Chapitre 22 : Devenir une chanson pour l'oasis
Les cigales sont bruyantes dehors, toute la journée, du matin au soir, tant que le soleil est dans le ciel elles chantent. On s'y habitue assez vite, si bien que ça peut facilement devenir un bête bruit de fond servant de décors à une journée banale. On s'y habitue tellement que si ça vient à s'arrêter on se dit que finalement, le silence nous avait un peu manqué sans qu'on ne le réalise vraiment. Ce n'est pas pour autant gênant, ou même irritant. Pas à mes yeux du moins.
De toute façon, ce ne sera jamais aussi agaçant que Liam qui se fout de ma gueule depuis dix minutes sur notre appel vidéo.
« T'as intérêt à ne pas revenir de si tôt de ta tournée si tu ne veux pas que je te pète la gueule. »
Je le fixe avec colère, pliant mon visage dans une grimace de mépris alors qu'il rit sans s'arrêter en me regardant. Oui je suis tout rouge et oui je pèle, mais ce n'est pas une invitation à la moquerie. Je me sens déjà bien assez mal de ne pas pouvoir bouger le moindre muscle sans que ma peau carbonisé ne me fasse mal pour ne pas qu'il en rajoute une couche en riant de mon malheur.
« Désolé mais.. C'était pas faute de t'avoir prévenu ! » Se moque un peu plus mon prétendu meilleur ami.
« Je vais te raccrocher au nez tu rigoleras moins. » Je hausse mes sourcils en pointant mon index vers lui, l'air de lui dire de bien faire attention à lui.
« Ok ok désolé ! » Il montre ses paumes avec innocence et je me tourne vers Brat. Il me regarde depuis le sol de la chambre, allongé entre mes affaires éparpillées et haletant.
Il s'est vite habitué à moi de toute évidence. Lui qui ne lâche pas Harry d'une semelle quand il ne court pas après des lièvres passe maintenant pas mal de temps avec moi quand son maître travail. Comme maintenant. Harry était penché sur son travail toute la mâtiné, il a même fini par partir à un moment donné pour aller voir quelqu'un du domaine qui avait besoin de lui. Je n'ai pas beaucoup d'idée de tout ce qu'il fait de ces journées de travail, pourquoi il s'y penche tant dessus. Si son père a aussi une part du domaine ce serai logique qu'ils se partagent les tâches, mais Harry reste stressé comme si il était le seul au sommet de ce vignoble. Il est toujours penché sur les comptes, sur les entrepôts de vieillissement, toujours en train de vérifier si les vignes vont bien. Il est souvent au téléphone avec des clients ou occupé avec Lucas et leurs publicités. Comme si il avait tous les jours des milliers de chose à faire.
« Louis ? Tu m'écoutes pas du tout. » Je sursaute quand la voix grésillante de Liam m'appelle, et me tourne vers lui.
« Oh désolé, je.. je suis un peu ailleurs en ce moment. »
En ce moment. Ce moment dure depuis l'autre soir à la fête foraine. Depuis la descente de cette grande roue. Harry m'a offert une pomme d'amour après ça, parce que de toute évidence c'est trop lui demander d'arrêter ne serai-ce qu'un instant de vouloir me donner tout ce que je semble vouloir. Elle était très bonne cette pomme d'amour, et je ne peux pas nier que je me suis sentit comme le héro d'une comédie romantique. Il faisait nuit et sombre, et je mangeais une pomme d'amour avec Harry, sous la lumière aveuglante des manèges. On a marché un petit moment dans la ville à moitié endormie, avec nos deux grosses peluches, et pendant cette balade remplie de murmure inintéressants ma vie n'avait plus la même valeur à mes yeux. Elle en avait bien plus.
« Comment ça ailleurs ? »
Je baisse mon regard vers mes genoux sur le lit, puis le tourne vers le gros panda orange assis sur le petit balcon de ma chambre, tourné vers moi avec ses grand yeux noirs. Je pince mes lèvres et mes poings se serrent. J'ai l'impression qu'elle me juge, cette peluche, sans que je ne sache pour quoi. Peut-être sait-elle ce que j'ai ressentie ce soir là, peut-être sait-elle aussi que ce n'est pas une bonne chose et que je ne devrais pas laisser ces sentiments s'installer définitivement.
« Ailleurs... »
« Y-a-t-il quelque chose que tu voudrais dire Louis ? »
Je lève mes yeux vers lui. Son visage est préoccupé par mon comportement et je force un sourire. Il hausse ses sourcils quand il voit que je ne réponds pas et je souris un peu plus en l'observant.
Ce brave Liam m'a appelé à la première heure ce matin, je ne suis pas tout à fait sûr de l'heure qu'il est en ce moment là où il est mais lui est dans un lit, et a sa tête du réveil. Ça m'amuse d'imaginer que je suis la première chose, ou presque, à laquelle il a pensée en se réveillant.
« Louis, je rigole pas moi. C'est grave ? »
Bien sûr qu'il pense au pire. Ça ne m'étonne pas. Il pense toujours d'abord au pire avec tout de toute façon, il est une personne étonnement plus pessimiste qu'on ne le penserai. Ça ne m'étonne pas non plus parce que je sors d'un événement traumatisant. Depuis que je suis ici, avec Harry, cependant, j'ai beaucoup tendance à l'oublier.
« Non, non bien sûr ce n'est rien de grave. » Je mordille ma lèvre. « Enfin, ça dépend de quelle perspective tu décides de voir la chose. »
« Ok, t'es obligé de me dire maintenant. » Il secoue la tête, catégorique, et je pouffe gentiment.
« D'accord... » Je souffle lentement et lance un regard nerveux vers la porte, par peur d'être entendu ou épié, sûrement. « Je... »
Me l'avouer à moi même était une chose. L'avouer à voix haute, même à la personne que j'aime le plus sur terre et qui a toujours étais non seulement de mon côté, mais aussi toujours derrière moi, ça reste une toute autre chose. Les mots sont juste là dans le fond de ma gorge, brûlant mon gosier avec acidité parce que les dire paraît bien trop difficile. J'ai l'impression que la seule façon qui s'offre à moi pour les faire sortir serai de vomir, ici et maintenant.
