Chapitre 83 (T.W)
Malcolm, six ans plus tôt
Le soleil est à peine couché que je sens une présence dans ma chambre. C'est la cinquième fois que ça se produit. La cinquième. Mais cette fois, je suis armé. Pas question de subir cette agression encore une fois, de me retrouver pris au piège sans défense. Pas cette fois.
Je garde mes yeux fermés, respirant aussi normalement que possible. Le silence est presque parfait, mais je l'entends tout de même. Un souffle, léger, à peine perceptible, celui de l'intrus qui se glisse dans l'ombre, qui attend, qui calcule. Une silhouette qui avance sans bruit, prête à frapper. Une pression qui s'installe dans ma poitrine.
Ma main est sous mon oreiller. J'y suis préparé. La crosse froide de mon Glock y repose, parfaitement à portée de main. Je sens le métal de l'arme contre ma peau, un rappel glacé de ma décision. Je n'ai plus aucune intention de me laisser faire. Je refuse de finir comme la dernière fois, là, dans cette douleur et cette humiliation, bâillonné, les yeux bandés, mes poings serrés sans pouvoir réagir.
Un frisson me parcourt, mais je le garde pour moi. La panique peut attendre. Je dois garder le contrôle. Pas question de supplier cette fois, pas question de me soumettre encore une fois à ce regard dégoûtant. Pas question de voir ce sourire malsain qui me glacerait le sang, de le laisser se repaître de ma faiblesse.
La respiration de l'intrus se fait plus proche, plus intense. Je sens qu'il est juste là, à quelques centimètres de moi, qu'il scrute chaque mouvement que je fais. Un léger bruit, presque imperceptible, me fait comprendre qu'il est désormais accroupi près du lit. Sa main va peut-être se tendre. Je suis prêt.
Je serre un peu plus fort le Glock, la crosse me mordant la paume. Je n'entends plus rien, ou peut-être est-ce juste le silence assourdissant qui m'oppresse, qui m'étouffe. Ma respiration est calme, mais intérieurement, je m'agite. Ce n'est pas la peur qui m'envahit, c'est la colère, celle qui bouillonne en moi depuis trop de temps. C'est la rage qui m'a fait prendre cette arme, qui m'a poussé à la garder près de moi. Ce n'est pas la peur. C'est la nécessité.
Je l'entends bouger. Un léger craquement, comme un souffle à peine audible. C'est tout. Je reste figé. Immobile. Ma main reste fermement agrippée à l'arme, prête à dégainer en une fraction de seconde. Je suis plus calme que jamais, mes muscles tendus comme des ressorts prêts à exploser.
Il avance encore. Je devine à peine ses mouvements. Mais je sais qu'il est là, tout près. À portée de main. Je sens presque sa chaleur, l'odeur de sa sueur qui me parvient en vague. Je dois frapper vite, avant qu'il ne s'en rende compte.
Tout à coup, il tend la main.
C'est le moment.
Je n'hésite pas.
En un éclair, je fais jaillir le Glock de sous mon oreiller et je pointe l'arme vers lui, la détente prête à céder. Le métal froid de l'arme brille dans la faible lumière de la chambre, comme une promesse glacée de ce qui va suivre. Le silence est lourd, presque tangible. Le souffle suspendu, je sens la tension, la puissance de l'instant.
Mais soudainement, une onde de panique m'envahit. Ce n'est pas le visage que j'aurais voulu voir dans cette situation. Ce n'est pas le visage d'un intrus, d'un ennemi que je pourrais éliminer d'un geste. Non. C'est celui de mon oncle, le Patriarche, celui qui m'a façonné, celui qui a marqué mon âme de sa poigne glacée.
Et en un instant, tout mon corps se fige. Les tremblements commencent. Mes mains, jadis sûres de leur pouvoir, deviennent des instruments de faiblesse. Je sens la sueur perler sur ma peau, mes jambes se dérobent sous moi, et pourtant je garde l'arme pointée, comme un dernier acte de rébellion.
— Debout, vermine ! tonne sa voix, profonde et autoritaire, coupant la pièce en deux.
