Chapitre 55 : La messagère

Il y a quelque chose de réconfortant dans la vision des deux tasses, posées, cotes à cotes, sur la table basse du salon, dont s'échappe deux petites nuées blanches de chaleur. C'est peut-être parce que c'est additionné à la journée tombante lentement dehors et au silence particulier de mon appartement, bercé par le son du mouvement de la rue derrière l'immeuble, mais cette vision est réconfortante. De la même façon, elle me rend aussi très peiné, et inquiet, alors que je serre un peu plus mon bras contre ma poitrine et mes doigts autour de mon téléphone portable, contre mon oreille, le regard se baladant sur les traits fermés de ma compagnie inattendu en cette fin d'après-midi, un dimanche.

Je tourne un petit peu sur ma position, dans le cadre de la porte de la cuisine, et je jette un regard nerveux à l'heure pour essayer de récapituler cette journée et comprendre combien de temps m'a-t-on attendu sur le seuil de la porte. Mais même en récapitulant tout dans ma tête, je ne pourrais pas savoir le temps de l'attente si je n'ai pas l'heure d'arrivé, et mon invitée n'est pas disposé à parler avec moi pour le moment, tandis qu'elle sanglote sur mon canapé depuis que je l'ai laissé entrer. Je lui ait offert un thé et des petits gâteaux, je lui ai demandé ce qu'elle faisait ici et comment elle avait eu mon adresse, mais rien n'y a fait et sa bouche est resté soudé sous la plainte de sa peine. Et je soupire encore une fois.

« Merci, en tout cas, de m'avoir prévenu. J'ai envoyé un message à Regina elle sera super soulagée de la savoir saine et sauve. » Je hoche la tête et me tourne de nouveau vers le salon, lèvres serrées d'inquiétude.

« Pas de soucis, c'est parfaitement normal. » Je hausse une épaule et fais une volte face pour entrer dans ma cuisine et attraper quelque chose à manger dans mon frigidaire, pour satisfaire mon ventre qui cri famine depuis des heures. « Je vous la renverrai demain, avec un des premiers trains. » Un nouveau soupir s'impose à moi et, de la même façon, mes questions n'arrivent pas à rester silencieuses. « Est-ce que tu sais pourquoi elle est là ? » Je demande alors, la voix un plus basse. « Ça doit être... plutôt grave. »

« Aucune idée. » Confis Lucas sur un ton défait. Dans ma tête, je peux presque le voir hausser ses épaules et faire une grimace. « Je crois qu'elle s'est disputé avec Harry et leurs parents ? H a laissé entendre qu'ils avaient eu un accrochage hier. »

« Je vois. » Je hoche la tête avec compréhension, essayant de retenir mon cerveau de faire milles et une hypothèse sur la raison de la visite surprise de Willow.

Je l'aime beaucoup, cette fille, elle est adorable et douce, gentille, mais je ne suis pas sûr que l'on partageait une grande relation. On a discuté, de temps à autres, oui, mais je ne suis pas sûr de savoir pourquoi elle viendrai me voir moi et pas un de ses amis. Surtout si c'est pour une simple dispute avec son frère. Je suppose, bien évidemment, qu'elle est très au courant de comment l'histoire s'est terminé entre lui et moi alors je ne vois pas vraiment ce que je viens faire là dedans.

« Enfin bon, je vais te laisser. Regina va sûrement m'appeler pour avoir des nouvelles. » Me prévient Lucas. « Passe une bonne soirée, prends bien soin de Wilhelmina. »

« Compte sur moi. »

Sans plus de cérémonie, la conversation téléphonique prend fin et je pose mon téléphone sur le plan de travail, fixant mon écran noir une seconde, ainsi que mon reflet dedans, avant de lentement reprendre mes esprits. Je me prépare mentalement à retourner dans la pièce, et à devoir discuter avec Willow. Non pas que ça soit une corvée d'être avec elle, mais je ne suis pas sûr d'avoir la force physique ou mental de devoir encaisser une conversation au sujet de mon ex le plus récent avec sa petite sœur. Je sais que Willow est une jeune adulte très réfléchie, elle est intelligente et consciente des dangers que ça représente de faire une telle fugue, et je pense que c'est aussi cela qui me fait peur dans cette conversation... la raison de la fugue est certainement grave.

Prenant mon courage à deux mains pour affronter ce que cette journée a, de toute évidence, encore en réserve pour moi, je sors de la pièce pour rejoindre mon invitée au salon, et gentiment m'asseoir avec elle dans le silence, comblé par ses reniflements ponctuels. J'attrape une tasse de thé, à la volé, pour me serrer sur moi-même contre un accoudoir du canapé, serrant la tasse entre mes doigts, avare de sa chaleur.

Willow reste immobile de son côté, fixant la tasse devant elle sans vraiment sembler la voir. Elle joue nerveusement avec ses doigts et je n'arrive qu'à me sentir désolé pour elle. Même sans vraiment savoir ce qu'il se passe, il faudrait ne pas avoir de cœur pour ne pas compatir à sa douleur. Elle semble démuni, fixant le vide comme si il cachait toutes les réponse à ses questions, et tremblant sous le poids de ses larmes. Ça me brise de la voir ainsi, elle qui est d'habitude si rayonnante, souriante, innocente et joyeuse n'a, aujourd'hui, laissé place qu'à une pâle copie d'elle même qui ne sait pas comment agir. Ses cheveux roux sont attachés dans une simple queue de cheval très mal rangée, ses cils sont collés entre eux, il y a des cernes sous ses yeux bruns, elle a l'air a milles lieux d'elle même. Décidément... beaucoup de gens sont malheureux en ce moment. Je soupire encore.

« Louis ? »

Je sais que j'attendais bêtement qu'elle se décide à me parler, à lancer la conversation. J'attendais gentiment, pour lui laisser le temps qu'elle voulait, pour qu'elle juge d'elle même quand elle serai prête à me dire quelque chose, mais je pense que je ne m'attendais pas à entendre sa voix de si tôt. Alors, quand les mots tombent soudain de sa bouche, tel un galet dans une marre en pleine hiver, ou du moins avec la même résonance lugubre, je sursaute sur ma place légèrement.

« Oui ? » Je réponds finalement, me redressant un peu pour m'asseoir dans une position plus avenante et ouverte, croisant mes jambes devant moi et tenant ma tasse sur mes cuisses, posant tout mon regard sur son profile.

« Est-ce que... » Elle marque une petite pause, indiquant par là une certaine hésitation nerveuse, puis se tourne vers moi, me permettant d'un peu moins me sentir invisible, comme depuis tout à l'heure. « Est-ce que tu savais que Harry ne.. qu'il.. » Elle serre ses lèvres, ses larmes semblent revenir. Je crois que je sais ce qu'elle va dire. « Il.. » Je pourrais finir sa phrase pour elle, maintenant, alors qu'elle retient son souffle et consulte sa conscience avec un regard de nouveau absent, mais je sais qu'elle a besoin de le dire. C'est comme ça, elle doit l'accepter et l'admettre, elle doit le dire à voix haute. « Il n'a pas le même père que moi ? » Elle hausse un sourcil, et sa grimace laisse penser qu'elle culpabilise de me le dire, comme si elle avait peur de me l'apprendre, et de le faire ainsi. Je souris, pour la rassurer.

