Chapitre 4

PASSÉ / 2004

— C'est le plus bel été de ma vie, s'illumina Harry en mâchant sa bouchée de céréales. Les garçons sont géniaux. Ils ont tous des voix géniales... on est d'accord sur tout ce qu'on fait. Liam a un peu de mal à rire parfois, mais c'est génial quand même !

Assise en face d'Harry à la table de la cuisine, Anne esquissa un petit sourire.

— C'est super mon chéri, dit-elle.

Hier avait été de ces jours où elle n'était pas sortie de sa chambre, où Harry et Gemma s'étaient faits une boite de conserve au micro-ondes et regarder la télé toute la journée en veillant sur le fait qu'elle n'ait besoin de rien. Peut-être que le jour d'avant avait été pareil, mais il n'avait pas pu en être témoin car Niall l'avait invité à dormir chez sa famille. Harry s'entendait très bien avec lui. Aujourd'hui, Anne allait mieux, était même en train de finaliser son rouge à lèvres rouge éclatant.

Harry n'était pas stupide, il avait bien remarqué que ces trois dernières semaines, elle avait commencé à se faire particulièrement jolie les jours où elle le déposait aux studios. Il comprenait, il appréciait aussi mettre de jolies chemises pour Louis. Il avait même souscrit à un abonnement de trains pour faire le trajet jusqu'à Londres trois fois par semaine mais elle tenait à l'emmener, les jours où son état le permettait. Il avait remarqué les petits échanges qu'elle avait avec Alexander, mais cela n'avait jamais plus loin que quelques mots et quelques regards pour l'instant.

— J'aimerais bien les rencontrer moi aussi, dit Gemma en entrant dans la pièce.

— Tu n'es pas au travail ? Demanda leur mère.

— Je commence une heure plus tard ce matin.

— Ouais, tu les adorerais, sourit Harry. Je pourrais peut-être les inviter ici un jour, si l'occasion se présente. Je suis sûr qu'ils seraient partants.

Anne haussa les épaules un peu timidement.

— Peut-être un jour mon chéri, peut-être un jour.

Harry et Gemma échangèrent un regard triste, puis le bouclé se leva et mit son sac sur ses épaules. Il tenait toujours à emmener des feuilles aux studios, afin de noter toutes les idées qu'ils avaient en groupe et les synthétiser sur feuille le soir. Il ne respirait que pour ce groupe.

— On y va ? Se réjouit l'adolescent.

— On y va, sourit Anne.

Elle embrassa la joue de Gemma et rejoignit Harry, qui avait déjà couru jusqu'à la voiture.

Le trajet de deux heures se passa comme Harry les aimait tant. Sa mère mettait ses CDs préférés de Shania Twain ou des Spice Girls, et ils chantaient ensemble dans la voiture sans se soucier du reste du monde et des problèmes existants. Dans ces moments-là, Harry se disait qu'il était heureux de n'avoir jamais connu son père, car il avait la meilleure mère du monde. Dans ces moments-là, il se disait qu'il n'y avait pas une seule chose qu'il ne ferait pas pour lui enlever cette maladie qui lui pourrissait la vie. Il savait comme elle culpabilisait d'infliger cela à ses enfants, mais il lui répétait souvent que cela ne la définissait pas. Dans ces moments-là, Anne se mettait à pleurer et demandait au ciel comment elle avait pu élever des enfants aussi parfaits en étant un tel désastre. Harry et Gemma savaient qu'ils n'étaient qu'un reflet de sa personne, mais qu'elle était trop aveuglée par la culpabilité pour regarder correctement dans le miroir.

Une fois à Abbey Road, Harry arriva en compagnie de sa mère, qui ne manqua pas de se regarder une dernière fois dans le rétroviseur de la voiture.

— Il te trouvera très jolie maman, allez viens ! Rigola Harry.

Les garçons étaient déjà tous présents à l'intérieur du studio. Liam et Zayn étaient penchés sur le piano, comme s'ils lisaient une feuille. Louis était un peu plus loin. Aujourd'hui, il portait un débardeur qui moulait son torse frêle. Harry connaissait Louis depuis un peu plus d'un mois et il était le plus heureux. La manière dont le garçon le faisait toujours rire avec ses bêtises, comment il répondait avec une répartie bien à lui, comment il semblait vouloir montrer l'exemple sans jamais être mal intentionné. Il était l'opposé total d'Harry, et Harry pensait qu'ainsi, ils se complétaient bien.

