~ PDV Malia ~ Partie 1

  Comme chaque jour, ma journée se déroule de la même manière depuis près d'un mois maintenant. L'arrivée de l'hiver demande encore plus de présence en ce qui concerne mon activité première. Gérer une exploitation de balade touristique n'est pas de tout repos et demande une présence quasi constante. Heureusement, j'ai auprès de moi, pour me venir en aide, mon oncle. Dernier membre de ma famille et pas des moindres pour moi. Il est comme un père pour moi et je ne le remercierai jamais assez d'être resté à mes côtés depuis toutes ses années.

Cela va maintenant faire huit ans que j'ai repris les rennes de cette entreprise familiale, créée par mon grand-père lui-même lorsqu'il a emménagé ici, en Laponie. Français de nationalité, il a eu envie de tout quitter et il n'y a pas perdu au change, loin de là même. À peine avait-il mis un pied dans ce petit coin de paradis, qu'il y a élu domicile et ne l'a plus jamais quitté. C'est ici qu'il a rencontré ma grand-mère et que par conséquent, après de longues années, me voici maintenant à sa place.

Bon, j'admets que plusieurs points diffèrent contrairement à lui. Je suis une célibataire endurcie depuis maintenant trois ans, après la perte de Sébastian. Moment encore douloureux pour moi. En parler est même encore impossible et seul Marc, mon oncle connaît mon ressenti sur ce point. Il est le seul avec qui j'arrive à en parler. Parfois, seulement. Sujet qui même après toutes ses années m'est encore douloureux. Voilà pourquoi maintenant je me concentre à notre entreprise familiale et mon second métier, kinésithérapeute.

J'exerce ce dernier dans un centre spécialisé à Rovaniémi. Une ville à quelques kilomètres de chez moi. Je ne suis réquisitionnée ou appelée que lors de gros cas car mon entêtement est souvent des plus utiles avec les personnes gravement handicapées. Contrairement à mes collègues, je n'ai pas peur de me montrer dure envers mes patients. Non par plaisir mais par nécessité afin de leur faire prendre conscience de ce qu'ils sont capables de faire. Ainsi que la volonté qu'ils détiennent en eux, mais dont ils ignorent à ce moment-là.

Jusqu'à maintenant, depuis presque dix ans que je fais ce métier, je n'ai encore jamais échoué et j'aime à penser que cela continuera ainsi. Comme aime à le dire mon oncle, je suis aussi butée qu'une mule quand je décide quelque chose et force m'est d'avouer qu'il a raison sur ce point. Une qualité selon moi, qui pour d'autre peut devenir un défaut, mais je ne m'en formalise pas car je suis ainsi et ne compte pas changer.

À peine ma tasse de café avalée, je m'empresse d'enfiler ma doudoune et mes bottes fourrées, afin d'aller nourrir les animaux. Le jour se lève à peine et j'aime ce moment de la journée. Celui où le calme règne encore, tout comme entendre quelques animaux non loin de ma propriété. La neige recouvre entièrement le sol et offre une sublime clarté à ce paysage qui s'offre à moi actuellement. Les arbres sont vêtus de leurs manteaux blanc eux aussi. Quelques traces sont visibles dans la poudreuse, celles de différents animaux qui sont venus fouler nos terres.

C'est avec un sourire aux lèvres que je prends la direction de l'un des bâtiments qui se trouvent à l'arrière du chalet principal. Lieu où sont les chiens de traineaux. Dix gros nounours, je dirais même plus, mes bébés. J'ai vu naître chacun d'eux et j'ai noué dès ce jour un fort lien avec eux. Ils m'offrent un amour inconditionnel et cela suffit amplement à remplir ma vie. Si l'on dit habituellement qu'une vieille fille finie avec des chats et bien pour ma part, ce sera avec des chiens et ça me va parfaitement. Fait qui désespère mon oncle.

Celui-ci craint que je passe à côté de chose magnifique en restant ici, enfermée avec mes bêtes. Ce n'est pas faute pour lui d'avoir, à de nombreuses reprises, essayées de me dire de sortir, de voir mes amis. De faire des choses que font les personnes de mon âge, mais cela ne me tente pas. Une vraie solitaire. Une Hermite presque. Ce qui le rassure c'est que j'ai un second métier qui m'oblige à côtoyer du monde, à sortir de la propriété. Sinon, je suis persuadée qu'il aurait été capable de me sortir lui-même à coup de pied de chez nous. Non que cela me fasse vraiment peur, mais son quarante-cinq ne me tente pas vraiment.