« Je le savais oui. » Son regard semble s'empreindre d'horreur alors qu'elle me regarde soudain, et je sens que ce n'était pas ce qu'elle voulait entendre. « Ça a beaucoup coûté à ton frère de me le dire, si ça te rassure. Je lui ai presque forcé la main. » Je me penche vers la table pour y poser ma tasse, mais ne la quitte pas des yeux alors qu'elle réalise l'ampleur de ce que je dis.

« J'étais... j'étais donc vraiment la seule à ne pas savoir ? » Renifle-t-elle, me consultant avec un regard suppliant de lui dire que non, de lui mentir, mais je ne fais que hocher la tête avec désolation.

« Il avait envie de te le dire. C'est.. tes parents qui l'en ont empêché. C'est tellement tabou qu'il n'a jamais put en parler avec Elizabeth, même alors qu'elle savait aussi. » Je pince mes lèvres. J'espère vraiment que ces petits détails ont de la valeur pour elle, qu'elle ne haïsse pas son frère et sa sœur pour ça alors qu'ils sont deux victimes, tout comme elle.

« J'arrive pas à y croire. » Souffle-t-elle dans un semblant de rire incrédule, reniflant ensuite, presque dans la même seconde, en serrant ses mains sur ses genoux. « J'arrive pas à croire qu'on m'ait caché un truc pareil si longtemps... à moi seulement. » Elle semble sincèrement heurté et confuse, et dans ce sentiment fort qui l'attrape elle passe ses mains sur sa tête avec épuisement, dévoilant ainsi pourquoi sa queue de cheval est si décoiffé.

« Je sais... j'avais très peur que ce jour arrive, tu sais ? Je me suis dis... le jour où Willow l'apprendra... ça va être dur pour tout le monde. » Je soupire lentement. « T'étais... je pense que t'étais la dernière chose qui faisait de ça un tabou, maintenant plus rien ne pourra être comme avant. » Je hoche la tête pour moi même et elle attrape enfin la tasse devant elle pour y boire une gorgée, ce que je prend comme un bon signe, après toutes ces larmes. « Comment tu l'as sut ? » Elle racle sa gorge, pour préparer sa voix à répondre, et prend une profonde inspiration.

« Je... j'ai... » Elle fronce son nez dans une drôle de grimace et se tourne vers moi. « J'ai rencontré son père. »

Si j'avais eu une gorgée de thé à la bouche à cette seconde je peux garantir qu'elle aurait fini par terre, parce que je l'aurait craché à cause de la surprise. À la place, cependant, je ne fais que prendre une inspiration soudaine qui me fait m'étouffer sur ma propre salive, dans une situation autant ridicule et dramatique que si j'avais craché du thé. Il faut me comprendre, ce n'est pas n'importe quoi ce qu'elle est en train de me dire. Si elle a rencontré son père... c'est que lui aussi, et ce n'est pas juste une anecdote, c'est quelque chose qui en implique beaucoup d'autres, et ça m'attrape le cœur avec une force rapide et soudain qui me donne le tournis.

« Attend attend attend. » Je toussote dans ma main encore une fois et me tourne vers elle, le regard peut-être trop vif et terrifié pour qu'elle n'ait pas envie de sourire d'un air amusé. « Tu l'as rencontré ? Où ? Comment ? Pourquoi ? » Elle mordille sa lèvre, mal à l'aise pour une raison ou une autre.

« Bon. » Commence-t-elle, passant ses doigts sous ses yeux, mécaniquement, bien qu'il n'y ai maintenant plus de larmes qui coulent. « Harry est allé à L.A. récemment. Il y est resté quelque temps et il est revenu jeudi. Je ne l'avais pas vu depuis son départ alors je lui aies dit que je viendrai le voir dès que ma semaine de cours serait fini, donc hier. Il m'a dit qu'il était d'accord mais que je devais pas venir après deux heures trente. » Elle marque une petite pause et prend une nouvelle inspiration, je pense que c'est une façon d'exprimer son regret de n'avoir pas écouté ce qu'il lui a dit. « Je me suis dis qu'il devait travailler ou quoi et je suis habitué à être chez lui pendant qu'il bosse, alors... je suis quand même venu avant deux heures trente. J'ai bien vu qu'il y avait une voiture que je connaissais pas devant, immatriculée dans un autre département, mais j'ai pas plus réfléchi, parce qu'il bosse souvent avec des associés que je connais pas et qui vienne de loin. » Elle hausse les épaules et une petit rire sort de sa bouche dans un air dépité, déçus d'elle même. « Et puis j'suis entrée... »

« Et il était là ? » C'est moi, cette fois, qui n'arrive pas à y croire.

Il a reprit contact avec son père biologique ? Son père ? L'homme qu'il avait peur de revoir ? Mais qu'a-t-il put se passer pour que tout change soudain ? D'un seul coup ? En un seul mois ? Que c'est-il passé pour que soudain il revienne vers moi et retrouve son géniteur ? Sans prévenir ? Qu'est ce que j'ai manqué ? J'ai l'impression de nager en plein rêve, d'être finalement celui qui a deux trains de retard, et peut-être même six ou sept d'autres.

« Ouais. » Dit Willow, la voix coincé dans sa gorge. « Je l'ai vu, ils étaient assis là et je trouvais ce mec bizarre, il avait l'air familier tout en étant un étranger et il s'est levé tout de suite quand il m'a vu et il m'a dit... 'salut tu dois être Wilhelmina... Harry m'a beaucoup parlé de toi. Je suis son père.' » Elle rit, un rire maniaque et presque terrifiant, un rire nerveux et mal à l'aise à l'absurdité et le manque de douceur dont cet homme a fait preuve. Quand elle s'arrête de rire ce n'est que pour que son visage se torde dans un sentiment de peine, et prendre une lourde inspiration traduisant tous les sentiments qu'elle ne dit pas. « Je me suis tourné vers Harry et il avait l'air paniqué... mais il a fini par se lever et il m'a dit... 'c'est vrai, c'est mon père biologique.' »

Le rêve devient un cauchemar. Je pense que c'était inévitable que Willow l'apprenne avec brutalité, ça été le cas de tout le monde autour d'elle et avant elle, mais de la même façon je trouve que la façon de lui dire n'a pas été correct. Elle méritait qu'on s'assoit avec elle et qu'on le lui dise patiemment, gentiment, avec détails et douceur, pour qu'elle comprenne doucement et assimile facilement. Et à la place on lui a dit, comme ça, sans même réfléchir, sans même la ménager. Ce n'est jamais facile d'apprendre ce genre de chose, et personne n'a voulu lui faciliter la tâche. Elle n'a que seize ans, et on lui dit d'un seul coup, sans prendre aucune pincette, que son frère n'est qu'un demi-frère. On lui a écrasé les mots à la figure, on l'a mit devant le fait accompli, sans rien lui expliquer, sans contexte, sans rien.