Les dire les rendrait réel et si je veux les étouffer je ne peux pas les rendre réel. Toutefois, cette petit voix contradictoire dans les tréfonds de mon cœur me susurre que j'ai envie de les dire. Je ne suis pas tombé amoureux depuis un petit moment, et cette euphorie de se sentir tout léger a envie d'être vécu, je le sens, je le sais.
C'est pour ça que je déteste cette situation.
« Je crois que je tombe amoureux de Harry. »
Avant même que je n'arrive à les retenir, les mots sont déjà dehors et un silence s'effondre sur nous dans un fracas immonde. J'ai le vertige de nouveau, je tombe de nouveau. Je me sens tout étourdi et j'ai envie de vomir alors que le silence m'arrache les oreilles par son agressivité. Je m'essouffle en réalisant que je viens de le dire et je lève les yeux vers Liam. Il me regarde à travers son propre écran et je vois la surprise sur ses traits, dans ses yeux, dans la forme de sa bouche entre-ouverte.
Il cligne des yeux dans cette moitié d'incompréhension et je coupe ma respiration un instant, comme si ça allait me permettre de disparaître et d'ainsi pouvoir échapper au moment où il me dira que ce n'est pas une bonne chose. Parce que je sais déjà que ce n'est pas une bonne chose et je n'ai pas envie qu'il me le confirme, parce qu'un part de moi espère encore que ce soit bon.
« Louis... » Souffle-t-il. « Je... je sais pas quoi te dire. » Il hausse de ses épaules et je hoche la tête. « Tu l'as sûrement pas demandé, mais.. fin... »
« C'est pas le moment, je sais. Pas plus que ce n'est la bonne personne ! » Je secoue la tête rapidement en mordant ma lèvre. « Il n'est même pas mon genre de mec alors je sais même pas ce qu'il se passe. » J'attrape ma tête à deux mains, ramenant mes jambes vers moi sur le lit pour coucher ma tête dans mes genoux.
« Tu t'es peut-être juste attaché à lui comme ça. Genre.. » Il marque une courte pause pour chercher ses mots et mon cœur se compresse lentement. « Tu savais clairement pas où t'allais, t'as failli mourir, t'avais tout perdu... et ce mec sort de nul part et t'emmène dans sa valise avec lui à l'autre bout de l'Europe... tu t'es peut-être juste attaché à lui parce qu'il est arrivé au bon moment ? »
Je redresse la tête. Je me suis dit exactement la même chose. Je sais qu'il y a une part de vérité là dedans, que c'est ce qu'il s'est passé, que Harry est arrivé quand j'en avais besoin. J'ai utilisé ça comme excuse pour mes sentiments. Mais ce n'est, en effet, qu'une partie du réel. La pression sous ma cage thoracique me dit avec une grande aisance que ce n'est pas que ça, et que, pire, je suis blessé que je puisse pensé que je suis bêtement reconnaissant envers lui. Je me suis dis à moi même que je l'aimais comme un sauveur, comme un oasis dans un désert ou une chanson qui mettrait, pour moi, des mots sur mes sentiments, et je sais que c'est vrai, que je le vois comme ça, mais je sais aussi que je voudrais être sa chanson à lui. Je veux être son oasis. Je veux être important pour lui. Je veux marquer sa vie.
Je sais aussi que je l'aime comme un oasis que je n'ai aucune raison de laisser. Je ne veux pas juste me reposer et reprendre des forces autour de cette étendue d'eau. Je veux m'y établir. Je veux m'y installer, je veux le découvrir et connaître chacun de ses recoins, je veux dormir sur le sable et chanter sa chanson au coin d'un petit feu, y construire une maison. Je veux que cet oasis devienne chez moi.
Je veux connaître chaque son de cette chanson, toute sa mélodie et tous ses couplets, chaque chœurs et harmonies. Je veux me souvenir de chaque inspiration dans chaque mots, des secondes exactes à laquelle une phrase vient. Je veux connaître son sens cachée et sa signification.
J'aime Harry comme un oasis que je ne veux plus quitter.
« Non Liam... je crois que je tombe vraiment amoureux de lui. » Mes yeux s'égarent et je sens une boule grossir dans ma gorge. De l'émotion, mais laquelle. « Et je sais pas quoi faire.. je veux pas de ça, c'est pas le moment pour moi, je veux vivre pour moi et par moi-même, j'ai besoin de faire tellement de chose avant de penser à ça à nouveau, et puis je sais même pas si Harry aime les garçons, je crois que non... et je me suis toujours promis de jamais laisser un garçon hétéro me rendre dans un tel état, parce que c'est pas bien, ni pour moi ni pour lui, ni pour notre amitié et- »
« Ok ok.. doucement chut, oh ! » Il secoue sa main devant la caméra et je serre mes lèvres. « Seigneur dieu c'est si rare qu'autant de mots sortent de ta bouche comme ça d'un coup. » Rit-il gentiment.
« Je vais t'arracher les couilles. »
« Non mais... vraiment, doucement, calme toi. Tu y penses beaucoup trop. Et puis de toute façon ça arrive très souvent de tomber amoureux d'un ami, même chez les hétéros, alors si ça le gêne plus que si c'était une de ses amies filles c'est juste qu'il est homophobe. » Il hausse ses épaules. « C'est aussi simple que ça... alors arrête de t'incriminer parce que t'es gay je pense pas qu'une amie à Harry s'en voudrai de tomber amoureuse de lui. » Mon souffle se coupe, de surprise cette fois.
Madeleine. Madeleine est amoureuse de Harry. Tout le monde le sait, sauf peut-être Harry. Et pourtant elle ne culpabilise pas comme moi, même alors qu'elle n'est aussi qu'une amie à lui. Alors pourquoi je devrais culpabiliser alors que je suis bien loin d'autant m'imposer à lui qu'elle ? Il n'a pas tord dans ce qu'il dit, si ce devait être une erreur de tomber sous son charme il devrait juste être désolé de ne pas pouvoir m'aimer pareil, et pas être dégoutté parce que je suis un garçon, non ?
