Chapitre 16 : Quand le gong sonne
J'ai chaud. La couverture semble bien lourde sur mes épaules et ça me dérange dans mon sommeil. Les yeux toujours fermés, j'ai envie de me battre pour rester là et faire ma grâce mâtiné malgré la chaleur. Une odeur flotte dans le vide, dans le vent et la brise, c'est une odeur de café qui gratte mes narines, et je réalise que je suis maintenant belle et bien réveillé et que la lumière du soleil a décidé d'elle aussi m'embêter. Inutile de vouloir rester couché, je ne vais pas pouvoir. Je comprend pourquoi quand j'ouvre les yeux.
Je n'avais pas réalisé que je m'étais endormi ici la veille, et me voilà sur le matelas dehors. Bien sûr que j'ai chaud, il faisait froid hier alors je m'étais bien couvert, et maintenant j'ai l'impression d'étouffer. Je m'empresse de repousser mes draps et de retirer mon sweat à capuche.
« Ah, bonjour. » Je me tourne vers la table de fer et regarde Harry, assis sur une chaise, Brat à ses pieds, allongé et haletant. Enfin je suppose que c'est mon hôte parce que le garçon devant moi n'a presque rien à voir avec celui que j'ai connu jusque ici. Je dois m'être levé plus tôt que la veille pour le trouver ainsi, les yeux rapetissés par sa fatigue et les cheveux pas coiffé. Et quelle surprise de découvrir sa tignasse au naturelle, un amas de cheveux bouclés et désordonnés qui tombe sur son front et ses oreilles, bouclant sur ses joues. Pour la première fois j'ai vraiment la sensation d'avoir un garçon de vingt-deux ans sous les yeux. Il n'est pas non plus maquillé, depuis la veille, et ça change beaucoup plus ses traits que je ne l'aurais cru, il est toujours très beau mais on ne peut nier la différence.
« Bonjour. » Je répond, la voix enroué de fatigue. « Quelle heure il est ? » Il baisse ses yeux vers sa montre en mangeant son toast.
« Presque neuf heure trente. »
Je râle et laisse tomber mon corps dans le coussin derrière moi. Le silence de la nature n'est plus le même ce matin. Les oiseaux chantent et la pompe de la piscine tourne en bas, des insectes volent ça et là et le ciel bleu clair est parcouru de nuage blanc, mais surtout les cigales chantent, fort, couvrant tout le reste en s'imposant comme un bruit de fond. Le soleil passe entre les branches pour venir picoter ma rétine et je me lève finalement pour rejoindre mon compagnon à sa table et me servir une tasse de café.
« On partira en début d'après-midi, ça te vas ? » Je lève les yeux vers lui et prend le loisir, pendant un instant, de me souvenir de quoi il parle avant de soudain me rappeler de la petite ville portuaire où il m'a proposé d'aller. Je hoche la tête alors. « Deux de mes amis vont venir avec nous si ça te va aussi. Ne t'en fais pas les deux parlent très bien anglais. » Il pousse un petit rire à l'angoisse qui a dut passer en coup de vent dans mon regard et je pouffe à mon tour quand le soulagement le remplace.
« Pas de soucis, je suis content de rencontrer tes amis. » Je souris, prenant une gorgé de café et tirant mes jambes vers moi sur la chaise.
« C'est vraiment.. une façon étrange de t'asseoir que tu as. » Je baisse une seconde mes yeux vers mes deux genoux et remet le plus vite possible mes pieds par terre.
« Oh mon dieu, désolé, c'est une habitude que j'ai j'aurai dû- »
« T'inquiète y a pas de mal, tant que tu ne fais pas ça sur mes canapé avec des chaussures aux pieds tu fais ce que tu veux. » Il rigole et baisse ses yeux vers son téléphone pour le tirer sous ses yeux et je contemple son visage, ses cils qui s'agitent quand ses yeux suivent ce qu'il se passe sur son écran. Son nez est droit, ses lèvres sont pleines, ses joues sont tendrement creusées. Il fronce ses sourcils, sait-il faire autre chose que ça ? C'est une bonne question.
Hier soir je priais pour oublier ce qu'il s'était passé, et pourtant, quand je le regarde, je ne peux m'empêcher de regarder ses cheveux. Pourquoi suis-je tant obsédé par ça ? Surtout si je sais, à en juger par comment il a agi hier, que c'est un sujet qui le rend nerveux, je devrais laisser les choses ainsi. Pourtant c'est tout ce à quoi je pense. Ça ne sonne pas anecdotique comme quelqu'un qui se colorerai les cheveux pour le plaisir, c'est comme si il cachait quelque chose, mais quoi ?
