Des mots à lire, des mots à écrire - Akimasa et Samjoko
A l'occasion des Nuits de la Lecture 2024, entretien sur la lecture et l'écriture avec les auteur.e.s Akimasaaa et Samjok-o
LIRE
Qu'est ce que la lecture pour vous ? Que vous apporte-t-elle ?
Akimasa : Pour moi, la lecture a d'abord été un moyen pour atteindre une fin ; j'ai toujours détesté lire (à cause de l'école qui, au même titre que les autres le subissent, me faisait avaler des romans qui ne m'intéressaient pas). Et puis j'ai un jour entendu cette phrase d'Amélie Nothomb : « aimer écrire sans aimer lire, c'est aimer cuisiner sans aimer manger. » Ça a été une révélation pour moi. J'ai eu un véritable déclic ; je suis allée acheter Barbe Bleue, je l'ai lu, et j'ai été fascinée par ce que j'y ai trouvé. Je crois que j'ai compris dès lors les lacunes que j'avais dans l'écriture (je ne pouvais pas m'en rendre compte tant que ça sans lire la plume des autres). J'ai commencé à dévorer des livres dans le seul but de m'améliorer ; égoïstement, je lisais en me servant comme on pioche dans les plats d'une cafétéria, juste pour grossir mon assiette. Et puis j'ai cessé. J'ai fini par lire parce que j'ai compris que ce que je lisais avait été écrit par quelqu'un comme moi, quelqu'un qui a l'amour de l'écriture. Je lisais pour me servir, et j'ai enfin appris à lire pour apprécier, pour m'instruire, pour remercier. Pourtant, je sais que si j'arrête de lire, je perds 50% de mes capacités d'amélioration pour mes écrits (les 50 autres pourcents faisant référence au travail même de l'écriture, c'est-à-dire à son exercice sur le temps). Je lis à présent pour deux raisons ; apprendre et apprécier. Apprécier et apprendre.
Samjoko : Je n'ai pas souvenir d'avoir été un gros lecteur étant petit, moi non plus. Sans détester ça, les livres me laissaient surtout relativement indifférent. Le déclic s'est fait lorsque ma mère m'a tendu le premier tome de la saga Harry Potter. Je n'en ai pas voulu. J'ai l'ai donc offert à une cousine qui elle-même n'en a pas voulu, et qui me l'a rendu. Je me souviens m'être dit "bon, pourquoi pas le lire". C'est à ce moment que j'ai découvert que les mots n'étaient pas que des lettres imprimées sur du papier, qu'ils avaient un réel pouvoir, qu'ils pouvaient faire voyager et rêver. Je me suis alors plongé dans la lecture jusqu'à en faire des nuits blanches, et pour le gamin que j'étais à l'époque, c'était une sensation incroyable. Je pouvais m'immerger dans une histoire et vivre des aventures aux côtés des personnages. C'était comme un jardin secret que je pouvais laisser le temps d'aller vivre ma vie, et venir retrouver en reprenant ma lecture là où je l'avais laissée.
Tout comme Akimasa, j'ai subi les lectures scolaires plus que je ne les ai appréciées. Les ouvrages proposés ne donnaient pas envie de s'impliquer, c'était stylistique, analytique, et on nous apprenait essentiellement à disséquer les textes plutôt qu'à les ressentir. La lecture pour moi est un vecteur émotionnel, elle permet l'évasion et une forme de liberté, aussi. Elle m'apporte des choses variées en fonction de ce dont j'ai besoin, parfois je lis pour déconnecter du réel et m'alléger l'esprit, parfois je lis pour nourrir mon inspiration.
Êtes-vous de "gros lecteurs" ?
Akimasa : Je rebondirais sur ma réponse précédente pour celle-ci : cela dépend des périodes. Parfois, je peux manger trois à quatre livres par semaine, parfois seulement un par mois. Je suis une lectrice instable.
Samjoko : Je suis moi aussi un peu brouillon en ce qui concerne ma fréquence de lecture. Il m'arrive de devenir boulimique et de dévorer plusieurs livres sur une très courte période, ou à contrario, ne pas lire pendant plusieurs mois. C'est assez aléatoire, et ça dépend beaucoup de mon temps, de mon humeur et de mes envies.
Comment vous définiriez-vous en tant que lecteur et lectrice ? Qu'est ce que vous aimez lire ?