Il est rare que je me prenne de plein fouet mon homophobie internalisée, mais elle me claque fort aujourd'hui. Je suis le seul à vraiment souffrir si je tombe amoureux d'un garçon hétéro, pas lui, pas l'autre. Cette homophobie qui existe depuis toujours, qui nous incrimine de tomber amoureux, elle s'est imprégnée en moi et ancrée dans ma façon d'agir. Elle m'a fait croire que si je tombais amoureux d'un garçon hétéro ce n'était pas dommage pour moi, mais pour lui. Pourquoi je devrais avoir plus peur qu'une fille d'aimer un garçon, je devrais pouvoir le vivre aussi simplement jusqu'à ce que, pour une raison simple, cette amour n'aboutisse pas, que ce soit parce qu'il ne m'aime pas pareil ou parce qu'il n'aime pas les garçons. Je ne devrais pas avoir l'impression de commettre un crime ou de heurter ce garçon.
« Louis... » Je lève mon regard vers Liam à nouveau. « Je sais que ce serai con de tomber amoureux d'un hétéro, mais c'est pas grave et c'est pas ta faute. Bien sûr que ça fait souffrir, mais ce n'est pas de le blesser lui parce qu'il est un garçon qui doit te heurter, c'est de tomber amoureux de quelqu'un que tu ne peux pas atteindre qui fait mal, c'est tout. » Il a l'air si bienveillant et je ne sais pas quand est-ce que l'univers a décidé que je méritais une telle personne dans ma vie, mais je lui suis reconnaissant qu'il me juge apte à recevoir cet amour. « C'est tout ce qui importe... tu ne sais pas si il aime les garçons... ça fait peur de te dire qu'il ne pourra peut-être jamais t'aimer de la même façon... Ce n'est pas le bon moment pour toi et ça fait peur que ce soit en train d'arriver. C'est tout ce qui fait mal, rien d'autre. » Je hoche la tête, déglutissant ma peine.
« Je voudrai que ce ne soit pas en train d'arriver. »
« Je sais. » Répond-il. « Et si c'est pourtant bien en train d'arriver... eh bien tu ne peux rien y faire.. Je suis désolé que les choses se passe comme ça... je sais que ce n'est pas ce que tu veux. » Sa voix est lente et réconfortante, et je soupire longuement. « Bon.. je vais devoir te laisser ok ? On se rappelle bientôt. Si t'as le moindre problème, rappelle toi que je ne suis qu'à un sms de toi. »
J'acquiesce, sourire fade aux lèvres, puis il raccroche et mon écran de téléphone, calé contre l'armature du lit, devient noir peu après, me laissant le loisir d'observer ma réflexion dedans. Je fais une moue triste et tombe dans le lit grinçant.
Brat prend ça comme un signal et décide de se lever pour venir me rejoindre, étalant son gros corps à côté de moi et couchant sa tête sur ses pattes avant. Ses grand yeux noirs me regardent et je souris. Je gratte tendrement son oreille.
« Qu'est ce que je devrais faire Brat... tu crois que ton idiot de papa accepterai que je sois amoureux de lui ? »
Je me moquais de Harry et de sa façon de parler au chien, mais je dois bien avouer qu'il ne m'aura pas fallu longtemps avant de prendre le reflex de m'adresser à lui comme si il comprenait quoi que ce soit et allait me répondre.
Celui-ci me regarde toujours, ses grands yeux passant d'une chose à une autre sur mon visage.
« J'aimerai savoir ce qui se passe dans sa tête de temps en temps.. » Je lui dit ensuite. « Tu as sûrement entendu plein de chose à propos de lui, toi... hein ? » Je pousse un petit rire en le regardant détourner ses yeux vers la porte quand des pas résonnent dans le salon de l'étage pour s'approcher.
Je me tourne dans le lit, juste à temps pour voir Harry arriver. Il cogne du dos de ses phalanges sur ma porte grande ouverte et me sourit quand je me redresse, Brat partant en courant vers lui pour lui faire la fête.
« Je dois aller chez mon père pour un soucis de boulot, et du coup maman nous invite aussi à dîner avec eux. » Il hausse un sourcils et je réalise finalement qu'il a son téléphone dans une main, alors que l'autre frotte tendrement la tête de son chien. Il me demande sûrement mon avis.
« Oh, oui pas de soucis, je vais me doucher et me changer. » Il hoche la tête en tournant ses yeux vers son smartphone pour composer un message, puis il tourne sur ses talons pour repartir là d'où il vient.
Je reste assis sur le lit, le regard vers la porte. J'écoute son pas lentement s'éloigner. Je le connais bien son pas, maintenant. Un. Deux. Trois. C'est une démarche lente et bizarrement elle me rappelle celle de mon père, elle est mature, rapide et confiante. Celle de Harry, cependant, ne m'inspire pas la même peur, pas du tout même. Au contraire.
Je reste là encore un peu, jusqu'à ce que je ne l'entende plus, et je me lève enfin pour rejoindre la salle de bain à côté. Ici aussi je me suis installé et fais comme chez moi. Mes affaires sont étalées un peu partout et je crois même que j'ai un peu de ma lessive sale entassée là. Harry est assez gentil pour me laisser user de sa buanderie, mais je n'ai pas encore vraiment eus la motivation de le faire, c'est un peu honteux de ma part mais j'ai vite tendance à me laisser aller. C'est probablement une mauvaise chose, surtout parce que je vais vite arriver à court de vêtements propres.
Je m'observe dans le miroir une fois mon maillot de bain par terre. Ma peau nue et rouge me tape à l'œil aussi vite et je grimace en me tournant pour mieux me regarder, sous toutes mes coutures, sous tous mes angles. Mes fesses sont blanches et ça coupe le rouge de mon dos de façon vraiment comique, surtout parce que mes jambes, elles, sont à peine caramel. Je passe ma main sur le bas de mon dos, j'étudie la forme des fossettes en bas de celui-ci et celle de mes hanches et ma taille étroite, mes cuisses épaisses.
« Oh Louis au fait ? » La porte de la salle de bain menant vers le couloir s'entre-ouvre et une panique aigu remonte sur mon dos alors que je me tourne.
« N'entre pas ! » Je cris soudain.
« J'allais pas entrer t'inquiète pas... je ne regarde pas. » Me rassure-t-il. Mais mon cœur bat la chamade parce que je suis totalement exposé et qu'il n'y a qu'une toute petite porte qui nous sépare.
