-Claire, on a rendez-vous dans la salle de réunion. Nos clients sont arrivés.

-J'arrive dans un instant !

Je finis d'agrafer un dossier et le posai sur le bureau de KyungSoo avant de rejoindre celui-ci. Il passa une main dans mon dos avant de fermer la porte puis nous rejoignîmes la salle de réunion ensemble.

-Tu te sens comment ?

-Je me sens revivre.

-Parfait. Attends.

Il me retourna vers lui et rajusta ma veste. Il remit ma mèche de cheveux derrière mon oreille et caressa doucement ma joue, d'un air attendri.

-Nous sommes si heureux de te retrouver en pleine forme, vivante comme jamais.

-Il le faut. Parce que je ne dois pas m'attarder sur les événements du passé.

Il sourit avant de m'embrasser le front puis nous entrâmes dans la salle de réunion, saluant nos collègues d'un geste de la main avant de serrer celle de nos clients.

-Bonjour ! Je m'appelle Claire, pour vous servir.

-MinSeok, enchanté. Et voici mon associé JongDae.

-Nous sommes heureux d'avoir été choisi par vos soins pour votre projet, ajout KyungSoo chaleureusement.

-On a récemment eu vent de vos petits prodiges d'un certain... JunMyeon, je crois, hésita JongDae.

Mes amis me lancèrent un regard inquiet que je remarquai du coin de l'œil mais poursuivis comme si de rien n'était. Même si j'avais ressenti un petit malaise qui avait paru invisible.

-Oh, je vois. Nous nous occupions justement de sa résidence secondaire.

-Il nous a aussi parlé de vous, ajouta MinSeok.

-C'est... c'est-à-dire ?

-Vous êtes une personne douce, à l'écoute de tout le monde, et qui prend soin de ses amis comme le fait une mère avec ses enfants.

-Ahah, je vois, merci. Hum. Eh bien, je suis exactement la même en ce qu'il s'agit de pouponner nos chers clients !

-C'est formidable ! Nous avions hâte de commencer, alors ! conclut JongDae.

Nous prîmes place sur les canapés et exposâmes nos compétences et capacités pour leur restaurant. Nos clients voulaient un style orientale, asiatique, avec une petite touche de modernité. BaekHyun était tout émoustillé à l'idée de faire une décoration digne du nom tandis que ChanYeol proposait des façades comme ceci ou comme cela, charmant nos clients qui commençaient à rêver de leur restaurant. Quant à KyungSoo, il ajoutait de temps à autre des précisions à ce que BaekHyun disait ; et moi à ce que ChanYeol exposait.

Quand la réunion toucha à sa fin, nous serrâmes la main de nos clients puis s'activaient à faire la liste de tout ce que nous avions besoin pour concrétiser notre projet. ChanYeol et moi dessinions les plans de la façade, faisant petit à petit l'inventaire pour les ouvriers, tandis que KyungSoo et BaekHyun, qui avait le plan du restaurant en main, déplaçaient des petits papiers sur la feuille. Ceux-ci correspondaient à des objets de décoration qu'ils avaient idée d'ajouter à l'entrée, ou bien près du bar, ou encore près de l'aquarium, etc. Nous étions actifs comme jamais.

Mon téléphone sonna. Je sortis du bureau pour répondre.

-Allô ?

-Claire...

-SeHun ?

-J'ai... j'ai oublié de te dire un truc la dernière fois qu'on s'est vu. À l'hôpital.

-Heu... oui. De quoi s'agit-il ?

-Je préfère le dire de vive voix. On peut se retrouver quelque part ce soir, juste après ton travail ?

-Eh bien, oui, pourquoi pas. Au café près du parc, celui qui fait le coin, ça te va ?

-D'accord, ça marche. À ce soir !

Je raccrochai et rejoignis mes amis. Ils me demandèrent qui c'était, alors je leur expliquai. Ils étaient au courant de toute l'histoire, donc j'allais pas leur cacher. C'était mes confidents à la longue. Maintenant, ce fut le téléphone de mon bureau qui sonna. Je soupirai et allai répondre.

-Dans mon bureau.

Heu... ok.

-YiFan ?