Samjoko : Je suis à la fois un lecteur esthète, et un lecteur rêveur. Esthète car il m'arrive de lire pour la beauté de la langue, pour me sentir bousculé par la justesse du ton, par le style, par la poésie et le rythme des mots. Et rêveur pour l'univers, pour l'intrigue, pour l'évasion, pour le fond plus que pour la forme. Je suis aussi le type de lecteur qui aime plonger dans la psychologie des personnages, analyser les détails pour comprendre le sens de ce qui a voulu être exprimé. J'aime vibrer, ressentir, m'arrêter sur une phrase et me dire "wow!". Je lis plus ou moins de tout, ça dépend vraiment des périodes. Mangas, romance, poésie, pièces de théâtre, thrillers, témoignages, littérature scientifique (je suis un fan d'astrophysique), fantastique, etc, je peux passer des heures en librairie à parcourir les ouvrages jusqu'à trouver celui qui me fera envie.
Akimasa : Je crois être une lectrice en quête. Quête de satisfaction, quête d'amélioration... Je suis avide dans mes périodes les plus affamées de lecture. Je lis de tout, non pas par envie de lire de tout pour m'instruire mieux, mais par naturel. Romans, fantasy, essais, livres historiques, biographies, BD, mangas, romans graphiques... Je lis ce qui m'attire sans prendre en compte ni le concept ni le format du livre. Je lis ce que j'ai à la fois besoin et envie de lire à chaque fois, sans m'occuper de la catégorie du livre en question.
Quel a été votre parcours de lecture ?
Samjoko : Comme je l'ai dit, mon amour pour la lecture a commencé avec Harry Potter. J'ai dévoré le tome 1 en une nuit. Puis j'ai demandé à ce qu'on m'achète le tome 2, puis le 3, et après ça, je ne me suis plus arrêté. Je me suis aussi découvert un amour inconditionnel pour le slowburn en lisant Orgueil et Préjugés. J'avais 14 ans. J'ai grandi dans un environnement où les livres ne tenaient pas une place particulière, j'étais un peu l'ovni de la famille mais ça ne me dérangeait pas. J'avais même aménagé un vieux placard pour en faire mon petit endroit privé afin de lire, protégé du monde. À chaque fois que j'ouvrais un nouveau livre, je me disais "dans quel univers vais-je plonger?". C'était grisant. J'ai eu une grosse période durant laquelle je ne lisais que des thriller, ensuite j'ai eu ma période poésie. Je me suis essayé à plein de genres différents pour varier les plaisirs et découvrir d'autres horizons. De manière générale, mon histoire avec la lecture se résume à des phases de recherche avant de finalement comprendre que je pouvais lire de tout, qu'il me fallait simplement respecter mes envies du moment.
Akimasa : J'ai, comme beaucoup, découvert la lecture à l'école ; ce qui m'a vite écoeurée. Au lycée, je n'osais pas dire que je ne lisais pas (puisque j'écrivais déjà, j'avais donc un semblant de lucidité sur le fait qu'aimer écrire mais ne pas aimer lire, c'est étrange, presque mal perçu). Pour l'anecdote, ma mère m'achetait continuellement des livres en pensant elle-même que j'étais une grande lectrice ! Livres que je ne lisais pas. Et puis, en L1 de lettres modernes, il y a eu ce colloque sur la reprise des contes dans la littérature contemporaine, l'actualisation de ces derniers. Barbe Bleue d'Amélie Nothomb a été mentionné et je ne sais pourquoi j'ai fini par aller voir une interview de cette grande écrivaine, quelques jours plus tard, par curiosité. J'ai entendu la phrase que j'ai cité plus haut, aimer écrire mais ne pas aimer lire, c'est aimer cuisiner sans aimer manger. Bim, le déclic.
Avez-vous une routine de lecture ?
Akimasa : Non ! Je le répète, mais je suis tout-à-fait instable. Je lis partout, dès que l'envie me prend, sans jamais préparer mes lectures. Je lis par envie, besoin, nécessité, impulsivité... Donc je peux ouvrir un livre et en lire deux pages avant de me doucher comme je peux en lire deux-cent assise par terre sur le tapis de ma chambre. Mon rapport à la lecture n'a aucune cohérence ni aucun sens, et je l'aime beaucoup ainsi. Je ne me force jamais.
Samjoko : Je suis un peu pareil. Je n'ai aucune routine. C'est terriblement arbitraire et variable en fonction de beaucoup de facteurs (temps, mood, etc). Ça peut me prendre n'importe quand, n'importe où, et durer très peu de temps comme plusieurs heures.
LECTURE ET ÉCRITURE
Écrire change-t-il votre rapport à la lecture ? Votre regard sur les textes ?