« Qu'est ce que tu veux répondre à un truc pareil ? » Demande-t-elle en soufflant un rire, de nouvelles larmes sur le bord des yeux. « J'ai regardé ce type, et je me suis juste dis.. 'oh, oui, c'est vrai... Harry lui ressemble.' Puis... je crois que d'un seul coup tout s'est débloqué dans ma tête, tout a commencé à avoir du sens d'un seul coup, brutalement, comme si on m'avait mis une grosse claque. J'ai tout compris... pourquoi mon père le traitait comme ça, pourquoi il disait tout ça, pourquoi maman passait son temps à se taire comme si elle avait honte, pourquoi Harry laissait faire sans rien dire, pourquoi Liz est partie, pourquoi la famille de mon père ne nous parle plus... j'ai tout compris d'un seul coup. » Elle lève son regard vers le plafond, prenant en compte physiquement l'ampleur de ces choses qui pèsent sur sa famille depuis des années et que jamais elle n'avait vu avant aujourd'hui. « Et au milieu je me suis juste demandé pourquoi on ne m'a jamais rien dit ? Pourquoi je ne savais pas ? Pourquoi je dois l'apprendre ainsi ? Je n'ai même pas laissé Harry s'expliquer... j'étais en colère et vexé et je suis partie en courant. J'ai appelé Lizzie mais ça n'a servit qu'à me mettre plus en colère parce qu'elle savait aussi... Puis j'ai confronté ma mère et elle a fondu en larme et n'as fait que se victimiser en long et en large, me dire qu'elle aurait voulu me le dire, qu'elle avait honte... » Elle regarde le vide, une lumière dansant dans les yeux et traduisant son émotion, sa solitude sous un sentiment aussi lourd que celui-ci. « Je suis même allé au domaine après, pour parler à mon père, mais j'ai juste trouvé ton adresse sur le bureau de Harry, écrite sur un post-it, posé avec des papiers. » Elle renifle rapidement. « Et puis c'est là que j'ai décidé que je voulais plus les voir. Je voulais voir quelqu'un d'honnête et qui ne m'avait jamais menti, quelqu'un de neutre en qui je pouvais avoir confiance, pour parler. Mais finalement... même toi tu étais au courant. » Elle hausse les épaules d'un air lassé, balançant les mots par dessus sa tête d'un mouvement de main et baissant son regard vers le sol. « Et je suis la seule potiche à qui on a rien dit. »

« Non... Will ne voit pas les choses comme ça. J'ai haï chaque seconde que j'ai passé à participer à tout ça. Ton frère aussi haïssais que tu ne saches pas... il voulait absolument que tu saches, il en avait marre de ce tabou et ce silence. Ne soit pas en colère contre lui, s'il te plaît, ou contre moi... » Je secoue la tête brusquement. « Ce n'est de la faute que de vos parents, c'est eux qui ont choisi de ne jamais te dire, de toujours repousser à plus tard et je suis tombé au milieu et j'étais indigné par tout ça, plus que Harry... C'était tellement important pour moi que.. » Je serre mes lèvres, ça fait mal d'y repenser, mais c'est un fait, c'est arriver et je dois bien réussir à le dire à voix haute moi aussi. Bien que ce soit la première fois depuis que je suis revenu que je parle ouvertement de ce qui s'est passé ce jour là et que ce ne soit en rien facile. « ... Que ça a fini par devenir une obsession et... et ça a causé notre rupture. » Willow se tourne vers moi, sourcils froncés, analysant mes mots avec une confusion très palpable, et m'observant avec une centaines de questions dans le regard, des questions si nombreuses qu'elles ne peuvent pas toute sortir et qu'elle ne peut me poser que la plus évidente d'entre elles.

« T'es plus avec Harry ? » Demande-t-elle, complètement choqué... et moi dont.

« Huh.. oui. » J'émets un mouvement de recule. « On.. on a rompu juste avant mon départ. Il te l'avait pas dit ? » Je pointe mon doigt vers elle.

« Non ? » Elle me regarde avec incompréhension, ses yeux dessinant des trajectoire dans le vide comme si elle essayait de retracer ses souvenirs, puis elle soupire en tombant dans le dossier. « Il a rien dit à personne ce con, ou du moins pas à moi ou nos parents... mais ça explique pourquoi il avait l'air si mal dernièrement du coup. » Mon souffle se coupe dans ma gorge, il se coupe à cause du passage d'une lame tranchante qui déchire ma trachée dans une envie de crier qui me démange. C'est la deuxième fois, maintenant, qu'on me parle de comment les choses se passent pour lui, la deuxième fois qu'on me dit qu'il va mal depuis notre rupture, et si la dernière fois je n'avais pas l'énergie de le savoir et de l'assimiler, aujourd'hui je crois que ce n'est plus pareil.

« Il... il avait l'air mal ? » Je sais que je ne devrais pas demander ça, que j'avais dit que j'arrêterai. Je m'étais promis de faire de mon mieux pour me tenir à mes promesses, j'avais dis que je ne le laisserai pas reprendre ses droits sur mon amour pour lui, et sur le trou béant dans mon cœur, mais après les photos de lui à L.A. c'est comme si mon cœur avait pris le dessus sur ma raison, et que la voix qui me hurle que je veux savoir était la seule chose que je pouvais entendre.

« Ouais.. assez. » Me dit-elle. « On pensait que c'était juste parce que t'étais parti, au début... mais c'est sensé si vous avez rompu. » Elle hoche la tête pour elle même. « Parce que c'était vraiment bizarre, ma mère se faisait beaucoup de soucis pour lui... il se levait beaucoup plus tard... il était tout le temps dans la lune, il était fatigué, il pleurait très souvent, il se maquillait beaucoup moins, il avait moins d'énergie... et ça a fini par se répercuter sur son travail. » Je sens qu'elle aborde une partie très difficile de la chose, mais le plus difficile est déjà en train d'arriver pour moi. Mon cœur est déjà en train de se briser alors que j'imagine Harry se levant avec les traits tirés par le manque de sommeil, sans l'énergie de se maquiller alors qu'il adore ça, incapable de se concentrer sur son travail et finissant par simplement pleurer. Ça fait beaucoup trop mal de l'imaginer comme ça. La simple idée en est insoutenable. J'ai envie de courir à lui, de le serrer dans mes bras, de lui dire qu'avec un simple mot de sa part je pourrais ne plus jamais le quitter. « Mon père lui a demandé des comptes du coup et ils se sont violemment disputés... genre même Harry criait.. il lui disait... 'je suis malheureux, si tu m'aimais vraiment tu essaierai de m'aider mais t'en as rien à foutre', ça a duré super longtemps... » Elle regarde un peu le vide et tord sa bouche dans une grimace. « Et mon père l'a frappé. Très fort. »

Les mots jettent un froid. Sur moi comme sur elle. Ils remontent le long de ma colonne vertébrale dans un frisson terrifiant et je sens ma gorge se serrer sur elle même. Je le savais que ça arriverai. Je savais que ça viendrai. Je savais que ce connard lèverai la main sur lui. Je le savais, je m'étais préparé à devoir me mettre entre eux plus d'une fois. Je savais que ça finirai par arriver. Mais j'aurai préféré avoir tord, j'aurai préféré me tromper. Et c'est pourtant bel et bien arrivé, et le pire dans tous les sentiment de rage et de douleur que je ressens, c'est celui qui brûle mes artères quand je me dis que je n'étais pas là, que je n'ai pas put le repousser, que je n'ai pas put protéger celui que j'aime. Je n'étais pas là. Harold a frappé Harry... et je n'étais pas là pour lui refaire le portrait en échange. J'ai envie de vomir. J'ai envie de crier. Harry a encaissé le coup, il est rentré chez lui et il a pleuré tout seul, sans personne pour le tenir et le rassurer, sans personne pour lui, sans... moi.

