VI.

« Nous vouloir toi pour Compagnon. »

Toujours assis dans la baignoire, Izuku regarde Katsuki devant lui, complètement éberlué. Les bras ballants, sa nudité passe au second plan face à ce qu'il vient d'entendre de la bouche du blond. Tout à l'heure encore, il espérait que Katsuki le choisisse et, à présent, il panique totalement devant la demande de la sirène. Mais a-t-il vraiment bien entendu ? Katsuki veut le prendre pour Compagnon ? Enfin, Katsuki et Shoto, l'un ne va pas sans l'autre.

Mais pourquoi ? Comment ? Pourquoi lui ? Et s'il ne plaisait pas à Shoto, que celui-ci le rejetait ? Et lui, arriverait-il à se faire à la vie à trois ? A aimer deux personnes de la même manière ? Quitter son monde pour le leur ne serait pas un problème, ça ne pouvait pas être pire qu'actuellement de toute façon. Mais est-il amoureux ? Il n'en avait jamais fait l'expérience, le seul amour qu'il n'avait jamais reçu et éprouvé en retour était celui de sa défunte mère, un amour maternel. Alors, que ressent-il pour la personne qui se tient devant lui ? Il ne saurait dire...Ce qui est sûr, c'est que cette sirène ne le laisse pas indifférent.

Ses grands yeux verts scrutent le visage du blond à la recherche de la moindre trace de plaisanterie. Mais en face de lui, l'expression de Katsuki est des plus sérieuses. Sur sa nuque, il sent ses doigts se crisper légèrement.

- Toi dire quelque chose.

A ces mots, Izuku se rend compte qu'il avait arrêté de respirer et que le silence s'étend depuis quelques secondes maintenant entre eux. Dire quelque chose ? Oui, mais quoi ? Trop de questions fusent dans son esprit.

- Pourquoi ?

C'est le seul mot qui sort de sa bouche. Katsuki penche la tête sur le côté, les sourcils froncés, semblant réfléchir à la question. Sa main dérive de sa nuque à sa joue alors qu'Izuku se tourne complètement vers lui, s'asseyant à genoux, les fesses reposant sur ses talons. Sa gène a foutu le camp en même temps que l'arrivée soudaine de la surprise.

- Pourquoi moi ? reprend-il, toujours aussi perdu.

Après tout, il n'est rien. Un bon à rien, un moins que rien, juste bon à se faire baiser par des gars tous plus immoraux et ignobles les uns que les autres. Il n'a rien à lui offrir, à leur offrir, mis à part son âme souillée et son corps couvert de bleus.

-Parce que toi. Toi être une bonne personne. Toi gentil et beau. Mais surtout, toi avoir odeur compagnon, toi fais pour nous.

- Tu dis ça, mais tu ne me connais que depuis cinq jours seulement. Je ne suis peut-être pas la personne que tu crois, Katsuki.

Katsuki secoue la tête négativement avant de replonger son regard dans le sien. Ce qu'il voit dans le rouge intense de ses yeux lui retourne les entrailles.

- Non. Moi pas besoin de connaître toi depuis longtemps pour savoir que toi être une bonne personne. Toi être personne que nous chercher.

- Comment peux-tu affirmer cela ? Toi, tu me connais, mais pas Shoto.

La main de Katsuki se presse plus encore contre la joue d'Izuku et il se penche vers lui, venant effleurer son nez du sien. La proximité le fait rougir, mais il ne recule pas pour autant.

- Si moi aimer toi, lui aimer toi aussi.

Son cœur rate un battement. Katsuki vient-il vraiment de lui dire qu'il l'aime ? Comme ça ? Si...posément ? Vouloir le prendre pour partenaire est une chose, l'aimer en est une autre. Mais comme tout à l'heure, la sincérité de ses propos se lit sur son visage parfait. Le feu de ses yeux rouges brûle intensément et Izuku se sent fondre comme neige au soleil. Personne ne l'a jamais regardé comme ça. D'habitude, les regards qu'il reçoit sont avides d'une seule chose, un intérêt malsain pour son corps, sans chaleur réconfortante. Or, chez Katsuki, il ne voit rien de tout ça. Devait-il accepter ? Se laisser porter par cette nouvelle vague, cette bouffée d'oxygène, cette porte de sortie, que lui offre la sirène, de quitter sa vie misérable ?

