-Bonjour, excusez-moi de mon retard, j'arrive dans un instant.

ChanYeol se leva puis m'aida à enlever mon manteau tout en chuchotant :

-Pourquoi t'es en retard ? D'habitude t'es toujours à l'heure ! On avait un rendez-vous important et c'est toi-même qui l'a fixé aujourd'hui !

-Je préférais quand t'étais saoul, tu parles moins.

-Claire !

-Oui, pardon, roh. J'ai pas dormi de la nuit.

-Pourquoi ?

-Parc que... allez, allons-y !

Je montai les trois marches qui surélevaient le bureau du patron, arrivant dans un petit salon aménagé astucieusement pour recevoir un client de haute importance dans les meilleures conditions. Aujourd'hui ça n'allait pas être une tasse de café qui allait faire tache, mais ma présence quelque peu en retard à l'entretien. Je saluai tout le monde d'une poignet de main (bizarrement mon patron ne me reprochait aucunement ma faute) et quand ce fut le tour de JunMyeon, il embrassa ma main comme hier soir. Je me rassis en essayant de calmer les ardeurs de mes rougissements et reportai mon attention sur le carnet de ZiTao. Il avait juste noté la date et l'heure, je n'étais pas si en retard que ça, en fait. BaekHyun se pencha vers moi, je fis de même vers lui.

-On t'attend depuis vingt minutes.

Bon. J'étais quand même en retard, tout compte fait.

La réunion se passa dans le meilleur des mondes possibles. C'est-à-dire que j'eus droit à plusieurs regards de JunMyeon vers moi ainsi que la sollicitation de mon patron à m'occuper personnellement de son ami. J'avais acquiescé avec ferveur et avait sollicité mes collègues dans telles ou telles tâche que j'exposai sur la table numérique disposée devant nous. Vive la technologie, sauvons la forêt.

-Bien, j'ai une affaire importante à régler je vais devoir vous laisser. Messieurs, mademoiselle... au plaisir.

Nous nous inclinâmes tous ensemble puis il sortit, accompagné de son secrétaire YiXing, fidèle comme jamais. Il ne parlait pas beaucoup mais était très efficace quand on avait besoin de lui. ZiTao, secrétaire lui aussi, m'avait vaguement parlé de lui à la réception d'hier soir.

-Claire, je veux te voir seule dans mon bureau.

Les autres comprirent alors qu'il fallait qu'ils sortent, optant pour une pause café à quatre. Je suivis alors mon patron jusqu'à son bureau puis m'assis dans l'un des deux fauteuils mis à disposition dans le cas d'une confrontation avec le patron. Celui-ci releva la tête vers moi, tout en croisant les mains devant son visage.

-Je te sens tendue, depuis que je t'ai présenté JunMyeon.

-Disons que quelques facteurs extérieurs en ce moment me perturbent un peu. Ne faites pas de lien quelconque entre ma vie privée et ma vie professionnelle.

-Très bien, si tu le dis. Claire... est-ce que je peux te demander une faveur ?

-Je vous écoute.

-Je t'ai affecté si fortement à ce projet... tu n'as pas la moindre idée de pourquoi ?

-Non. Puis-je vous en demander la question ?

Il recula dans son siège et m'adressa un sourire bienfaisant.

-Ca fait combien de temps que l'on se connaît, Claire.

YiFan était mon ami depuis le lycée. Il avait toujours veillé sur moi. Je le tutoyais en-dehors du travail, mais gardais une forme de respect par le vouvoiement comme il était mon supérieur. C'était donc par ma relation que j'avais réussi à entrer dans sa boîte, ainsi que mes collègues. Il avait hérité de la boîte de son père.

-Longtemps.

-Oui, très longtemps. Et ca fait très longtemps que je te vois seule. Tu n'as personne dans ta vie ?

Je baissai la tête. Il y avait LuHan, mais il ne comprendrait pas. Comme d'habitude, YiFan voulait mon bonheur, comme si j'étais sa petite sœur protégée. Soudain, je relevai la tête, comprenant où il voulait en venir.

-Est-ce que tu insinues que mon projet avec JunMyeon pourrait aboutir à... ?

Il tournait de gauche à droite dans son fauteuil. Consternée, je me levai et me retournai pour partir.

-Je suis désolée, YiFan, mais ce n'est pas le moment de jouer aux entremetteuses.

-Il t'apprécie beaucoup.

Je me stoppai dans ma course, à quelques pas de la porte.

-Il m'a beaucoup parlé de toi hier et ce matin. C'est un homme bien, fais connaissance avec lui. Intéresse-toi un peu à toi, arrête de t'occuper des autres comme tu le fais souvent pour tes amis.

Je soupirai puis ouvrai la porte avant de dire :

-D'accord, je le ferai.