— Salut bouclettes, lâcha le châtain. Bonjour Madame Styles.

— Bonjour les garçons, sourit la femme.

La porte de la salle d'enregistrement s'ouvrit sur Niall et Alexander. Il portait un polo noir et ses lunettes de vue, qu'il enlevait dès qu'il parlait à quelqu'un. A la vue d'Anne, il les baissa.

— Bonjour Harry, dit-il. Bonjour Madame Styles.

— Alexander, sourit Anne.

— Harry, tu es le prochain à passer dans la salle. Tu peux lire ce que j'ai confié à Liam et Zayn. C'est les phrases que vous allez chanter dans le micro après. Madame Styles, je peux vous proposer un café avant que vous repreniez la route ?

— Avec plaisir, accepta t-elle.

Ainsi, ils partirent dans le petit espace cafétéria. C'était un espace vitré, donc pas intime, mais insonorisé. Harry s'approcha du piano pour regarder la feuille.

C'était des paroles d'une chanson culte, Wonderwall du groupe Oasis. Dès la première semaine, Alexander avait expliqué aux garçons que le premier album sponsorisé par les studios devrait être un mélange de reprises de grands titres et quelques chansons d'eux, pourtant entièrement écrites par d'autres personnes. Ce n'était pas exactement comme Harry avait imaginé la chose, mais il ne se plaignait pas du tout de l'opportunité.

— Tu ne révises pas, toi ? Demanda Harry à Louis.

Ce dernier vient jusqu'au niveau du jeune et passa son bras autour de ses épaules. Harry avait remarqué comme Louis était tactile. Cela le faisait beaucoup rougir.

— Je suis sur autre chose apparemment, répondit-il. La chanson ne va pas avec ma voix... ou quelque chose comme ça.

Harry avait remarqué que Louis était un peu plus mis en retrait qu'eux et il n'était pas sûr d'apprécier. Mais il laissait les professionnels de la musique juger le champ d'action de chacun. Harry avait une confiance aveugle en Alexander.

— D'accord, dit-il. Même si je pense que tout irait avec ta voix.

Louis sourit en coin.

— Vraiment, bouclettes ?

Harry rougit un peu et se concentra à nouveau sur la feuille.

— Comment ça s'est passé ? Questionna Liam à Niall.

— Bien, rétorqua le blond. J'ai dû chanter le premier couplet pendant quelques fois. Certaines notes finales étaient trop plates. Il a fait quelques essais aussi, je n'ai pas tout compris.

— Il a été plus dur avec moi hier, soupira Zayn. J'étais trop... mou apparemment.

— Tu es un peu plus effacé que nous, c'est vrai, nota Harry. Mais c'est pas une mauvaise chose. Il dit ça pour nous aider.

— Merci H, sourit Zayn.

Harry se concentra et commença à réciter l'air de Wonderwall en marchant un peu dans la pièce. Cela l'aidait à se concentrer. Ils avaient tous leur technique pour se plonger dans la musique : Zayn s'asseyait et fermait les yeux, Liam restait stoïque et concentré, Louis avait besoin de souffler un grand coup avant. Pour Niall, c'était assez impressionnant : il souriait juste et se lançait, comme si c'était inné chez lui.

Le bouclé alla s'asseoir sur le sol, près des guitares, et en prit une. Il gratta quelques cordes du bout des doigts et fronça les sourcils à la sensation désagréable. Niall vint s'asseoir à côté de lui.

— Tu en joues ? Demanda l'irlandais.

— Non. J'aimerais bien.

— Je pourrais t'apprendre si tu veux, sourit le blond. J'en fais depuis tout petit.

— Ouais ? Sourit Harry. Tu ferais ça ?

— Bien-sûr ! Après cet album, on va rester amis, non ? Je pourrais t'apprendre quand on se verra. C'est pas dur. Je suis sûr que tu y arriverais.

— J'adorerais !

L'idée plaisait parfaitement à Harry. Il s'imaginait déjà l'été suivant avec Niall, à jouer de la guitare. Dans sa tête, la vie allait toujours être aussi simple et innocente. Il aurait tout donné pour que la vie reste si belle et douce.

— Au fait, les gars, reprit Niall à l'attention générale. Je pensais à quelque chose. Ma famille est en vacances cette semaine, j'ai la maison. Vous voudriez venir dormir ? Je me suis dit, on s'est jamais fait une soirée tous les cinq depuis qu'on travaille ici. Ça pourrait être bien de sortir un peu de... ça.