Je suis parfaitement conscient que j'ai des atouts, souvent je me sens au top de mon potentiel beauté, je me sens séduisant. J'aime savoir que je peux jouer sur des cordes sensible parce que j'ai assez confiance en moi quand je le veux bien. Mais une chose, une unique chose, a toujours était difficile. Me montrer nu, m'offrir, partager un minimum d'intimité. Probablement parce que je suis doué pour avoir confiance en moi uniquement jusqu'à un certain degrés. Et ce degrés ci est trop élevé, celui d'être nu, sans barrière, découvert sous le regard d'un autre, ça fait peur. Il n'y a plus aucun artifice, plus rien pour se cacher, plus rien pour prétendre que j'aime vraiment ce corps avec lequel j'ai pourtant du mal à vivre bien souvent, avec lequel j'ai une relation complexe. Je n'ai rien pour me cacher une fois nu. Il n'y a plus que moi et mon embarras, ma gêne, ma peur, celle de ne pas suffire, de ne pas répondre aux attentes, de ne pas être assez bien.
« Je voulais juste te demander si tu aimes l'aubergine. »
« Hum.. oui. »
Je racle ma gorge, serrant mes bras contre ma poitrine, alors que la porte se ferme lentement à nouveau. La pression redescend lentement et je me tourne vers mon reflet, vers mon bras gauche et cette marque. Juste une nouvelle chose que je n'aime pas, juste une nouvelle chose sur mon corps que je vais haïr et faire semblant d'accepter juste pour avoir confiance en moi jusqu'à ce que ce soit trop dur.
Je ne sais même pas d'où vient cette relation d'amour-haine avec mon corps, mais elle existe depuis aussi longtemps que je me souvienne. Un mélange de petites moqueries et piques de la part d'amis ou juste de personnes au sujet de la forme qu'il a, de petites tacles de la part de mes parents comme quoi je devrais plus me muscler, que je suis un peu trop maigre, puis juste mon regard admiratif vers des garçons qui on le corps que je voudrai avoir. Ça prend du temps d'accepter sa propre personne, ce qui est dommage, si il y a une personne sur terre qu'on devrait aimer regarder le plus ce devrait bien être sois-même, parce que c'est la seule personne qu'on est sûr de voir jusqu'à notre dernier jour sur terre.
Le temps, je le prends chaque jour, a essayer de m'aimer un peu plus. C'était un peu plus facile quand j'étais avec Zayn cependant, j'étais si bien avec lui, dans une telle relation de confiance, que non seulement j'aimais mon corps, mais je l'aimais à travers ses yeux aussi, comme si son amour pour moi était assez fort pour nous deux. J'ai toujours espéré le lui rendre comme il le fallait et d'une façon équitable, mais je ne saurai jamais vraiment si ça a été le cas à un seul moment.
Je sais juste que, même en étant passé à autre chose, ça me manque parfois d'être devant le miroir puis que soudain il soit là et m'enlace en me disant que je suis beau. Plus peut-être que lui, je pense que ça me manque d'être aimé de cette façon là.
Quand ma douche est fini, je saute dans mon premier short en jean et passe un débardeur jaune un peu délavé qui jure un peu trop avec ma complexion rouge tomate. J'aime cependant trop ce dit débardeur pour le troquer contre un autre et décide qu'il fera l'affaire. Je mets un peu de crème hydratante sur les coups de soleil, légèrement atténué, sur mes joues, ainsi que du déodorant, puis sort finalement de la pièce pour descendre et retrouver mon hôte en bas dans le salon de l'entrée, le regard fixé sur son écran de téléphone. Je crois qu'il regarde une vidéo.
Il m'entend arriver et se lève du canapé, glissant son téléphone dans sa poche et souriant vers moi en me montrant galamment la voie. Parfois, quand je le regarde, j'aimerai croire qu'il a deviné tout seul ce que je ressens, mais à la vue de comment il ne semble même pas vraiment réaliser que Madeleine l'aime je peux faire une croix sur mon envie qu'il se rende compte de quoi que ce soit sans mon intervention. Dommage. Les choses auraient probablement étaient plus simple si je n'avais rien eu à faire d'autre que de juste attendre ici en silence qu'il remarque qu'il me plaît.
« Dis... au fait ? » Je lui demande quand je monte dans la voiture, plaçant mes lunettes sur mon nez et me tournant vers lui pour le voir s'asseoir au volant. « Tes sœurs... je sais que ça me regarde pas vraiment mais... ça a été entre elles l'autre jour ? » Il me regarde une seconde pour juger ma question et fait une moue en hochant de la tête tandis qu'il tourne la clé du contact.
« Ouais... » Dit-il. « C'est... ouais.. elles ont discutés et tout et c'est bien. Je sais que Elizabeth s'en veut pas mal de ne pas avoir été une superbe grande sœur pour Willow. » Il tourne le volant en disant cela, et puis la voiture s'engage dans le chemin de pierre. « Alors le peu de fois qu'elle vient ici elle essaie toujours de parler avec elle, lui demander des nouvelles, mais c'est difficile quoi. »
« Ouais.. » Je confirme sur un hochement de tête. « Ça m'a un peu surpris quand elle m'a dit qu'elle ne la connaissait pas beaucoup. Surtout après que j'ai vu combien Elizabeth est proche de toi. » Il pince ses lèvres avec une telle force qu'elles en deviennent légèrement blanches.
« Ma... ma famille est assez complexe et on a tous de relations très particulières les uns avec les autres. Elizabeth n'est jamais réellement venu vivre ici, pas plus qu'elle n'a rendu visite. Quand elle a eu fini les études secondaires elle est restée très peu ici et Willow avait à peine trois ans à ce moment. Donc naturellement elle n'est pas proche d'elle comme moi je le suis, puisque je venais en vacances ici très souvent et que... beh je vis ici maintenant. »
Je regarde son profil et je me demande encore une fois ce qu'il se cache sous toutes ces relations bizarres. Je me demande comment il se sent, vis à vis de cette petit sœur qui est née ici et y a toujours vécue quand lui et Elizabeth, enfant et adolescent, on était laissé là haut, en Angleterre jusqu'à leur dix huit ans respectif. Harry n'avait que six ans quand elle est née, en quoi n'aurait-il pas put venir suivre l'école ici, lui aussi ? Et Liz ? J'ai, comme toujours, un nombre incalculable de questions que je me refuse de poser, et je me contente donc de détourner le regard vers la route devant nous.
« Combien y a-t-il d'année d'écart entre Elizabeth et Wilhelmina ? » Je demande simplement à la place, parce que j'arrive à voir qu'il aime beaucoup ses sœurs et parler d'elles.