En fermant la porte, je le vis sourire encore une fois, fier de m'avoir parlé de ce sujet. J'ai dit que j'allais lui parler, pas que j'allais tomber dans ses bras ou lui sauter dessus ! Et puis, pourquoi moi ? Pourquoi pas une autre, d'abord ? J'ai pas le temps de penser à ces choses-là, j'ai du boulot. Je m'arrêtai de marcher, comprenant ce que je venais de dire. Il est vrai que le boulot me bouffe les trois quarts de ma vie. A quand remonte mes vacances déjà ? Il y a sept mois, pendant les vacances de Noël, quand j'ai été au ski avec ChanYeol, BaekHyun et KyungSoo. Je souris à ces souvenirs si tendres et si loin. Il fallait que je prenne des vacances aussi, tiens.

J'entrai dans le bureau, rejoignant la bande. Ils m'adressèrent tous un regard, et virent que c'était pas le moment de me parler. ZiTao s'éclipsa après m'avoir adressé un signe puis s'en alla rejoindre YiFan. Je m'assis dans mon fauteuil et me pris la tête dans les mains.

-T'as besoin de vacances.

-C'EST CE QUE JE ME DISAIS !

Les yeux de KyungSoo s'agrandirent encore plus qu'ils ne l'étaient. Je m'excusai auprès de lui puis rebaissai la tête.

-Tu t'es fait quoi, là ?

BaekHyun attrapa mon poignet et releva ma manche. Il avait remarqué le bandage en-dessous du tissu. Je jurai secrètement dans ma tête, me rappelant de la colère de LuHan.

-J'ai cassé un verre, et un débris m'a coupé.

-Tu es allée aux urgences ?

-Pas besoin, ChanYeol.

-Ca tombe, le débris est DANS ton bras. Il faut qu'on y aille. Allez prévenir le boss, je vais avec elle.

-ChanYeol, je te jure que...

-Tais-toi.

Ses yeux. Ils avaient un air déterminé, et à la fois inquiet. Il me prit la main, attrapa sa veste puis sortit. Je me retournai et vis KyungSoo s'en aller voir YiFan, tandis que BaekHyun se tenait à la porte en souriant tristement. Super, j'avais inquiété mes amis.

Le médecin finit de bander mon bras puis leva la tête vers moi.

-Voilà, mademoiselle. Vous êtes hors de danger.

-Merci monsieur. Bonne journée !

-A vous aussi.

Je lui serrai la main puis sortis, allant rejoindre ChanYeol qui attendait dans la salle d'accueil en s'amusant avec un petit garçon pas plus âgé que sept ans. Il se redressa et me prit dans ses bras.

-Tu as vu ? Il fallait que tu viennes ici.

-Oui, merci ChanYeol.

Il resserra son étreinte puis émit un petit "oh" avant de me retourner dans la direction où il regardait. JunMyeon était là. Une poche de glace sur la tête, encadré par deux infirmières. Nous courrâmes jusqu'à lui.

-JunMyeon, est-ce que tout va bien ?

-Oh, rebonjour. Oui, tout va bien. J'ai juste reçu quelque chose sur la tête.

Je fronçai les sourcils puis sentis un courant d'air froid. Je tournai la tête à gauche... et aperçus LuHan. Il souriait, fièrement. Je serrai les poings, en colère comme jamais. Je dressai mon majeur discrètement avant de m'en aller direction les toilettes. Une discussion s'impose.

-Pourquoi t'as fait ça ?!

-Je voulais juste m'amuser et j'ai pas contrôler le truc.

-Qu'est-ce qui est tombé sur sa tête ? Dis-le moi !

LuHan prit soudainement peur. Jamais je ne m'étais énervée contre lui, surtout que je commençais à pleurer.

-Pourquoi tu pleures ?

-Premièrement : t'as fait éclaté un verre hier en t'énervant, un débris m'est arrivé dans le bras. La raison du pourquoi je suis ici. Deuxièmement : comme j'ai pas dormi cette nuit parce que JE NE VOULAIS PAS TE VOIR, je suis arrivée en retard au boulot. Et j'avais un entretien avec JunMyeon. Troisièmement : Mon boss essaie de me caser avec lui et toi tu commences sérieusement à m'énerver à te mêler de ce qui ne te regarde pas !

-Mademoiselle ? Est-ce que tout va bien ?

Je me rappelai alors que j'étais dans un des toilettes, dans un hôpital, là où on pouvait facilement te prendre pour un dérangé du cerveau.

-Oui oui, je suis au téléphone.

-Oh, excusez-moi alors.

-Tout va bien. Vous ne faites que votre métier.

Je tournai la tête dans la direction où était LuHan... mais il n'y était plus. Je soufflai un bon coup puis sortis des toilettes. Sur le miroir, dans la buée qu'il avait produit par son souffle, quelques mots s'y trouvaient :

J'ai fait tombé un livre sur sa tête