Le son de ses mots frappe comme un fouet. Ils résonnent dans ma tête, déchirent ce semblant de contrôle que j'avais encore, et me forcent à obéir. Comme la bête docile qu'il a si bien éduquée, je me redresse brusquement, l'arme toujours entre mes doigts tremblants. Mes muscles sont tétanisés, mais mes yeux, eux, refusent de quitter son regard, défiant son autorité ouvertement. Il n'y a pas de pitié dans ses yeux, seulement cette froideur qui m'a toujours hanté. Je suis son reflet, une copie déformée de lui-même, et c'est ce reflet que je hais et aime à la fois.
Je me dirige vers le coin de la chambre, m'habillant mécaniquement, en enfilant mes vêtements d'entraînement, tout en sentant la lourdeur de son regard sur moi. Chaque mouvement semble être sous son contrôle, une danse qu'il a chorégraphiée dans la douleur et l'humiliation. Il n'y a pas de place pour la résistance ici, pas de place pour les choix. Juste l'obéissance, pure et brutale.
— Il est évident que tu seras puni pour avoir pointé ton arme sur un être aussi indispensable que moi ! ajoute-t-il d'une voix glacée, pleine de dégoût et de mépris.
Les mots percutent comme des pierres. Une nouvelle couche de honte se dépose sur moi, une couche qui me colle à la peau. Je ferme les yeux un instant, comme pour fuir cette réalité, mais il me l'impose. Son souffle rauque est proche, son ombre se dessine sur le sol comme un prédateur qui attend son heure. Et moi, je suis là, figé, sans échappatoire. Je suis son œuvre, son échec et sa réussite à la fois, tout ce qu'il a voulu que je sois.
Je baisse la tête, évitant ses yeux. Il aime ça. Il aime voir son pouvoir sur moi, la soumission dans mes gestes. Il est le maître, et moi, un pantin qui ne sait plus s'il désire encore couper les fils qui le tiennent. Il ne me laisse pas le temps de respirer, de penser. Ses pas résonnent derrière moi comme des coups de marteau, me martelant chaque seconde qui passe. La chaleur m'étouffe, mais je suis là, dans cette cage que j'ai construite avec mes propres mains, et lui, il me regarde de haut.
— Suis-moi, maintenant !
Il y a une impatience dans sa voix, comme une menace silencieuse, glacée, qui semble m'envahir. Chaque syllabe est une morsure, chaque mot un coup porté. Il ne me laisse aucun répit. Je sais ce qui m'attend. Je le sais par cœur. Les événements sont écrits d'avance, et malgré la terreur qui me déchire, je n'ai pas la force de lutter, pas la force de le regarder une dernière fois dans les yeux avant de sombrer. Non. Je n'ai plus rien. Plus aucune volonté, plus aucune forme de résistance. Le poids de la peur m'écrase face à cet homme.
Je me lève mécaniquement, comme un automate dénué de vie, d'âme, d'espoir. Mes jambes tremblent, mes pensées se brouillent, mais je me force à avancer. Pas un mot, pas un geste pour me révolter. Juste l'obéissance, celle qui est gravée dans mes entrailles. Le chemin est tout tracé. Je suis condamné à le suivre, encore et encore. Les questions ne servent à rien. Les doutes ne m'appartiennent plus. Il m'a ôté tout ça. C'est lui qui m'a fait, lui qui m'a brisé, et je suis incapable de m'en échapper.
Sans plus attendre, nous quittons ma chambre. La lourde porte se referme derrière moi, et un silence oppressant envahit l'espace. Le couloir sombre semble s'étirer à l'infini. Mes pas résonnent de manière sourde sur le sol froid, me rappelant à chaque mouvement ma condition. Je passe une main dans mes cheveux, presque instinctivement, en marchant devant la porte de la chambre de ma cousine. Ses yeux verts, que je perçois à peine, se plantent discrètement dans les miens. Ils portent la même souffrance, la même résignation que les miens. Mais je me détourne. Je ne peux pas la regarder, pas maintenant. Pas dans cet état. Pas dans cet état où je suis tout sauf moi-même.