« Quatorze ans. »
J'ouvre des yeux surpris. Je ne sais pas quel âge je donnais à Elizabeth mais ce n'était sûrement pas trente ans, elle ne les fait pas du tout. C'est peut-être un des seuls points communs de cette famille, aucun d'eux ne fait son âge, que ce soit Harry qui donne l'impression d'être plus âgé, ou Regina et Elizabeth qui ont l'air plus jeune, personne ne pourrait leur donner leur âge exact directement.
« Et dis, toi... on en a jamais vraiment parlé... t'as rencontré toute ma famille maintenant... mais je sais rien sur ta famille à part que ton père est un con. » Je rigole à ça remarque, amusé par la facilité avec laquelle il parle de mon père de la sorte. Je n'ai aucune raison de le reprendre de toute façon, et il le sait. « T'as des frères et sœurs ou quoi ? » Je pince mes lèvres.
« Non. » Je grimace, l'air désolé. « Mais j'ai Liam et c'est un peu un frère pour moi. J'aime aussi beaucoup Calvin parce que je le connais depuis qu'on est des gamins, même si je suis pas aussi proche de lui que de Liam je peux pas nier que je l'ai toujours un peu considéré comme un frangin. » Il se tourne rapidement vers moi alors que je hausse mes épaules.
« Liam ! C'est celui qui savait qui j'étais c'est ça ? Le meilleur ami. Et Calvin, c'est celui de la brasserie. Non ? » Il sourit d'un air malin et je l'accompagne, teinté d'incrédulité et d'amusement.
« Tu te souviens ? »
« Bien sûr que je me souviens. » Ricane-t-il. « Je me souviens très bien de cette journée, et de l'expression sur ton visage quand je t'ai demandé si tu avais fais des recherches sur mon nom. » Son rire devient un peu plus franc alors que le souvenir se déroule dans ma tête. Il est un peu flou pour moi, mais je me souviens de ne pas avoir été des plus agréable avec lui avant qu'on ne commence à rire ensemble. « Je me souviens quand je t'ai vu au café. » Rit-il. « J'avais pas du tout prévu de t'aborder, mais quand j'ai vu que tu tenais ma carte de visite je pouvais pas m'en empêcher. T'avais l'air tellement agacé. »
« Et ça t'amuses ! » Je le frappe à l'épaule et il fait mine de se tasser vers la gauche pour m'éviter, le rire aux lèvres.
« Bien sûr que ça m'amuse ! Quelles étaient les probabilité pour que j'entre à ce moment et que je te vois là avec ma carte de visite ? » S'amuse-t-il. Il laisse un silence se dérouler avant de soupirer. « Je suis content que ça se soit passé comme ça. »
Je fais sincèrement mon possible pour ne pas que ça arrive, mais mon cœur s'emballe, il part dans une grande farandole de tambour et je n'arrive pas à le retenir. Comme un jeune oiseux, il volette et bat des ailes à toute allure et je ne peux pas le retenir, même en essayant. Mes paumes sont moites et je sens la chaleur remonter dans ma gorge.
« Parce que... maintenant t'es là. » Il se tourne vers moi et quand je croise ses yeux des miens je me sens me perdre quelque part dans l'intensité de ses prunelles, du moins jusqu'à ce que je n'arrive plus à tenir la tension.
Son sourire quand il dit ça est bien trop rayonnant et innocent pour attendre de moi que je garde mon calme. Je fais de mon mieux mais mon sang bout dans mes veines et mes joues chauffent un peu plus qu'elles ne le devraient déjà à cause de leur brûlure.
Le silence comblé par le vent retombe autour de notre véhicule, il est tranquille mais bizarrement il me démange un peu sous la peau. Malgré cela, il reste avec nous, comme une présence en trop sur la plage arrière, jusqu'à ce qu'on arrive à la maison familial.
J'ai souvenir que Willow m'ait dit qu'elle était plus loin sur leurs terres, derrière le château du domaine. Et sans surprise elle reste, en effet, plutôt à l'écart du reste. Bien qu'elle ne soit pas dans les vignes la demeure reste isolée, cachée sous la pinède sauvage et noyé sous le son des cigales au sommet d'une colline. La voiture passe un grand portail de fer et la petite route se poursuit en grimpant en zigzag. En haut, je peux voir la grande maison. Je ne devrais pas être encore surpris de réaliser combien ils sont riches, mais comment voulez vous ?
D'ici je vois un cliché de la belle et grande maison de riches. Une immense porte en bois arrondie en haut dans une façade clair, un immense balcon directement au dessus, d'immense fenêtre, une haie de pin parfaitement taillé, des rosiers qui s'aligne le long du mur. La lumière du soleil de la fin de journée frappe la maison de plein fouet, se réfléchissant dans le verre des fenêtres. Devant, je reconnais la voiture de Regina et celle de Harold cote à cote.
Quand on arrive devant je regarde partout. Les voitures, les arbres et le ciel filtrant entre leurs branches, la façade et la façade haute de la demeure.
Sur le pas de la porte se tient Wilhelmina. Elle sourit vers son frère et court vers lui quand il sort de la voiture. C'est la première fois que je les vois vraiment interagir l'un avec l'autre, je crois, et un petit sentiment de bonheur picore mes cotes quand je le vois la serrer fort contre lui, enfonçant son visage dans ses longs cheveux à la couleur cuivrée. Il prend une grand inspiration de son odeur en la reposant par terre et pose ses mains sur ses épaules pour embrasser son front ensuite.
Je pense que j'aurai voulu avoir un frère ou une sœur. J'étais prêt à devenir un grand frère, mais ce petit plaisir m'a été retiré, à moi, mais surtout à mes parents. Avec le recule je pense tout de même que je suis heureux d'être fils unique maintenant, j'aurai haï de devoir laisser mon frère dans un tel univers, les choses sont donc sûrement mieux ainsi, mes parents ne peuvent pas détruire la vie d'un autre enfant ainsi. Ce n'est pas plus mal.
« Bonjour Louis ! » Me dit finalement Wilhelmina quand elle vient vers moi puis qu'elle nous guide à l'intérieur de l'immense maison.
Il fait très frais dedans, c'est agréable à cause de la chaleur abominable de ces journées d'été. Alors je pousse un petit soupir de plaisir.