Akimasa : Au début, oui. Si d'un côté j'essayais de me servir chez les autres, j'ai commencé à avoir ces quelques pensées monstrueusement nombrilistes : « ah, j'aurais pas dit ça comme ça », « j'aurais tellement pu écrire ça », « pourquoi j'ai pas pensé à écrire ça ? » (des remarques internes qui méritent de très bonnes gifles). Aujourd'hui, c'est bien plus doux : « mais c'est grandiose, merci aux humains qui écrivent d'écrire ! » Je suppose que cela a un rapport avec mon isolement intense à mes débuts sur Wattpad, vis-à-vis des autres auteur.es, lorsque j'ai commencé à avoir beaucoup de vues. Et puis, quand tout cela s'est calmé et adouci, j'ai cessé de voir les autres auteur.es comme ils voulaient à tout prix que je les vois (des rivaux, sûrement). Dès lors, mes lectures se sont apaisées. Avant, je lisais en pensant : « je dois faire mieux, c'est génial et je dois faire mieux. » Aujourd'hui, je lis en songeant : « j'ai tant de chance d'avoir pour passion l'écriture, car nous sommes tellement d'auteur.es, je me sens comprise et à ma place. »
D'un point de vue plus technique, j'ai réussi à détacher mon regard d'auteure des autres textes. Il m'a fallu du temps pour y arriver mais, à présent, j'arrive plus ou moins à avoir un comportement de pure lectrice et à endormir l'auteure en moi pendant mes lectures.
Samjoko : J'ai commencé à écrire avant de réellement aimer lire. Je n'avais aucun point de comparaison et je ne cherchais rien d'autre qu'à me faire plaisir et extérioriser. Lorsque j'ai commencé à lire, j'ai eu quelques complexes et je me suis beaucoup remis en question concernant la qualité de ce que je pouvais produire. J'étais jeune, mes écrits étaient tâtonnants et immatures, et lorsque j'ai vu la beauté des écrits des autres, ça m'a fait un choc. J'ai arrêté d'écrire pendant un long moment après ça, préférant lire ce que les autres écrivaient plutôt que d'essayer de le faire moi-même, puisque j'étais insatisfait. Lorsque je me suis remis à écrire, j'ai tenté d'imiter ce que j'aimais chez les grands auteurs que je lisais, mais j'ai vite compris que j'allais droit dans le mur ; ce n'était pas mon style à moi. J'ai alors travaillé ma plume pour parvenir à la rendre plus authentique, et arrêter de me trouver médiocre (ce n'est toujours pas le cas concernant le dernier point, mais ça aussi, j'y travaille). Écrire a changé mon rapport à la lecture au début de manière assez brutale, donc, puisque je me suis senti vraiment minable en comparaison de ce qui se faisait ailleurs. Désormais, je suis beaucoup plus rationnel et j'ai compris que chaque plume était différente. J'essaye de ne pas lire les autres avec ma vision d'auteur, mais c'est encore compliqué.
Faut-il lire pour écrire ? Faut-il lire pour bien écrire ?
Akimasa : Oui. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de développer là-dessus : si vous écrivez, lisez. Si vous ne lisez pas, vous gâchez votre véritable potentiel. Vous stagnerez. Il faut lire pour écrire car l'écriture est un apprentissage de tous les jours, donc la lecture, ce sont les cours théoriques.
Samjoko : Comme je l'ai dit, j'ai commencé à écrire avant même de véritablement lire. Je ne pense donc pas qu'il faille lire pour écrire, mais lire pour bien écrire, oui ( je me permets de nuancer, puisqu'il y a deux questions bien distinctes). Il faut lire pour se nourrir des autres, apprendre de nouveaux mots, de nouvelles figures de style, s'inspirer d'expressions qui font écho en nous, et s'améliorer. Comme l'a dit plus haut Akimasa en citant Nothomb, "écrire sans aimer lire, c'est comme cuisiner sans aimer manger". Il n'y a rien de plus juste. On peut techniquement cuisiner sans aimer manger (on peut donc écrire sans aimer lire), mais ça ne sert pas à grand-chose, et effectivement, il y aura stagnation. On dit que tout artiste doit maîtriser les règles avant de les briser. Il en va de même pour la littérature : lire permet de connaître les bases avant de pouvoir s'en servir, puis de s'en émanciper en trouvant sa propre voie.
Êtes-vous influencé.e.s par ce que vous êtes en train de lire lorsque vous écrivez ?
Akimasa : Seulement si ce que je suis en train de lire se rapproche de ce que je suis en train d'écrire. Mais de manière générale, je peux être influencée par des lectures passées, oui. Cela reste assez rare. Je suis plutôt influencée par d'autres types d'art.