Le poids de son regard me hante, mais je le chasse immédiatement, me forçant à me concentrer sur le chemin que je dois parcourir, celui qu'il m'impose. Une fois le seuil de la pièce franchi, je sens son bras s'étirer soudainement vers la porte attenante, celle qui mène à l'endroit où tout se déroule. Le lieu du supplice. Là où la douleur est devenue familière, presque un second souffle. Je meurs un peu plus chaque jour, et pourtant, je suis encore là, présent dans cette réalité qui ne fait plus sens.
Nous arrivons enfin en bas, le sol froid sous mes pieds nu-pieds, mes jambes tremblant légèrement. Une lourde porte grince, s'ouvrant lentement sur la salle d'entraînement. L'air se fait plus lourd, chargé de cette tension que j'ai apprise à reconnaître.
Mon oncle défait sa ceinture avec une lenteur presque calculée, l'action d'une simplicité déconcertante, d'une mécanique huilée. Je l'observe, implacable, et je sais qu'il attend quelque chose de moi. Une rébellion, peut-être. Une tentative d'évasion. Mais au fond, il sait aussi bien que moi que je n'ai plus la force, ni l'envie, de résister depuis bien des années déjà.
Je suis là, figé contre le mur, mon cœur battant dans ma poitrine comme un tambour de guerre qui se fait plus pressant à chaque seconde. J'entends presque le sifflement de la ceinture qui se déploie dans l'air, une promesse de souffrance imminente. Chaque instant avant l'impact semble une éternité. Je sais qu'il va frapper, et je sais aussi que je le mérite.
— Retire ton pull.
Sa voix, glaciale et autoritaire, me tranche en plein cœur, aussi tranchante qu'un couteau. Il n'y a pas de place pour l'humanité, pour la pitié dans ses mots. Il y a juste l'ordre. Une obéissance qu'il attend de moi, une soumission qu'il exige, et que je n'ai pas le cran de refuser. Je le regarde un instant, ses yeux perçant la pièce comme des épées, avant de baisser les yeux. Mon corps, déjà tendu, se soumet, lentement, comme un condamné qui attend son verdict.
Le pull glisse lentement sur mes bras, la chaleur de ma peau se dévoilant sous la pénombre de la pièce. Je le sens dans le vide autour de moi, comme si chaque fibre de mon être se contractait sous l'anticipation. Ma peau frissonne au contact de l'air frais, mes mains fermement pressées contre le mur. Je sais que ce que je vais recevoir est mérité. Je l'ai mérité depuis longtemps.
Le premier coup tombe avec un bruit sec, brisant le silence oppressant de la pièce. Le choc est si brutal que j'ai l'impression que mes os vont se briser.
SHLAK !
Le cri qu'il laisse échapper est un poison dans l'air, plus douloureux que le coup lui-même.
— Petit merdeux inutile !
Les mots s'enroulent autour de moi, acides et violents, imprégnant chaque centimètre de ma peau. Je sens l'humiliation monter en moi, comme une marée noire. Ce n'est pas simplement la douleur qui me frappe. C'est cette certitude qui se fait plus claire, plus nette à chaque impact : je ne serai jamais assez. Jamais assez pour lui. Je ne suis qu'une déception, un sous-produit de sa lignée qu'il doit détruire et remodeler à sa convenance.
Un second coup, plus rapide, plus puissant, fait trembler mon corps tout entier. La brûlure de la ceinture sur ma peau m'envahit, chaque claque résonne dans mon crâne, me coupant le souffle.
SHLACK !
Mon corps se tend davantage sous l'impact, chaque fibre de moi en alerte, mais sans le moindre espoir de résistance.
— Tu sais pourquoi je te punis ?
Je baisse la tête, mes yeux se posant sur le sol. Je n'ai pas besoin de répondre. Pas besoin de lui donner l'occasion de me voir trembler, de lui montrer la honte que je ressens, cette honte muette qui m'enserre à chaque mot qu'il prononce. Je sais ce qu'il attend. Il attend que j'admette ma faute. Que je l'accepte, que je le reconnaisse comme mon juge, mon bourreau. Et je suis trop faible, trop brisé pour lutter.