L'intérieur de la grande maison Styles a d'égale toute la prestance de leur famille. Sol lisse, meuble de créateur, tapis de marque au centre du hall, mur décorés, on voit que ce n'est pas le confort financier qui manque ici. Un escalier monte juste là, le mur qu'il longe est couvert de nombreuses photos que je n'ai pas le temps de voir puisque je suis conduis, par Harry et sa sœur, vers une pièce en face. Il n'y a pas de porte dans l'encadrement de porte et l'on débouche sur un grand salon illuminé par une immense baie vitré donnant sur un large terrain à l'arrière avec une piscine et une terrasse de bois. Aussi loin que va le terrain il n'y a aucune pelouse. Je crois qu'il n'y en a pas chez Harry non plus, sûrement parce qu'elle meurt avec la chaleur de l'été et que ce serai ridicule de vouloir l'entretenir.
Regina est assise dans le canapé du salon et sourit quand elle nous voit.
« Bonjour les garçons. » Dit-elle de son habituel voix douce et tendre, légère comme la brise de l'été. Aujourd'hui elle porte une longue robe d'été aux couleurs discrètes et de forme ample. Elle est, comme toujours, très belle, sans surprise de sa part. « Comment allez vous ? » Demande-elle en venant vers nous. Elle attrape même ma main gentiment et je hoche la tête stupidement. Qui pourrait garder son calme devant une telle femme de toute façon ? « Harry, ton père t'attend dans son bureau. » Souffle-t-elle à son fils.
Celui-ci hoche la tête et s'excuse auprès de moi pour me laisser et s'en aller vers une ouverture rejoignant une autre pièce de la maison. Je reporte mon attention vers Regina et elle me sourit, une petite grimace sur le visage, comme si elle était désolé pour quelque chose, mais quoi ?
« Alors, comment se passe tes vacances ici Louis ? » Me demande-t-elle en se reculant pour s'asseoir sur le canapé à nouveau, à côté de sa fille. « Veux-tu une tasse de thé ? »
« Oh.. euh, oui, je veux bien oui. »
Elle me fait signe de m'asseoir et je prend place dans le fauteuil en face d'elle en l'observant versé du thé dans une tasse pour ensuite la poussé vers moi sur la table basse, tournant même la hanse vers moi dans son attention particulière. Je la remercie timidement et me penche pour l'attraper et en boire une petite gorgée.
« Tu as pris de jolies couleurs dis moi. » Rit-elle.
« Oh.. ne m'en parlez pas. » Je rigole. « J'ai brûlé et j'ai mis trois heures à le réaliser. »
« Fais attention toi, le soleil est assez traître ! » S'amuse-t-elle.
La pièce ne reste pas longtemps teinté par cette légèreté et cet douceur. Très vite, des éclats de voix résonnent entre les murs, venant de loin, et Regina prend une mine gênée en détournant ses yeux. Wilhelmina perd toute sa bonne humeur au même moment qu'elle. Son sourire s'effondre sur son visage et son regard se perd dans le vide alors qu'elle écoute ce que Harold dit, en français, à Harry, sur un ton qui ne laisse pas penser qu'il le remercie de quoi que ce soit. Je crois que Harry se défend, et que c'est pour ça que le ton monte entre eux. Tout mon corps est en alerte.
Mes mains autour de ma tasse se serre et j'ai envie de pester grossièrement. Je n'ai pas envie d'être venu jusque ici juste pour entendre Harold abuser verbalement de son fils. Je n'ai même pas envie de rester là à ne rien faire, je veux aller là bas et je veux le confronter ce vieux chnoque. Il n'est même pas capable d'apprécier les efforts de son fils, il ne sait sûrement même pas combien Harry met du cœur dans son travail et se met la pression pour être à la hauteur de ses attentes. J'ai envie de pleurer. Comment ose-t-il ?
Dans ma tête je ne peux que revoir son visage, ses yeux, ce regard, celui qui concerne Harold et je me maudis d'avoir eu l'audace de les croire proches alors que Harry est évidemment plus que terrifié et blessé moralement par son paternel.
« Willow, trésor, peux-tu aller chercher les scones pour ton frère ? »
La jeune fille ne se le fait pas dire deux fois et se lève du canapé, visiblement de mauvaise humeur, pour partir vers la direction qui doit être celle de la cuisine. Regina sourit et se tourne vers moi quand sa fille a quitté la pièce.
« Louis... » M'interpelle-t-elle, un air un peu malin et amusé sur son visage, qui me rappelle beaucoup son fils. « Depuis quand es-tu amoureux de mon fils ? »
Une chance qu'elle ai attendu que je n'ai rien dans la bouche pour me demander, parce qu'en considérant la façon dont je réagis j'aurai été capable de m'étouffer sur une gorgée de thé tout en la recrachant. À la place je ne fais que m'étouffer sur ma propre salive et je frappe mon sternum pour essayer de me calmer, alors qu'elle sourit, amusée de si facilement me placer dans l'embarras.
« Comment vous- » Je pointe mon doigt vers elle et elle sourit.
« Je sais ce genre de chose c'est tout. » Elle hausse ses épaules et s'avance vers moi pour me placer dans la confidence. « Je le vois surtout à ta réaction là, d'entendre ça. » Me confit-elle avant de revenir à sa position initial, tenant sa petite tasse gracieusement dans ses doigts. « Lucas sait très bien que Harry et son père ne s'entendent pas... mais même en tant que meilleur ami il n'a jamais réagi ainsi alors.. » Elle hausse gentiment ses épaules avant de soupirer quand la voix de Harry s'élève de nouveau. « Ça a toujours été comme cela entre eux... »
« Pourquoi ? » Cette fois je ne peux pas retenir la question. L'urgence que je ressens à l'idée de cette situation ne me permet pas de retenir quoi que ce soit, et je ne pense qu'à ça, qu'à savoir. Pourquoi ? En quoi Harry mérite-t-il ça ?
