REDNESS & JEALOUSY

JESSE - Je garde Cerbère en laisse

Rouge. C'est la couleur qui m'apparaît, alors que la lumière se fait soudain. J'ouvre difficilement les yeux, ébloui par le rayon de soleil qui est venu se déposer sur ceux-ci.

Une senteur de cigarette flotte, émanant de mes draps froissés et se mêlant aux relents de sueur restés de la nuit dernière.

Je dissimule le rayon de lumière matinale à mes yeux de mes doigts, alors que ma main tâtonne le matelas, à ma gauche. Enfin, je touche une chair douce et endormie, et souris, alors que mon contact la fait grogner. 

Me redressant, j'embrasse son épaule, et laisse mes doigts glisser le long de ses courbes comme sur autant de dunes. 

- Il est quel heure... ? Finit-elle par demander, se tournant vers moi.

Elle a les yeux ensuqués, l'air peu reposé, et de légères cernes creusant ses joues pouponnes. 

- Aucune idée.

Vanessa pousse un long soupir, et cache son visage dans ses mains, avant de le frotter pour se réveiller, et de secouer la tête. 

- J'ai du boulot, ce matin. Je t'appelle.

Elle s'apprête à se lever, mais j'attrape son bras, et l'attire à moi, pour l'embrasser. Ses baisers n'ont rien à voir avec ceux de Clark... Ils sont francs, manquent de douceurs : elle va droit au but, ne joue pas la difficile à embrasser. 

Le sexe aussi, était différent avec elle. Plus simple, sans rapport de force, sans mots. Et elle savait crier, Ô dieu, elle savait crier, oui. Clark ne crie pas.

- J'ai passé une super nuit, finit-elle par murmurer, en rompant le baiser.

Ma main caresse sa joue, et je hoche la tête. Hier soir, quand je suis rentré chez moi, elle était postée devant la porte. Elle portait encore sa tenue de sport, étant en pleine séance de gym quand elle avait du me rejoindre. Furieuse, elle m'a foncé dessus, alors que j'étais encore enveloppé des charmes de l'autre ensorceleuse. Son patron l'avait appelée pour lui demander ce que je foutais avec sa fille, et pourquoi il l'avait retrouvée seins nus dans un club de strip-tease... Je n'avais ni l'énergie d'argumenter, ni de me disputer avec elle, alors j'ai réglé le problème plus simplement : sur l'oreiller. Ça fait des mois que je n'avais couché avec personne. J'ai bien essayé depuis ma rupture avec Clark, mais l'alchimie n'y était pas. Et hier soir... Disons que les résidus de ce qui s'était passé dans la voiture m'ont aidé.

- Je te laisse utiliser la salle de bain et piocher dans mes vêtements, si tu veux. Je vais aller préparer quelque chose... Thé, café, lait ?

- Café, s'il te plaît.

Elle se lève pour partir dans la salle de bain, et je fais de même, enfilant rapidement un bas de survêtement et descendant à la cuisine. Sur la poignée de la porte, je vois mon reflet déformé par la forme du métal : mes cheveux tombent devant mes yeux, et j'ai une gueule d'enterrement... Je vais passer la journée à dormir.

Chantonnant, je sors une bouteille du réfrigérateur et commence à boire l'eau glacée avec délice et soulagement : ma gorge est tellement sèche que je ne sais même pas comment Vanessa a fait pour ne pas s'évanouir à cause de mon haleine.

Mais le bruit de ma porte d'entrée qu'on claque résonne brusquement dans la maison, et dans un sursaut, je renverse une bonne partie de la bouteille sur mon visage et mon torse, manquant de m'étouffer quand l'eau tente de s'infiltrer dans mes narines. Toussant et encore victime du choc thermique que l'eau glacée sur ma peau a provoqué, je referme le frigo et regarde qui est la raison de mon état déplorable : toujours la même coupable, j'en ai bien peur.

- C'était ouvert, alors je me suis permise d'entrée, s'exclame-t-elle d'une voix claire.

Elle est rayonnante. Une robe de soie rouge laisse ses épaules et ses jambes dénudées, tombant élégamment sur ses hanches et s'arrêtant sous celles-ci, robe qu'elle accompagne d'un simple collier de ce que je soupçonne être de vrais diamants. Et par dessus, mon sweat...