Ce ne sont peut-être que des idées en l'air ce que je dis, c'est peut-être stupide, ce n'est pas un regard paniqué qui peut m'assurer qu'il ne voulait pas que je le sache. Je pense sûrement trop, comme toujours. Je me fais sûrement des idées, comme toujours.
« Tu n'as pas trop mal à ton doigt ? » Je demande dans l'espoir de me distraire moi même, et il sourit en regardant son doigt et la coupure dessus.
« Non ça va. Ce n'était qu'une petite coupure. » Il hausse une épaule et me sourit rapidement. « Je vais te laisser, j'ai un peu de travail, on se retrouve pour le repas, on partira juste après. Annie et Madeleine arriveront après. »
Annie et Madeleine, ses amis sont donc des amiEs. Je note l'information pour moi même et le regarde se lever et rentrer dans la maison, son chien le suivant comme son ombre en remuant la queue. Cet animal est énorme est pourtant j'ai l'impression de ne jamais le voir. Hier il est resté à la piscine et une fois sec il a disparu, et je l'ai retrouvé allongé à côté de Harry dans le salon. Impossible de savoir ce qu'il fait. Quand il n'est pas avec Harry il est quelque part dans les vignes.
Je tourne un regard contemplatif au matelas par terre. Va-t-il rester là ? Sera-t-il rangé ? Devrais-je le faire ? Mon attention tangue et je lève les yeux vers la balancelle au dessus, dans la pinède, elle est à l'ombre sous les arbres et je souris. Je ne mets qu'une seconde pour me décider et me lève pour traverser le jardin et rejoindre la pinède. C'est une pente un peu raide mais ça ne m'empêche pas de grimper.
Il ne faut que peu de temps pour que j'arrive en haut, et aussitôt que cela arrive un soupir abaisse rudement mes épaules et mes yeux tombent sur quelque chose que je ne m'attendais pas à voir. Il y a une petit estrade en bois juste là, sous une tonnelle en toile où pendent des petites lumières vertes, rouges, bleues et jaunes. Et juste là, dessous, il y a un jacuzzi. L'installation est en contre bas, ce qui explique que je ne l'ai pas vu d'en bas alors que je voyais la balancelle.
Je descend quelque marche pour le rejoindre et passe mes doigts sur le bord du bassin à moitié hors sol. Combien de secret cache encore cette endroit ? Je suppose que, comme ce sont toutes les terres de l'entreprise, son terrain s'étend encore plus loin que ce que je pensais, qui sait ce qu'il peut y avoir d'autre. Je lève les yeux vers l'horizon, comme si j'allais avoir une réponse immédiate à mes questions avec un simple regard sur la vigne qui s'étend. Je vais devoir demander à Harry, je ne vais pas avoir le choix.
Quand je remonte je m'assoie sur la balancelle et croise mes jambes. Les arbres chantent dans le courant d'air et les oiseaux piaillent au dessus de ma tête. La mélodie dans mes oreilles me berce et je ferme les yeux.
*
Je ne sais plus combien de temps je suis resté assis sur la balancelle en tout, longtemps probablement. Je devais retrouvé Harry pour le déjeuné mais finalement je suis resté ici si longtemps que c'est lui, qui me trouve.
« Bah alors, c'est ici que tu te caches ? » Je lève mes yeux et le voilà, chemise noir ouverte sur ses clavicules, rentrée dans pantalon droit de couleur beige, cheveux coiffés et tirés en arrière, le teint frais et maquillé, à me regarder en souriant. Et moi je suis toujours en pyjama. Je n'ai fais qu'un allé retour à l'intérieur pour récupérer un livre, un des seuls en anglais de la bibliothèque dans ma chambre. Donc je suis toujours là sur ma balancelle, si bien installé que le pieds qui me serre à me balancer touche à peine le sol. J'étais tant perdu dans mon petit monde que je n'ai pas vu le temps passé et que je me retrouve en face de monsieur monde en aillant l'air de rien, j'ai même mit un bandeau, que j'ai trouvé dans la salle de bain, pour tenir mes cheveux en arrière parce que ma mèche me dérangeait.
« Je ne me cachais pas. » Mes mains tombent sur mes jambes et il pousse un rire en regardant.
« Ça fait pourtant un moment que je me demandais où tu avais pu disparaître. » Souffle-t-il. « Le repas est prêt. » Me dit-il en penchant sa tête sur le côté.
