Une matinée qui s'annonce assez tranquille. Depuis presque trois heures que nous avons pris notre poste, aucun appel. Pas une seule intervention et c'est chose rare. Habituellement nous avons au moins un ou deux appels pour de petites interventions. La neige en reste bien souvent la cause principale, mais par chance très peu mortelle. Les habitants étant habitués à ce temps sont des plus prudents lors de leurs déplacements et nous évitent alors de sortir à notre tour pour les secourir.

La vérification de nos véhicules se fait dans une ambiance de franche camaraderie. Les blagues et discussions vont bon train entre mes collègues et moi. Certains racontent leurs soirées animées pour les célibataires et plus tranquilles pour les autres.

Même mon frangin qui fait partie de mon équipe ne manque pas de nous narrer ses exploits avec sa dernière conquête en date. Chose assez surprenante, cela fait tout de même plus de six mois qu'ils sont ensemble. Un record pour mon frère. Donovan n'est pas connu pour rechercher la stabilité et encore moins se voir caser. Pourtant il semble bien que Aline ait réussi, là où d'autre ont échoués.

Mon regard fait le tour de chaque hommes ou femmes qui compose mon équipe. Donovan, Blake, Oliver, Alban et Carly prennent soin de vérifier le fourgon pompe. Kol et Nathalia, eux, s'occupent du leur : le véhicule de secours. Ses derniers renforcent notre équipe depuis nos débuts et ne manquent pas de courage non plus.

Il est important que l'on puisse tous compter les uns sur les autres et c'est le cas. Nombre de fois où des interventions nous ont demandé de devoir travailler en binôme, assurant ainsi la sécurité de chacun. Aucun duo n'est fait au hasard. L'affinité est un point important dans ces choix, mais aussi la compréhension entre les deux, afin de ne pas avoir de moment de doute lors d'interventions.

Notre métier nous demande un professionnalisme mais ne nous permet aussi aucune erreur. Les vies de nombreuses personnes sont en jeu, les nôtres y comprit, autant dire que ces deux derniers points, pèsent lourds dans la balance. Fait qui pose bien souvent problème dans nos vies personnelles. La possibilité de tomber lors d'une inter n'est jamais à exclure et fait peur.

J'en sais quelque chose, ma dernière relation s'est révélée un échec pour cette raison. Mon travail prend une grande place dans ma vie. Voir un peu trop selon ma sœur, mais je n'y peux rien, je suis ainsi et aider les autres est en quelque sorte vitale pour moi. Par chance, si l'on peut dire, mon frangin le comprend lui aussi, étant pompier aussi. Fait non négligeable et qui aide lors des repas de famille entre nous trois.

Sans ses deux-là et une autre frimousse aux yeux verts de six ans, je n'en serais certainement pas là où j'en suis maintenant et je ne leur en serais jamais assez reconnaissant. Je donnerai tout pour eux, ma vie y compris s'il le fallait. Mon équipe, composée de mes amis, sont un autre pilier sur lequel je peux m'appuyer avec une confiance aveugle.

Tout en pensant à cela, j'aide mon équipe à vérifier le matériel présent dans le camion, afin d'être prêt en cas d'intervention. Je ne fais pas attention à la discussion qui se déroule autour de moi et apparemment cela ne passe pas inaperçu auprès des gars.

— Allo la terre, ici la lune ! me lance mon frangin avec amusement.

Cela a le don de me sortir de mes pensées et amuser les autres qui nous entourent.

— Quoi ? m'empressé-je de lui répondre.

— Je ne sais pas à qui ou à quoi tu pensais, mais ça devait être intéressant car ça fait trois fois que Oliver tente de te parler ! lance aussitôt Blake avec un sourire en coin.

— Merde, désolé, mec ! dis-je rapidement en me tournant vers mon meilleur pote et équipier.

— No souci, Julian ! T'inquiète, ce n'est pas comme-ci c'était la première fois, me balance-t-il amusé.

— Elle doit être vraiment bien foutu pour accaparer ton esprit à ce point-là ! le coupe Oliver, tout en m'offrant un haussement de sourcils suggestif.

Lorsque je le vois faire, je ne peux retenir mon rire. Jamais le dernier à avoir des pensées salaces celui-là.

— Je vais te décevoir pour le coup, Mec ! Aucune nana n'est responsable de mon absence, je repensais juste à nos débuts ici ! finis-je par leur dire avec sincérité.

