Chapitre 4
Ce ne fut qu'une fois rentrés que père et fille installèrent Elfie confortablement dans son lit. Sa sœur se rapprocha d'elle et lui prit les mains.
— Tu as faim Fifi ? Tu veux que je t'apporte quelque chose à boire ? Ou quoi que ce soit ?
Le regard de la jeune fille semblait pourtant ailleurs, comme si on l'emmenait dans l'autre monde.
— Je dois vous dire...
— Non ! l'arrêta Louve avec autorité. Tu dois d'abord te rétablir. Papa ? Pourriez-vous lui ramener un verre d'eau je vous prie ?
— Bien sûr, ma puce. J'arrive tout de suite.
La jeune fée en profita pour enlever les vêtements oppressants de sa jumelle et l'installer le plus confortablement possible. D'ailleurs sa respiration sembla devenir moins laborieuse après cela. Alexis arriva pile à ce moment-là et lui tendit un verre qu'elle s'empressa de boire à grandes gorgées. Ses yeux roulèrent dans leurs orbites, comme si elle était sur le point de perdre conscience. Sa sœur lui caressa tendrement les cheveux.
— Repose-toi ma Fifi.
— Non ! s'écria-t-elle. L'ombre ! J'ai vu l'ombre ! Elle s'est emparée de toi Lou ! Je l'ai vu !
La jeune fille eut un sourire perplexe.
— Ne dis pas n'importe quoi. Je vais parfaitement bien, moi.
— Je le sais. Je l'ai vu. Tu dois... me... croire...
Cependant, avant que la jeune fille aux cheveux d'or n'ait eu le temps de comprendre ce que cela impliquait, sa sœur aux cheveux argentés s'était endormie. Pas d'un sommeil paisible, non ce dernier semblait agité. Louve lui caressait tendrement les cheveux, essayant de l'apaiser autant que faire se peut. Leur père, quant à lui, semblait totalement désœuvré. Il ignorait tout du mal qui rongeait sa princesse et ne savait pas comment s'en occuper. Il triturait ses doigts en prenant appui sur une jambe, puis sur l'autre, mal à l'aise.
— Je vais aller vous faire à manger, finit-il par décider. Tu as besoin de reprendre des forces et ta sœur en aura également besoin à son réveil.
— Bonne idée papa.
Et le silence retomba sur la petite demeure. Louve mangea en silence dans le salon auprès de son père puis, lorsqu'elle eut terminé, elle monta un plateau à sa sœur qu'elle força à se réveiller pour se sustenter avant de la laisser replonger dans ses songes. Elle pensa qu'elle ne dormirait pas cette nuit-là. Elle avait passé de nombreuses heures à veiller sur sa jumelle. Alexis, quant à lui, était sûrement parti se reposer également, laissant les deux sœurs ensemble.
Ce ne fut qu'aux premières lueurs de l'aube que du bruit parvint aux oreilles de la jeune fille. Elle s'était assoupie, la tête posée sur le bras de sa sœur, et se réveilla en sursaut. De dehors leur parvenait des cris, voire même des hurlements de colère, et des lueurs rougissantes transparaissaient au travers des fenêtres. À ses côtés, Elfie avait été réveillée aussi et la regardait d'un air ensommeillé.
— Que se passe-t-il ?
— Rien, tenta de la rassurer sa sœur. Rendors-toi, je vais aller voir.
— Hors de question !
Et avant que Louve n'ait eu le temps de s'interposer, sa jumelle était déjà debout. Finissant par abdiquer, la jeune fille aux cheveux d'or prit la direction du salon où leur père était lui aussi déjà debout et regardait par les fenêtres ce qu'il se tramait.
— Les filles, retournez vous coucher ! ordonna-t-il.
— Jamais de la vie, répondirent-elles en cœur.
— Vous êtes aussi têtues que votre mère, grogna-t-il, même si en vérité cela sonnait plutôt comme un compliment venant de lui.
— Sortez !!! hurla un homme devant la maison.
— Les filles, surtout quoi qu'il se passe, vous ne sortez pas !
— Mais... père ! tenta de répondre Elfie.
— Quoi qu'il se passe ! insista-t-il. Jurez-le moi !
La jeune fille aux cheveux argentés hocha la tête, les larmes roulant librement sur ses joues pâles.