« Après ça... Harry a décidé de partir à L.A. pour 'réfléchir à la suite'... il m'a dit à son départ. » Elle fait les guillemet avec ses doigts, et sa voix sonne absente et lugubre à nouveau. Je peux sentir qu'elle aussi est en colère contre Harold, elle aussi aurait voulu être là pour Harry.

Et je comprend alors. Les photos de Harry à Los Angeles, le câlin avec Niall, la marque sur sa joue, sa douleur, mon t-shirt. Son père l'a frappé et il est partie se réfugier loin de lui, avec mon odeur sur le dos. Je comprend aussi que Willow ait voulu le voir à son retour, si vite et si tôt, et.. je comprend aussi pourquoi il a soudain reprit contact avec son père biologique. Harry... a peut-être finalement eu son déclic, celui que j'attendais tant, celui qui devait lui donner la force de sortir de ce trou où son père l'enterrait vivant. J'ai, cependant, mal à la gorge de me dire que c'est jusque là qu'il aura fallut en arriver pour qu'il ait ce déclic. Il aura fallu que Harold le frappe pour qu'il se dise qu'il mérite mieux, pour qu'il ait envie de réfléchir, de contacter son père, de se donner une chance de vivre sainement, de partir à la recherche de nouvelle bases pour son future. C'est immonde qu'il ait fallut que Harold aille si loin pour que Harry réalise qu'il mérite mieux, j'ai mal au cœur que l'amour de Harry pour son père l'ait aveuglément mené jusque là, et qu'il aura fallu un coup physique dans la figure pour se rendre compte que ce n'est pas normal de courir après la validation et la fierté de son père.

Et je crois que c'est à cet instant, à ce moment très précisément, avec ses mots en têtes, que toute la culpabilité que je portais pour notre rupture tombe au sol et disparaît. Oui, j'ai merdé, oui, je suis devenu insistant, mais tout ça ne serait pas arrivé si Harold n'était pas un tel trou du cul. J'avais déjà dis que je n'étais pas le seul fautif, mais en soit quel était ma faute en premier lieu ? Oui j'ai sûrement été très loin, souvent, oui j'ai sûrement dit et fait des choses vexantes dans mes tentatives incessantes à aider Harry à sortir de ce trou dans lequel il se terrait, oui j'ai souvent agis vite parce que je me retrouvais beaucoup trop dans ces douleurs, mais, au fond, n'importe qui aurait agis ainsi. N'importe qui aurait voulu hurler de rage et de peine comme je l'ai fait, n'importe qui aurait essayé de faire entendre raison à la personne qu'il aime comme j'aime Harry. N'importe qui serait devenu complètement fou de voir quelqu'un qu'il aime tant se boucher les oreilles, fort, quand on veut lui faire entendre raison, parce qu'il est persuadé que la relation qu'il entretient prendra un jour tout son sens. Je me dois d'être indulgent envers moi même, oui, j'aurai haï, moi aussi, qu'on essaie de me presser comme je l'ai fait, mais n'importe qui, qui comprend et qui aime comme je le faisais, aurai agis de la sorte, aurait demandé sans relâche, remis sur le tapis encore et encore. Ça ne plaisait pas à Harry parce qu'il savait que j'avais raison et qu'il ne voulait pas que j'ai raison, parce qu'il était dans cette relation qui avalait tout le reste et le retirait de la réalité.

Tout ça, notre rupture... ce n'est pas ma faute. J'ai une part de responsabilité, oui, évidemment, et lui aussi, d'ailleurs, mais tout ce temps j'ai porté une responsabilité trop grande pour ce que c'était vraiment. J'ai agis comme si tout était ma faute, comme si j'étais le seul à devoir blâmer, alors que c'était bien plus dur que ça, et que mon seul tord était de vouloir sortir Harry de là. Un Harry qui s'était convaincu ne pas exister sans son père, un Harry qui était sûr que tout finirai par avoir du sens, un Harry qui était coincé dans une relation dont il dépendait, une relation qui lui disait tous les jours que si il arrêtait il perdrait toute sa valeur. Je ne faisais pas le poids. J'ai crié et hurler mais ça n'a servit qu'à faire peur à Harry qui ne se rendait pas vraiment compte de ce qu'il se passait. Cette rupture n'était pas de ma faute, elle n'était même pas de celle de Harry... malgré nos tords à tous les deux. Non, la faute vient de cette relation toxique qui, comme toute relation toxique, a coupé de Harry ce qui était le plus à même de le libérer.

Finalement, je le savais déjà, dans une relation comme celle-ci, si les autres peuvent nous aider il n'y a vraiment qu'une seule personne qui peut nous sortir de là : nous-même. Et Harry y est enfin arrivé, il a enfin réalisé et accepté que c'était trop, que ça n'avait aucun sens de continuer et que ça n'en aurait jamais, il a enfin fait ce qu'il avait le plus peur de faire. Il a mit son père sur la touche, il a prit du temps, pour de vrai, pour penser à son futur, et il est visiblement venu à une conclusion... puisqu'il a reprit contact avec son géniteur. Et je me retrouve là, à des kilomètres de lui, et mon cœur n'a jamais autant été gonflé de fierté pour lui avant aujourd'hui. J'ai toujours, je pense, admiré Harry et sa force, son travail, sa motivation, son amour pour la vie et les choses qu'il entreprend, mais aujourd'hui, pourtant, je suis plus fier que jamais. Fier de savoir qu'il est en train de s'offrir une vrai chance à la vie, pour lui même. Fier qu'il ait eu la force de se rendre compte que ça n'allait pas.

« C'était de ça que je voulais parler avec lui hier. » Je m'ébroue lourdement pour revenir un peu sur terre et me tourne de nouveau vers Willow toujours assise là, le regard dans le vague en se remémorant tout cela.

« Une conversation qui n'a pas eu lieu. » Je récapitule pour elle. « Tu te rends quand même compte que c'est une décision très dangereuse que tu as pris, de venir jusqu'ici ? Toute seule ? » Elle fait un petit sourire amusé en hochant la tête.

« Je sais. » Dit-il, boudeuse. « Mais je voulais vraiment... leur montrer que j'étais en colère, j'aurai put aller voir Lucas ou Madeleine, ou un amis, mais... mais je sais pas... je crois que je voulais venir te voir toi parce que t'es le mec de Harry... enfin étais. » Elle tord ses lèvres dans un air désolé et je soupire.