- Je...C'est...c'est d'accord, murmure-t-il finalement dans un souffle, las de se poser des questions.

C'est bon, il capitule. A la base, il voulait juste en finir avec son existence et tous ses maux. Alors, pourquoi ne pas se laisser aller, lâcher prise et accepter cette nouvelle vie que lui propose le blond.

Le sourire éblouissant qu'il reçoit en réponse le fige sur place et une chaleur intense s'invite dans la moindre fibre de son corps. Accentuée quand Katsuki lui attrape le visage en coupe et l'embrasse de nouveau. Cette fois, leurs lèvres s'entrouvrent et leurs langues viennent se rencontrer pour la toute première fois. Timidement, elles se cherchent, se touchent et se caressent pour enfin se goûter. Et Izuku se noie littéralement dans ce baiser. C'est certain, il ne lui faudrait pas longtemps pour tomber éperdument amoureux de lui.

Doucement, il se redresse sur les genoux, sortant son corps nu de l'eau, et ses mains se frayent un chemin jusqu'à la nuque de Katsuki, se fourrant dans ses cheveux. Toute pudeur envolée, il se presse contre les jambes du blond qui les écartent légèrement afin de le recevoir contre lui. Son corps nu et mouillé vient se coller aux vêtements de Katsuki qui n'y prête aucune intention, trop occupé à savourer ce premier baiser avec son nouveau compagnon. Les grandes mains de la sirène dévalent alors son corps dénudé et s'ancrent sur ses hanches avec tendresse teintée d'un soupçon de possessivité.

Izuku a l'impression que l'eau chaude du bain est devenue bouillante tant le contact de Katsuki contre sa peau le retourne complètement. Le baiser, tout à fait innocent au début, s'est progressivement transformé en quelque chose de plus...passionné et un gémissement s'extirpe d'entre ses lèvres quand son sexe tendu frotte soudainement contre le jogging de Katsuki.

Sortant de sa transe, il s'éloigne brusquement du blond, reculant à l'autre bout de la baignoire, les mains plaquées contre sa virilité dressée, rouge et honteux de la tournure des événements. L'eau, qui atteint à présent presque le bord de la baignoire, déborde sous le mouvement et vient s'écouler en grosses flaques sur le sol. Qu'est-ce qu'il fout bon sang ? Son corps a réagi à Katsuki, plus que bien réagi même... Le blond le regarde les sourcils froncés, toujours assis sur le rebord, les cheveux en bataille et les lèvres gonflées de leur baiser. Merde, il est beaucoup trop...

Pourquoi toi éloigner ?

- Je...euh...je...

Que répondre ? Qu'il est excité, tendu au possible, rien qu'avec une étreinte et un baiser de sa part ? Détournant le regard, il se pince les lèvres, cherchant ses mots. Il en profite, par la même occasion, pour atteindre l'eau qui continuait de couler depuis le début.

- Et bien, je...tu...enfin...tu es beau et je...

La tête penchée sur le côté, Katsuki observe son humain bafouiller, essayant de trouver une explication à son geste, les mains cachant comme il peut son entre-jambe. Alors, il commence à comprendre et un sourire en coin prend place sur ses lèvres. Finalement, ils ne sont pas si différents que ça. Il a déjà surpris des conversations entre anciens humains à ce propos, il n'est donc pas si ignorant que ça. Et puis, si Izuku s'avère aussi sensible que Shoto, il allait adorer.

Ses yeux verts se reposent sur le blond lorsque celui-ci amorce un mouvement. Il le voit se relever et enjamber le rebord avant de s'accroupir à sa hauteur, un sourire en coin ornant sa bouche.