Pour l'avoir testé étant plus jeune, lors de mes escapades en pleine foret avec Baïko, mon husky, je sais qu'il peut faire assez mal. La frayeur que j'ai, de trop nombreuses fois, causé à mes parents et mon oncle me valait quelques remontrances. Malgré celles-ci, cela ne m'a jamais empêché de recommencer. Comprenez donc que j'évite de trop le provoquer, au cas où cela le démangerait de réitérer.

Je suis à peine devant la porte que les chiens se mettent à aboyer, ce qui me fait sourire. J'entre alors sans attendre dans l'immense bâtiment où ils se trouvent. Chacun d'eux possèdent un coin bien à eux, afin d'éviter tout problèmes. La première pièce sur ma droite est celle où sont entreposés les différents traineaux, utilisés pour les balades touristiques. Sur ma gauche se trouve l'infirmerie et la cantine pour ses gros poilus. Mes pas me mènent enfin dans l'espace où tous se trouvent et je suis accueillie par un concert d'aboiement. Que demander de plus alors je viens leur offrir des caresses, accompagnés de bonjour.

Comme beaucoup de personnes, je parle avec eux, comme s'ils peuvent me répondre. Ce qui fait souvent rire les enfants qui viennent visiter notre domaine. Six hectares de bois, de plaines enneigées actuellement.

Pendant presque deux heures, je m'occupe d'eux. Vérifie que tous vont bien et sont prêts pour leur journée à venir. Deux balades sont prévues, une ce matin et une cet après-midi, puis des élèves de Rovaniémi doivent venir nous rendre visite. Enfin, ils viennent surtout voir mes pensionnaires et ses derniers adorent avoir autant d'attention de la part des enfants.

Lorsque je reviens au chalet, il est bientôt neuf heures et mon oncle me rejoint, afin que l'on prenne notre petit-déjeuner ensemble. Notre petit rituel journalier. Un moyen aussi de rester attentif à l'autre, mais aussi de garder notre complicité et lien familial intact. Quand il me voit, Marc vient me serrer dans ses bras en guise de bonjour. Câlin que je lui rends aussitôt. Puis, on s'installe tous deux autour de l'îlot central dans la cuisine.

— Alors, tous le monde va bien ? me demande-t-il avec amusement.

— Oui, tous sont impatient de sortir et Kali semble en meilleure forme qu'hier, j'ai eu le droit à un câlin et un lavage du visage en bonne et due forme ! lui dis-je en souriant.

— Une bonne chose, alors ! Je vais donc pouvoir la remettre à sa place attitrée, en tête du traineau ! Car au moins avec elle là, je suis certain de pas me retrouver hors du sentier prévu !

Je ne peux retenir mon rire quand j'entends ses précisions. Il est vrai que Molto aime n'en faire qu'à sa tête et le mettre en chef de traineau, n'est vraiment pas conseiller. Sauf si l'on veut faire du hors-piste, ce qu'il adore contrairement à Marc. Les clients, quand cela arrive, semblent s'en amuser, ce qui est une bonne chose. Auquel cas, on aurait eu quelques petits soucis avec eux.

— Moques-toi ! Vas-y ! Mais la prochaine fois, je te laisserai t'y coller et on verra si tu rigoleras toujours autant de devoir sortir le traineau bloqué sous deux mètres de neige ! me lance-t-il alors, avec une grimace.

— Oh aller, tonton ! Même mes clients en rigolent alors ne soit pas si bougon ! m'empressé-je de lui dire, en tentant de ne pas rire de nouveau.

Il ne me répond pas mais le regard noir qu'il m'offre en entendant ma répartie me suffit à comprendre que cesser de rire à ses dépends semble être la meilleure chose à faire. Pas simple, mais si je ne veux pas le mettre de mauvaise humeur, c'est le mieux.

— Ok, Ok, je me tais ! Tu sais que je t'aime tonton, hein ? tenté-je alors de l'amadouer.

En voyant mon regard de chien battu, il laisse échapper un soupir de défaite et je lui offre alors un immense sourire.

— Tu arrives toujours à m'avoir, grogne-t-il mécontent. Ce, même après vingt-neuf ans, finit-il par avouer ensuite.

Je me lève de ma chaise et vient déposer un baiser sur sa joue, avant de le serrer dans mes bras, tout en lui disant.

— C'est pour ça que tu m'aimes, autant que je t'aime, tonton !

Il referme ses bras autour de mon corps et acquiesce à mes mots. On reste ainsi quelques minutes, avant que mon portable ne ce mette à sonner. Je file donc répondre, afin de découvrir qui essaie de me joindre et je m'aperçois que ce sont nos premiers clients qui nous avertissent de leur arrivée. J'en fait part à Marc et nous nous empressons de sortir les accueillir.          

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