Samjoko : Influencé, non, mais inspiré, oui ! Souvent.
Que représentent vos livres et textes préférés pour vous en tant qu'auteur.e ? Sont-ils un but à atteindre ? Leurs auteur.e.s, des figures-modèles ?
Akimasa : Ils ne sont pas forcément des buts à atteindre pour moi. Il y a des textes que j'ai réussi à atteindre (sur Wattpad, notamment ; des histoires que j'ai lu l'année dernière et dont je me sentais si loin. À ce jour, je considère que je suis finalement au même niveau que ces textes que je pensais inatteignables, ce qui est très gratifiant et motivant pour continuer de s'améliorer). En revanche, concernant mes livres préférés et sachant qu'ils ont été écrits par de grandes figures littéraires (Amélie Nothomb, Annie Ernaux...), je ne crois pas que ces textes soient des objectifs à atteindre puisque je ne tends pas à écrire comme elles. Mais je prends toujours pour modèle leur cohérence. Surtout, leur folie dans l'écriture. Leur touche. Je m'inspire d'elles en restant moi ; je voudrais réussir à avoir une plume que l'on reconnaît au coup d'œil, c'est ce que ces lectures que j'aime tant animent chez moi.
Samjoko : Pour moi non plus, ils ne sont pas des buts à atteindre. Il existe autant de livres qu'il existe d'auteurs, et c'est ce qui fait toute la beauté de la littérature. Chacun possède son propre style, sa propre essence, et je pense que de vouloir pasticher des écrivains que l'on admire serait perdre sa propre identité. J'apprécie lire mes auteurs et livres favoris, j'y trouve toujours beaucoup d'inspiration et ils m'aident à m'éduquer et à m'éveiller à d'autres choses, mais je n'aspire pas à leur ressembler.
Tirez-vous votre inspiration de ce que vous lisez ?
Samjoko : Comme dit plus haut, il m'arrive d'aller puiser dans les textes de mes auteurs favoris l'élan d'inspiration qui me fait parfois défaut. Quand je me sens vide de mots, je vais les lire et je me gorge de leur énergie. C'est un énorme booster lorsque je suis en panne d'inspiration.
Akimasa : Non. Très peu. Ça m'arrive, mais le cinéma écrase complètement mes lectures en terme d'inspiration.
Peut-on dire que la lecture et l'écriture sont les deux pans d'une même passion ou le rapport est-il différent selon vous ?
Akimasa : Le rapport est différent à mon sens, la preuve étant que j'ai été profondément animée par l'écriture de Suprématie (c'est à ce moment-là que j'ai su que je ferais tout pour en faire mon métier) et, pourtant, je ne lisais pas encore. L'écriture est une action, une imagination que l'on façonne, tandis que la lecture est une sorte de soumission, plutôt, à l'imagination d'un autre. Ma réponse manque probablement de nuance pour certains, mais c'est ainsi que je vois les choses. Que je les ressens, surtout.
Samjoko : Je suis d'accord, le rapport est différent. On peut tout à fait être passionné de lecture mais ne pas vouloir écrire. Ou écrire sans nécessairement être un lecteur assidu. Écrire c'est donner, et lire, c'est recevoir. Ce sont deux choses liées par le biais d'une histoire, mais opposées dans leurs fonctionnements et mécanismes.
Doit-on penser aux lecteurs lorsque l'on écrit ?
