Coeur nomade
Image de Kayla et de comment elle est habillée dans le chapitre
Cela faisait déjà trois jours que nous voyagions vers la ville. Trois jours. Et à pied avec nos énormes sacs à dos de voyage en plus! C'était décidément le seul moment où j'aurai vraiment voulu que ma mère possède une voiture. Bien sûr, on n'en avait jamais vu l'utilité avant aujourd'hui. Ma mère avait été silencieuse depuis qu'elle m'avait annoncé que nous irions à l'académie Nakras, ignorant chacune de mes questions et ne m'adressant la parole que pour m'indiquer où dresser le campement. Les lèvres pincées, elle semblait constamment perdue dans ses pensées, ce qui commençait à m'agacer royalement. Je veux dire, des hommes franchement louches nous attaquent avec de la fumée, on quitte la maison dans laquelle on est resté cloîtré pendant vingt ans et elle ne veut pas me dire ce qui se passe! Et tout ça, c'est sans parler d'aller à l'académie Nakras.
Je sais bien que je ne connais pas beaucoup le monde extérieur (pour ne pas dire pas du tout), mais l'académie n'a jamais été réputée pour accueillir des voyageurs quelconques. Ils sont plutôt du genre club sélect qui ne prend en charge que les meilleurs combattants du territoire pour leur apprendre à devenir des Nakras, donc des guerriers de feu et lumière. Bref, ils ont l'air un peu snob et ne nous inviterons certainement pas dans leur grosse baraque de puissants guerriers.
Je poussai un soupir de frustration. Mes pieds me faisaient affreusement mal et mon front commençait à perler de sueur. Je portais un simple t-shirt blanc ample avec une paire de jeans et mes fidèles Converses, en regrettant amèrement ce choix de vêtements trop chaud pour la température. Ma mère avançait d'un bon pas devant moi, ralentissant de temps en temps pour ajuster son sac à dos sur son épaule avec son bras opposé, l'un d'eux étant toujours brisé et retenue par un bandage et une branche. Pas de jugement, on n'a pas le luxe d'aller à l'hôpital quand on se terre dans le bois.
Soudain, elle s'arrêta pour se tourner vers moi.
-Hailee, on arrive à la ville. Reste près de moi et ne parle à personne. L'académie est au sommet de l'ancien volcan, on peut sûrement l'atteindre avant la tombée de la nuit, mais je veux t'avertir que les gens là-bas ne m'apprécient pas particulièrement, donc essai de rester le plus silencieuse possible et de me laisser gérer la situation, me demanda ma mère en me regardant droit dans les yeux.
Je pouvais parfois avoir un tempérament assez explosif, j'imagine que c'était l'une des raisons pour laquelle ma mère me demandait de ne pas parler. Elle avait toujours pensé que ça venait de mes pouvoirs de feu, j'avais un caractère aussi brûlant et imprévisible que la flamme. Elle n'avait pas tort là-dessus.
-C'est bon, je vais me taire et essayer de ne pas trop avoir l'air d'une touriste, dis-je d'un ton résigné.
De son bras valide, ma mère m'encercla les épaules affectueusement en me lançant un sourire avant de se remettre en marche. Après une dizaine de minutes de plus à marcher, les arbres firent bientôt place à des routes de terres battues entourées de petites maisons blanches. Des gens allaient et venaient de tous les côtés et je regardais tout autour de moi en essayant de suivre le rythme de ma mère. Tout cela était si nouveau pour moi, la curiosité m'emportait, mais ma mère avait accélérée le pas depuis que nous étions sortis de la forêt, ce qui rendait difficile de la suivre tout en regardant tout ce qu'il y avait à voir.
Bientôt, les maisons firent place à une sorte de marché avec plusieurs kiosques où différents artisans semblaient vendre leurs produits. Peu d'acheteurs étaient sur place toutefois, probablement étant donnée l'heure avancée. Certains me lançaient des regards curieux, sûrement parce que je devais avoir l'air exactement de ce que je suis: une fille n'ayant jamais vu un marché ou un autre être humain que sa propre mère. Embarrassée et sentant que mes joues allaient s'empourprer d'une seconde à l'autre, je décidais de garder le cap devant et de me concentrer sur la montée à faire parce que oui, la ville entière était construite sur le flanc du volcan et donc en pente. J'étais sérieusement en train de me demander si le critère de sélection pour pouvoir être accepté à l'académie Nakras n'était pas de seulement être capable de montée jusqu'à l'académie. Quoique je semblais être la seule dans la ville à être couverte de sueur et à respirer bruyamment.
