, à l'insu de notre père bien entendu. Et puis quand j'ai été chassée, il n'a pas non plus plaidé en ma faveur. Il a même fait en sorte que je sois expulsée le plus tôt possible. Il convoitait depuis toujours ma place auprès de Dieu. C'est ce qu'on appelle un hypocrite.

- C'est Lucy, vociféré-je entre mes dents. Et tout le monde change.

Il me toise du regard en laissant apparaître un petit sourire ironique. Alexander était plus grand que moi. Il tenait ses cheveux roux de Dieu et ses yeux bleus d'ailleurs.

- Ton nom est Lucifer. Soit donc un peu reconnaissante de tes origines.

Il enlève son manteau et le tire sur le comptoir. Il se met à faire le tour du rez-de-chaussée, comme s'il en était le nouveau propriétaire. Je le suis sur les talons et souhaite qu'il ne veuille pas aller chercher Louis.

Il s'assoit sur le divan et me fixe du regard. Son pouvoir n'avait jamais agi sur moi auparavant, mais je commençais à me sentir molle, comme s'il arrivait à me contrôler. J'ai détourné le regard et j'ai fait les cent pas devant lui. J'ai toujours pu résister à cette soumission, pourquoi maintenant je n'arrive plus à soutenir son regard?

- Lucifer, tu as l'air préoccupée.

- Que fais-tu ici Alexander?, le coupé-je. Je n'avais pas envie d'avoir cette discussion avec lui. Pourquoi débarques-tu sans prévenir?

- Pour préserver la surprise ma très chère sœur, tu n'es pas contente de me voir?

Je sens son regard brulant sur moi. Je ne dois pas le regarder. Qui sait ce qu'il pourrait m'obliger à faire si je suis sous son emprise? Je pourrais peut-être faire du mal à Louis sans le vouloir. Non, je ne pouvais pas laisser ça arriver.

- Et si tu me disais la véritable raison au lieu de tourner autour du pot.

Il ricane et étend ses bras sur le dossier du divan tout en croisant les jambes. Il se sentait déjà chez lui. Il se racle la gorge.

- Tu sais les anges parlent en haut. Il y a une rumeur qui court que Lucifer abriterait un humain encore vivant chez elle et qu'elle serait en train de perdre ses pouvoirs. Alors tu me connais, je leur ai dit que c'était des bêtises. Et que pour les rassurer, j'irais constater par moi-même.

Il marque une pause et je retiens mon souffle. Comment ça avait bien pu se savoir jusqu'en haut? Qui avait parlé?

- Cela dit, je n'avais jamais vu d'humain vivant en vrai, reprit-il. Il a l'air fascinant. Et ses yeux...

- Si tu avais voulu voir des êtres humains en vrai, t'avais qu'à prendre la place de Jésus. Il m'exaspère.

- Non moi être accroché à une croix par des clous... ce n'est pas mon fort. Tu sais qu'il a toujours été masochiste.

Il n'a pas tort. Notre frère Michael lui avait prédit ce qui allait lui arriver parmi les humains et il a voulu y aller quand même. Fait qui nous a tous étonnés, il avait très hâte de vivre cette expérience. Personnellement, je pense que c'était seulement pour faire bonne impression sur notre père et qu'un jour, il accède à sa place. Tout le monde se doutait bien que c'était perdu d'avance. Comme on le pensait, Dieu n'a même pas levé le petit doigt pour aller le chercher. Je reporte mon attention sur mon frère.

- Ton humain, il est là pour une expérience? C'est ton homme de ménage?

Dois-je lui avouer que je ne sais pas de quelle façon il est arrivé ici? Qu'on ne sait pas comment le faire repartir? Il peut peut-être m'aider. Non. Le mieux c'est que je dise le moins de chose possible sur Louis, pour ne pas lui attirer d'ennui et surtout pour sa protection. Pense vite Lucy.

- Une expérience oui c'est ça. Tu sais qu'ici il arrive des gens qui viennent en consultation, de temps à autres. Ils prennent le temps de réfléchir et repartent.

- Et ils habitent ici?, demande-t-il suspicieux.

- Ça arrive, j'essaie de ... changer ma façon de faire, dis-je hésitante.