Juchée sur une paire de talons blancs, elle ne prend pas le temps d'en dire plus, et, les faisant claquer sur le plancher, s'approche de moi pour venir me pousser contre la table.

- On va finir ce qu'on a commencé hier soir. Maintenant.

- Tu sais qu'il faut être deux à le vouloir, pour ce genre de choses ? Le consentement mutuel, ça te dit quelqu-

Mais elle pose une main sur mes lèvres, me regardant d'un air totalement sérieux.

- J'ai passé la nuit à coucher avec mon mec, et ça n'a pas suffi à te sortir de ma tête. Alors on va faire les choses rapidement, parce que je n'ai pas l'intention d'avoir envie de toi plus longtemps.

Sa main étouffe le rire que je ne peux m'empêcher d'avoir, avant que je ne vienne saisir son bras d'une poigne ferme, pour sortir du mutisme auquel elle me contraint.

- Princesse... Tu es sûre que c'est comme ça que ça marche, en ce bas monde ? Ou c'est juste un mensonge que tu te racontes pour justifier le fait de venir ici pour réclamer du sexe... ? D'ailleurs, qu'est-ce qui est arrivé au « je ne trompe pas mon copain » ?

- Ferme la bouche, ça sent le rat crevé là-dedans.

Cette fois, j'éclate de rire, alors que l'effrontée croise les bras et détourne le regard. Prenant son visage à deux mains, je l'embrasse langoureusement, alors qu'elle fait mine de se débattre. Mais je ne lui en laisse pas l'occasion, prenant ses lèvres avec volupté, et lui imposant mon haleine matinale.

- Tu disais ?

La lâchant complètement, je la laisse là, désorientée par cet échange, l'air perdu. Mais elle se reprend rapidement.

- Je disais que tu puais. Ce qui est toujours valable.

- Ce qui pue, c'est tes mensonges, gamine.

Purement et visiblement offusquée, elle me fixe, les lèvres entrouvertes en attendant de trouver une répartie cinglante. Je ne peux retenir un sourire stupide de s'afficher sur mon visage : je suis d'une étonnante bonne humeur, ce matin. L'idée de l'obséder à ce point me ravit, surtout quand je sais que, contrairement à elle, j'ai pleinement profiter de ma nuit avec Vanessa. Il est vrai que ce serait encore plus satisfaisant si elle n'était pas du genre à réclamer quoique ce soit, si je l'avais obligée à remballer son orgueil pour venir me voir. Mais Clark n'est pas de ce genre : elle ne place pas sa fierté au-dessus du reste et ne la laissera surtout pas se mettre en travers d'un quelconque plaisir. Elle vit de ça : le plaisir.

- Bon, je te sers un café, à toi aussi ?

- « Moi aussi » ?

- Jesse, je t'ai emprunté un boxer, j'espère que ça ne te dérange-

Les pas de la petite brune se font entendre dans l'escalier, et le volume de sa voix diminue à mesure qu'elle se rapproche de nous.

- Vanessa, tu tombes bien ! Expresso ou allongé, le café, je lui demande avec un sourire.

Me tournant vers elle, je l'observe, attendant patiemment que son regard arrête de faire l'aller-retour entre Clark et moi et qu'elle daigne répondre. Mais son visage tourne au cramoisi, et je sais que je vais devoir me débrouiller tout seul pour deviner comment elle aime son café.

- Oh, je suis tellement désolée, je vais partir tout de suite, je ne savais pas...

- Non non, ne t'inquiète pas, viens t'asseoir avec nous, si tu veux !

Je ne devrais pas torturer cette pauvre fille, mais la voir perdre ses moyens me met en joie. Joie qui disparaît rapidement, quand je sens une douleur aiguë attaquer mon oreille. Avec une série d'exclamations, je me tourne vers la brune à mes côtés, qui me jette un regard noir sous sa frange irrégulière.

- C'est qui, ça ?

- « Ca » s'appelle Vanessa, et elle allait rester avec nous pour le petit déjeuner si tu n'y vois pas d'inconvénient.

- Non, je vais partir, ça vaut mieux...

Par dessus mon épaule, Clark lui lance un sourire clairement hypocrite, hochant la tête.

- Fais donc ça, ouais.

Et, sur ses mots, elle m'attire à elle et plante un baiser sur mes lèvres. Est-ce qu'elle essaie de marquer son territoire, comme un chien pissant sur un poteau ? Ce n'est pas vraiment flatteur pour moi...

