11. Croquis
Une femme jalouse fait des biens meilleures recherches qu'un enquêteur de police
~ Vendredi ~
Dans mon cahier de notes, j'avais gribouillé comme à mon habitude, mais cette fois-ci, mes dessins n'avaient pas seulement l'air d'avoir été faits par un enfant en maternelle. Cette fois-ci, mes esquisses avaient une forme définie, une forme féminine. J'y avais même mis de la couleur tant le cours d'histoire était passionnant. Et sans Steph ni Gwen pour y mettre son grain de sel, l'atmosphère était assez morose. Mon dessin presque fini, je le signais en me disant que je devrais peut-être l'envoyer au musée du Louvres. Ce serait dommage de cacher mon talent au reste du monde. J'étais si concentré dans ma pièce artistique que je ne remarquai pas Steph qui observait par-dessus mon épaule ce que je dessinais, pas plus que je n'avais remarqué que le cours était fini depuis belle lurette.
— C'est qui cette fille? Je crois pas que Jess va apprécier tes nouveaux fantasmes, mon vieux.
— Je ne vais pas apprécier quoi? S'enquit Jess en entrant dans la pièce.
L'art d'arriver au bon moment au bon endroit.
— Oh, rien de très grave, on dirait juste que ton cher petit copain t'as trouvé une rivale, expliqua Steph comme un animateur météo qui annonçait un tsunami sans aucune émotion.
Le visage de Jess vira légèrement au rouge, plus sur le coup de la surprise que de la colère.
— De quoi il parle?
— Rien rien, m'empressais-je de répondre en refermant furtivement mes cahiers.
Elle fronça les sourcils, mais avant qu'elle ne puisse me poser plus de questions, Gwen entra dans la classe en faisant plus de bruits qu'un camion constructeur. Elle saluait tout le monde, absolument tout le monde, même les gens qu'elle ne connaissait pas.
— Hey toi, monsieur pantalon rouge, j'adore ton style! Audrey!! Ça marche encore pour demain? Parfait! Au fait, Louis, je t'ai envoyé le projet de géo, tu me diras si c'est bon. Salut vous trois, j'ai raté quelque chose? Demanda-t-elle en examinant nos visages tour à tour.
—Nah, rien à part que Matt...
— Mathias rien du tout! coupais-je Steph qui se faisait un malin plaisir de me mettre dans l'embarras. On ferait mieux de se dépêcher, sinon le directeur ne sera pas content.
Jessica me lança un regard inquisiteur, regard auquel je répondis par un sourire angélique qu'elle sembla trouver suspect, car elle fronça encore plus les sourcils. Super, Steph avait semé le doute dans son esprit on dirait. Rien de mieux qu'un peu de jalousie pour pimenter une relation. Mais bon, je la connaissais. Dès que je lui aurai expliquer ce qu'il se passait, tout se remettra en place . Enfin, espérons.
— Comme vous le savez, chers élèves, cette année encore a lieu la campagne de financement de...
J'arrêtais d'écouter le discours du directeur qui semblait s'éterniser années après années, comme si les ronflements perceptibles un peu partout dans la salle ne lui avaient rien appris.
— ... votre générosité à tous pour faire de cette événement un moment inoubliable.
Tout le monde, enfin, ceux qui ne dormaient plus ou venaient de se faire réveiller par leurs amis, se levèrent et applaudirent, non pas pour le discours assommant du principal, mais plutôt pour soit se féliciter de l'avoir écouté jusqu'à la fin, soit pour le remercier de cette période de sommeil bien mérité.
— Mon dieu qu'il est ennuyant! C'était à n'en plus finir, s'exclama Gwen avec l'exagération qu'on lui connaissait.
— Comme ça au moins, ai lieu d'avoir anglais, j'ai eu une session dodo, lança Steph à la rigolade.
— Vous exagérez, c'était supportable, rigola Jess.
— Dit celle qui a passé tout le discours à dormir dans les bras de son Mathias chéri, renchérit Gwen en riant.
— Au fait, est-ce que quelqu'un a pris des notes dans son cours d'histoire? Parce que j'ai raté un cours et personne dans ma classe n'en a pris des compréhensibles, s'exclama Jess pour changer le sujet, sachant que Gwen venait de marquer un point.
— Moi j'en ai prise! M'écriais-je avant de le regretter aussitôt.
— Vraiment? Merci, je te les redonne demain matin, promis, dit Jessica. En plus les tiennes sont toujours super bien organisées.
Heureusement pour elle, parce que élève modèle n'était pas qui voulait.
— En fait, je ne peux pas te les donner, repris-je lentement en pensant à l'excuse que je donnerai.
— Mais tu viens de dire que...