-Ouais. Il a juste dit d'une voix sec "Dans mon bureau", et a raccroché.

-Ça sent le rossi !

-Merci de me rassurer, BaekHyun.

-Je t'accompagne ?

-Non, pas la peine de te rattraper.

Les autres rirent alors qu'il fit une petite bouille innocente. Je rejoignis l'ascenseur puis arrivai devant la porte du bureau de mon boss. Je toquai, ce fut ZiTao qui m'ouvrit. Il avait pas l'air de rigoler, dis-donc.

-Assis-toi.

Je m'exécutai, ne tenant pas à me faire démonter de toute pièce par son regard froid. Il était rarement dans cette humeur, je le connaissais assez pour dire que quelque chose l'avait énervé.

-J'ai eu vent des nouvelles de JunMyeon.

Il balaya sa main vers la gauche, soit vers ma droite. Je me rendis compte alors de la présence de YiXing, qui me sourit en me faisant un petit signe de la main. Je lui répondis de la même façon.

-Il se trouve qu'il ne récupère pas de ce qu'il s'est passé. J'ai appris que tu n'avais pas voulu l'écouter quand il était venu s'expliquer.

-YiFan ! T'es un patron, pas un site de rencontre, merde !

-Excuse-moi si je m'inquiète pour mes amis.

-En-dehors du boulot, ok. Mais me convoquer ici pour cette histoire qui relève de la vie privée est maladroit ! Au revoir.

Je claquai les portes du bureau, qui se rouvrirent très vite avant que quelqu'un ne me rattrape.

-On peut parler ?

-Si c'est à propos de JunMyeon, non. Je ne veux plus entendre parler de ce gars.

-Claire ! Et ma promesse ?

Je m'arrêtai net. Putain de merde, je l'avais oublié, celle-là. Je me retournai lentement vers YiXing.

-Qu'est-ce que je dois faire ?

-Je sais pas.

-Je veux tenir ma promesse, mais je ne veux pas le blesser. Je devrais aller le voir, le réconforter. Mais ça lui ferait mal puisque nous ne devrions pas avoir de sentiments.

-Il t'aime encore. Et toi ?

-J'ai...

Je m'arrêtai, portant la main à mon cœur. YiXing attrapa mon poignet et sentit nettement les battements de mon cœur. Je me dégageai de sa main et croisai les bras, frustrée par ce que je venais de découvrir.

-Claire ! C'est encore possible !

-Aaaah, tu vas pas t'y mettre, toi aussi ? Est-ce que tu sais quand même ce que j'ai vécu ?

-Oui.

-Bon, alors tu n'as rien à... quoi ? Qui t'a raconté tout ça ?

-YiFan.

-Il commence à me casser les roubignoles, lui, chuchotai-je.

YiXing se mit à rire. Soudain, je pris peur.

-JunMyeon le sait ?

-Non. Enfin je crois.

-Comment ça, tu crois ?

-Eh bien... la personne avec qui tu as partagé ces moments de bonheur il y a un mois est venu nous rendre visite il y a quelques jours. avant que YiFan me raconte il nous a tout raconté.

J'étais bouche-bée. LuHan avait rendu visite à... mais comment avait-il fait ?

-Vous l'avez vu ? Fantôme ?

-Oui. Enfin, il avait donné des signes de sa présence en inscrivant des mots sur la buée des fenêtres.

-Je vois.

-Il nous a demandé d'allumer un poste de radio. On a vu le bouton tourner dans plusieurs sens puis on a entendu sa voix. Il avait pris possession d'une fréquence brouillée pour nous parler.

-Et c'est là où il vous a tout raconté.

-Oui. Dont quelque chose que tu ne sais pas et qu'il ne veut pas que tu saches.

-Ah. Bon. Eh bien, suivons sa volonté.

Nous nous quittâmes sur ces derniers mots. Je rejoignis mes amis et leur informai, comme toujours, de ce qui venait de se passer. Ils étaient mon journal intime, en somme.