— Tu t'imagines que tu peux échapper à ça ?
Sa voix se durcit, se fait plus menaçante, presque comme un cri étouffé dans sa gorge. Il s'avance d'un pas, sa silhouette noire se découpant dans l'obscurité de la pièce.
— Tu es un homme de ma lignée. Et tu as oublié ce que ça veut dire. Me menacer moi alors que je viens te chercher pour t'apprendre la vie !
Le coup suivant tombe sans crier gare, le choc d'un violent impact contre ma peau.
SHLAK !
J'incline encore un peu la tête, comme un soldat qui se prépare à l'attaque. Je sais ce qu'il attend de moi : une soumission totale, un abandon sans condition. Et j'y vais. Toujours plus loin. Toujours plus bas.
— Regarde-toi. Sa voix est devenue tranchante, presque glaciale. Tu n'es même pas capable d'honorer les enseignements que je t'ai donnés ! Tes sens, Malcolm ! Tu aurais dû savoir que c'était moi dans ta chambre ! Faiblard !
Les mots s'enroulent autour de moi comme des chaînes, me tirant vers le fond, là où la lumière n'a plus sa place. Je ferme les yeux, car c'est la seule manière de supporter cette vérité qui me frappe dans le ventre, chaque claque me la renvoyant encore plus violemment.
Il a raison, bien sûr. Il a toujours raison. Parce qu'au fond, je mérite ça. Je mérite chaque douleur, chaque coup, chaque humiliation.
Je me laisse faire, comme un animal qui a appris à accepter sa condition. Je suis son pantin, son instrument de souffrance, et je sais qu'il est le seul à pouvoir me donner un sens. Il est mon maître, mon dieu, mon bourreau. Et je n'ai jamais eu la chance d'échapper à son emprise.
Je sens sa main glisser sous ma mâchoire, me forçant à relever la tête. Il est si proche que je peux sentir l'odeur de sa peau, du cuir de sa ceinture, un parfum d'acier et de domination. Il me force à croiser son regard, et je vois la lueur dans ses yeux, une flamme froide et méprisante.
— Tu sais que tu n'es rien sans moi.
Je n'ose rien dire. Je laisse son regard m'engloutir, sans rien ajouter. Parce qu'il a raison. Il a toujours raison. Je suis son reflet, son sous-produit, et sans lui, je ne serais rien. Jamais personne. Et il le sait.
— Tu crois que ça te rend fort de garder le silence, d'accepter ? Non, tu n'es qu'une merde faible et pathétique !
Je n'ose même pas répliquer. Il sait que je suis brisé. Il sait que je ne me défends plus. Que je suis là, juste pour lui prouver qu'il a raison. Chaque mot, chaque claque, me transperce comme une lame, mais je n'éprouve plus la douleur. La douleur physique n'est plus qu'un bruit de fond, un écho. Le poison, c'est lui. C'est sa voix. C'est sa présence.
Il me saisit brusquement, me tirant contre le mur dans un mouvement violent. Je reste là, immobile, attendant le prochain coup, le suivant. Comme si chaque douleur me ramenait à ma réalité.
— Pardonnez-moi, mon oncle... Je pensais que c'était...
— Boucle-la ! Tu ne mérites même pas de t'adresser à moi ! Comment as-tu osé me regarder dans les yeux, petite sous-merde !
Le coup suivant tombe sans préavis. Plus fort. Plus violent. La douleur me consume, mais je n'essaie même plus de m'y soustraire. Je suis prêt à encaisser. Toujours. Prêt à tout.
Chaque coup me rappelle ma place. Chaque coup me rappelle que je ne suis pas grand chose. Rien de plus qu'un jouet, qu'une chose entre ses mains. Et pourtant, dans un coin sombre de mon esprit, une pensée dérangeante émerge. J'aime ça. J'aime lui appartenir. Parce que sans lui, qui suis-je ? Que dalle.
— Tu mérites juste de crever comme ta mère ! Je comprends pourquoi elle a essayé de te tuer !