« C'est n'importe quoi... » Soufflé-je. « Comment t'es entrée de toute façon ! »

« Oh ! » S'exclame-t-elle en serrant ses mains sur sa tasse, prenant une petite gorgée avant de reprendre. « C'est simple, j'ai sonné chez toi et puis tu répondais pas alors je me suis dit que j'allais attendre devant, puis une gentille femme est arrivé avec un petit chien, elle m'a vu devant la porte et m'a demandé qui j'étais et qui je venais voir. Quand j'ai donné ton nom elle a semblé savoir qui tu étais et m'a laissé entrer avec elle, puis après je suis monté devant ta porte, et je t'ai attendu. » Je cligne des yeux plusieurs fois de suite en regardant sa mine satisfaite, cherchant peut-être à me réveiller d'un mauvais rêve.

« C'est l'histoire la plus absurde que j'ai jamais entendu. » Je remarque. « T'es arrivé à quelle heure ? »

« Je sais plus trop... quatorze heure ? »

« Quatorze heure ?! » Elle rigole en m'entendant, mais je ne suis pas sûr que j'ai envie de rire, moi. « T'as attendu deux heures devant ma porte ?! »

« Tu voulais que je fasse quoi !? » Elle rit un peu plus quand elle se penche vers moi, déroulant ses mains dans le vide à la recherche d'une réponse.

« Je sais pas ! Mais tu te rends compte un peu ?! » Je passe mes mains dans mes cheveux en réalisant un peu plus l'absurdité de cette situation. Je suppose que c'est là un des points comment entre Willow et Harry, ils sont deux idiots qui prennent des décisions absurdes, que ce soit inviter un étranger en vacances chez soit ou venir à l'improviste chez quelqu'un pour attendre deux heures devant sa porte.

« J'étais là ! J'allais pas bêtement faire demi-tour hein ! » Ricane-t-elle.

« Je rêve, donc ta famille te cherche partout depuis ce matin et t'as ignoré appels et sms assise sur le pas de ma porte ? Je vais faire un infarctus et ce sera à cause de toi. » Je la pointe de mon doigts quand je me lève et elle rit un peu plus fort, parce que de toute évidence c'est la chose la plus drôle du monde de s'enfuir de chez elle à six heure du matin pour prendre un train jusqu'à Londres. Je vais vraiment m'évanouir, cette journée commence à devenir vraiment trop longue.

« Tu dramatises. » Souffle-t-elle.

« Je dramatise rien du tout, jeune fille ! »

« Tu parles comme un daron ! »

« Et je commence à me sentir comme un daron aussi ! » On rigole stupidement à cette conversation et je pousse un long soupir quand je tombe de nouveau assis, cette fois si sur un fauteuil un peu plus loin, le regard droit sur mon invitée.

« Tu m'en veux vraiment d'être venu ? » Me demande-t-elle ensuite, la voix sincèrement apeuré que je dise oui.

« Non.. Je t'en veux d'avoir fait une fugue par contre. J'ai rien contre le fait que tu veuilles venir me voir pour parler, mais quand même... tout le monde s'est fait un soucis monstre pour toi Will... » Elle pince ses lèvres et baisse son regard sur ses genoux, honteuse. « Mais bon... maintenant que c'est fait. » Je frappe dans mes mains et regarde l'heure tourner rapidement et annoncer qu'il est bientôt six heures. « Tu veux qu'on aille se taper un McDo ? J'ai une dalle immonde, je me suis réveillé à midi trente et j'ai rien mangé. » Elle lève son regard vers moi et peint un sourire sur son visage.

« Moi non plus j'ai rien mangé ce midi. » Avoue-t-elle.

« Raison de plus pour y aller alors. Aller, je t'invite. » Je frappe dans mes mains encore une fois et les frotte l'une à l'autre en me relevant presque aussi vite que je me suis assis là en premier lieu. « Comme ça... on peut un peut penser à autre chose, et parler d'autre chose. » Elle pousse un petit rire, rempli d'entrain, et se lève à son tour, pour m'emboîter le pas vers la sortie.

*

« Ta mère vient de me dire qu'elle va m'envoyer de l'argent pour payer pour tes billets de train demain. » Je dis en revenant dans le salon , après avoir récupéré mon téléphone, que j'avais laissé à la cuisine, et lance un regard vers Wilhelmina assise sur le canapé et finissant son soda. Elle me lance un regard par dessus son épaule, acquiesçant, sans rien dire d'autre, d'un simple signe de tête.

Puisque je l'avais laissé ici pour notre viré au McDonald le plus proche, je n'ai pas put vraiment regarder mon téléphone pendant un petit moment, alors je profite de finalement être là pour regarder les notifications que j'aurai put manquer. J'ai un message de Liam, qui me fait sourire puisqu'il me rappelle le plus important à propos de cette journée : il est réveillé. Je n'y répond pas une fois que je l'ai lu et regarde simplement les autres bandeaux blancs, pour finalement trouvé la dernière chose que je m'attendais à voir là, et pourtant ce que j'aurai dû le plus voir venir. J'ai un appel manqué... de Harry.

J'ai envie de me mettre une petite claque pour être sûr de ne pas rêver, mais ce serai un peu bizarre, alors je me contente de retenir mon souffle une demi-seconde et de me dire à moi même de me réveiller. Mais, comme toujours, c'est la réalité. Décidément... cette journée est vraiment beaucoup trop longue et j'ai de plus en plus envie d'aller dormir. Ça commence à devenir beaucoup trop, je m'étais réhabituer à avoir un mode de vie calme et routinier après les jours de calvaire que j'ai vécu au mois d'août, et je n'avais pas envie de si vite me reprendre une journée lourde en émotion dans la figure, surtout si c'est ces émotions .

Je pose mon téléphone sur la table basse et m'accorde une petite pause avant de devoir trop vite me confronter à ce que je ressens à l'idée d'avoir un appel manqué de Harry, alors que l'on ne s'est pas parlé depuis le soir de notre rupture, depuis le matin où j'ai quitté la France et l'ai laissé derrière moi. Je préfère, pour une seconde encore, prétendre que je n'ai rien vu. Je pense qu'il appelle uniquement pour Willow, mais ça n'empêche en rien le fait qu'il est aussi mon ex, et que j'ai encore le cœur brisé et que l'idée d'entendre sa voix à nouveau m'angoisse. Alors je secoue un peu ma tête quand je me redresse, pour oublier, et me tourne vers Willow.

« Je te laisse ma chambre cette nuit. » Dis-je en partant vers ma dite chambre, avec son sac, pour vérifier si elle n'est pas trop en désordre et si je dois un peu mieux la préparer.

« Non, t'embête pas je peux prendre le canapé. » Me dit Willow, derrière moi, me suivant à la trace.

« Soit pas bête, je vais pas te faire dormir sur le canapé, tu prends mon lit c'est très bien, il est grand et ça te donne de l'espace et un peu d'intimité comme ça. » Je me tourne rapidement vers elle, surprenant une moue sur son visage.