Mentir n'a jamais été mon fort, mais il a l'air de me croire. Je déteste le mensonge, j'ai toujours l'impression que mon corps me trahit. Mais je ressens une force à l'intérieur de moi qui me fait me sentir plus confiante. Je lève à peine les yeux que je vois Louis en haut des escaliers. Il m'observe, il est là. Curieusement,

- Et pour tes pouvoirs? Tu sais Lucifer que tu ne peux pas régner sur les Enfers avec des pouvoirs qui font défaut, me rappelle-t-il.

- Tu n'as même pas à t'inquiéter pour ça, essayé-je de le rassurer. Je me porte très bien. Il n'y a aucun problème.

- Si tu as des problèmes, consulte tes légendes.

Mes légendes et puis quoi encore. Quand je me suis faite expulsée, Dieu avait tenu à m'offrir un livre contenant des légendes de toute sorte et m'avait dit de les lire avant de me coucher. Qu'un archange qui connaissait ses légendes, était un archange puissant, supérieur. J'ai tiré le bouquin dans ma bibliothèque et il prend la poussière depuis des siècles et des siècles. Amen, ricane ma conscience. Ta gueule.

J'ai levé les yeux au plafond en lui répétant que tout allait bien et que je n'avais pas besoin de consulter quoi que ce soit. Il ricane. Je ne sais plus s'il me croit ou non.

Il se lève donc avec une grâce qui lui était propre et se dirige vers la porte. Je suis soulagée qu'il parte. Je ne me serais pas imaginée supporter sa présence plus longtemps. Avant qu'il ne sorte, il me dit :

- Si tu as envie de partager l'humain, afin de jouer un peu, tu sais comment me joindre, grande soeur.

Il éclate d'un rire qui me fait froid dans le dos, puis il part en claquant la lourde porte. J'attends qu'il se soit suffisamment éloigné et je me mets à hurler de rage. Toute sorte d'émotions contradictoires se bousculent en moi.

Qui m'avait trahi et était aller raconter n'importe quoi au Paradis? Comment pouvait-on être au courant que mes pouvoirs faisaient défaut? Je devais trouver qui et je me tourne lentement vers Louis. Tout cela est à cause de lui, j'en suis sure. Il n'y a que depuis qu'il est là que tout va mal. Je m'approche de lui avec la haine dans le corps. Mon sang bouillonne. J'aurais dû m'en débarrasser dès le départ. Le faire cuire, le découper et le donner à manger aux géants.

- Louis!, hurlé-je. Où te cache-tu?

Je monte les escaliers. Je l'entends se réfugier dans sa chambre. Il a peur, comme c'est délicieux. Je monte les marches une à une en me frottant les mains. J'ai soif de sang, j'ai soif de tortures. Il ne sera pas bien résistant mais je vais faire avec. On ne me trahit pas deux fois. Ça lui servira de leçon.

J'ouvre la porte de sa chambre avec fracas. Il est assis par terre de l'autre côté de son lit avec Cerbère dans les bras. Il est effrayé. Ça se voit dans ses yeux, qu'est-ce que j'aime ces moments-là.

Je m'approche de lui et avant qu'il ait pu dire quoi que se soit, je mets mes doigts autour de la gorge et le soulève pour qu'il soit à la hauteur de mes yeux. Il est léger comme une plume.

- C'est toi qui m'as trahi. Je te faisais confiance!, sifflé-je. C'est Dieu qui t'envoie c'est ça? Tu es son espion?

Il secoue la tête, trop terrorisé pour répondre. Je sers mes doigts autour de son cou, je vais l'étouffer. Cela va être une belle mort, je vais voir la vie s'échapper tranquillement par ses yeux.

Au fur et à mesure que je serrais, il s'est mis à suffoquer et je sentis à mon tour quelque chose autour de mon cou. Comme si quelqu'un essayait de m'étrangler à mon tour. Puis, le vide se fait tout autour de moi et je perds conscience avant de toucher le sol.

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Voilà un autre chapitre ! Avril est un magnifique mois propice à l'inspiration, 3 chapitres en très peu de temps, vous êtes gâtés! J'espère que vous aimez toujours! 😘

Qu'en avez-vous pensé?

À bientôt! ❤

Dédé 🎀