Louis adressa un grand sourire.

— Ouais, carrément ! Il faudrait que j'appelle ma mère pour la prévenir, mais je suis partant.

— Pareil, dit Zayn.

Liam sembla un peu plus sur la réserve, mais finit par hocher la tête.

— Ok, ça peut être sympa, capitula t-il.

Niall se tourna vers Harry.

— Bien-sûr que c'est ok pour moi ! Sourit-il. Je vais aller demander à ma mère tout de suite.

Il se leva et jeta un oeil à travers la vitre de la cafétéria. Les deux adultes discutaient, souriants. Harry toqua avant d'entrer.

— Hey, dit-il doucement.

— Harry, j'arrive, parla Alexander.

— Oui, pas de soucis, parla l'adolescent. Je voulais te dire, maman, je dors chez Niall ce soir.

— Oh, d'accord, sourit la femme.

— Donc, tu sais... si tu veux aller passer la soirée sur Londres ou autre, tu n'as pas à me ramener...

Harry avait regretté ces mots des milliers de fois, dans les années suivantes. Anne rigola nerveusement et adressa un regard à Alexander. L'adolescent quitta la pièce, satisfait de savoir que sa mère allait avoir un rendez-vous galant pour la première fois depuis tellement longtemps. Elle méritait tant d'être heureuse. Il aurait tellement aimé lui avoir apporté le bonheur, et non pas une condamnation.


Today is gonna be the day that they're gonna throw it back to you

— Non, parla Alexander en travers le micro. Recommence. La note finale n'est pas bonne.

Harry se racla la gorge et ajusta le casque sur ses oreilles. Cela faisait déjà plusieurs fois qu'il se retrouvait dans cette pièce d'enregistrement annexe mais il n'arrivait pas à s'y faire. Harry était persuadé qu'il fallait qu'il savoure chaque détail, chaque moment, car ce n'était peut-être que la réalité le temps d'un été.

Today is gonna be the day that they're gonna throw it back to you

De l'autre côté de la vitre, Alexander appuya sur le bouton pour faire marcher le micro :

— Toujours pas, dit-il. Note finale. Recommence.

Frustré, mais obéissant et motivé, Harry recommença. Une fois, deux fois, trois fois. Ce fut au bout de la neuvième fois qu'il put chanter le second vers :

And by now you should have somehow realized what you gotta do
I don't believe that anybody...

Le clic du micro se fit entendre ; Harry s'arrêta instantanément.

— Tu l'as presque, la note sur le anybody, parla Alexander. Elle était bien.

— Presque ? Demanda Harry, confus.

Il n'aimait pas tellement les moments dans cette pièce. Cela touchait à la musique et il n'y avait rien qu'il aimait plus au monde, mais il n'aimait pas la frustration de devoir recommencer vingt fois la même parole, de devoir réellement travailler sur le coté technique et pas le côté passion. Il n'aimait pas le fait que lorsqu'il parlait à Alexander, il ne pouvait pas le voir à travers cette vibre assombrie, comme un Dieu qui dicte depuis son ciel.

— Essaie de descendre d'un ton la note. Tu essaies de trop mettre d'effets. C'est bien de la différencier des autres, mais reste dans le thème du reste du couplet.

L'adolescent souffla un coup et se concentra.

I don't believe that anybody
Feels the way I do
About you now

Il s'arrêta et arqua un sourcil, en attente de la bénédiction du producteur. Comme il n'avait pas de retour, il commença à sourire, fier de lui, mais...

— Non, la voix d'Alexander résonna. Pas encore parfait. Recommence.

Ce jour-là, Harry chanta le premier couplet de Wonderwall très exactement 64 fois. En entier. Sans compter toutes les coupures. Lorsque l'homme lui dit que c'était suffisant pour aujourd'hui et qu'il pouvait le rejoindre derrière la vitre, l'adolescent s'était affalé sur le sol en bois pendant quelques minutes. Il s'était finalement relevé pour rejoindre le producteur. Ce dernier n'était jamais celui qui faisait le pas.

— C'est une chanson dure, dit l'adolescent.

— C'est vrai, acquiesça Alexander. Peut-être pas tellement techniquement mais tellement de gens l'ont reprises, il faut toujours se démarquer et exceller.

Harry hocha la tête et se mordilla nerveusement la lèvre.