J'allais commencer à me plaindre sur la longueur de la montée quand je vis les maisons et le marché disparaître pour laisser à nouveau place aux arbres qui entouraient une route terreuse. Ma mère semblait devenir de plus en plus nerveuse, je me demandais si cela avait avoir avec le fait qu'elle avait dit ne pas être en bon terme avec les gens de l'endroit. Je ne savais même pas qu'elle connaissait ces gens à la base...
-Hailee, tu ne parles à personne du feu et tu ne l'utilises pas sans aucune exception. À moins que je te dise autrement, dit soudain ma mère en continuant de marcher et sans se retourner.
-Donc, il y a une exception, non? Il faut que tu me le dises, répondis-je.
Ma mère s'arrêta brusquement.
-Hailee, tu sais ce que je veux dire. Ici, c'est différent. C'est différent de la vie dans la forêt et c'est différent de ceux qui nous ont attaqués. Tu as ce qu'ils cherchent depuis vingt ans: le feu. Il y a toujours des gens qui feraient n'importe quoi pour avoir accès au pouvoir, alors le moins ils en savent sur toi, le mieux se sera, dit-elle d'un ton sérieux.
-Attend, je pensais qu'on allait chez les gentils là!
-Il n'y a jamais de gentils ou de méchants, la vie n'est jamais si simple. Tu fais ce qu'on t'a enseigné être le bien sans vraiment savoir si tu es du bon côté. Ici, c'est la lumière contre la noirceur, mais sans noirceur il n'y a pas de lumière. Le but n'est pas de détruire l'autre, car chacun est essentiel. Il faut simplement maintenir l'équilibre entre les deux et éviter que l'un prenne plus de place. Certains ne comprennent pas ce principe et tu es une arme très vulnérable en ce moment dont ils pourraient abuser. Ne leur laisse pas l'occasion, dit ma mère.
Je la regardais silencieuse un moment. Est-ce que mon pouvoir de feu était vraiment si important? Je veux dire, je savais bien que ça ne courait pas les rues des filles pouvant envoyer des boules de flammes, mais le feu attendu depuis vingt ans? Combien d'autre information est-ce que ma mère me cachait?
-Je sais que c'est beaucoup de chose en même temps, mais tu vas mieux comprendre quand on va rencontré le directeur de l'endroit, dit ma mère dans un soupir et en se retournant pour se remettre en marche.
Ne sachant pas quoi répondre, je la suivis sans un mot. Je ne sais pas trop à quoi je m'attendais de ce départ de la forêt, mais certainement pas à autant de choses me concernant. Je passais le reste du chemin dans mes pensées, maudissant occasionnellement mon choix de chaussure chaque fois que je passai à peu de me fouler la cheville. Donc, à chaque fois que je trébuchais sur une racine au sol. Pas comme s'il y en avait beaucoup dans une forêt.
Après une éternité, j'aperçus finalement les contours d'une sorte d'énorme manoir de pierres brunes avec l'inscription «Académie Nakras». Comme si on pouvait se tromper... En approchant l'immense porte de bois sombre, un garde nous interpella.
-Vous n'êtes pas autorisé à entré, spécialement pas vous, dit le garde en regardant ma mère.
Non, mais pour qui il se prend?! Ce n'est pas parce qu'il portait un complet noir et une arme à la ceinture qu'il devait se croire tout puissant! Je dû me mordre la langue pour ne pas le remettre à sa place, je déteste les gens qui se prennent pour d'autres...
-Je sais qu'il est tard et que ma présence ici n'est pas conforme à ce qu'on avait établi, mais une situation est arrivée et je n'avais pas d'autre choix. J'ai besoin de voir Mr. Jackson, dit ma mère de son ton le plus calme et respectueux.
Une grande actrice, préparé l'Oscar.
-Je suis certain que M. Jackson a d'autres choses à faire en ce moment que d'être dérangé par une exclue et une gamine. Vous avez une situation, vous la réglez, c'est tout, répondit le garde.
Exclue? Ma mère n'est pas une exclue et j'ai vingt ans bon sang, je ne suis pas une gamine!
-Mais je suis certaine qu'il sera intéressé, puisque la situation concerne les Oru et le feu, poursuivit ma mère avec un sourire faussement poli.
Le garde la regarda longuement, puis regarda la porte avant de revenir vers nous.
-Comment est-ce que je peux savoir que vous dites bien la vérité?
-Je n'ai pas fait tout chemin parce que vous me manquez, ça, c'est sûr, répondit ma mère d'un ton agacé.