« Oh, désolé j'avais pas réalisé, j'étais tellement pris dans ma lecture et... » Il pousse un petit rire et secoue la tête en venant s'asseoir à côté de moi, sans que je ne l'y invite. Je croyais que l'on devait aller manger, mais de toute évidence il n'a rien contre notre retard dans son emploie du temps.
« Tu lis quoi. »
« Quelque chose qu'il y avait dans la bibliothèque. » Je lève la couverture vers lui et il s'enfonce dans le dossier en lançant un balancement un peu plus prononcé.
« C'est ma mère qui l'a écrit. » Je fronce mes sourcils et tourne mon livre pour regarder le nom de l'auteur.
« Regina Sorange, c'est son nom de jeune fille. » J'observe la couverture et les lettres écrites. Je n'aurais jamais pensé que sa mère serai auteur, je crois que j'ai même oublié l'idée qu'il avait une mère. J'ai rencontré ses deux sœurs et son père et jusqu'à maintenant il n'a dit qu'une chose à propos d'elle. Je crois que j'ai aussi pensé une minute qu'elle était peut-être une femme trophée, belle et jolie, qui se laisse entretenir, parce que c'est ce qu'est ma mère. Elle a un diplôme, et avant de rencontrer mon père elle travaillait comme auxiliaire médical, et quand mon père a commencé à beaucoup gagner d'argent et qu'il se sont marié elle a arrêté pour se consacrer au rôle de la maîtresse de maison puis de mère quand je suis né.
Je ne dirais pas que j'étais un enfant qui a grandi avec des parents absent, et je l'ai déjà dit, après tout ma mère a tout arrêté pour s'occuper de moi, mais ce n'est pas le simple fruit de mon imagination qui m'a donné la sensation de ne pas être soutenu émotionnellement dans mon foyer, dans une profonde solitude moral et surtout avec l'idée que j'étais une déception, surtout après l'incident de la seconde grossesse de ma mère.
« Elle est autrice alors. » Je remarque à voix haute en marquant ma page avec une feuille d'arbre que j'ai trouvé plus tôt.
« Ouais, celui-ci c'est son dernier livre et aussi mon préféré. » Je souris en le tournant pour lire une nouvelle fois le résumé de ce drame familial.
'Alors que la grippe espagnol décime les habitants d'un village français d'après-guerre, Margaret apprend que son mari n'est pas mort en action comme on le lui avait affirmé, et qu'il revient bientôt. Sa nouvelle vie de femme veuve au côté d'un amant se retrouve compromise, et son cœur soudain balance entre amour fidèle et amour fou.'
« Elle est talentueuse je trouve. » Je souris en levant mes yeux vers lui, faisant tomber le livre dans le creux entre mes cuisses en souriant. « Je me demande où elle a trouvé l'inspiration pour une œuvre aussi intéressante et déchirante. »
« Ma mère a beaucoup d'imagination. » Sourit-il en se tournant vers l'avant, ses yeux tombant dans le contre bas et le jacuzzi. « J'aime bien la fin de ce livre. J'espère qu'elle te plaira aussi. »
« Hey Harry ! » Il hausse son sourcil et on se tourne en même temps vers la maison en bas et les deux filles dans l'encadrement d'une des baies vitrées. L'une d'elle fait un grand signe de main et il se tourne vers moi.
« Eh bien, en voilà deux qui viennent de s'inviter. Tu viens ? » Il se lève alors et je le suis sans histoire, non sans crainte. Parce si lui et les deux jeunes femmes sont tous habillés et prêt à détruire un tapis rouge, moi je suis en pyjama et je pu sûrement un peu.
En bas, une des deux filles dis quelques choses et Harry rigole en tendant son bras vers moi et disant mon prénom. Il leur explique quelque chose rapidement et les deux émettent leur compréhension avec une longue onomatopée synchronisée. Puis la métisse se tourne vers moi avec un grand sourire aux lèvres
« Bonjour Louis ! Je suis Madeleine, j'enseigne l'anglais donc tu n'as pas de soucis à te faire. » Elle me fait un petit clin d'œil en tendant sa main et je lui souris en la serrant.
« Je suis Annie. » La deuxième sonne un peu plus hésitante quand elle tend sa main vers moi et je la serre avec un sourire poli et rassurant, je ne voudrais pas qu'une d'elles pensent que je le jugerai où leur voudrai du mal. « Je suis étudiante en médecine, alors ce n'est pas aussi facile mais je fais de mon mieux. » Je hoche la tête, un rire dans la gorge et me recule au côté de Harry. Celui-ci leur dit quelque chose d'autre et Madeleine fait un mouvement de main.