— Pourquoi on la chante, alors ?

Alexander était occupé à toucher différents boutons dont Harry ignorait totalement l'utilité. Il semblait toucher à bien plus de choses qu'il n'aurait dû, avoir un contrôle général. Il leva les yeux vers lui, les sourcils arqués.

— Comment ça ? S'étonna t-il.

— Je veux dire... Tenta Harry. C'est une belle chanson. J'ai hâte d'entendre notre version studio finalisée. Mais je me disais... on pourrait peut-être chanter une de nos chansons.

— Une de vos chansons ? Vous avez écrit quelque chose ?

L'adolescent haussa les épaules.

— Pas vraiment... Enfin, pas moi. Je sais que Louis écrit beaucoup. Il écrit bien !

Un petit rire quitta les lèvres d'Alexander, qui recommença à toucher à tous les boutons.

— C'est vrai, insista Harry. Il écrit bien. Je suis sûr que ce qu'il fait pourrait marcher, si on l'enregistrait tous ensemble.

— Harry, si Louis veut un élan d'indépendance, je pense qu'il peut venir m'en parler lui-même ?

— Non, non... Enfin, oui...

Harry secoua la tête, un peu confus.

— Il ne veut pas, expliqua t-il. Il ne m'en a pas parlé... C'est moi, je pense que ce qu'il écrit a du potentiel.

L'ainé ne répondit pas. Il n'eut aucune réaction, comme si même il n'avait rien entendu. Harry attendit une minute, ouvrit la bouche pour se répéter, prêt à se mettre en première ligne pour Louis qui ne lui avait rien demandé, mais au moment où un son allait sortir de sa bouche, Alexander leva la main vers lui.

Tu as du potentiel, dit-il en regardant Harry droit dans les yeux. Tu es le coeur de ce groupe. Ne t'épuise pas pour les autres.

Le bouclé mima l'incompréhension, pâle, livide.

— Mais... tenta t-il.

— Vous êtes un groupe et vous allez faire cet album, dit-il. Mais n'oublie jamais ça Harry. Tu as du talent et tu n'as pas besoin d'eux.

Si Harry avait été moins naïf, il aurait deviné à cet instant qu'Alexander récitait probablement un discours général pour les monter les uns contre les autres. Si Harry avait eu une famille un peu moins gentille, s'il avait eu une enfance écorchée et un caractère trempé, il aurait froncé les sourcils et aurait dit à ce producteur qu'il avait besoin des garçons comme ils avaient besoin de lui. Si Harry avait pu lire l'avenir, il aurait mis un poing dans le nez d'Alexander Davis.

Mais Harry n'avait rien de tout cela. Harry n'était qu'un adolescent mineur, épuisé d'avoir chanté des dizaines de fois la même chanson, émerveillé par les paroles d'un grand producteur dans le domaine de ses rêves. Alors, il s'émerveilla :

— J'ai du talent ?

Un sourire en coin tira les lèvres d'Alexander.

— Énormément. Et je te l'ai dit, si tu fais comme on le dit, le monde sera aveuglé par ce talent et rien ne pourra nous arrêter.


La maison de la famille de Niall était tout ce qu'une maison typique anglaise était. L'extérieur était une façade blanche avec des colonnes ; un grand escalier était la première chose visible en entrant à l'intérieur, la cuisine était un mélange de briques et de bois. L'Irlandais leur avait expliqué que c'était la soeur de sa mère qui vivait ici ; il avait une chambre à lui et comme le couple n'avait pas d'enfants, il se sentait comme le petit roi. Ils avaient même laissés quelques billets sur la table, pour permettre à Niall de se commander une pizza. En mettant au bout, les garçons avaient pu se commander quelques pizzas à partager.

Harry n'était pas du genre à se projeter dans la vie des autres. Mais en visitant cette maison, il pensa un court instant qu'il aurait mérité d'avoir un logement comme celui-ci. Pas spécialement lui, il aimait sa petite maison rustique dans un village lointain ; mais pour sa mère. Peut-être que dans une si jolie maison, dans une ville vivante, sa mère aurait été plus heureuse et vive.

Ce n'était pas comme ça que la dépression fonctionnait, au fond il le savait. Mais cela restait un adolescent.

Une fois la nuit tombée, ils s'installèrent tous sur la terrasse, dans des chaises de camping aménagées en rond et sous quelques couvertures. L'espace était joliment décoré, avec quelques guirlandes et une petite enceinte pour mettre de la musique. Niall rigola et lança Wonderwall.