- Moi comprendre, déclare-t-il alors en zieutant vers le bas avant de reporter son attention sur lui.

- Qu-quoi ?!

Nan, mais c'est quoi encore cette réaction et cette situation ?! Katsuki a réellement compris ce qui se passe ? Comment ?! A cet instant, il se demande vraiment comment fonctionnent les rapports entre sirènes, leur façon d'être...excité est sensiblement la même ? Non parce qu'ils ont une nageoire qui commence au niveau des hanches, du coup, leurs...hum...enfin...

Tellement gêné de la situation, il n'arrive pas à formuler des pensées claires et cohérentes. Il n'est même pas sûr de vouloir en fait...La voix du blond le coupe dans ses visions étranges de sirènes entremêlées et le ramène à la réalité, qui est un Katsuki toujours accroupi devant lui, les bras croisés contre le rebord de la baignoire et qui le regarde, affamé.

- Toi apprendre nous. Faire sexe comme humains.

- Pa-pardon ?!

Ok, cette conversation..c'est n'importe quoi ! Non seulement, Katsuki a compris son petit problème de...dureté, mais surtout, il vient de lui demander de coucher avec lui ! De la façon la plus naturelle possible et avec un regard si intense qu'il déglutit difficilement. Des images de lui, dans une étreinte passionnelle avec le blond lui viennent à l'esprit et son rougissement de gêne se mélange à celui du désir. Cependant, ses pensées teintées d'obscénités se stoppent quand il réalise une chose. Katsuki a dit "nous". Cela veut dire que...

- Mais d'abord, moi aller chercher Shoto. Comme ça, toi rencontrer lui et lui transformer toi.

Les yeux fixés sur le blond, il a du mal à intégrer tout ce que celui-ci vient de dire. La seule chose qu'il retient est que Katsuki va partir et le laisser seul. Une horrible angoisse vient lui enserrer le cœur, balayant toutes les autres émotions qu'il avait eues depuis ce début de conversation. C'est un véritable ascenseur émotionnel qu'il subit en une fraction de seconde, passant d'une excitation sexuelle intense à la panique totale. Ses lèvres se mettent à trembloter et il sent ses yeux s'humidifier.

- Hey ! Non, toi pas pleurer, dit alors Katsuki en attrapant son visage entre ses mains. Nous revenir, moi jurer toi.

- Pourq..., il commence avant de respirer un bon coup, pourquoi tu ne me transformes pas tout de suite et je te suis dans ton monde ?

- Parce que moi pas pouvoir. Shoto oui, mais lui, obligé accompagné par moi pour venir ici.

La vue brouillée par les larmes, Izuku fixe son nouveau compagnon sans vraiment comprendre ses mots. Mais si Katsuki dit qu'il ne peut pas le transformer tout de suite, c'est qu'il y a une raison. Il sent bien, à travers son toucher contre ses joues, que si la sirène avait pu l'emmener tout de suite avec lui, il l'aurait fait sans hésiter. Néanmoins, il ne peut qu'être déçu. Il avait eu l'espoir fou, pendant quelques secondes libératrices, de pouvoir quitter cette vie merdique pour une nouvelle, avec des personnes qui l'aimeraient et le choieraient. Or, même s'il allait revenir, Katsuki repartait pour une durée indéterminée et ça lui faisait peur.

- Tu pars quand ?

Le blond se pince les lèvres et ses mains délaissent son visage tacheté. Le cœur d'Izuku tressaille.

- Bientôt.

- Et...tu reviens quand ?

- Moi pas savoir. Quelques jours, peut-être.

Quelques jours. Il va devoir tenir ces longues heures sans lui, sans eux. Supporter encore un peu Shinso et ses clients...Il peut le faire ! Il a bien tenu plusieurs années, qu'est-ce-que quelques jours de plus ?

- Ok.

Devant lui, Katsuki affiche un petit sourire triste. Ses doigts viennent se perdre dans les boucles humides de ses cheveux rendus plus lourds et sombres à cause de l'eau.