— Ah, ok... Merde on aura donc pas le droit à des détails croustillants de la part de notre Capitaine ! me répond alors Alban en feintant la déception.

— Pour ça faudrait déjà qu'il est une nana, mec ! renchérit Donovan tout en se marrant.

Je le regarde surpris de sa répartie, même si j'en suis habitué à force. Sauf que pour le coup, je ne l'ai pas vu venir là. Autant dire qu'il va devoir faire gaffe à ses arrières à partir de maintenant car je ne vais pas le rater. Le regard que je lui lance actuellement semble suffire à ce qu'il le comprenne. Tout comme la perte de son sourire car il me connait assez pour savoir de quoi je suis capable.

— Tu veux vraiment entrer sur ce terrain, petit frère ? m'empressé-je de lui demander avec un haussement de sourcils et un sourire en coin.

— OK ! Stop vous deux ! On sait comment ça se fini à chaque fois alors on va éviter, hein ! s'interpose alors Blake afin d'éviter une guerre fraternelle.

— Ouais, j'aimerais assez ne pas devoir nettoyer une deuxième fois le fourgon, les gars ! Si jamais ça vous vient en tête, alors je vous assure que vous le ferez sans moi ! nous informe Carly avec sérieux.

Cette dernière est la seule femme de l'équipe mais elle n'en reste pas moins la plus caractérielle d'entre nous tous. Ce qui, lorsque l'on travaille avec des hommes, n'est pas négligeable. Je dirais même que c'est primordial pour ne pas se faire bouffer par toute cette testostérone présente au sein de la caserne. Tout comme, elle n'a pas sa langue dans sa poche et n'hésite pas à nous en foutre plein la gueule quand on le mérite.

Autant dire trop souvent pour certain des gars. Oliver et Donovan semble adorer la prendre à partie et la rendre folle, ce qui nous oblige aussi à devoir jouer les arbitres pour éviter qu'elle ne les attache sur l'échelle et les laisse croupir la pendant toute une garde.

Ce dont elle est parfaitement capable et on en a tous parfaitement conscience. Enfin, Blake, Alban et moi. Même Kol et Nathalia du service des secours ne se frottent pas à elle, c'est pour dire. Parfois, Nath se joint à elle et les deux ensembles, un conseil, fuyez !

On n'a pas le temps de lui répondre que l'alarme retentit et que la voix de Nolan s'échappe des haut-parleurs. Celui-ci nous annonce une intervention qui requiert nos services. Un feu, voilà ce qui nous attend. S'en perdre de temps, on court en direction du vestiaire enfiler le reste de nos tenues. Le tout en moins de cinq minutes, avant que l'on ne monte dans le fourgon pour prendre la route aussitôt.

L'unité de secours nous suit de près, afin de prendre en charge les possibles victimes dont on le suppose le propriétaire de la boutique d'antiquité. La route est glissante en ce début de matinée neigeux. Notre avancée se fait donc plus lente que d'habitude, mais si nous voulons y arriver entier, on n'a pas trop le choix. La sécurité avant tout.

Oliver est aussi le chauffeur attitré de notre unité et celui qui maitrise le mieux les routes et ce, en tout temps. Voilà donc pourquoi ce choix n'a pas été dur à faire pour moi. Il est celui grâce à qui nous arrivons sur chaque intervention en un seul morceau et surtout le plus rapidement possible. Son professionnalisme n'est plus à prouver lors d'interventions, même malgré son tempérament taquin.

Lorsque l'on arrive à l'entrée du centre-ville, on peut apercevoir les flammes monter haut dans le ciel et éclairer une bonne partie de la vielle. Ce qui nous laisse alors imaginer l'ampleur du foyer et surtout les dégâts occasionnés par cet incendie. À cette constatation, je regarde alors chaque membre présent dans ce camion, afin de déceler ce qu'ils pensent. Il ne me faut que peu de temps pour comprendre que comme moi, ils ont compris que cette intervention sera aussi périlleuse que dangereuse.

C'est donc sur cette pensée que l'on continue notre avancée dans la rue principale, encore vide à cette heure. Cela nous facilite l'accès, alors on ne s'en plaint pas. On aperçoit aussi quelques curieux à leurs fenêtres et d'autres commencés à apparaître sur les trottoirs. Certainement attirés par cette lumière inhabituelle. Cette fumée noire qui s'élève dans le ciel à grande vitesse et qui commence à envahir la ville, petit à petit.