— Toi aussi Louve, insista l'homme.
— Je ne peux pas..., murmura-t-elle.
— Tu n'as pas le choix ! Tu dois t'occuper de ta sœur et tu le sais bien. Jure-moi que tu veilleras toujours sur elle ! Jure le sur le nom de ta mère !
— Je...
— Jure le ! insista-t-il à nouveau.
— Je le jure sur la tombe de Navi...
— Bien.
Il se rapprocha de ses filles et les serra fort dans ses bras, les embrassant chacune sur le sommet de la tête.
— Je vous aime mes princesses. Plus que ma propre vie. Prenez toujours soin l'une de l'autre.
— Alexis !!! Sors ou alors nous mettrons le feu à ta maison ! cria de nouveau l'inconnu.
Il regarda ses filles une dernière fois dans les yeux. Ceux d'Elfie emplis de larmes et ceux de Louve qui étaient secs, mais représentaient bien la combattante qu'elle avait toujours été, fière et forte. Il ne dit pas un mot de plus et sortit de la maison, veillant bien à refermer la porte derrière lui.
— Je suis là. Que me voulez-vous ?
— Où sont tes démones de filles ?
— Vous ne vous en approcherez pas, répondit-il en s'emparant d'une fourche.
Louve regardait tout depuis l'intérieur. Elle ne désirait en manquer aucune miette pour quand elle aurait à se venger. Et sa sœur aussi d'ailleurs. La si douce et si lumineuse Elfie.
— Comment as-tu osé ramener des monstres dans notre village ? cria une femme. Les laisser côtoyer nos enfants !
— Ce ne sont pas des monstres ! Ce sont mes filles ! Ce ne sont que des fillettes !
— Louve a blessé Jace ! Il a des griffures sur tout le corps !!!
— Oui, et pourquoi a-t-il tout ça d'après toi ? Qui a attaqué Elfie ? Je serais en droit de demander réparation et justice !!!
— Ils n'ont fait que chahuter ! répondit un autre.
— Ah oui ? Au point que ma fille perde connaissance et se retrouve entre la vie et la mort ?
— Et bien elle est en vie puisque ton autre saleté de fille a utilisé sa magie pour la sauver !
— Et heureusement ! En quoi est-ce mal d'être différent ?
— C'est mal lorsque la différence est de la monstruosité surnaturelle ! Des fées ? Laisse-nous rire ! Cela n'a jamais existé. Je ne sais pas ce que tu as fait à tes bébés pour qu'elles deviennent comme ça, mais nous ne les laisserons pas affecter les autres. Laisse-nous passer pour nous occuper d'elles et nous te laisseront partir du village pour aller reconstruire ta vie où bon te semble !
— Hors de question ! Vous devrez me passer sur le corps.
— Ainsi soit-il.
Louve attrapa sa sœur dans ses bras et la serra contre elle pour l'empêcher de regarder dehors. Elle commença à voir des hommes se battre, puis elle détourna les yeux à son tour. Ses yeux qui ne représentaient plus que les ténèbres qui l'habitaient. Pourtant, elle ne sortit pas ce soir-là. Non parce qu'elle n'en avait pas envie, mais parce qu'elle avait juré sur la tombe de Navi. Cette promesse était donc sacrée.
Ni elle ni sa sœur ne prononcèrent le moindre mot pendant des heures que durèrent la rixe au-dehors. Ce ne fut que lorsque les combats cessèrent qu'une voix s'éleva de nouveau.
— Allez chercher les filles, ordonna une voix de femme.
Un homme se rapprocha de la porte, mais il fut repoussé par un bouclier magique. Ce que tout le monde ignorait, à l'instar des petites filles ; ce qu'Alexis seul savait, c'était que Navi avait utilisé un charme féérique pour protéger ses filles tant qu'elles resteraient dans cette maison. C'était la raison pour laquelle leur père était sorti et les avait laissées enfermées à l'intérieur.
— Sortez, hurla-t-il.
— Allez-vous-en ! répondit Elfie en larmes. Laissez-nous nous recueillir sur le corps de notre père.
— Nous reviendrons demain au coucher du soleil. D'ici-là, vous aurez intérêt à avoir déguerpi de notre village !
Les pas s'éloignèrent. Louve vérifia que tout le monde était bien parti avant de se diriger vers la porte...
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