« Mais... je m'invite et en plus tu me file ton lit je vais me sentir mal. »

« Fallait y penser avant de fuguer ça, hein ! » Je râle en attrapant les vêtements qui décor mon parquet pour aller les déplacer dans la salle de bain, dans la panière à linges sales, là où ils devraient être depuis le début si je n'étais pas un énorme flemmard.

« Hey... qu'est ce que c'est ça ? » Je fronce mes sourcils, et entend un papier plastique se froisser, et mon sang ne fait qu'un tour alors que je repars en courant.

« Ne touche pas à ça ! » Je cris, un peu plus fort que je ne veux bien l'admettre, en me figeant dans la porte. « C'est... c'est rien. » Je me presse vers elle pour attraper le sac plastique dans ses mains et le fourre dans mon dos pour ne pas qu'elle le voit plus longtemps. « Juste des affaires que je dois jeter. » Elle me regarde d'un air sceptique, ne croyant de toute évidence pas un seul mot de ce honteux mensonge, et je souris. « Je vais te laisser, ok ? Si tu as besoin la salle de bain est un peu plus loin dans le couloir et les toilettes aussi, je serai au salon ok ? Ok. » Je fais un rapide signe de main et sors à la hâte de la chambre, fermant la porte derrière moi et serrant le sac de plastique blanc contre ma poitrine.

Mon cœur bat à toute allure. Je sais très bien que j'avais l'air tout ce qu'il y avait de plus suspect en agissant ainsi, mais je préfère qu'elle se fasse des films à foison au sujet de ce sac que d'admettre, devant elle, que j'ai volé une chemise à Harry. Je l'ai mise là quand j'ai commencé à vouloir remonter la pente, pour ne pas qu'elle m'ensorcelle avec ses pouvoirs magiques à base d'odeur ensorcelante, et je ne comptais pas l'en sortir, mais le destin est toujours contre moi et maintenant elle est dans ma main. Mes yeux restent un instant fixés sur le mur en face de moi alors que je peux jurer sentir le plastique brûler ma paume. C'est comme si j'avais peur de ce qu'il y avait dedans, et c'est peut-être le cas. Cette journée m'a retourné dans tout les sens au sujet de mes sentiments pour Harry et de comment je me sens, et je ne suis pas sûr d'aimer tout ça, d'aimer me dire que je l'aime encore et que j'ai toujours le cœur brisé, qu'un commentaire laissé sur un poste au milieu de la nuit peut me mettre en rogne et en même temps me donner des espoirs étouffants. J'ai peur de me dire que si il revenait, d'un coup, et disait les mots qu'il fallait je pourrais bêtement tout laisser en plan pour lui, une deuxième fois. Ça me fait peur. J'ai peur de l'amour que je lui porte encore, surtout maintenant que je sais que lui aussi regrette ce qui est arrivé ce jour là et tous les mots que l'on s'est craché dessus. J'avais déjà peur avant, mais cette journée a tout empiré.

J'ai peur... peur de l'aimer comme je le fais et de le perdre à nouveau. Peur de l'aimer comme ça et que ça ne serve à rien. Peur de l'aimer et que ça ne mène à rien d'autre que de la douleur, encore et encore. J'ai peur de cette vulnérabilité que j'ai quand il est là, de comment tout s'arrête de tourner si je pense à lui, de tout ce que mon amour pour lui me fait ressentir, de comment je me sens petit et ridicule, vide à l'intérieur, depuis qu'il n'est plus là. Je ne pense pas que ce soit impossible de vivre sans lui, je l'ai déjà dit, mais j'ai toujours ce troue béant en moi, et il me terrifie. Il me rend si fragile, si stupide, un mot de Harry peut me détruire, un mot et je peux m'envoler, un mot et je suis tout à lui, et c'est terrifiant. Parce que si je sais qu'il regrette aussi... qui sait si il ressent la même chose ? Si c'est la même force ? Le même amour ? Je ne veux pas l'aimer aussi fort, je ne veux pas céder en un seul mot, si son amour à lui n'a pas été assez fort pour me regarder dans les yeux et me dire un mot quand c'était la seule chose que je lui demandais.

Notre rupture était peut-être dû à quelque chose de plus fort que nous deux, mais on a toujours nos tords, et je lui en veux toujours pour les siens, et je sais qu'après ce qu'il s'est passé... ce n'est pas à moi de revenir vers lui. Parce que moi j'y ait cru jusqu'au bout, jusqu'au dernier moment, et peut-être même qu'une part de moi y croit encore un peu sous la colère et la douleur, sous le diable et les angoisses. Et lui non. Et c'est terrifiant.

Mon téléphone vibre dans le salon, sur la table. Il attire mon attention. Quand je pose celle-ci sur l'écran, je découvre un appel entrant, et mon cœur remonte dans ma gorge dans une nausée terrible alors que je lis le nom de Harry dessus, juste sous sa photo. C'est une belle photo de lui. Dessus, il sourit. C'est une photo que j'ai prise de lui dans le lit que l'on partageait à Palavas. Il était sous la lumière du soleil et je le trouvais beau, alors je l'ai appelé pour qu'il se tourne vers moi et je l'ai pris en photo. J'avais oublié qu'elle existait. J'avais déjà changé mon fond d'écran pour ne plus avoir à croiser son regard chaque fois que j'allumais mon smartphone, à la place j'avais mis une photo trouvé sur internet. Ça me fait bizarre de me retrouver face à cette photo, à ce moment pour toujours figé en image.

Je pousse un soupir triste, et attrape finalement mon téléphone pour décrocher l'appel. Le silence me répond. J'ai un mot coincé dans la gorge. Je n'arrive pas à le dire. Je crois que si j'ouvre la bouche pour parler mon cœur va sortir et je vais mourir, juste ici, comme un idiot. Alors je reste silencieux, stupide, tenant mon téléphone et mon petit sac plastique, immobile dans la pénombre de la soirée tombant lourdement sur Londres. L'un de nous va, cependant, devoir se décider à dire quelque chose, parce qu'on ne pourra pas rester ainsi sans rien dire pendant une éternité. Même si c'est dur de se parler à nouveau, de se dire quelque chose après tout ça, même alors qu'il s'agit de mots qui n'ont rien à voir avec nous même.

« Hey. » Je dis finalement, trouvant quelque part au fond de moi la force nécessaire pour forcer l'air par delà mes corde vocal sans mourir, mais pas assez fort pour être sûr de l'avoir vraiment fait, comptant sur le silence autour de moi pour engouffrer les mots en lui.

« Hey. » Me répond-il.

Mes genoux sont faible. C'est sa voix. C'est vraiment sa voix. C'est lui. Et j'ai l'impression que ça fait des centaines de millénaire que je ne l'avais pas entendu. C'est vraiment lui. J'ai l'impression d'avoir attendu ce moment pendant trois vies entières, et d'être mort une dizaine de fois en une fraction de seconde en l'entendant. Je crois que je vais pleurer. Peut-être pas tout de suite, peut-être que les larmes essaieront de me surprendre plus tard, mais je crois que je vais pleurer. Je vais m'effondrer. Il me parle. C'est sa voix, je l'entend et si je ferme les yeux je peux presque prétendre qu'il est juste là.