- Moi attendre toi pour dormir.

Izuku le voit se lever et attraper une serviette avant de la lui tendre à bout de bras, le regard dévié de sa personne.

- Merci, souffle le vert en se levant, réceptionnant par la même occasion la serviette.

Il s'enroule dedans au moment où la porte se referme, enjambe le bord de la baignoire puis tire le bouchon afin de la vider. Devant le miroir, ses pupilles viennent percuter son reflet. Son nez est rouge et ses yeux gonflés d'avoir pleuré. Ce n'est clairement pas la meilleure image de lui, mais il s'en fiche complètement. Même s'il se sent triste face au départ imminent de Katsuki, il ressent également de l'apaisement, de la sérénité. Car le blond l'aime et souhaite l'avoir à ses côtés. C'est étrange comme mélange d'émotions.

Une fois séché et les dents brossées, il enfile ses affaires de nuit qui trônent sur le couvercle du bac à linge sale puis, après une grande inspiration dans l'espoir de calmer les battements frénétiques de son cœur, ouvre la porte afin de retrouver Katsuki qui l'attend sagement sur le lit. Ses lèvres tressaillent et leurs coins viennent se relever légèrement. Il ne peut s'en empêcher, dès qu'il le voit, il a envie de lui sourire. Oh bien sûr, ce n'est pas un grand sourire resplendissant - la tristesse de le voir partir lui enserre encore le cœur - mais il a le mérite d'être sincère.

Alors, il s'approche doucement de lui et vient serrer entre ses doigts la main que le blond lui tend. Celui-ci dépose un baiser sur le dos de la sienne, provoquant le rougissement soudain de ses joues.

- Toi beau.

Izuku se sent fondre. Il va décidément tomber amoureux de lui bien plus rapidement que prévu s'il continue comme ça.

- Tu t'es pas vu. Tu es bien plus beau que moi Katsuki.

- Non, fit-il avec un mouvement de tête tout en le rapprochant de lui. Moi peut être beau, mais toi magnifique.

Son rougissement prend de l'ampleur et il a soudainement chaud. Ouais...Vraiment plus rapidement...

- Je...Merci, sincèrement, répondit-il ému, avant de se pencher vers lui et de déposer ses lèvres sur les siennes. On dort ?

Le blond acquiesçe d'un hochement de tête et, comme toutes les nuits depuis qu'ils vivent ensemble, ils s'installent tous les deux dans le lit. Katsuki vient se placer dans son dos, l'enlaçant de ses bras, la tête plongée dans son cou. Et c'est ainsi qu'ils s'endorment, Izuku accueillant Morphée pour quelques heures de sommeil sans cauchemars.

.

Cela faisait longtemps qu'il n'était pas venu ici en pleine journée. La dernière fois remontait à cinq jours lorsqu'il avait trouvé Katsuki échoué sur la plage. Mais il était tard et il faisait nuit. Cependant, à présent, ils se tiennent sur cette même étendue sablonneuse et le soleil brille de mille feux, les réchauffant de ses doux rayons. Il fait bon et la légère brise marine vient ébouriffer leurs cheveux, les emmêlant plus qu'à l'accoutumé pour Izuku.

Inquiet, il ne cesse de jeter des coups d'œil autour de lui. C'est le moment, il ne faudrait pas que quelqu'un passe par là et surprenne Katsuki en train de se transformer, ça serait dramatique. Déjà, pour se rendre à cet endroit, il avait fait des détours en voiture afin de s'assurer qu'il n'était pas suivi. Heureusement, ça n'avait pas été le cas. Mais on n'est jamais trop prudent.

Soudain, le blond se met en mouvement. Les sourcils froncés, Izuku le suit, se demandant ce qu'il fait. Leurs pas les mènent sur les rochers qu'ils escaladent et contournent tranquillement. Tel un gentleman, Katsuki l'aide à ne pas tomber quand il marche sur un rocher rendu humide par les vestiges des vagues, et Izuku commence à comprendre où ils se rendent. La crique.

