Chapitre 4 : Le début de l'aventure
Ma gorge est sèche. Elle me fait mal. Il y a une main dans la mienne et quand j'ouvre les yeux c'est sans la moindre surprise que je trouve Liam au pied de mon lit. C'est lui qui tient ma main gentiment, et ses yeux me regardent avec un air inquiet alors qu'un petit sourire barre ses lèvres épaisses. Comme toujours il s'angoisse pour moi, mais qui suis-je pour le blâmer ? Moi aussi j'aurais paniqué si j'avais reçu un appel de l'hôpital au milieu de la nuit disant qu'il était blessé et qu'il voulait me voir. Moi aussi je serais venu à la première heures le lendemain pour être sûr qu'il va bien.
Son autre main vient vers mon visage, et lentement il pousse une mèche de mon visage. Ses doigts sont tendres le long de mon visage, alors qu'il redessine des traits que je dois porter. Je n'ai aucune idée de l'état dans lequel je peux être. Hier les médecins ont fait le nécessaire et m'ont directement placé en observation pour je ne sais combien de temps. J'ai put un peu me débarbouiller mais pas complètement, alors je pense que je dois avoir du sang sécher ça et là, et peut-être un bleu. Mais il ne dit rien, et garde son sourire.
« Tu vas bien ? » Chuchote-t-il. Et je devine les heures d'angoisses qu'il a passé par ma faute, l'attente avant d'enfin me voir, je les entends dans sa voix. « Les médecins étaient incapable de me dire ce qu'il s'était passé. » Sa voix est toute douce, elle me berce et entre droit dans mon cœur. Je serre mes doigts sur les siens et souris du mieux que je le peux. « Ils m'ont juste dis que tu étais hors de danger, que tu avais eu de la chance. La coupure était vraiment profonde, il y avait un gros morceau de verre dedans. » Je pince mes lèvres et baisse mon regard vers mon bras.
Il est enroulé dans un bandage, il semble propre, mais je ne sais pas exactement où est la plaie sur ma peau, il y avait tellement de sang, je sais qu'il déchire un de mes tatouages cependant. Ma tête s'enfonce dans mon oreiller derrière moi et tourne pour que je fixe ce plafond blanc et stérile. La lumière est blanche, je peux presque entendre le néon grésiller dans le silence, j'ai mal à la tête.
« Que s'est-il passé Louis ? » La voix de Liam est douce, elle est aussi forte qu'un murmure et elle me fait du bien, comme un gant imbibé d'eau chaude sur ma peau froide.
« Mon père m'a frappé. Et je suis tombé sur mon verre. » Il ne répond pas, je pense qu'il encaisse.
Mon père n'avait jamais une fois levé la main sur moi auparavant, il ne m'a jamais tapé une fois. Je me suis déjà battu je crois, enfant, au collège, je me suis déjà battu au point d'avoir des bleus, mais jamais pourtant ça n'a fait aussi mal que ce coup là. Que la baffe de mon père. Il ne m'a jamais frappé de ma vie, et par delà la douleur qui accable mon visage, je me sens heurté dans mon âme, ma dignité. Moi, son fils, il m'a frappé. Ça fait mal de se dire de tels mots.
Liam reste silencieux encore un peu. Je ne sais pas ce qu'il pense. Sûrement que c'est trop, sûrement regrette-t-il que j'ai pris cette décision de leur en parler quand ça m'a clairement coûté une grave blessure et un traumatisme de plus sur la liste que m'ont donné mes parents. Je ne sais pas ce que je dois faire maintenant. Faire un coming-out était comme une tâche importante à accomplir pour moi, elle l'a toujours été même quand je n'y pensais pas sérieusement. C'est comme si j'avais longuement préparé quelque chose qui été finalement arrivé, je n'ai plus rien à faire maintenant. Je n'ai même plus envie de pleurer.
« Je sais... que tu te dis que j'aurais pas dû faire ça. » Je ne le regarde pas, je fixe le bout du lit et mes vêtements, tâchés et fichus, pliés sur le meuble à côté du fauteuil sur lequel Liam a étalé sa veste en entrant.
« Non, non.. ce n'est pas ta faute. Tu as bien fais de le faire, c'est lui qui n'aurait pas dû faire ça... » Il soupire. « J'suis désolé Louis, tu mérites pas ça. »
« Je sais. » Je tourne mon sourire le plus sincère vers lui, et il y répond avec le sien, mais je vois bien que c'est un sourire triste qui remonte le bord de ses lèvres. Il y a sûrement de quoi.