« Tu rigoles, au contraire, c'est mieux pour lui d'essayer de l'inclure. » Souffle-t-elle.
« Je voudrais quand même essayer de parler un peu français avec vous ! Mais c'est dur, je n'ai aucune base. » Je retiens une moue et la jeune femme rit gentiment.
« Ah oui, c'est une langue difficile ! » Elle pousse un rire amusé et je me tourne vers Harry.
« Je vais monter me changer et me rendre plus présentable, parce que là ça va pas fort. » Il s'amuse avec moi de ma tenu puis affiche sa compréhension d'un mouvement de tête, Madeleine, alors, arrive et attrape Harry par le bras pour aller avec lui, et Annie, vers le salon d'usage. Je reste un instant tout bête dans les graviers en les regardant s'éloigner, observant les doigts gracieux de la jeune fille s'enrouler au biceps de Harry. Quelque chose de bizarre flotte entre eux, si bizarre que la sensation s'engouffre dans ma poitrine, je ne sais pas ce que c'est, peut-être est-ce touchant ? Je pense que je suis heureux pour Harry d'avoir quelqu'un dans sa vie qui semble tant l'apprécier. Elle doit-être une bonne personne pour que quelqu'un comme Harry soit si ami et proche d'elle, je pense.
Quand je redescend l'escalier un peu plus tard, je trouve tout ce beau petit monde dans la véranda en train de rire autour de trois verres de vins et un verre vide à côté d'une bière. Je suppose que c'est ma place, à côté de Annie. J'y vais donc sans riposter et sourit en regardant Madeleine. Elle me sourit. Son corps semble tourner vers celui de Harry et leur coude se touchent, ils ont l'air proches. Je tique, peut-être sait-elle tout ce que j'ignore de lui. Comment je me sens à cette idée ? Je ne sais pas trop, je crois que je veux lui parler.
« Et toi Louis, tu fais quoi dans la vie ? » Je racle ma gorge en ajustant le col de mon t-shirt et souris.
« Pour l'instant pas grand-chose, j'ai était viré il y a peu et puis Harry m'a invité ici peu de temps après, donc pour le moment... je suis juste là je suppose. » J'émets un rire rapide.
« Oh dis donc tu t'es pas raté, c'est quoi ça ? » C'est Annie qui parle, pointant mon coude gauche. Un courant froid coule dans ma nuque, comme une goutte d'eau ou un glaçon, et je frissonne sans le réaliser. Je ne lui en veut pas de demander, elle sonne plus inquiète qu'autre chose et je ne peux pas la blâmer de prendre un tel ton face à une telle blessure, ça ne peut que tomber sous le sens.
« Rien.. Je suis tombé. » Je tire mon bras vers moi et je pense que tout le monde saisi ce qu'il se passe dans ma tête, combien je me ferme soudain et ne désire pas aller plus loin. Annie replie son doigts et racle sa gorge en se tournant vers la table et Harry se lève d'un coup, les mains à plat devant lui.
« Je vais chercher le repas. » Il me lance un regard, il communique quelque chose, je crois que ça se veut rassurant. « Tu viens avec moi ? Chercher la vaisselle ? » Je comprend dès ce moment, dès cette phrase, que c'est sa façon de me sortir de là et j'apprécie son attention, son effort, ce respect envers moi et ce que je ressens de me permettre de prendre une petite seconde pour quitter mon état de frayeur traumatisé au souffle court. Je me lève alors et sort le premier, les pas de Harry s'enfonçant dans la trace des miens dans mon dos alors que je rejoins la cuisine d'usage dans la pièce voisine.
« Je suis désolé. » Souffle-t-il quand il attrape la salade dans le frigidaire alors que je récupère la pile de vaisselle déjà sortie et posé sur le comptoir.
« T'inquiète c'est pas ta faute, ni de la sienne. » Je secoue la tête pour l'affirmer. Il n'y a, en effet, rien d'agréable à ce que deux personnes différentes mettent les pieds dans le plats deux jours à la suite, mais je ne peux rien y faire. « Merci plutôt de m'avoir sorti de là. » Je tourne un sourire vers lui et il pose le saladier sur les assiettes alors qu'il doit se charger du plats chaud, un peu plus lourd.
« Quand même, je... je sens que c'est sensible. J'aurai dû leur dire de pas en parler. Si tu le veux bien je vais demander aux autres de ne pas le mentionner et de ne pas la fixer pour ne pas t'embarrasser. » Je tord mes lèvres et un soupir passe mon nez.