« C'est une longue histoire... mais Harold est très très exigeant avec lui.. » Soupire-t-elle. « J'ai plusieurs fois eu des disputes avec lui à ce sujet.. J'aurai voulu que Harry s'en aille, comme Elizabeth, qu'il coupe les pont. Mais à la place il s'est dirigé dans cette voie et veut tout faire pour prouver sa valeur à son père... il aurait été tellement plus heureux si il avait rêvé d'autre chose, ou si Harold n'était pas si dur avec lui... si il pouvait traiter les filles et Harry de la même façon. »
Wilhelmina revient dans la pièce avec des scones sur une petite assiette et les pose près de la théière. Regina la remercie gentiment et la jeune fille reste dans un mutisme total visiblement en colère et triste. J'ai l'impression que Regina voudrai faire ou dire quelque chose, mais qu'elle ne le peut pas, comme si elle était au centre de cette situation, en tant que témoin impuissante.
Je pince mes lèvres, impuissant moi même. J'attends. J'attends que Harry revienne. Je veux le voir. Je n'aime pas cette situation.
Mes yeux s'accrochent à quelque chose finalement. Sur une petite table à côté du canapé, je vois un cadre photo. Il y a deux enfants dessus, Elizabeth et, sûrement, Harry. Ils sont jeunes dessus. Je ne m'en approche pas, pour ne pas risquer de mettre qui que ce soit mal à l'aise, et regarde de loin. Liz a l'air d'avoir une dizaine d'année, et Harry est tout petit, il a les cheveux tous rasé sur sa petite tête ronde et un gros sourire percé de fossette. Il est tout petit et porte des vêtements un peu trop grand.
« C'était le jour des deux ans de Harry. » Sourit Regina, probablement parce que je ne suis pas discret. « Il y a tout plein de photo comme celle-ci dans l'entrée, n'est pas peur va jeter un œil si tu veux. » Elle rigole gentiment en balayant l'air avec sa main vers le hall.
« Je peux ? »
« Mais bien sûr ! Tout le monde adore ce mur, il y a plein de belles photos. Vas-y ! »
Je ne cache pas ma joie d'y être invité et m'excuse gentiment en posant ma tasse avant de partir vers le hall, Willow sur mes talons. Quand j'entre dans la pièce je lève aussi vite les yeux pour voir les photos se dévoiler à moi et je souris. Wilhelmina passe à côté de moi et monte quelques marches pour me pointer une photo.
« Ça c'est moi ! » Je la rejoins sur la marche pour regarder la photo. Je reconnais un peu de Harry sur le visage du bébé que je vois là, mais surtout le charmant nez en trompette de la jeune Styles au milieu de son visage aux traits délicats.
Elle se recule contre la rembarre de l'escalier pour mieux regarder et mes yeux s'égarent entre les portraits.
« Qui c'est là dessus ? » Je pointe une photo de Harold, il sourit en grand à la caméra en tenant un bébé dans ses bras.
« Harry. » Me dit-elle. « Je crois que c'est le lendemain de sa naissance. »
Je hoche la tête en détaillant la photo. Harry a les yeux fermés et tient ses petits poings serrés contre lui alors que Harold le pointe de son doigt en le tenant contre lui dans un décors de chambre d'hôpital. Il a l'air heureux, sûrement parce qu'il tient son premier fils dans les bras. C'est marrant de voir Harry si jeune, de le voir bébé, ça me fait tout bizarre. Il est tellement atypique que parfois j'oublie qu'il n'a pas toujours été ainsi, et qu'il a été un enfant insouciant un jour.
Sur une autre photo il est un peu plus grand et je le reconnais mieux. Il pousse Willow, qui doit avoir autour de cinq ans à ce moment, assise sur une balançoire ses petits cheveux roux dépassant de sous son bonnet rose. Harry a un gros bonnet sur sa tête mais ses boucles dépassent et habillent ses joues toutes rose alors qu'il sourit grandement vers la caméra, la main tendu devant lui. Je m'amuse de le voir ainsi, si petit et mignon. Finalement je remarque quelque chose, sur les quelques mèches qui dépasse de son bonnet. Leur couleur...
Je n'arrive pas à croire que ça me soit sortit de la tête. Harry se colore les cheveux en brun foncé. Comment ai-je pu oublier ? Peut-être que la réponse à la question concernant sa couleur naturelle est sur ce mur, sur leurs photos d'enfance affichées ici sans secret. Il y a beaucoup de photos sur ce mur qui traverse de nombreuses années. Sur le peu de photos sur lesquelles Harry est enfant il porte toujours quelques choses sur la tête, ne laissant que de petites mèches claires caresser ses joues. Puisque oui, je me suis trompé, il n'a pas cette même teinte de cheveux presque roux ou cuivré comme son père et ses sœurs, ses cheveux sont clairs. Je ne saurais pas dire quelle teinte exactement, mais c'est le mot qu'il faut. Clair. Sur les photos où il est adolescent c'est évident qu'il a les cheveux bien plus foncé. Ça me permet donc d'en déduire qu'il a commencé à les colorer autour de ses douze ou treize ans. C'est assez tôt.
Il y a un hic cependant. Il avait vraiment l'air gêné que je vois sa coloration. Mais pourquoi ? Il n'y a rien de grave à vouloir avoir les cheveux d'une autre couleur. Ou de vouloir un peu plus ressembler à sa mère. Je ne comprend rien.
Pendant une seconde j'ai envie de demander à Willow, mais qui sait si elle sait simplement que c'est une couleur, elle qui a grandi en voyant Harry avec cette couleur de cheveux et elle ne sait peut-être pas par conséquent. Sa couleur pourrait simplement laisser croire que ses cheveux ont foncés avec l'âge alors ce ne serai pas stupide qu'elle n'ai jamais fait attention. Seulement moi je sais, je l'ai vu sa coloration. Il n'y a nul part place pour le doute.
« Eh bien. »
Moi et la jeune fille se tournons vers le bas de l'escalier. Harry se tient là, bras croisés sur sa poitrine. Sur son visage je peux voir des traces de peine qui brise mon cœur.
Wilhelmina est plus rapide que moi, qu'importe ce que j'avais prévu de faire, et elle descend les marches rapidement pour accourir dans ses bras, enfonçant son visage dans sa poitrine en le serrant le plus fort possible. Mais ses yeux ne quittent pas les miens, et si ils les quittent ce n'est que pour observer le mur de photos une courte seconde. Il sait que j'ai compris quelque chose. Je ne sais pas si j'ai envie de lui poser la question, de toute évidence c'est un sujet qui fâche. Je pourrais attendre qu'il m'en parle, c'est ce que je fais depuis que je suis là.