Sans douceur, je la repousse et pars à la suite de Vanessa, qui est déjà sur le seuil de la porte ne sachant pas où se mettre.

- Hé, tu m'appelles, pas vrai ?

- Tu es sûr... ?

- Oui, ne t'inquiète pas, je garde Cerbère en laisse.

Elle écarquille les yeux, alors que je réalise ce que je viens de dire. Plus de sommeil, donc.

- Métaphoriquement, bien sûr.

- C'est vous que ça regarde.

Et, sur ces mots, elle ouvre la porte et quitte la maison, d'un pas rapide. Un Vaudeville. 

Un rugissement de colère dans mon dos me ramène sur terre, et je me retourne pour faire face à Clark, qui se dirige déjà vers la porte, prête à quitter l'endroit.

- Oh non, où tu vas comme ça ?

Je lui bloque l'accès à la porte, mais elle me pousse sur le côté de façon si brusque et si inattendue que je titube un peu, ce qui lui laisse le temps de se faufiler et de sortir. Mais à peine a-t-elle fait un pas que je la rattrape, pour venir la plaquer contre le mur extérieur.

- Oh non... T'es jalouse ?

Elle marque une pause, et une lueur amusée passe un instant dans son regard si intriguant. Elle humecte ses lèvres, et je ne peux empêcher mon regard de descendre sur celles-ci. Pourquoi faut-il qu'elle soit si attirante ?

De si près, et dans la lumière douce du matin, je peux voir chaque détail de son visage, et il est horriblement bien fait. Les lèvres ourlées, les quelques grains de beauté qui viennent tacher sa peau, comme faite de marbre blanc, et les notes rosées qui réchauffe son teint lui procurent un attrait auquel je ne saurais résister. Croque la pomme. Difficile de dire si cette fille est Eve, ou si elle est le serpent.

- C'est pour ça que t'as fait ça ?

Je reconnaîtrais ces mots même si on me les disait dans une décennie. La première fois qu'elle a joué avec mes nerfs, mes sentiments...

- Peut-être.

Je pose une main sur sa hanche, mais elle tente de m'échapper, se contorsionnant.

- Ne me touche pas !

- Ah ? T'étais pas venue pour une formidable partie de baise ? J'aurais cru...

- Plus maintenant que je t'ai vu avec cette fille ! Je mange pas les restes des autres !

- Qu'est-ce que je devrais dire ? Je suis sûr qu'après ce qu'il t'a mis, t'es même plus un reste, t'es la chips qu'on laisse au fond du paquet pour montrer qu'on l'a pas fini !

Elle était prête à répondre, mais plisse les yeux à l'entente de mes derniers mots, en me fixant d'un air consterné.

- Tu peux parfois être incroyablement poétique, mais là ton imagination se retourne contre toi...

Et elle m'échappe à nouveau, partant vers le portail au fond du jardin. M'empressant de la rejoindre, je lui fais face, marchant à reculons devant elle.

- Allez, te fous pas de moi. T'as couché avec quelqu'un cette nuit, moi aussi, c'est quoi la différence ?

- La différence ?

Me poussant brutalement, elle me fait perdre l'équilibre. Je me sens tomber en arrière et à peine ai-je eu le temps d'accuser la chute qu'elle est assise sur moi, dans l'herbe humide, ses jambes de part et d'autre de mon bassin. Elle vient saisir mes joues de deux doigts, et plante son regard dans le mien.

- La différence c'est que, contrairement à toi, je ne partage pas mes jouets.

C'était petit. Elle a vraiment décidé de me rappeler à quel point j'ai pu être faible, quand on était ensemble.

- Dégage, avant que je ne change d'avis et te prenne là, dans l'herbe, je lui souffle, entre mes dents serrées.

- Comme si tu en étais capable.

Elle se relève, non sans donner un petit coup de pieds « involontaire » dans mes côtes, et part comme elle est venue. Quand sa silhouette disparaît derrière le mur d'enceinte, je laisse ma tête retomber parmi les quelques violettes, primevères et marguerites ayant survécu au Printemps, et étends mes bras. Ce sera moins facile que je l'avais imaginé...

Vous avez aimé ce chapitre? Une petite maj tardive, j'espère qu'elle vous plaira, je me prive de sommeil pour cette histoire à force!

Un avis sur Jesse et Vanessa?

Allez vous coucher, le sommeil, c'est le plus important! 💫

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