« Je pense... que ça attirerai encore plus l'attention. » Je propose en me stoppant dans la pièce pour voir si il me suit. « Et puis je dois bien apprendre à vivre avec. » Je hausse mes épaules et reprend mon courage avec une profonde inspiration avant de quitter la pièce et de rejoindre la véranda de nouveau où les deux filles discutent paisiblement. Je pose la pile de vaisselle et retire le saladier de dessus. Harry arrive juste derrière moi et pose le plats. Je m'efforce de détendre l'atmosphère en reprenant une mine enjoué et le cours de notre conversation.
*
Harry avait raison, c'est joli ici. On s'est garé un peu loin parce qu'il y a apparemment peu de place près du centre, alors on longe le canal vers la rue marchante. Et si il avait raison et que c'est sympa de marcher sur ce dallage, il a aussi omit le fait qu'il y a un monde fou. Quand on approche d'un pont et du début de la rue marchande je réalise qu'il y a de plus en plus de monde et surtout bien plus que je ne le pensais. Quand je me plain, Harry me dit que ce n'est même pas encore le pire parce qu'on est pas encore vraiment en saison. Et je ne peut pas y croire, la foule monstrueuse devant nous avale les passant devant nous et je me sens presque horrifié quand on traverse la route pour la rejoindre. Ici, l'espace personnel de chacun n'est plus qu'une brève ligne entre les épaules qui se frôlent et j'ai presque l'impression de tourner de l'œil.
Je ne suis pas agoraphobe, pas plus que je ne pense que la foule me dérange, et pourtant il y a tellement monde que je me sens malgré moins ensevelie sous les signaux d'alarme dans ma tête alors qu'on l'on entre finalement dans le lent mouvements des promeneurs autour de nous, dans un balais d'aller et de venu déstructuré. Les petites boutiques s'alignent sur la gauche et mes yeux sautent de choses colorés à une autre. Grosses bouées et vêtement de plage se font la guerre à côté de petites peluches d'animaux typique de la région. Flamant rose, taureau, cheval blanc, impossible de passer une seule boutique sans voir au moins un des trois.
Il y a des restaurants, tous basé sur des thèmes différent, le long de l'allée, on passe devant le premier et mes yeux tombent sur des personnes assises en bord de promenade sans faire attention à l'agitation, discutant tranquillement autour de leurs tables. Je m'imprègne des instants de vie alors que le pas se fait lent quand les inconnus de la balade ralentissent pour humer l'odeur dans l'air, mélangé avec celle de l'iode autour de nous. À droite, en face du restaurant, il y a la terrasse sous une grande véranda et les serveurs dépassés essaie de passé entre les marcheurs avec leurs assiettes. C'est un spectacle tout ce qu'il y a de plus captivant.
« Louis attention. » Une main attrape mon dos puis tombent vers ma hanche, et un frisson remonte dans mon dos avant que je ne réalise que c'est Harry qui vient de m'attraper pour me tirer vers lui et m'empêcher de percuter un homme poussant une poussette en sens inverse et que je n'ai de toute évidence pas vue, force de distraction. Je m'excuse rapidement alors que mon flanc épouse celui de Harry. Celui-ci sourit quand je me tourne vers lui. « Regarde où tu vas. » Rigole-t-il tendrement.
Mon regard tangue et je vois Madeleine à côté de lui. Elle tient encore son bras sur le sien, et son regard observe avec un drôle d'air la proximité entre moi et Harry. Je crois qu'un gong sonne alors dans ma tête, au moment où ses yeux remontent et qu'elle me sourit. Je réalise quelque chose dans la façon dont elle s'accroche à Harry sans que lui ne dise ou ne fasse rien. Je crois que Madeleine a des sentiments pour lui. Je ne pourrais pas l'affirmer mais quand Harry me lâche et que je les vois marcher l'un à coté de l'autre, que je la vois ainsi pendu à son bras et tourné vers lui, son attention sur lui, je n'arrive pas à ne pas le penser.
Annie arrive à côté de moi et je tourne un regard qui doit être emplie de question, si j'en crois son amusement et son haussement d'épaule alors que l'on marche silencieusement derrière la paire. Il y a un autre restaurant un peu plus loin, après une petite boutique et je regarde Harry tendre sa main vers quelque chose et s'arrêter pour mieux voir.
« Est-ce que c'est toujours comme ça d'être avec eux ? »
« Comme ça ? » Demande Annie, pour demander une précision.
« Ils donnent toujours la sensation qu'on est la cinquième roue du carrosse ? » Elle pousse un rire, peut-être une peu plus franc qu'elle ne le voudrai. Elle a l'air d'une personne assez timide et vite embarrassée, elle est mignonne, avec ses petites boucles brunes sur sa peau bronzé.