Avec le temps, l'érosion a grignoté la falaise et l'océan a fait de même, ce qui a permis la création de cette crique, difficilement accessible. Il n'y a pas de chemin à proprement parler et les rochers sont glissants et souvent coupants. Mais, Izuku s'y est déjà rendu et, à priori, Katsuki s'en fiche pas mal. Ce qu'il espère, c'est qu'il n'y aura personne là-bas.

Cinq minutes plus tard et la respiration sifflante, ils arrivent enfin. Leurs pieds touchent les galets plats de la plage, bien différents du sable chaud de tout à l'heure. Il n'y a presque pas de vent et seul le bruit des vagues, venant s'échouer devant eux, se fait entendre. Et heureusement, ils sont seuls.

- Comment savais-tu qu'il y avait ce genre d'endroit ici ? Tu es déjà venu ?

- Non, jamais. Moi sentir, répond simplement la sirène, les yeux rivés sur le large.

Il l'a juste senti ? Comment ? Est-ce un instinct naturel des créatures marines ? Est-ce qu'elles ont une sorte de connexion avec la nature et instinctivement, elles savent où aller ? Encore une fois, ses questions demeurent sans réponse.

Katsuki se tourne alors vers lui et, d'un geste habile, se débarrasse de son T-Shirt. Devant les yeux d'Izuku, son torse musclé apparaît, le faisant déglutir difficilement. Certes, il l'a déjà vu entièrement nu, mais là, c'est différent. Ils sont dehors, dans un endroit particulier et la lumière naturelle joue merveilleusement bien sur les courbes du blond.

Les joues rougies d'envie, il détourne le regard et détache le sac de son dos. Il l'a ramené afin de récupérer les vêtements de Katsuki une fois celui-ci transformé. S'accroupissant, il ouvre la fermeture Éclair et y fourre, dans un premier temps, les chaussures que la sirène avait laissées sur les galets. Un tas d'affaires tombe alors subitement près de lui et il sursaute en relevant la tête. Il n'a pas le temps de se préoccuper de la virilité de Katsuki juste devant ses yeux que celui-ci lui attrape le visage, l'invitant à se relever, avant qu'il ne fonde sur sa bouche avec passion.

Complètement à l'ouest, Izuku se laisse embarquer dans ce baiser pour le moins langoureux. Ses lèvres s'entrouvrent, laissant la langue de la sirène se mêler à la sienne pour une danse sensuelle. C'est fou...les baisers de Katsuki sont toujours d'une incroyable intensité. Il a l'impression de perdre la tête, de suffoquer, de se noyer sous la décharge d'émotions qui le submerge. Mais comme à chaque fois, il n'en a jamais assez, il en redemande toujours, toujours plus. Comme un drogué en manque.

Il ne sait combien de temps leur étreinte passionnée a duré, mais lorsque Katsuki s'éloigne de lui, il est essoufflé, fiévreux et pantelant. Comme s'il avait parcouru un marathon en sprintant de bout en bout. Ses yeux sont humides et ses lèvres gonflées de désir. Tout comme une certaine partie de l'anatomie du blond qu'il sent contre son bas-ventre.

Les mains de Katsuki dérivent alors sur son corps, l'une venant se poser sur sa hanche et l'autre, sur sa nuque. Front contre front, leurs regards plongent dans celui de l'autre, intensifiant la tension entre eux.

- Nous revenir, promis.

La gorge nouée, Izuku ne peut qu'acquiescer. Il ne peut pas parler. Non, plutôt, il ne veut pas parler, car s'il ouvre la bouche, il sent bien que les digues qu'il a érigées céderont et ça sera les chutes du Niagara. Et il ne veut pas faire culpabiliser la sirène.

