19. Journal Intime
"Un livre est un hopital pour l'esprit"
~Mardi~
À mon réveil, par ailleurs bien trop tôt à mon goût, la première chose que je vis fut le livre qu'Evelyn m'avait donné hier. À moindre d'être aveugle, difficile de le manquer puisqu'il était posé sur la table de chevet juste à côté de mon lit.
Je n'y avais pas touché depuis hier. Pourquoi? C'était un peu ridicule de ma part, mais j'avais légèrement peur de ce que je retrouverais dedans. Imaginez qu'elle y avait mis une bombe.
Tiens, certaines réponses sont dedans.
Des fois, mieux valait ne pas trop en savoir. Peut-être que le livre recelait de secrets trop énormes pour que je puisse les garder pour moi. Bon, respire, expire. Ce n'était pas non plus une espionne, dû moins, pas à ma connaissance, alors il ne risquait pas d'y avoir des secrets d'états à l'intérieur. Un peu d'optimisme.
Peut-être que les réponses étaient plutôt des sortes d'indices qui m'aideraient à en savoir plus sur elle? Mais on se connaissait qu'à peine, alors quel intérêt? La seule manière de le découvrir était d'examiner le livre.
Commençons par la couverture. Pas besoin d'un doctorat pour vous dire qu'il s'agissait d'un roman de Stephen King, auteur dont le nom au moins devrait vous dire quelque chose. Mais pas n'importe quel roman oh que non, c'était le troisième et dernier tome de la trilogie Mr.Mercedes, et figurer vous que celui que je lisais dans le bus lors de mon premier jour de stage était le deuxième tome. Coïncidence? J'avais comme qui dirait des doutes.
Logiquement, Evelyn était belle et bien la fille blonde que j'avais vu dans le bus le premier jour et qui avait lu par dessus mon épaule jusqu'à ce que je m'énerve. Sûrement que me voyant lire le deuxième, elle avait pensé à m'offrir le troisième quand nous avions commencé à plus nous connaître. Maintenant, il ne restait plus qu'à comprendre pourquoi elle était tantôt rousse, tantôt blonde. Un autre endroit où ça se compliquait, c'était au niveau des dates. Le tome trois, End Of Watch, ne sortait qu'en Juin. Nous étions en Mars. Vous commencez à comprendre pourquoi j'étais aussi perplexe? Elle m'avait fait cadeau d'un livre qui, officiellement du moins, n'était pas encore publié. Comment? D'où l'avait-elle eu?
Tiens, certaines réponses sont dedans.
En soupirant, je fis ce que je répugnais absolument, je me levai hors de mon lit. Laissez moi vous dire que mon pauvre dos en souffrit grandement, comme si j'avais passé ma vie couchée et avais perdu l'habitude de me lever. Mais bon, il n'y avait pas milles manières d'élucider ces mystères. Le livre était là, semblait me regarder, me narguer même, comme voulant me dire qu'il en savait plus que moi. Et il en savait effectivement plus que moi.
Ni une ni deux, je m'emparai du livre et l'ouvris - tenez vous bien- à la première page. Je sais, je sais, vous ne l'aviez pas vu venir. J'aime faire ressentir des émotions fortes.
Jusqu'à maintenant, c'était un livre tout ce qu'il y avait de plus normal, une page avec la maison d'édition et tout le reste, mais à la deuxième figurait une note, un post-it rose fushia plus précisément, et dessus était écrit un message allant comme suit:
Lis deux paragraphes par semaine sans faute. Pas plus, pas moins. Ne triche pas. Un chapitre lundi, un autre vendredi. Deux par semaines. Je te fais confiance.
Peut-être aurais-je dû être effrayé et appeler la police, mais bizarrement, j'étais surtout intrigué. Ne le lire que lundi... Nous étions mardi, mais puisqu'elle me l'avait donné hier, et que j'avais volontairement refusé de l'ouvrir, j'imaginais que je pouvais briser la règle pour cette fois-ci et lire un mardi.
Je lis le chapitre assez rapidement et encore une fois, Stephen King ne m'avait pas déçu.
...
J'ai rencontré un garçon, était-il écrit directement dans le livre à la fin du chapitre, dans le bus. Maman et papa devaient m'amener à l'hôpital, mais ils ne pouvaient pas venir et moi non plus, je ne pouvais briser la promesse que j'ai faite à Daisy. J'irai, à pied s'il le faut, même si je risque de le regretter plus tard. Bref, le garçon. Il lisait le deuxième tome de la série Mr.Mercedes, l'avait presque fini. Ça m'a donné une idée. Je viens de commencer ce livre, le dernier de la série, et à chaque paragraphe, je vais écrire quelque chose. Comme un journal intime. Je m'arrangerai pour que, d'une manière ou d'une autre, il finisse par recevoir le livre quand je l'aurai fini. J'espère que je le regretterai pas. Pourquoi lui? Parce qu'il s'occupe de ma soeur. Je l'ai vu. Il était dans la salle, mais je ne suis pas rentrée, je ne voulais pas déranger, pas comme je l'ai dérangé dans le bus. Je ne voulais pas mal faire, mais ça l'a énervé alors je suis allée m'assoir devant. Et on est descendu au même arrêt, mais il a couru, et je ne pouvais pas suivre son rythme. Voilà, c'est tout pour aujourd'hui. J'espère qu'il va lire jusqu'au bout, jusqu'à la fin, jusqu'à la dernière page...