« Oh ça ! » Sourit-elle. « Oui ! Toujours ! C'est la particularité de Mad et H. Ils sont comme ça. » Elle hausse ses épaules et une pierre plonge dans mon ventre. « Quand ils sont ensemble... c'est comme si ils se mettaient dans leur propres petites bulles, ont est habitué ! » Elle rit un peu plus et je fronce mes sourcils en regardant Harry. Peut-être que je ne le connais même pas un peu si c'est sa façon à lui d'être proche de quelqu'un, il est finalement peut-être aussi distant et propres sur lui que je le pensais. Et pourtant je n'arrive pas à le croire. Pourquoi ? Je ne sais pas trop, la façon dont il m'a demandé de venir avec lui parce qu'il a besoin d'amis me donne le sentiment que ce garçon n'a personne de vraiment proche de lui.
Un autre gong sonne dans ma tête. Tous les éléments s'enclenchent comme dans une machine et une lumière s'allume quelque part après avoir grésillé un instant. Il m'a dit de venir parce qu'il avait besoin d'amis et que j'étais différent, je l'ai réalisé moi aussi, que c'était différent. Et je réalise que je sais pourquoi c'est différent, je l'ai sus quand j'ai reconnu sa peine avec son père, dans ses yeux, il l'a sut aussi quand il a compris la mienne avec mon propre père. La lumière devient plus forte et une bouilloire siffle sur le feu. Il m'a demandé de venir parce qu'on s'est compris, c'est facile et différent entre nous parce qu'on s'est compris. Harry n'a personne de très proche de lui, parce que je suis le seul à vraiment comprendre ce qu'il a ressentit au téléphone avec son père... et qu'il le sait très bien.
Madeleine et lui sont peut-être proche, plus que je ne le crois, pourtant je sais que je suis plus proche encore de lui que eux ne le crois tous et que je n'arrive moi même à le réaliser. Harry a besoin d'un ami et il a tendu sa main vers moi, il m'a choisit moi, parce que je semble comprendre mieux que quiconque ce qu'il ressent même sans savoir d'où ça vient.
« Avec nos amis ça fait un petit moment qu'on essaie de les caser ensemble. » Je retombe dans le monde réel quand l'accent de Annie m'interpelle par dessus le son de la foule et sous l'odeur du nouveau restaurant que l'on traverse sur un thème très marin, aux couleurs bleu et blanche. Je me tourne vers elle rapidement, et la vois observer ses deux amis devant nous avec un sourire. « On essaie de faire en sorte que Madeleine confit ses sentiments à Harry, mais elle est têtu, alors on a tout essayé ! Et on continu ! » Elle rigole et se tourne vers moi. Elle aussi elle rayonne et je me rend compte qu'en effet, du peu que j'ai vu ils sont tous plutôt différents de Harry.
« Tu penses... que Harry répondrai à ses sentiments ? » Je me tourne de nouveau vers les deux toujours devant nous.
« Je pense oui, Madeleine et lui sont proches et je pense qu'il l'aime plus qu'il ne le dit. Elle a était là pour lui dans ses pires moments, surtout quand sa dernière ex l'a trompé puis quitté pour son amant. » J'ai l'impression qu'elle ne devrait pas me dire ça, c'est la vie de Harry et je ne devrais pas apprendre ça comme ça et de sa bouche, et pourtant je prend quand même l'information et je la laisse blesser mon cœur. Comment une personne pourrait faire ça, surtout à quelqu'un comme lui. « Harry aime beaucoup trop les gens je pense, et de façon beaucoup trop destructrice, il s'attache trop facilement et recherche toujours une sorte de validation dans les yeux des gens, alors une copine n'en parlons pas... c'est pour ça qu'on pense qu'il devrait se mettre avec Maddy. » Je reste pensif en regardant son dos et son profil. Il sourit vers Madeleine et se tourne vers les boutiques pour observer la marchandise. Mon cœur se serre. Je pense que c'est de savoir qu'on lui a fait du mal.
« Maddy serait une meilleur copine ? »
« Je pense oui. » Elle hoche sa tête à ses propres mots et je tire mes lèvres en ligne droite. « Tu devrais te joindre à nous dans nos plans pour les mettre ensemble. » Elle glousse et un rire jaune s'échappe de mon nez. Je pourrais, en tant qu'amis je devrais l'aider et le pousser vers les gens qui lui veule du bien, n'est ce pas ?