Le garde hésita encore un peu avant de lâcher un juron et d'ouvrir la porte, nous signifiant de le suivre sans faire de bruits. L'intérieur ressemblait à un ancien manoir: du bois foncé sur les murs, des couloirs étroits et des chandeliers se trouvaient dans l'endroit. Ma mère me tira légèrement par le bras pour me faire accélérer le rythme, je devais avouer que c'était pas mal. Le garde frappa à une porte et y entra seul avant de revenir quelques minutes plus tard en nous faisant signe d'y aller à notre tour. Ma mère sembla hésité avant de finalement entrée, moi à sa suite.
Le bureau ressemblait beaucoup au reste de la demeure, le même bois foncé et chandelier était présent, avec en plus un large bureau du même bois, ainsi qu'un divan de cuir. Un homme âgé se tenait devant le bureau en complet bleu marin et fixant durement son regard bleu acier sur ma mère.
-J'espère que tu as une bonne explication à ta présence ici, Olivia, commença l'homme en ne m'adressant même pas un regard.
-Je ne serais pas venue sinon, répondit doucement ma mère en prenant place sur le divan et en m'indiquant de faire de même.
-J'écoute, poursuivit l'homme en jetant un regard froid à ma mère.
Il devait sûrement être l'une des personnes avec qui elle est en mauvais termes. Ma mère ne se fie pas prier, sentant sûrement que l'homme voulait rapidement savoir ce qui se passait. Elle raconta l'attaque des hommes, omettant volontairement toute les parties qui parlaient de moi et du feu. L'homme fronça les sourcils.
-Des Oru? Ils ne se déplacent habituellement pas dans les endroits isolés et certainement pas en si grand nombre, demanda M. Jackson d'un ton presque accusateur.
-Je n'ai aucune raison de mentir, répliqua ma mère.
-Tu as aussi fait mention d'avoir des informations sur le feu à mon garde, poursuivit l'homme après un silence.
-Ça, c'est plus délicat. J'ai besoin d'un échange de service là-dessus.
À ces paroles, M. Jackson sembla s'enrager.
-Pardon?! Tu brises les règles en venant ici avec une inconnue et tu oses me demander un service! Tu n'as aucun droit sur moi ou les Nakras, tu devrais me supplier de ne pas revenir sur ma décision!, hurla l'homme.
-Je sais où est le feu, mais j'ai besoin de savoir que vous allez le protéger, répondit calmement ma mère.
Une minute, qu'est-ce qui s'est passé avec le «on ne parle surtout pas du feu»?!
-Je n'ai jamais manqué de protéger le feu avec ma vie et tu le sais bien! Les Nakras l'ont cherché pendant vingt ans et les recherches sont toujours actives à l'heure où on se parle. Le territoire entier à été ratissé et je devrais croire que toi tu sais où il est?
-Si je dis la vérité, le feu est retrouvé et vous acceptez ma condition. Si je mens, je retourne d'où je viens. C'est une entente raisonnable, répondit-elle.
L'homme réfléchi un instant, gardant son regard fixé sur ma mère avant de répondre.
-Quelle condition?, lâcha-t-il.
-Ma fille aussi doit être protégée. Au même titre que le feu, dit ma mère d'une voix soudainement faible et tremblante.
L'homme sembla incrédule pendant un instant, puis son regard se posa sur moi. La colère sembla montée dans ses yeux.
-Ta fille?!, répéta-t-il.
Il inspira un moment comme pour se calmer.
-Et quel âge as-tu?, me demanda-t-il en sembler essayer très fort de contrôler sa voix pour ne pas hurler.
-Euh... 20 ans, dis-je légèrement apeurer.
Ma réponse sembla le mettre hors de lui, il fit le tour du bureau deux fois avant de finalement s'immobiliser derrière la chaise de bois et de soupirer à nouveau longuement.
-Où est le feu, Olivia?, demanda finalement l'homme d'un ton qui laissait entendre qu'il acceptait la condition de ma mère, mais à contrecœur.
Je ne sais pas à quoi je m'attendais. Peut-être à ce que ma mère mente et désigne quelque chose d'autre comme porteur du feu ou encore à ce qu'elle dise quelque chose de vague comme une prophétie pour désigner l'endroit. Tout, sauf ce qu'elle ouvrit la bouche pour dire.
-Devant vous, dit ma mère en se tournant pour me regarder.
Un autre chapitre! Moins d'action que le premier, mais il laisse place à beaucoup d'intrigue au sujet de la mère de Kayla. J'espère que vous avez aimé, laissez-moi savoir ce que vous en pensez!!!
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