« Hum.. ma... ma sœur est chez toi, apparemment. » Souffle-t-il ensuite, précisant l'objet de son appel, alors que je hoche la tête, pressant ma paume sur ma bouche pour ne pas risquer de sangloter et me ridiculiser. Je suis supposé être en train de passer à autre chose.

« Ouais. » Je dis, et ma voix sonne creuse et vide, résonnant sans volonté dans ma gorge alors que je me sens glisser hors du réel. « Elle est arrivé tout à l'heure. Je l'ai trouvé devant ma porte. »

« Elle va... bien ? » J'aimerai tellement que la question ne soit pas que pour elle.

« Ouais. » Je dis simplement. « Elle... elle était assez secoué. » Il pousse un lourd soupir et je peux jurer sentir le souffle contre ma joue alors que doucement mes jambes lâchent prise, me faisant me retrouver à genoux sur le sol petit-à-petit.

« J'imagine oui... c'est ma faute. » Je déteste mon cœur de réagir ainsi, de soudain se mettre en alerte, et de forcer tout mon corps à se tendre.

« Non. Dis pas ça. C'est pas ta faute. Tout ça ne serait même pas arrivé en premier lieu si tes parents avaient mieux agis. » Je me déteste de céder si facilement à mes pulsions, à mon besoin de le rassurer et d'être là pour lui, je me déteste d'être si faible pour lui et qu'en un quart de seconde je dise des choses comme ça sans réfléchir, lançant un froid sur notre conversation.

« C'est... oui... oui t'as raison. » Admet-il, pour une fois. « T'as toujours raison, t'as toujours eu raison. Sur toute la ligne. » Mon cœur se compresse. Je sais très bien à quoi il fait référence.

« Pourquoi tu m'as pas appelé ? J'aurai put t'aider moi aussi. » J'ai envie de pleurer, j'ai envie de me baffer. Je suis pitoyable, je suis pathétique, je devrais avoir honte de dire des choses pareilles, je devrais avoir honte de lui demander quelque chose comme ça. C'est exactement pour ça que j'ai peur de mes sentiments, il me rende désespéré. Je veux son amour, si fort, si douloureusement, que je dis des choses stupides et ridicules dans des situation insensé et je me hais.

« Je... » Il racle sa gorge, mal à l'aise, et un frisson remonte dans mon dos. « Je pouvais pas, ça aurait été déplacé de ma part. Tu as retrouvé ta vie et tes amis et... Ta fiancée et... je pouvais pas m'imposer. » Je déglutit pour essayer de faire passer la sensation que j'ai une pierre dans la gorge, mais ça ne fait qu'empirer la chose.

« Ma fiancée ?.. Eleanor- elle... je-... on est plus fiancés, depuis que mon père a essayer de me tuer. » Je fronce mes sourcils. « Et puis... nos fiançailles étaient arrangées depuis notre enfance alors bon.. Tu as regardé mon Instagram ? » Il rit jaune une seconde, et je crois que c'est à ce moment que les larmes commencent à venir.

« Oui.. » Souffle-t-il sur un ton amusé et honteux, et mon cœur flotte sur un nuage alors qu'il s'emballe un peu plus, alors que je réalise un peu plus que tout ça l'a touché aussi, que ce n'était pas des mots en l'air de la part de Émilie ou Wilhelmina. Je ne devrais pas laisser ça compter autant, et pourtant je laisse faire, je me conforte dans ce sentiment bizarre de me sentir toujours important pour lui. « Je pensais que tu le savais... »

« Non... »

« Bah... tu le sais maintenant. Je regardais ton Instagram. » Son ton est lent et calme, je peux presque l'imaginer allongé dans son lit, Brat à ses côtés, sous la lumière tamisé qui nous ont vu faire l'amour la première fois. « Et tu avais l'air... bien ? Alors je ne voulais pas déranger, et puis... ça aurait été vraiment... bizarre, non ? » Je rougis un peu.

« Hum.. oui... oui je suppose. » Je tousse doucement, essayant de fuir sur place.

« Et tu... tu vas bien ? » Je sens une douleur remonter dans ma gorge, c'est une douleur piquante qui se coince sous mes amygdale, signe assez clair que je suis à deux doigts de pleurer à la simple idée qu'il soit sincèrement en train de me demander des nouvelles.

« Oui. » Je réponds, la voix un peu trop basse, et un peu trop entravé pour paraître sincère. « Et toi je... j'ai entendu que tu... cherchais quoi faire ensuite ? » Je force un sourire, alors que j'essaie de changer de sujet, pour ne pas qu'il relève mon mensonge, qu'il pose plus de questions et me force à m'effondrer et avouer que je veux le retrouver, que je suis misérable sans son amour et que je fais de mon mieux pour vivre avec mais que c'est la chose la plus dur de je n'ai jamais eu à faire.

« Oui, en effet. Je... j'ai des plans pour le futur. » Dit-il, la voix un peu plus forte et sûr d'elle pour une raison ou une autre.

« Oh. » Je force un sourire et baisse les yeux vers mes genoux, mais tout est flou. Moi aussi j'ai des plans, alors pourquoi ça me fait si bizarrement mal de l'entendre dire ça ?

« Ils t'incluent, ces plans, Louis. » Je retiens mon souffle et un silence se déroule alors.

Le mots résonnent dans ma tête et ma respiration s'alourdit. Ils m'incluent. Ça non plus ça ne devrait pas faire mal, j'ai toujours rêvé qu'il me dise quelque chose comme ça, alors pourquoi j'ai si mal au cœur ?Pourquoi j'ai tant l'impression qu'on m'arrache la colonne vertébrale une vertèbre après l'autre et qu'on se joue de ma peine ? Pourquoi est-ce que j'ai mal quoi qu'il dise, pourquoi est-ce que j'ai peur quoi qu'il dise ? Qu'est ce que je veux ? Qu'est ce que j'attends ?

« Quoi ? » Je ne peux pas retenir ma voix, faible et à moitié muette, de trembler, mes doigts de se serrer sur leurs prises respectives, froissant le plastique dans un son assourdissant et irritant, mon cœur de se compresser et mon sang de se figer. « Comment ça ? » J'ai l'impression que le silence m'assourdit, et qu'en même temps il m'engloutit dans un néant opaque et infini qui m'aveugle. J'ai peur. J'ai tellement peur.

« Je devrais pas te dire ça... » Regrette-t-il aussi sec.

« Non ! Enfin si ! Enfin... » Je renifle bruyamment.

« Tu.. est-ce que tu pleures ? »

« Qu'est ce que tu crois pauvre con ? » Je renifle une nouvelle fois et soudain un sanglot m'échappe et c'est le début de la fin. « Bien sûr que je pleure ! J'ai pas entendu parlé de toi pendant un mois et tu sors de nul part pour me dire ça ? » Je ne suis pas sûr de savoir pourquoi je pleure. Suis-je en colère ou heureux ? Suis-je triste ou fatigué ? Je ne sais pas vraiment, même mon ton, vide comme le vent, n'apporte pas plus de précision. « J'ai passé un mois à essayer de me reconstruire Harry, j'ai des projets moi aussi et tu ne peux pas juste- »

« Je sais. » Me coupe-t-il. « Je sais que tu as fais tout ça. Lucas m'en a vaguement parlé. Mais je ne te demande rien, ni maintenant ni même après. » Assure-t-il. « De toute façon c'est encore trop tôt... mais je viendrai te récupérer, je ne vais pas te demander de tout abandonner pour moi, mais je vais te demander de m'épouser. » Un frisson remonte dans mon bras et un sanglot m'échappe à nouveau.