« Sûrement ! » Je hausse une épaule et lève les yeux vers le ciel bleu. Une odeur de sel de mer flotte dans l'air et je la laisse emplir mes poumons avant de baisser mes yeux. Il y a un goéland sur le bord de l'eau, il n'a pas peur, il est habitué à l'homme. Je pense qu'il attend que de la nourriture tombe ou qu'on lui donne quelque chose.
La foule perd de son épaisseur et je me rend compte que l'ont est arrivé au bout de la rue, on peu continuer le long de la promenade qui suit la plage le long de petits hôtels, mais mon regard ne détail rien, parce que je ne vois que la mer et sa plage. Il n'y a que peu de sable menant aux premières vagues, mais ça ne m'empêche pas du tout d'apprécier la vue. Je n'attend même pas longtemps avant de soudain m'écarter des autres pour rejoindre le petit passage séparant la rue de la plage. Avant de passer sur le sable je tire sur mes chaussures et mes chaussettes pour les enlever. Le sable est épais, et chaud, mes pieds ne s'y enfoncent que partiellement alors que je m'avance vers l'eau. Il n'y a pas de baigneur dans l'eau, il n'y a que des gens assis dans le sable et profitant de l'air de la houle.
Je rejoins l'eau finalement et mon regard ne lâche pas l'horizon bleu qui rencontre le ciel. Mon cœur s'emballe et j'ai l'impression de tomber, sans fin, de m'enrouler dans la brise et de m'endormir dans le son des vagues. L'eau remonte et éclabousse mes pieds, elle est froide. Je prend ce signe pour une invitation et décide d'avancer, de suivre la vague quand elle se recule. D'ici l'eau est si foncée et opaque que je n'arrive pas à voir où elle commence à devenir profonde.
L'eau n'est pas comme celle de la manche qui est plus foncé, ici elle est bleu marine, dans un contraste touchant avec l'écume qui s'écrase sur le sable mouillé de couleur assombri par l'humidité. J'ai envie de me baigner, de voir jusqu'où j'ai pieds et jusqu'où je peux aller, j'ai envie de voir si il y a des poissons, de mettre un masque et de me laisser tomber dans la profondeur, de faire corps avec l'eau salé.
« Alors ? » Je me tourne en un sursaut vers Harry. Il sourit en regardant au large, un sourire satisfait sur son visage droit, et je détourne le regard.
« Alors wow. » Je pousse un petit rire et il m'accompagne une seconde.
« Je suis content que ça te plaise. »
Je me sens bien, même quand une bourrasque de vent s'engouffre entre nous d'un coup et balaye mes cheveux dans tous les sens. Même quand je sens ma peau commencer à tirer à cause du sel. Je lève mes yeux vers lui de nouveau, puis vers les filles plus loin, hors de portée de voix.
Je crois que je voudrais que Harry sache que j'ai compris ce que je n'avais pas saisit quand il m'a dit que j'étais différent. Je voudrai lui dire qu'il a bien fait de tendre sa main vers moi, que je veux bien avoir ce sens là dans sa vie si il le veut. Je voudrai lui dire mais je ne sais pas comment. Comment faire ? Peut-être que je me fais des idées ? Peut-être que je vais lui faire du mal en le disant comme je le pense ? Et je ne veux pas de ça, je veux qu'il se sente en sécurité vers moi, qu'il sache que sa main a été tendu à une personne qui la respectera.
« Harry.. » Il se tourne vers moi et on s'observe stupidement. Là, au bord de l'eau, le son des vagues couvrant celui de mon cœur dans mes oreilles alors que je fais de mon mieux pour soutenir son regard. La houles se lève et avale mon appelle et se tient sûrement prête à étouffer le reste pour que seul lui l'entende, lui et personne d'autre ici. Je voulais être moi même, n'est ce pas ? Je voulais trouver qui j'étais et prendre un nouveau départ, non ? Je pensais pouvoir faire ça en ignorant d'où je viens pour prétendre à autre chose avec lui, mais je ne le peux pas. Je dois accepter, et pour ça je dois lui dire. « Je suis gay. » Le mots tombe comme un caillou dans l'eau d'un lac en un jour sans vent, ça ne résonne pas, et le silence me répond, sans que je ne puisse être sûr que je l'ai vraiment dit. Il accepte la confession sans que son regard ne change et je sais que c'est la meilleure chose à faire. « Et quand j'ai fais mon coming out à mon père il a voulu me blesser.. merde il a même peut-être voulu me tuer. » Je me tourne vers la mer à nouveau, c'est trop dur de tenir son regard, surtout avec cette émotion dans la voix. Je ne l'avais pas encore admis à voix haute cette partie là, ça fait bizarre de le dire. C'est comme si j'en prenais vraiment conscience. « Il m'a frappé et je suis tombé sur un morceau de verre qui s'est logé dans mon bras gauche. C'est ça... ma plaie. » On retombe dans le silence, et son regard ne quitte pas mon profil. Je ne sais pas ce qu'il pense, mais je sais étrangement que je n'ai pas peur. Que je n'ai même aucune raison d'avoir peur.