— Maintenant, rajoutais-je précipitamment. Je ne peux pas te les donner maintenant parce que...
Je cherchai une raison et il faut préciser que le sourire amusé de Steph n'aidait pas beaucoup. Il me regardait l'air de dire "débrouille toi et laisse moi profiter du spectacle". Il ne restait plus qu'à espérer que mon avocate de mère m'avait transmis un peu de ses talents de persuasion.
— Je l'ai déposé dans mon casier.
— D'accord... Alors on peut aller le chercher non?
— Non!! M'écriais-je si vivement que je sentis dans le regard de Jess qu'elle commençait à se douter de quelque chose. Je veux dire... Il faut que j'aille voir monsieur... Verlin, pour qu'il m'explique une partie de la nouvelle matière que je n'ai pas trop comprise.
— D'accord... Alors je t'attend à la biblio et tu viens me voir quand tu as fini?
— Exactement, m'exclamais- je avec empressement, trop en tout cas pour que Jess se départisse de son regard suspicieux.
— Parfait, alors à tantot.
Elle s'en alla avec Gwen vers la bibliothèque pour attendre que je finisse de parler avec Mr.Verlin.
— Il faut que tu me racontes tout après, chuchota Gwen en se retournant, un sourire aux lèvres.
Impossible de la bluffer celle-là. En même temps, quand on mentais aussi bien qu'on respirait, pas difficile de dépister les mensonges des autres.
— Et c'est pas la seule à qui tu dois tout raconter.
— Steph, j'étais au courant, merci. Et puis c'est un peu de ta faute! Qu'est-ce qui t'as pris de dire à Jess que j'avais des fantasmes sur une fille?!
— Oh, parce que c'est faux? Tu suis une inconnue dans le bus, puis tu dessines une fille dans ton cahier et tu as toujours l'air quelque part d'autre. Donne moi une raison de me faire changer d'idée.
C'était son côté emphatique qui prenait le dessus. Il ne voulait pas que je blesse Jess.
— Et si je te disais que ça a rapport avec Daisy?
Il leva un sourcil et je sus que j'avais capté son attention, alors avant de la perdre, j'entrepris de lui raconter toute l'histoire.
— Donc, Daisy a une soeur, et tu as vu une fille dans le bureau de ton patron. Cette fille avait les mêmes yeux que Daisy, mais ne lui ressemblait. Dans le bus, tu as entendu une fille qui avait la même voix que la fille de l'hôpital, mais pas les mêmes cheveux. Tu es sûre que ce n'est pas à cause de l'éclairage que tu as eu l'impression que ses cheveux étaient roux?
— Peut-être, je ne sais pas, dis-je en haussant des épaules.
—Je sais ce qu'on va faire. Je vais m'inscrire comme stagiaire à ton hôpital, mais moi ce sera les dimanches, comme ça j'enquête en secret, et je n'ai plus besoin de trouver un endroit où faire mon stage en milieu de travail.
— En plus, tu veux devenir cardiologue plus tard, c'est un plan parfait!
On se fit un high five et on se dirigea vers la bibliothèque pour aller chercher les filles.
— Hé bah, il en avait des choses à te dire, Mr.Verlin.
Monsieur Verlin?
— Monsieur... Oh oui, oui, beaucoup! Dis-je en me rappelant de justesse mon mensonge, sous le regard espiègle de Steph.
Je voyais bien que Gwen et Jess avaient eu le temps de discuter en notre absence et qu'elles semblaient s'être entendues pour dire que quelque chose clochait et que je leur devais des explications.
— Tu as le cahier d'histoire?
Il n'avait jamais été dans mon casier, donc je l'avais en ma possession, mais j'avais oublié de déchirer les feuilles avec mes dessins.
— Bonne chance pour comprendre ses notes avec tous les dessins qu'il y a dedans! Je veux dire, faut quand même s'ennuyer pour dessiner une actrice dans ses notes, lança Steph l'air de rien.
— Il a pas tort. Tu me diras ce que tu penses de mes esquisses. J'ai essayé de l'imaginer avec des cheveux roux, blonds et noirs pour voir lesquels iraient mieux avec ses yeux gris.
— D'accord...
Jess nous regardait bizarrement, trouvant notre comportement bizarre, mais son regard suspicieux commençait à s'effacer.
— Ton stage est à quelle heure demain?
— La même que d'habitude.
— Je vais passer chez toi avant, ça te dérange pas?
Je lui répondis que non en souriant, et tandis qu'elle discutait avec Gwen, je remerciai Steph de m'avoir sauvé la mise avec l'idée de l'actrice.
— Du chocolat aux noisettes et nous sommes quittes, me répondit-il avec un clin d'œil.
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