Akimasa : Oui. Je n'ai jamais cru à « j'écris pour moi avant tout », une phrase tant répétée qu'elle en est devenue un adage chez les écrivains. Je ne m'y retrouve personnellement pas. Je suppose que le parcours influe là-dedans. Mais à part pour le journal intime, on écrit toujours, toujours, en pensant à qui lirait bien ce qu'on est en train de produire, pire encore, on écrit en ayant pour but de publier. Si on écrivait pour soi, les livres ne ressembleraient pas à ce à quoi ils ressemblent actuellement. Du côté moral de la chose, oui, également, on doit penser aux lecteurs lorsqu'on écrit à mon sens. Des mots n'existent pas sans qu'on les lit, et c'est en les lisant qu'on les fait vivre. Je ne fais pas passer mes besoins personnels avant ceux de mes lecteurs (cela reste sain) : c'est-à-dire que je peux être dans un état physique et mental terrible que ça ne me permettrait pas de ne pas écrire pour eux. On dit souvent qu'il n'y a pas de reconnaissance à avoir, je crois que si ; je me sens redevable et cela n'impacte pas négativement ma vie. Sans mes lecteurs, je n'aurais jamais écrit 5 romans en 5 ans. Si je n'avais pensé qu'à moi, je n'en aurais écrit que 3, et sûrement que le 3ème en serait à peine à la moitié. Cela m'a souvent coûté en santé mentale, mais je fais partie des gens qui pensent que si l'on écoute toujours sa santé mentale, alors plus rien ne se passe. Modérément, souffrir, c'est avancer, c'est mûrir. Rien ne fonctionnera jamais en coulant de source. Je pense à mes lecteurs avant tout. Leur présence m'a fait gravir des montagnes que je n'aurais jamais gravi si « j'écrivais pour moi-même avant tout. »
Samjoko : Lors d'un précédent entretien, j'ai cité Amélie Nothomb et Proust qui disaient tous deux que l'écriture était un art égoïste. Qu'il fallait d'abord écrire pour soi (écrire ce qu'on aimerait lire et se faire plaisir dans l'écriture), pour espérer donner du plaisir aux autres. Cependant, écrire pour soi ne veut pas dire ne pas penser à celui qui lira, c'est simplement une façon un peu abrupte peut-être de dire qu'en tant qu'auteur, on n'écrit pas pour satisfaire une demande quelconque, qu'il s'agisse de l'édition ou du lectorat. Certains auteurs vont à contre-courant, nous font nous remettre en question, nous, lecteurs, parce qu'ils ont fait le choix de dire ce qu'ils avaient à dire, peu importe les qu'en dira t-on. Ils ont fait le choix de parler, de s'exprimer parce qu'ils avaient besoin de le faire, et je pense qu'avant même de penser à l'après, il faut penser au maintenant. Soi, et son récit. Soi, et ce qu'on a envie de raconter. Quand je dis que je pense d'abord à moi quand j'écris, c'est en ce sens. L'idée naît de moi, et je n'écris pas pour convenir ou pour faire plaisir.
Cependant, il est évident que j'aime et pense à mes lecteurs, ils sont un moteur et une motivation. J'envisage leurs réactions, je me demande s'ils aimeront, si ça leur apportera autant de joie ou d'émotions que ça m'en a procuré à moi. Mais l'écriture naît d'un besoin, et non pour répondre à une demande ou pour convenir à quiconque. Une histoire prend forme parce que l'auteur l'écrit. Ensuite seulement, elle existe et vit grâce aux lecteurs. C'est un partage fabuleux qui se fait en relais. D'abord l'auteur et son texte, qu'il finit par poser dans les mains de ses lecteurs.
Écrivez-vous ce que vous aimeriez lire ?
Akimasa : Oui et encore oui ! Je dirais même que c'est la recette d'une histoire réussie. Écrire ce qu'on voudrait lire, c'est écrire ce que tant de personnes aimeraient lire ! Écrire quelque chose que nous n'aurions pas forcément aimé lire, c'est prendre le risque d'imiter un désir. J'écris uniquement ce que je rêve de pouvoir dévorer.
Samjoko : Entièrement d'accord avec Akimasa. C'est aussi en ce sens que je disais qu'il faut écrire pour soi. Ce n'est pas une pensée narcissique, c'est une autre manière de dire "écrivez ce que vous avez envie de lire, et faites vous plaisir avant tout".
Avez-vous un regard "de lecteur/lectrice" sur vos histoires ?
Akimasa : Non, je n'ai pas de distance vis-à-vis de mes textes. Heureusement, j'ai mes lecteurs pour cela ; je me réfère énormément à ce qu'ils me disent, en portant une attention particulière au nombre d'entre eux qui peuvent dire la même chose, qu'elle soit positive ou négative. Cela me permet de prendre la température. Mais à titre personnel, je n'ai pas encore réussi à avoir un véritable recul sur mes textes, à la seule exception de si je relis mes textes quelques mois plus tard ; là, étrangement, j'ai envie de changer tant de choses !
Samjoko : Seulement quand je relis mes écrits en ayant laissé passer un peu de temps, comme viens de le dire Akimasa. Je pense qu'il y a aussi le fait que la plume évolue au fil de l'expérience, qu'elle se modifie un peu et prend en maturité. Relire d'anciens chapitres me fait toujours un peu étrange (quand bien même la première histoire que j'ai posté sur Wattpad n'a que 6 mois), et j'ai parfois un peu honte de ce que j'ai produit. Mais je me dis que c'est un premier jet et que tout ça pourra être retravaillé lors de la réecriture.
Un grand merci à Akimasa et Samjok-o d'avoir répondu à ces questions !
Et vous, lecteurs et lectrices de cet entretien ? Quelle est votre opinion sur les différentes questions posées ?
N'hésitez pas à participer au débat en commentaire !
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