Un sourire s'inscrit sur les traits de Katsuki et ses lèvres se posent sur son front, y déposant un baiser tendre. Naturellement, ses yeux se ferment, appréciant la douceur de ce geste. Puis, d'un coup, l'étreinte s'arrête, le laissant seul. En rouvrant les yeux, il aperçoit la sirène s'approcher de l'eau et y entrer sans hésitation.

Arrivée à mi-cuisse, Katsuki tourne la tête vers lui et lui adresse un dernier sourire, accompagné d'un signe de main, avant de plonger dans l'océan, provoquant des remous et éclaboussures. Quelques secondes plus tard, une magnifique nageoire aux dentelles rouge orangé perce la surface puis c'est de nouveau le calme.

Et Izuku se retrouve encore une fois seul sur une plage. Mais cette fois, son objectif n'est plus le même. Il a un but. Il va tenir bon jusqu'à leur retour. Car il le sait à présent, sa vie est avec Katsuki et Shoto.

.

Trois jours. Cela fait trois longs jours que Katsuki est reparti dans son monde et qu'Izuku doit surmonter ces journées les unes après les autres. Interminables, épuisantes, solitaires. Il avait toujours eu la sensation d'être seul, mais depuis qu'il a partagé son foyer avec la sirène, cette solitude est plus qu'une sensation. Elle est palpable, bien réelle. Elle lui vrille les entrailles, lui court-circuite le cœur. Il a hâte qu'il revienne avec Shoto.

Shoto, Izuku n'arrête pas d'y penser. Il essaye de se l'imaginer avec le peu de détails que le blond lui a donné. Des cheveux bicolores, des yeux également hétérochromes, et un caractère posé, calme. Voilà le peu d'infos qu'il a en sa possession. Trop peu pour s'en faire un portrait, mais juste assez pour en avoir une vague idée. Néanmoins, plus il y pense, plus il se sent excité de le rencontrer. Faire sa connaissance, rencontrer une deuxième créature de cette espèce légendaire, cela était impensable il y a encore quelques jours. Qui aurait pu croire que cela existait ? Et que lui, Izuku Midoriya, allait devenir le compagnon de deux de ses représentants ? Même lui, avait du mal à y croire.

Étonnamment, devenir une sirène ne lui fait pas peur et cette nouvelle relation à trois non plus. Katsuki lui a assuré qu'il plairait forcément à Shoto, qu'il était fait pour eux, et il le croit. A présent, il accueille l'idée sereinement et avec impatience.

Cependant, il doit attendre qu'ils reviennent. Et cette attente devient de plus en plus difficile chaque jour. Surtout avec Shinso toujours sur son dos. Quand Katsuki était là, il arrivait à endurer la situation, car il savait qu'il avait quelqu'un qui l'attendait à la maison. Mais maintenant, son studio étriqué est vide et le retour chez lui est dur. Il n'a ni l'envie d'être au club, ni chez lui. Alors, il subit. Et les jours se suivent et se ressemblent tous. La fatigue s'accumule et l'anxiété de ne pas revoir ses futurs compagnons lui pèse tellement qu'il a l'impression de devenir fou dès qu'il franchit les portes de son misérable studio. Il se fait sans doute des idées, mais il a la sensation que ses objets bougent tout seul chez lui. Oui, il perd vraiment la tête.

Resserrant sa veste, il passe les portes en verre du club et s'arrête sur le trottoir afin de souffler. Encore une soirée de merde, il est épuisé. Physiquement comme moralement. Les clients sont de plus en plus brutaux et Shinso ne le lâche pas d'une semelle dès qu'il passe le seuil. Il est même présent lorsqu'Izuku est avec un client adepte du voyeurisme. Il est là, en train d'être pris par un gars pendant que son patron se rince l'œil, tranquillement installé derrière des vitres sans tain. Il ne le voit pas, mais rien que de savoir ses yeux vitreux posés sur lui le dégoûte. Heureusement qu'il se bourre de comprimés et d'aphrodisiaques. Et quand ceux-ci viennent à ne plus faire effet, il pense alors à Katsuki. A ses grandes mains chaudes qui effleurent sa peau, à ses yeux rouge intense qui le dévorent littéralement du regard, à ses lèvres affriolantes sur son téton dressé. Et cela fonctionne. Trop bien même.