J'en ai assez. J'en ai assez de lui et cette conversation. Comme ose-t-il ? Comment ose-t-il me dire ça ? Maintenant de tout moment ? Alors qu'il y a un mois j'aurai vendu mon âme pour lui passer la bague au doigt. Comment ose-t-il me faire ça ? Me dire ça ? Comme ça ? Quel genre de cruauté faut-il avoir pour revenir de nul part, d'un seul coup, avec un stupide commentaire et un banal 'je te demanderai de m'épouser', à quelqu'un qu'on a laissé partir, sans se battre. Si il était si sûr de lui pourquoi est-ce que tout s'est fini comme ça et pourquoi il revient pour me faire ça, pourquoi il revient pour me dire ça. Pense-t-il me préparer ? Pense-t-il me faire du bien ? Me faire plaisir ?

« Harry. » J'en ai assez de pleurer. « Tu sais... que tu ne vas pas tout régler avec ça ? Tu sais que... j'ai attendu une seule chose le jour où je suis partit et que tu n'as pas sût me le donner... alors tu sais aussi... que si je te met une veste tu ne pourras pas m'en vouloir. » Je pleure avec douleur au milieu de mes mots, hoquetant et reprenant mon souffle en devant me battre contre mes poumons, contre mon corps qui ne demande qu'à s'effondrer et à attendre le sommeil. En réponse, il rit un peu nerveusement, mais c'est pour cacher un sanglot, que je sens très facilement derrière son calme trompeur.

« Je sais. » Dit-il, le cœur gros dans la voix. « Je sais aussi qu'on a beaucoup de chose à se dire, de toute façon. Alors voilà, je te préviens que je vais revenir, pour toi, pour qu'on parle, qu'on se dise tout ce qu'on a se dire, et pour te demander de m'épouser. » Il n'a pas le droit de sonner si sûr de lui alors qu'on pleure tous les deux parce qu'on sait qu'on souffre trop pour ça.

« Arrête de répéter ça. » Les mots aboutissent sur un sanglot et je peste pour moi même. Moi qui pensais que j'avais fini de pleurer pour lui... j'avais bien tord.

« Non. Parce que j'en ai envie. Je veux t'épouser. Alors prépare toi, simplement. » Souffle-t-il d'une voix bien trop douce.

« Je te déteste. » Je marmonne à voix basse en poussant une larme sur le côté mais ne pouvant pas balayer les autres.

« Je sais. » Souffle-t-il, si doucement que ça ressemble à une caresse qu'il laisserai sur ma tête alors que l'on est allongé l'un à côté de l'autre. « Moi aussi je te déteste. » Un rire ironique froisse le micro de son téléphone et je prends un inspiration.

« Je te déteste fort ! Si fort ! » Je crache avec colère... puis je raccroche.

Je le déteste. C'est vrai. C'est la vérité. Je le déteste, je le déteste. Je le hais, plus fort que tout, plus fort que je n'ai jamais détesté quelqu'un avant. Je le déteste. Je veux le baffer, je veux lui dire d'aller se faire foutre, je veux lui dire de me laisser tranquille, je veux lui dire de me ficher la paix. Mon cœur n'a pas besoin de battre si fort, je n'ai pas besoin de me sentir ainsi, je n'ai pas besoin d'exploser en sanglot pour ça, comme un con, à genoux au milieu du salon, dans le noir. Je n'ai pas besoin de plus d'espoirs. Qu'il la pose sa question je vais l'envoyer au diable, encore une fois, et surtout pour de bon.

« Me demander de l'épouser. » Je répète à voix haute en m'approchant du canapé pour m'allonger dessus. « Et puis quoi encore ? » Je serre le sac plastique contre ma poitrine et je pleure, j'attrape la chemise et je la tire contre moi, contre mon visage, pour sentir son odeur et me confondre dedans. Je suis pitoyable. Je peux dire et redire ce que je veux, je sais que je mens.

Je l'aime. C'est ça la vérité. Je l'aime. Je l'aime plus fort que tout, et plus fort que je n'ai jamais aimé quelqu'un avant. Je l'aime. Je veux le voir, je veux lui dire de ne plus jamais me laisser partir, je veux lui dire de ne plus jamais me faire douter de son amour pour moi, je veux lui dire oui. Mon cœur souffre sans lui, dans ce vide qu'il a laissé, avec lui tout est facile et simple, tout a un sens et je me sens bien, et oui ça en est au point où je pleure, comme un idiot, en boule sur mon canapé en m'accrochant à son odeur et aux espoirs absurdes qu'il m'offre à nouveau. S'il pose sa question, je sais que je n'aurai pas la force de l'envoyer au diable, et encore moins pour de bon.

Je pensais qu'il était une erreur de parcours, que je m'étais trompé, qu'on s'était trompé, mais finalement non, les seules erreurs qu'on a commis était de partir et de me laisser faire. Harry ne peut pas être une erreur de parcours sur ma route, parce que ça n'a simplement aucun sens. Pourquoi tout serait si simple avec lui si il n'est pas celui que l'univers voulait pour moi ? Pourquoi tout semblerait si naturel et normal quand je suis dans ses bras ? Pourquoi tout serai si juste quand on fait l'amour et qu'il me serre dans ses bras comme si j'étais la seule chose qui comptait ? Qui pourrait prétendre aussi bien s'entendre avec moi, avec mon âme, avec mon corps ? Qui pourrait prétendre m'être plus assortit ? Qui pourrait me mettre dans tout mes états avec un simple mots ? Qu'importe ce qu'est une âme-sœur, Harry comble toutes les définitions et il les a toujours comblés.

Mais est-ce que moi je comble ses définitions ? Et est-ce que ce sera assez pour qu'on retrouve tout ce qu'on avait sans le moindre problème ? Est-ce que je veux retrouver tout ça ? Est-ce que je vais avoir la force de le pardonner comme lui semble l'avoir fait ? Est-ce que je veux risquer de le perdre à nouveau ?






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J'ai mis beaucoup moins de temps à écrire ce chapitre ! C'est peut être parce que Harry est un peu de retour hehe !

Ahaha je crois que, du peu que j'ai vu, personne s'attendait à voir Willow devant la porte. Beaucoup de gens pensait que ce serai le père de Louis ou carrément Niall ! 😂 Et non, c'était Willow ✨

J'espère que, même si ce n'était pas Harry devant la porte, ce chapitre vous aura plut et apporté un peu de réconfort pour Lou et H ! J'ai eu bcp d'émotions en écrivant leur conversation alors j'espère les avoir bien communiqué. ❤️✨

Jvous embrasse ✨
Joëlla.

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