Je pense qu'il enregistre l'information et que, dans sa tête, il rassemble les morceaux et fait des liens entre tout ce que j'ai dis et tout ce qu'il s'est passé. Quand enfin il semble avoir comprit, il hoche la tête.
« D'accord. » Dit-il simplement. « Je suis désolé que ça te soit arrivé Louis. » Il se tourne vers le large à nouveau. « Tu n'étais pas obligé de me le dire mais j'accepte de partager ce secret. » Je souris, je ne sais pas si on s'est comprit mutuellement, si il sait ce que j'ai fais en disant ça. « Tu ne méritais pas une telle chose, j'espère que tu le sais. » Conclu-t-il.
« Je le sais, oui. »
« J'espère aussi que tu sais que... ce n'est pas un problème pour moi ok ? Hétéro ou non.. » Il se tourne vers moi et capte mon regard aussi vite. « Ça n'a pas d'importance, tu restes.. mon ami. » Un visage ému tord mes lèvres et je hoche la tête. Je le regarde jusqu'à ce que ça devienne trop dur d'ainsi le regarder et que je n'ai plus que le choix de détourner les yeux, l'émotion dans la trachée. « Et je suis content que tu me le dises.. que tu m'attribues une telle valeur, ça me rassure.. parce que tu as déjà pas mal de valeur pour moi aussi, plus que tu ne le crois sûrement. » Je crois que ça devient finalement trop dur pour moi, ces mots me touchent beaucoup trop. J'avais sûrement besoin de le lui dire, presque autant que j'avais besoin de me savoir accepté par quelqu'un. Dans ma vie je crois n'avoir dit qu'à Liam et une très ferme et petite poignée d'amis que je suis gay, ce qui est peut-être idiot pour quelqu'un avec tant d'amis que ça. Surtout par rapport Zayn que j'ai forcé dans le placard parce que je n'arrivais pas à assumer. Alors je crois que ça fait du bien d'être accepté par quelqu'un, accepté et valorisé.
Je me mets à pleurer. C'est plus fort que moi. Je baisse le regard et mon sourire se tord pour devenir un rictus de peine. Je renifle grossièrement et les larmes déboulent plus vite que je n'arrive à les sentir. Elles coulent. Une, deux trois. Et bientôt c'est une flot qui roule sur mes joues alors que mes épaules se secouent dans un sanglot trop fort pour mes maigres forces réservées à le retenir. Je frotte mon visage d'une main et inspire avec difficulté, le souffle se coinçant par accoue dans ma gorge serré et douloureuse. Je n'arrive pas à me retenir.
C'est la première fois que je pleurs vraiment depuis ce soir là. La première fois que je réalise vraiment ce qui s'est passé et combien c'est mal, combien je ne le méritais pas, combien ça m'a blessé. C'est la première fois que cette peine sort. Bien sûr j'ai pleuré le soir même, mais ce n'étaient pas les mêmes larmes, celles-ci ne sont pas de choque et de douleur physique, celles-ci sont de douleur mental tonitruante, de soulagement, de haine et d'amour, de reconnaissance et de peine. Celles-ci c'est la totalité de ce que je porte qui soudain déborde du vase, ma rancœur, ma culpabilité, ma haine et ma tristesse, tout, sans fin. Le barrage est brisé et le torrent déferle sur mon corps, ébranlant mon être et me précipitant droit dans la mer devant moi. Je voudrai m'y noyer, j'ai tant voulu m'y noyer, si longtemps, mais je suis bien là, les pieds sur la terre.
Soudain, Harry m'enlace. Son bras s'enroule à ma taille et il tire mon corps contre lui. Un frisson me parcours, de froid ou de réconfort, ou bien des deux. Je me laisse aller et couche ma tête contre son épaule en fermant les yeux pour me calmer. Sa main frotte tendrement mon bras puis le creux au dessus de ma hanche et je souffle longuement pour reprendre mon souffle. Il est doux et patient et je l'en remercie.
Je pense qu'il a comprit. Après tout, il a dit que j'avais beaucoup de valeur pour lui et qu'il était rassuré qu'il en ait pour moi aussi. C'est tout ce que je voulais. Qu'il sache.
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