Le vent se lève subitement, le faisant frissonner. Il se met en route, direction son appartement. Il est 3h du mat' et il ne pense qu'à s'enrouler dans sa couette, le nez enfoui dans l'oreiller qu'utilisait Katsuki. Les jambes flageolantes dû à la retombée des médocs, il se traîne difficilement jusqu'à son immeuble décrépit. Il s'apprête à passer la porte d'entrée délavée quand un bruit de chaussure sur le bitume du trottoir le stop dans son mouvement. Pourquoi il a l'impression de reconnaître cette démarche ?

Son cœur s'emballe douloureusement, menaçant de sortir de sa poitrine. Il rêve, ce n'est pas possible autrement. Pourquoi il l'aurait suivi jusqu'ici ?

- Deku.

Il sursaute. Non ! Impossible ! Pourquoi est-il là ?! Paniqué, mais essayant de se canaliser tout de même, il se retourne pour tomber sur son patron, qui se tient à même pas trois mètres de lui, les mains dans les poches de son long manteau noir, valant sans doute une petite fortune. Celui-ci se rapproche alors lentement de lui, semblant se délecter de la peur qu'il lui procure.

- T'es parti avant la fin de ton service Deku, ce n'est pas très professionnel.

- Qu-quoi ? s'exclame-t-il surpris. N-non, je n'avais plus de client, j-j'ai bien vérifié.

- Et bien, tu as mal regardé, répond Shinso, sa main venant se poser sur l'épaule d'Izuku en la pressant douloureusement. Mais je suppose que tu étais pressé de retrouver ton amant. Il est où d'ailleurs ? Il n'y a aucune trace dans ce qui te sert de logement.

Une grimace s'affiche sur le visage tacheté d'Izuku, il lui broie presque la clavicule.

- Katsuki n'est pas...c'est mon cousin, je-je vous l'ai déjà dit et il..il est reparti chez lui.

Cependant, son cerveau tilte ce que la dernière phrase de son patron veut dire. Il plisse les yeux, suspicieux.

- C'était vous ! Vous êtes venu fouiner dans mon appartement !

Avant-hier soir, une fois rentré de son travail, il avait trouvé quelques petites choses déplacées. Trois fois rien, juste un bibelot pas à la bonne place, la porte de la salle de bain entrouverte alors qu'il l'a ferme toujours...Il avait mis ça sur le compte de la fatigue, mais à présent, il comprend, son patron avait sans doute envoyé des hommes afin de mettre la main sur Katsuki !

- Et alors ?

- Vous-vous avez pas le droit ! C'est chez moi !

Un rire sadique éclate dans le silence de la nuit, lui donnant des frissons. Shinso le regarde avec des yeux déments et sa poigne se resserre sur son épaule.

- Et ce "chez toi" appartient à qui déjà ? Tout ce qui est à toi m'appartient, toi y compris Deku. Tu as tendance à l'oublier je trouve.

Sa main dévie sur la nuque d'Izuku, lui attrape les cheveux et lui tire la tête en arrière. Son visage, au rictus mauvais, se place juste devant le sien et il se crispe sous la douleur.

- On va tout de suite y remédier. Tu vas honorer ton dernier client comme il se doit !

Et il comprend. Il comprend que Shinso le veut pour lui ce soir. Son patron retient depuis bien trop longtemps sa frustration et celle-ci vient de percer la bulle dans laquelle elle était retenue prisonnière.

Sa bouche se plaque durement contre la sienne, sa tête maintenue par la main dans sa nuque, l'empêchant de se reculer. Les mains à plat sur son torse, Izuku tente de le repousser, mais Shinso est bien plus fort. Il vient même mordre violemment sa lèvre inférieure, forçant l'accès. Non ! Il ne veut pas ! Les clients sont une chose, Shinso en est une autre. Et maintenant, il y a d'autres personnes qu'il souhaite embrasser.