Comme en transe, j'étais plongé dans ma lecture, perdant ainsi la notion du temps. Le texte était presque plus intéressant que le chapitre en lui même. Je ne comprenais pas tout, mais j'étais sûr que tout se mettrait en place au fur et à mesure que je lirais. Elle y écrivait comme dans un journal intime, sans se relire puisqu'il restait certaines fautes, et j'avais l'impression de jeter un coup d'œil dans ses pensées.
Sans y penser, je commençais à tourner la page pour lire la suivante, mais...
Non, il fallait attendre vendredi. C'était si facile de briser ma promesse, elle ne le saurait pas, mais je ne pouvais faire ça, combien même je l'eusse voulu. Elle me faisait confiance et je ne pouvais pas me résoudre à perdre cette confiance. En soupirant, je reposai le livre sur ma table sans chercher à comprendre pourquoi elle avait décidé de faire tout ça. Mieux valait suivre le cours de la rivière et arriver calmement à destination que d'essayer de se sauver et finir noyé.
Un peu confus, ne sachant même pas quelle heure il était, je m'assis sur mon lit en baillant, encore fatigué. Quelle plaie que de se réveiller fatigué!
Driiing!!
Mon téléphone. Le temps que je le trouve, la personne avait raccroché. Tant pis, si c'était importait, elle rappellerait.
Driiiing!!
Désormais à portée de main, je saisis mon cellulaire et vis sur l'afficheur que c'était Jessica qui tentait de me joindre. Apparement, c'était la septième fois qu'elle essayait...
— Hey, Jess, ça...
— BORDEL Mathias, ça fait des heures que je t'appelle!!! Hurla-t-elle à l'autre bout du combiné.
Toujours d'aussi bonne humeur. Sous le choc, j'éloignais le téléphone de mon oreille en grimaçant. RIP tympans.
— Je... Je lisais. Qu'est-ce qu'il y a?
— Il faut qu'on se voie, genre, tout de suite à l'instant maintenant à la seconde même où je te parle.
Je souris et elle me dit de la rejoindre au café-déjeuner pas très loin de chez moi.
— Mais je... Ronchonnais-je.
— Hey, pas de mais, c'est une urgence, grouille-toi je suis déjà là. T'as intérêt à être là dans dix minutes top chrono si tu tiens à la vie.
— Je...
Je voulus riposter mais elle avait déjà raccroché au nez. Su-per, j'avais tellement envie de sortir en ce beau matin de congé où mon lit était particulièrement confortable. Quand j'arrivais dans le café, Jess était déjà assise sur une table. Elle n'avait encore rien commandé, ne m'avait pas vu non plus,
— Hey, je suis là, Jess!
— Onze minutes très exactement.
— Tu me laisses au moins manger avant de me tuer?
— Bah oui, je suis pas si méchante que ça voyons, répondit-elle offusqué avant de rire.
Je commandai des croissants croquants et dorés à souhait bourrés de crème à la vanille et un jus d'orange, et Jess prit des minis crêpes fraises-chocolat recouvert de crème fraîche, comme toujours.
Comment manger santé avec Jess et Matt.
— Mais qu'est-ce que...!!
— Alors en fait, commença-t-elle en prenant une bouchée d'un de mes croissants qu'elle avait emprunté directement dans mon assiette sans intention de le rendre.
Elle cherchait la guerre? Elle l'aurait! Je pris moi aussi une de ses crêpes et elle me frappa la main. Par réflexe, je la laissai tomber sur son assiette.
— Mais aiie!
— Hey, si t'en voulais, t'avais juste à en commander.
Pendant un moment, je crus qu'elle était sérieuse, puis elle prit nos deux assiettes et les plaça en plein milieu de la table pour qu'on puisse tous deux se servir.
— Un problème de réglé, dit-elle en m'adressant un sourire légèrement moqueur.
— Alors, c'est quoi l'urgence qui a fait que j'ai dû quitter mon lit, ma maison, ma vie?
Elle s'esclaffa avant de prendre une bouchée d'un autre croissant.
Elle faisait exprès de mâcher len-te-ment pour me tenir en haleine. J'aurai eu le temps de faire le tour de monde deux fois avant qu'elle finisse sa bouchée. Enfin, elle finit sa bouchée.
— Les papiers du divorce sont signés et...
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