— Pitié non, couina Harry.

— Je n'en peux plus de cette chanson, rigola Liam.

— Je pense que si je l'entends encore une fois, je vomis, dit Zayn.

Cela provoqua un rire général. Harry leva la tête vers Louis, assis en face de lui. Le châtain avait un petit sourire aux lèvres, un regard triste. Il était le seul qui n'avait pas pu chanter Wonderwall et Harry trouva cela injuste. Peut-être avait-il du talent mais il était sûr que Louis aussi, et qu'Alexander ne le voyait pas suffisamment.

L'Irlandais changea la musique pour mettre le dernier album d'Aerosmith.

— Je n'arrive pas à croire qu'on est en train de vivre ça, parla le blond. Qu'on fait de la musique tous les jours.

— Trois fois par semaine, corrigea Liam.

— Toujours aussi comique, sourit Louis.

Cela fit rire Harry. Stupidement, tout ce que disait Louis faisait rire Harry.

— J'en ai toujours rêvé, reprit l'Irlandais. Je ne pensais pas gagner ce concours... mais j'en rêvais.

— Je ne voulais même pas y aller, pouffa Zayn. Ma mère m'a forcée.

— Moi aussi, parla Louis. J'ai failli m'enfuir en courant. J'étais mort de trouille.

— J'étais un mélange de stress et de détermination, reprit Liam. Je crois qu'ils m'ont pris juste parce qu'ils se sont dit que j'en mourrais sinon, pouffa t-il. J'ai tout donné. J'ai déjà fait de nombreux concours comme ça avant... dans ma ville, ses alentours.

Harry écouta, attentif. Liam portait toute cette force et motivation dans ses traits. C'est une des choses qui l'avait le plus impressionné, la première fois qu'il l'avait entendu chanter. Il savait que c'est ce qu'il voulait faire et cela se voyait.

— Et toi Harry ? Sourit Niall. Ton audition ?

— Oh, moi... Ils m'ont oublié.

Les garçons s'étonnèrent.

— Oublier ? Répéta Zayn.

— Oui. Tout le monde est passé puis est parti et je me suis juste retrouvé... là. Alexander était en train de partir, je l'ai rattrapé et je me suis mis à chanter au milieu du studio. J'étais mort de peur aussi. Puis il m'a dit qu'il m'appellerait... et il l'a fait.

— C'était toi ! Liam tapa dans ses mains. Le garçon qui a été choisi par Alexander lui-même. La rumeur a tourné entre les candidats.

— Vraiment ? S'étonna Harry.

— Oui, confirma Zayn. Personne n'a parlé du fait que tu avais été oublié par contre.

— Eh bien... Rigola timidement l'adolescent. Ils m'avaient totalement oublié.

— Nous, on t'oubliera pas, sourit Louis.

Cela retourna le ventre d'Harry.

Le livreur de pizzas arriva et la conversation s'axa sur un sujet plus banal : la famille, les loisirs en dehors de la musique, les études. Louis et Zayn avaient une famille nombreuse, tandis que Liam vivait avec son père célibataire et Niall avait des parents joyeusement mariés mais était fils unique. Harry n'eut pas besoin de beaucoup parler ; les garçons connaissaient déjà sa mère. En mangeant sa pizza quatre fromages, il apprit que Zayn adorait le dessin et que Liam était fan d'équitation. Niall adorait les randonnées et Louis était tout le temps avec sa famille. Cette image fit sourire le bouclé.

Lorsque la nuit fut davantage entamée, Niall eut la brillante idée de proposer un film d'horreur.

— Non, couina Harry.

— Si ! S'exclamèrent Louis et Zayn en choeur.

— Je n'aime pas les films d'horreur.
— C'est encore plus drôle ainsi, rigola Niall.

Ils migrèrent tous dans le salon. Harry s'installa dans le canapé, sa couverture sur lui, les bras croisés sur son torse. Louis prit place à ses côtés.

— On dirait que tu boudes, sourit le châtain. Passe-moi un peu de ta couette.

Sous la couette, le genou de Louis toucha celui de Harry. Peut-être que regarder un film d'horreur n'était pas si mal, pensa le bouclé. J'espère même que ce sera un long film.