Je descends les dernières marches qui me séparent des deux et sourit en tendant ma main vers lui pour la poser sur son épaule. Il sait, aussi, que l'on a tous entendu sa dispute avec son père. Je sens que ça aussi c'est un sujet qui fâche, alors qu'il serre sa mâchoire et que son regard devient cet grimace de douleur, celle que je hais, celle qui brise les os de ma poitrine.
Il lâche sa sœur avant de traverser la pièce vers le salon et de passer la baie vitrée. Sans un seul mot pour personne. Personne d'autre que celui qu'il m'a donné sans pourtant le dire. Celui qu'il me glisse quand il regarde vers moi par dessus son épaule. Celui qui me dit 'suis moi'.
« Harry.. » L'appelle sa sœur.
« Je m'en charge. »
Je passe à côté d'elle et suis le garçon à la trace jusqu'à la fenêtre pour ensuite sortir dans la chaleur extérieur qui m'étouffe aussi vite. J'aperçois la silhouette de Harry une demi-seconde avant qu'il ne disparaisse dans une grande serre un peu plus loin. Je presse mon pas dans le jardin pour pouvoir entrer sous la cloche de verre à mon tour.
Ici la chaleur est encore pire, mais c'est supportable si elle signifie pouvoir voir cette grande variétée de fleures habiller les murs, des étagères et des sols. Il y a un petit salon de jardin au milieu, sur le dallage, sûrement pour faire de cet endroit une salon d'extérieur utilisable en saison froide. C'est agréable, il y a une fontaine quelque part, je peux entendre l'eau couler, habillant le silence avec élégance, comme si il avait s'agit d'un charmant bracelet au poignet de la plus délicate des personnes.
Malheureuse, le temps n'est pas à l'appréciation et la contemplation de cette sublime serre.
Harry est là, il est assis sur le petit canapé, il me regarde et je souris en approchant.
« Tout va bien ? »
Je m'assieds lentement à côté de lui, m'assurant par ma lenteur que je ne le dérange pas. Il ne bouge pas, créant une forte proximité entre nous quand je me retrouve assis là, tout contre lui. Nos bras se frôlent de près et un frisson chatouille mon épiderme.
« Non tout ne va pas bien. » Souffle-t-il en laissant tomber sa tête contre mon épaule.
Je n'ai pas grand-chose à lui dire. Je n'ai pas beaucoup d'idée sur la façon dont je pourrais le réconforter. Je me contente d'être là. Parce que je sais que personne n'a jamais été là, qu'il n'a jamais laissé l'occasion à personne de l'être. Alors je prend ce rôle à cœur et je couche ma tête contre la sienne en attrapant sa main.
« Je suis désolé Harry. » Je lui dis bêtement en espérant que cela et l'allée-retour de mon pouce sur la peau de sa main soient assez pour le réconforter.
Les mots de Regina résonnent encore dans ma tête, maintenant plus que jamais. Pourquoi Harry se fait-il tout ce mal, pourquoi veut-il a ce point prouver sa valeur à son père, pourquoi se force-t-il ? Mais en fait je sais parfaitement pourquoi. Ou plutôt je comprend pourquoi.
Il n'y a pas de parce que qui réponde à ces questions.
Je faisais pareil que lui, et moi même je ne sais pas pourquoi je voulais à ce point convenir à mes parents, pourquoi je voulais tant être l'enfant parfait. Il m'aura fallu des années avant de réaliser que j'ai le droit d'être comme je suis et de ne pas correspondre à leurs attentes, que c'est humain de ne pas être parfait. Harry, lui, est toujours coincé là dedans, et il n'y a pas de parce que. Le seul qu'il y ait c'est parce que c'est son père et que c'est la première validation qu'un individu recherche dans sa vie, celle de ses parents. Harry est toujours à la recherche de cette validation. Ça aurait été plus simple de vouloir autre chose et de vivre pour lui même, mais c'est surtout difficile d'avoir cette confiance en soit si même votre père diminue vos efforts et votre personne.
C'est une situation qui n'a que deux issues possible. Harold doit cesser son exigence si strict. Ou Harry doit réaliser que cette situation n'est pas bonne pour lui et qu'il mérite de travailler avec des gens qui apprécient ses efforts et encouragent sa valeur.
« J'essaie tellement fort. » Chuchote-t-il. Sa voix n'est qu'un peu serré, mais elle traduit tout de même la proximité de ses pleurs. Alors je me penche un peu mieux contre lui, serre un peu plus sa main.
« Je sais oui. »
Je ne connais que trop bien le sentiment qui doit dormir en ce moment dans son estomac. Ça brûle dans le ventre, on a envie de vomir, de pleurer, la gorge se serre et la respiration est difficile. Les mains tremblent. Je sais aussi ce qu'il se dit. Ne serai-je donc jamais assez bien ? Que dois-je faire pour lui convenir ? Devrais-je essayer plus fort ? Que devrais-je changer ?
Je ne serai jamais assez bien.
Je ne veux pas qu'il pense ça.
« Comment tu as fais, toi... » Demande-t-il tout bas, la voix étouffé.
« Je n'ai rien fais. » Je répond, le ton le plus calme et silencieux possible, pour l'apaiser, ne pas troubler sa peine. « J'ai arrêté d'essayer. Je me laissais faire je crois sur la fin, sans plus essayer de répondre ou de leur convenir... Je crois que j'ai eu de la chance dans mon malheur aussi, je ne pense pas que les choses se seraient passé de la même façon si je n'avais pas été fichu à la porte. » Je souffle longuement. « J'aurais sûrement mis du temps avant de vraiment m'en aller et de devenir qui je veux être. »
Je lâche sa main, uniquement pour pouvoir dégager mon bras et le tirer contre moi dans une étreinte, un peu plus étroite.
« J'aurai mis des années parce que jamais personne ne m'a dit que je devais partir. Alors je te le dis moi. » Je le serre un peu plus, coince mon menton sur le haut de sa tête et ferme mes yeux. « Tu dois sortir d'ici Harry. »
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Hello, je voulais juste laisser une mini note parce que je reçois beaucoup plus de retour sur DAeDV depuis récemment et que ça me touche beaucoup. Je suis vraiment contente que cette fiction vous plaise. Elle me trotte dans la tête depuis assez longtemps maintenant (deux ans) alors je suis heureuse de la partager et qu'elle soit appréciée ! Merci beaucoup ! xx
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