Dans une tentative désespérée, il lui envoie vivement son genou dans l'entrejambe. L'effet est immédiat. Son patron le relâche, dans un gémissement de douleur, et recule de plusieurs pas, se tenant les parties de ses mains.

- Toi...

Il redresse la tête et ses yeux fusillent Izuku sur place. La rage déforme ses traits, le rendant encore plus flippant qu'à l'ordinaire. Face à un tel regard, le bouclé se tétanise sur place. Il est allé trop loin ! Même s'il ne regrette pas son geste, il va bientôt déguster. Lentement, il voit Shinso se redresser et s'avancer vers lui. Il aimerait s'enfuir, mais ses jambes ne répondent plus.

- Tu mérites une bonne correction !

Sa respiration s'accélère à mesure que son patron s'approche et, bientôt, celui-ci est assez près de lui pour sentir son souffle s'échouer contre son visage. Un frisson de dégoût le parcourt, mais il n'arrive toujours pas à déguerpir. Il le voit alors lever son bras, prêt à lui mettre une gifle. Ses beaux yeux verts se ferment, laissant une perle salée dégringoler le long de sa joue, et attendant la sentence...qui ne vient pas.

Soudainement, il est tiré en arrière et un bras vient le ceinturer. Il est alors enveloppé dans une chaleur familière, son visage dans un torse qu'il connaît bien à présent. Rouvrant vivement les yeux, il lève la tête et tombe sur les traits familiers de Katsuki. Celui-ci lui adresse un sourire avant de reporter son regard devant lui, la mâchoire crispée.

Se contorsionnant dans les bras de la sirène, il voit alors Shinso être soulevé d'une main autour de son cou par un homme aux cheveux rouges et blancs, seulement vêtu d'un pantalon noir, trop petit pour lui. Izuku trouvait déjà Katsuki très grand par rapport à lui, mais lui doit bien dépasser le blond de plusieurs centimètres.

- Je vous prierai de bien vouloir laisser Izuku tranquille. Maintenant, il nous appartient. Si vous osez vous approcher de lui, nous vous tuerons, soyez en certain. Est-ce que c'est compris ?

Le visage rouge par le manque d'oxygène, Shinso ne peut qu'acquiescer d'un mouvement de tête. Apparemment satisfait, l'homme le lâche, le laissant s'échouer au sol lamentablement. A quatre pattes sur le bitume, son patron se met à tousser toutes ses tripes avant de redresser la tête et de lui adresser un regard noir. Autour de lui, Izuku sent le bras de Katsuki resserrer sa prise, mais Shinso ne tente rien. Il se relève difficilement puis, lui lançant un dernier regard meurtrier, il disparaît dans l'obscurité de la nuit.

La tension retombe immédiatement et Izuku se laisse aller en arrière contre le torse également dénudé de Katsuki, complètement vidé de toute énergie. Celui-ci vient lui déposer un baiser sur le haut du crâne, tout en le serrant tendrement dans ses bras. Il soupire de bien-être, ça lui avait manqué.

L'homme en face de lui se retourne enfin et Izuku découvre son visage. Il en a le souffle coupé. Les sirènes sont-elles toutes aussi belles ?

- Bonjour Izuku, je suis Shoto, dit-il en s'approchant d'eux, un sourire doux collé sur les lèvres. Katsuki t'a parlé de moi, je suis son compagnon et, très bientôt, je serai le tien, si tu le veux toujours.

Incapable de parler tant l'émotion le submerge, Izuku lui répond simplement d'un hochement de tête. Le sourire de Shoto s'agrandit encore plus, provoquant l'embardée de son palpitant. Ok, il est littéralement foutu avec ces deux-là. Le bicolore lui attrape alors les doigts et ses lèvres se déposent sur le dos de sa main dans un baiser plein de douceur.

- Tu es bien plus beau en vrai que dans les souvenirs de Katsuki.

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