Liam s'installa à côté d'eux sur le canapé, tandis que Niall et Zayn prirent place sur le sol, adossés au sofa. Une fois la pièce plongée dans le noir, le générique de The Ring commença sur la télévision. Harry se tendit directement. Sous la couverture, Louis attrapa son pouce avec son index. L'adolescent se figea puis tourna lentement la tête vers le châtain. Il était concentré sur l'écran, comme si ce qu'il se passait sous la couette était une seconde dimension. Harry avait l'impression que les garçons pouvaient entendre son coeur battre aussi vite dans sa cage thoracique, qu'ils allaient lui demander de se calmer. Rien de tout cela n'arriva ; Louis garda son pouce entre ses doigts, enlaça un peu plus sa main au moment des scènes où Harry sursautait le plus.

Pour la première fois de sa vie, Harry adora avoir peur.


Dans l'obscurité de la nuit, Harry avait mal aux joues tellement il ne pouvait s'empêcher de sourire. Le film d'horreur l'avait terrifié mais rien n'avait été comparable à ce qu'il avait ressenti en tenant la main de Louis sous la couette. Jamais il n'avait pensé qu'un contact aussi simple aurait pu tant le bouleverser.

La maison était totalement silencieuse. Au loin se faisait entendre une horloge bruyante. Tic-tac. Tic-tac. En temps normal, cela aurait pu agacer Harry, mais rien ne pouvait gâcher sa soirée. Il avait de nouveaux amis super, il faisait de la musique avec eux, il avait rencontré un joli garçon qui lui tenait la main et lui souriait souvent.

Du bruit se fit entendre, quelques pas sur le plancher qui grinça. Harry tourna la tête vers la porte fermée de la chambre dans laquelle il dormait, le coeur tambourinant dans la poitrine. Tic-tac. La poignée de la porte commença à bouger ; il s'attendit à voir une silhouette blanche aux longs cheveux noirs prête à le tuer, mais ce n'était que Louis. Harry soupira d'aise et lui lança un coussin dessus.

— Tu m'as fait peur ! Chuchota t-il en se redressant.

— Je vois ça, rigola le châtain en fermant la porte derrière lui.

À pas de loups, il s'approcha jusqu'à être dans le lit.

— Pousse-toi, fais-moi de la place.

Harry s'exécuta. Le lit n'était pas fait pour deux personnes, ce qui amena un contact direct entre leurs jambes dénudées par leur short. Son coeur ne se calma pas, mais ce n'était plus de la peur.

— Tu n'arrives pas à dormir parce que tu as trop peur ? Sourit Louis.

— Non, mentit Harry.

— Ouais, c'est ça, rigola Louis.

— Je n'ai pas peur, se défendit le bouclé.

Ils étaient face à face, allongés chacun sur un côté de leur corps. Harry ne pouvait pas totalement voir son visage mais il devinait les détails grâce à la lumière de la lune qui venait éclairer à travers la fenêtre.

Le sourire de Louis fana puis délicatement, il leva sa main pour venir toucher la joue d'Harry. Ce dernier ferma les yeux au contact. En se concentrant, il remarqua que les doigts de Louis tremblait. Il rouvrit les yeux pour rencontrer les siens ; une certaine peur y régnait. Ce n'était pas la peur du film, c'était une autre forme.

Tic-tac.

— Ce n'était qu'un film, murmura Louis. Ce n'était pas la réalité.

— Je sais, chuchota Harry en retour. Je n'ai plus peur.

— Je sens ton coeur battre vite pourtant.

— Ce n'est pas parce que j'ai peur.

Un sourire frêle, presque inexistant, tira les lèvres de Louis.

— C'est vrai, je pense que tu es courageux, souffla le châtain.

— Moins que toi...

— Non, Louis secoua la tête. Non. Je suis courageux uniquement lorsqu'il fait nuit. Tu es courageux tout le temps. Tu n'en as juste pas encore conscience.

Tic-tac.

Dans l'élan de courage le plus fou, Harry avança son visage pour écraser ses lèvres contre celles de Louis. Il n'avait jamais embrassé personne ; de toute évidence, Louis avait déjà embrassé auparavant. Il parvint à le guider pour effectuer quelques mouvements de lèvres et Harry crut que son coeur allait exploser dans sa poitrine, sortir puis s'envoler tel un papillon.

S'embrasser sous la lumière de la lune sembla être l'acte le plus romantique au monde selon Harry. Si seulement il avait su à quel point il finirait par maudire l'existence de cet astre.

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