La journée tourna à sa fin. J'avais passé la majeure partie de mon temps à me défoncer au travail pour penser à autre chose, c'était cool ! Je pris mon sac et ma veste et regagnai le parking pour prendre ma voiture et me rendre au rendez-vous de SeHun. Quand j'arrivai sur les lieux, je constatai qu'il était déjà arrivé. Je posai ma main sur son épaule et me penchai pour l'enlacer. Nous étions devenus proches au fur et à mesure qu'il prenait de mes nouvelles de mon rétablissement.

-Comment tu vas ? Me demanda-t-il avec enthousiasme.

-Bien ! Juste un peu fatiguée par ma longue journée de travail.

-C'est normal. J'ai envie de dire que c'est ce qui te fait du bien, d'un côté.

-Oui, c'est vrai ! Et toi ?

-Un peu tracassé, depuis que je me suis souvenu de ce que je devais te dire. Normalement, tu ne devrais pas le savoir.

Je fronçai les sourcils, me rappelant de YiXing qui m'avait dit quelque chose de similaire.

-À propos de LuHan ?

-Heu... oui.

-Je t'écoute.

-Il m'a raconté que quand JunMyeon a dragué la serveuse au fast-food il y a longtemps de cela... il n'était pas maître de son corps.

-Oui, c'est ce que lui-même m'a raconté.

-C'était LuHan qui le possédait.

Je faillis m'estoquer avec le café qui venait fraîchement (si je puis dire pour une boisson chaude) d'arriver. SeHun se leva pour me donner de l'aide, je me calmai peu de temps après. Soudain, je me souvins du restaurant que j'avais partagé avec JunMyeon, au début de notre relation. LuHan l'avait traversé, et il avait affaibli JunMyeon en faisant cela. Pourquoi n'y ai-je pas pensé plus tôt, merde ?!

-SeHun. Ce que tu m'as dit va grandement aider quelqu'un. Merci.

-Je-je t'en prie.

-LuHan vient te voir parfois ?

-Mais... il est mort. Et ne réapparaît pas en fantôme. C'est fini, tout ça.

-Il a rendu visite à JunMyeon et son ami YiXing que je connais aussi il y a quelques jours.

SeHun fut tout autant choqué que moi quand je l'ai su. Nous nous regardions, perplexe, ne sachant où notre ami LuHan voulait en venir. À la fin de notre discussion quelque peu désolée, dépourvue de joie et débordante d'interrogations, nous nous quittâmes pour rentrer chez nous. Mais je décidais de ne pas rentrer chez moi.

Assise dans ma voiture, le cœur battant, mes pensées tournées vers JunMyeon, je ne savais que faire. Je plaquai mes mains sur le volant en les crispant, faisant gémir le cuir marron sous ma peau. Je soufflai puis attrapai mon téléphone d'une main tremblotante.

-Allô, Claire ?

-YiXing. Donne-moi votre adresse.

-Qu'est-ce que tu...

-J'ai su par un ami ce que LuHan ne voulait pas me dire. Il le connaît aussi, depuis bien longtemps.

-...

Il me donna son adresse, je le remerciai puis raccrochai. J'accélérai en m'engageant sur la route, prête à rendre visite à JunMyeon. Le temps des explications était arrivé. En peu de temps qu'il ne le fallait pour me rendre compte de ce que je faisais, je me garai devant une villa luxueuse. J'aperçus YiXing en train de faire les cent pas devant le perron. Je quittai ma voiture, la fermai puis sonnai au portail. Il sursauta puis l'ouvrit avec une télécommande, me rejoignant à grandes enjambées.

-Il est au courant de ma visite ?

-Non. Il est dans sa chambre. Dépêche-toi.

J'avais peur. Peur qu'il me rejette parce que je n'avais pas voulu l'écouter et qu'il pense que je me fasse passer pour une fille malade d'amour qui va à droite et à gauche et qui tentait de le reprendre après un douloureux passage. La peur me prenait aux tripes, l'attente était insupportable.

YiXing m'amena jusque devant la porte en ébène de sa chambre. Je déglutis silencieusement, j'avais une envie de vomir un truc de malade. Il posa sa main sur mon épaule et m'offrit un sourire réconfortant. "Tu ne peux que réussir", me souffla-t-il alors qu'il tourna la poignée.

Ce fut l'instant de vérité. Le plus stressant de toute ma vie.