« Tu sors dans l'après midi je crois. » Dit-il pour changer de sujet.
Je hoche la tête. Le vent souffle contre la fenêtre, il tente de siffler comme un fantôme mais les fenêtres sont trop épaisses et le son est minuscule, ça me donne l'impression d'être en sécurité. Je me sens bien. Je me sens mieux que la veille.
Je réalise avoir pensé des choses terrifiantes la veille, allongé dans l'herbe. Comme un délire avant la mort. J'ai pensé à des choses auxquelles jamais je n'aurais pensé avant. La mort si proche c'est comme si je n'avais rien voulu d'autre, alors qu'avec le recule, maintenant, je sais que je ne veux pas mourir. Mais tout semblait tellement plus difficile hier soir, respirer était difficile. Vivre était difficile. Et la mort était juste là, réconfortante.. accueillante.
« Louis.. je sais... que les émotions et tout ça c'est... assez privé pour toi, mais... est-ce que ça va ? Avec ce coming-out ? Tes parents ? » Je me tourne vers lui. Il a raison, c'est très privé pour moi.
Mes sentiments, ce que je ressens, j'arrive toujours à les garder pour moi, pour les analyser seul et les contempler. Je crois que de l'extérieur c'est assez difficile de deviner ce que je peux ressentir à moins que ce soit évident. Liam, je crois, avec le temps, à fini par détecter les micro signaux pour reconnaître comment je me sens. Ce n'est point question que je me retienne ou cache ce que je ressens, je crois que je suis simplement très inexpressif, privé et secret quand il s'agit de chose douloureuse. Et que je me sens mieux si je dois y faire face par moi même, bien alors que je réalise que parfois c'est bien de demander de l'aide.
« Ça va, je crois. » Mes mots tombent dans un long souffle et ma tête dodeline à nouveau. « J'ai mal mais je crois... je crois qu'une part de moi est soulagé que ce soit passé. »
« Vraiment ? »
« Ouais. » Je racle ma gorge. « Mon père va sûrement.. me couper les vivres et tout ça, mais.. ça va. J'aimerai juste.. » Il hausse un sourcil et sa main serre un peu plus fort la mienne. « J'aimerai juste savoir ce que je dois faire maintenant. » Il sourit, c'est rassurant. Je l'aime beaucoup. « A... après tout j'ai toujours fais ce que je devais faire et maintenant que j'ai laissé tomber mes dernières prises je me retrouve à tomber dans le vide... et je ne sais pas ce que je dois faire. Où devrais-je aller ? Est-ce que je veux continuer cette vie telle qu'elle est ? Est-ce que je dois reprendre des études ? Déménager ? » Il pousse un petit rire hors de ses lèvres, il sort comme un petit gloussement, et penche sa tête sur le côté dans un signe de tendresse.
« Tu sais.. » Il se lève pour changer de place, choisissant celle sur le lit. Je me décale en silence et le laisse s'allonger. « Il n'y a que toi qui a les réponses à cela. Parce que, justement, plus personne n'est là pour te mettre la pression, ce n'est... plus que toi. Alors.. fais ce que tu veux. » Sa main s'enfonce dans mes cheveux et il sourit encore, un sourire qui rayonne. « Plus personne ne peut dicter ta vie pour toi Louis. C'est fini. »
J'ai découvert la veille que les mots pouvait faire mal. Aujourd'hui en face de Liam, je réalise qu'ils peuvent aussi faire du bien. Parce que c'est ce qu'il se passe. C'est fini. Les mots s'écrasent sur mon cœur et le recouvre d'un manteau de chaleur, de bien être. Ma gorge se serre une nouvelle fois en moins de vingt-quatre heures. C'est beaucoup de larmes, mais celles-ci ne sont pas de peine.
« Oui. » Je répond simplement, les lettres sont à moitié retenu dans mon bonheur étouffant et Liam le voit, et il sourit un peu plus fort. Sûrement que lui aussi voyait bien ce que je vivais depuis des années, caché, emprisonné de façon invisible, sans murs physique autour de moi, bien qu'ils fussent pourtant bien là. Et là, d'un seul coup, avec cette ultime attaque envers cette cage invisible, ils se sont effacés sous mes pieds et autour de moi, et c'est un nouveau monde qui s'offre à moi. Où vais-je aller ? Que vais-je faire ? Quels sont mes buts ? Toutes ces questions ne sont que des mystères. Et un mystère.. c'est une aventure qui ne demande qu'à être vécu.
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