Le dernier coup tombe, encore plus fort. Je sens le monde basculer autour de moi. Ma tête se baisse à nouveau, mes yeux se fermant presque instinctivement. Mais au fond, dans cette soumission, il n'y a plus de rébellion. Juste l'acceptation.
Parce qu'il a raison. Il a toujours raison. Et moi, je suis une erreur. Une simple erreur. C'est à moi de payer pour ça. Chaque coup, chaque parole, chaque geste me rappelle ma place dans ce monde qu'il contrôle. Une place insignifiante, écrasée par la loi de la force, de la soumission, où l'on apprend à plier sans jamais se relever. Je suis une existence vide, une ombre dont la seule fonction est de servir son maître, de me faire oublier ma propre humanité pour m'abandonner à son désir de domination. C'est ainsi qu'il m'a forgé, et je n'ai pas le droit de m'y opposer. Pas le droit de rêver de quelque chose de différent. Je suis un produit de sa volonté, un artefact de sa cruauté.
Soudain, il s'arrête et me tire à lui dans une étreinte. Ce geste me déstabilise, mais c'est devenu une habitude. Il fait toujours ça quand il a fini de nous punir.
Il me prend dans ses bras, m'enserrant comme un enfant qu'il berce après un moment de colère. L'étreinte est froide, mais réconfortante, comme une couverture qui, tout à la fois, réchauffe et étouffe. Il semble vouloir effacer le mal, effacer la douleur, me faire oublier que je suis celui qu'il a brisé. Un câlin, une bise sur le front, quelques mots doux, une question, et tout est oublié. Ou du moins, c'est ce qu'il espère. Mais dans cette douceur feinte, une hyène se cache, qui, par son souffle apaisant, nous hypnotise et nous rend vulnérables à son emprise. Comme si, après la violence, il cherchait à effacer l'empreinte de sa domination.
— Malcolm... Tu sais que je fais tout ça pour votre bien... Je veux que vous deveniez de grandes personnes, toi, tes cousins, et même ton frère...
Il dit cela comme une vérité universelle, une certitude qu'il a imposée à tout le monde, y compris à moi. Comme si toute cette violence était un moyen légitime de nous forger, de nous préparer à ce que la vie nous réserve. Mais ses mots me brûlent, me rappellent que j'ai perdu ma liberté dans ce processus, que tout cela n'est qu'une illusion de bienveillance.
— Kiara... murmuré-je, comme pour lui rappeler l'existence de sa fille.
Je ne peux m'empêcher de penser à elle, là, loin de tout cela. Elle, qui ne mérite pas de vivre dans cet enfer.
Il ne répond pas à cela. Il fait semblant de ne pas entendre, comme il fait semblant de ne rien savoir de ce qu'il inflige à chacun de nous.
Il continue de me bercer, me couvrant d'une douceur qui est à la fois agréable et douloureuse. C'est une douceur qui cache une intention déformée, une gentillesse empoisonnée. Je m'y perds, je me laisse aller dans cette mer de contradictions. C'est plus facile ainsi. Plus facile de croire qu'il m'aime. De croire qu'il m'aide. De croire que tout ce que je ressens est erroné, que cette souffrance est nécessaire.
— Est-ce que tu m'aimes ? me demande-t-il, sa voix douce, presque câline.
C'est la question qu'il me pose toujours, après chaque punition, après chaque humiliation. Comme si son amour était la récompense ultime, l'ultime justification de tout ce qu'il me fait subir.
Et là, comme à l'accoutumée, dans son sourire, toute ma rancœur disparaît. La culpabilité m'envahit. Pourquoi ressentir de la haine envers celui qui me veut du bien, n'est-ce pas moi qui suis trop faible pour comprendre ? Son sourire est comme une main tendue, une caresse qui me prend tout entier et me fait oublier ce que j'ai enduré. Il a ce pouvoir sur moi. Celui de me faire douter de ma propre perception.
— Je donnerais ma vie pour vous, mon oncle, lui réponds-je, les mots glissant de ma bouche comme une vérité acquise.
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