Deux mondes parallèles, une personne existentielle
-Heure du décès : 22h34. Débranchez les machines, couvrez le corps du drap. Nous allons prévenir sa famille.
-LuHan, ta gueule.
J'ouvrai les yeux et fis face à mon ami qui riait à n'en plus pouvoir. Il fit quelques saltos dans les airs avant d'adopter une position sur le flan, le coude soutenant la tête.
-Alors, comment c'est passé ta journée ?
-Bien. Et toi ?
-C'était long ! J'avais hâte que tu me rejoignes, je commençai à m'impatienter. Tu ne songes pas à te coucher plus tôt, histoire qu'on passe plus de temps ensemble ?
-LuHan, j'ai une vie !
-Ouais, contrairement à certains.
-Oh, désolée, ce n'est pas ce que je voulais dire.
Je m'approchai de lui en volant un instant puis le pris dans mes bras. Nous étions dans ma chambre, assis sur le bord de mon lit, tandis que mon corps endormi se trouvait derrière nous. J'avais le pouvoir de quitter mon corps lorsque je m'endormais, pouvant voyager dans les airs sans que personne ne me voit. A part LuHan, qui était un simple fantôme qui m'accompagnait lors de mes sorties nocturnes. C'était mon meilleur ami, je l'aimais très fort.
-Et si nous allions nous promener au parc ?
-Allons-y !
LuHan attrapa ma main et nous fit traverser le mur. Arrivés dehors, les lumières de la ville s'offrirent à nous, comme le reflet des étoiles hauts perchées dans le ciel. LuHan m'avait dit qu'une fois, il était allé jusqu'à elles, et qu'elles brûlaient quand on les touchait. Je n'avais certainement pas envie de me réveiller en sursaut avec les mains couvertes de brûlures. Mais je vous avoue que la curiosité me pinçait de temps en temps.
Nous atterrîmes au parc, sur le toit des jeux pour enfants. LuHan me prit par les hanches pour éviter que je glisse et me fit asseoir doucement. Je posai ensuite ma tête sur son épaule, alors qu'on regardait l'animation de la ville au loin.
-Tu étais là-bas, aujourd'hui.
-Oui.
-Ce n'est pas une question, j'étais avec toi.
Je me tournai vers lui, il affichait un sourire en coin.
-Tu m'espionnes.
-Je veille sur toi, c'est pas pareil !
-Ouais ouais, rattrape-toi.
J'ébouriffai ses cheveux alors qu'il faisait la grimace. LuHan, comme il se sentait souvent seul, avait tendance à me couver. Je le voyais et le sentais bien, mais j'ignorais qu'il le faisait pendant que j'étais éveillée, alors que moi je ne le voyais pas.
-J'espère que t'es pas un voyeur quand je suis dans une cabine d'essayage d'un magasin.
-Non, mais je regarde ce que tu prends. La jupe patineuse noire et blanche que tu as acheté aujourd'hui te va à merveille, d'ailleurs. Il serait judicieux de la revêtir lors de la cérémonie d'ouverture du bal qui a lieu demain, à 19h30, comme tu l'as si bien noté dans ton agenda mercredi.
Je souris. Vous voyez, on ne voit pas nos anges gardiens. Et bien moi, je vois le mien la nuit. C'est LuHan. Je l'ai connu il y a trois mois, alors que je m'étais endormie au bureau. Je pensais qu'il était un visiteur de mon lieu de travail mais il m'avait ensuite montré mon corps à côté de moi. Au début, j'avais paniqué, puis il m'avait aidé à me calmer. Il m'avait ensuite appris à reprendre possession de mon corps, lutant contre la fatigue qui m'avait fait assoupir. Juste au moment où mon patron venait me voir. Etant l'une des meilleures architectes de la boîte, je ne devais en aucun cas montrer un moment de faiblesse devant mon supérieur.
Puis j'étais rentrée chez moi, la tête remplie de questions. Comment avais-je pu faire ça ? Pourquoi LuHan était-il là, lorsque j'étais endormie, et pas quand j'étais éveillée ? Quand je suis rentrée à la maison, après avoir dîné, je me suis couchée. Et je l'ai revu. Pendant toute la nuit nous avons fait connaissance, en même temps que je prenne confiance de ma "capacité". On passait le temps ensemble, c'était très amusant. Il se sentait moins seul, et moi je découvrais la ville d'une autre façon, en plus d'apprendre à voler dans les airs. Nous pouvions aller voir un film gratuitement, ou visiter quelques maisons. C'est comme ça que j'appris que mon boss entretenait une relation très particulière avec ma collègue de bureau, me révélant alors pourquoi elle était sans cesse convoquer. Moi qui pensais que c'était pour une formation intensive, comme elle était nouvelle.
-Claire.
-Oui, LuHan ?
-Est-ce que tu... tu songerais à m'abandonner si tu rencontrais quelqu'un dans la vraie vie ?
-C'est quoi cette question ? Bien sûr que non, voyons ! Tu es mon ami, LuHan, mon meilleur ami ! Un ange gardien, tout au plus. Alors je veux te garder près de moi.
Je conclus ma phrase en lui faisant un gros câlin puis me levai.
-Rentrons chez moi, je ne vais pas tarder à être réveillée par ma sonnerie.
Si je ne revenais pas près de mon corps, dans un rayon de cinq mètres maximum, je pouvais avoir du mal à me réveiller car mon esprit n'aurait pas repris entièrement possession de mon corps, et ce dernier pourrait considérer mon esprit comme un corps étranger dans les premières minutes de la fusion. C'est ce qu'on appelait avoir la tête dans le cul.
-Demain tu comptes me suivre au bal ?
-Oui, je veux te voir danser et resplendir dans la salle.
Je rougis violemment en riant comme une fillette. Je plaquai ma main sur ma bouche, honteuse. Il me l'enleva en riant et la baisa doucement.
-Ce que j'aimerai danser avec toi.
-Nous danserons à la prochaine pleine lune, si tu veux.
-C'est d'accord !
LuHan était très niais, ce qui contrastait fortement avec son côté pervers. Je devais me méfier de lui, car il cachait bien son jeu. Je n'arrivais pas tout le temps à deviner ce qu'il avait derrière la tête, c'était très troublant.
-Allez file ! Sinon tu ne vas pas réussir à bien te réveiller. Ce serait con de ressembler à un panda alors qu'on sort en soirée.
-Oui, tu as raison. A plus tard, Lulu !
-Bonne journée, Claire.
Il sourit en penchant la tête sur le côté, puis m'aida comme toujours à m'allonger au-dessus de mon corps pour reprendre possession de ce dernier. Il glissa un bras en-dessous de mon dos et pris ma tête dans le creux de son autre main. Avant que je ne me réveille, LuHan embrassait toujours mon front avec douceur, comme un cadeau avant de se revoir la nuit d'après. Sauf que cette fois-ci...
Il embrassa mes lèvres.
Quand j'ouvrai les yeux, je palpai du bout des doigts l'endroit où il m'avait embrassé. Je n'osais encore y croire. Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi, tout simplement ?
-LuHan... je suis quoi pour toi ?
Tout à coup, la glace de mon miroir se glaça, laissant apparaître une buée sur la surface lisse. Des mots vinrent alors se dessiner :
Tu es bien plus que tu ne le penses
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