♱ | 1. Maudit Angleterrien


De retour en Enfer !

La Volkswagen blanche s'arrêta au bord de la route, à quelques mètres de la cour du lycée. Steven fut le premier à sortir du véhicule, tandis que je vérifiai une dernière fois si j'avais tout dans mon sac.

— On dirait qu'un rendez-vous important t'attend, se moqua mon père en coupant le moteur.

Je sentais son regard posé sur moi tout en continuant mon contrôle.

— Je veux juste m'assurer qu'il ne me manque rien.

Cette annonce provoqua un ricanement de mon paternel. Il pouvait bien rire, ça m'était égal. C'était vrai que je n'étais pas l'élève la plus modèle – je ne comptais même plus mes visites dans le bureau du proviseur, ainsi que mes heures de retenue – mais il n'était jamais trop tard pour prendre de bonnes résolutions. Sauf que venant de ma part, ce genre de changements avait le droit d'être moquée.

Après avoir vérifié que rien ne manquait, ma main saisit la poignée de la porte. Je tournai ma tête dans la direction de mon père et croisais ses yeux emplis de douceur et de bienveillance.
— Fais attention à toi, lâcha-t-il.

Qu'est-ce qu'il peut bien m'arriver à part mourir d'ennui ?

Je ne relevai pas sa remarque et l'embrassai sur la joue avant de quitter le véhicule pour rejoindre Steven qui m'attendait à l'entrée de la grande coure.

Après avoir observé la voiture démarrer et partir au loin, je me tournai face au bâtiment qui se dressait devant moi. Construit sur deux étages, le lycée de Mallory West faisait partie des endroits que je détestais. Pourtant, je n'avais pas d'autres choix que de m'y rendre. À contrecœur, je pénétrai dans la fosse aux lions où toues les élèves s'étaient répartis en petits groupes bien distincts, pour parler de sujets auxquels je ne comprenais rien.

C'était pour cette raison que je préférais largement la compagnie de Steven. En dépit du fait que nous étions jumeaux, lui seul parvenait à me comprendre et il en était de même pour moi. Aussi loin que je m'en souvinsse, nous avions toujours partagé un lien très fort. Nous n'avions cessé d'être inséparables.

Qu'est-ce que nous avions pu faire tourner en bourrique nos parents ! Ces remémorations d'un passé devenu trop lointain me valurent un ricanement qui franchit la barrière de mes lèvres.

— Qu'est-ce qui te fais rire ? demanda Stev', le front ridé par la curiosité.

— Oh, rien. Je repensais simplement à un truc idiot.

Mon frère fit un simple haussement d'épaule avant de retourner à ses propres rêveries. En pénétrant dans le grand hall où résonnaient en écho les nombreuses conversations des lycéens, je sentis une dynamique bien différente que les autres jours. Toutes les filles que je croisais sur ma route semblaient bien excitées. Les mots que je percevais le plus parmi tous ces commérages qui volaient dans les couloirs étaient : « Le nouveau », « Angleterre » et « Trop mignon ». Je supposais alors qu'un nouvel élève se trouvait à l'origine de ce changement d'atmosphère marqué par l'impatience.

— Tu te souviens que le nouveau arrive aujourd'hui ?

Cette question confirma mes soupçons. Je dévisageai Stev' avec le sourcil arqué qui traduisit ma confusion. Comment pouvais-je me souvenir qu'il débarquerait aujourd'hui alors que je n'étais même pas au courant de sa venue ? Afin de montrer mon indifférence à l'égard de cette nouvelle, je haussai les épaules. Rien ne changerait de toute façon, nouvel élève ou pas au lycée. Il serait l'attraction parmi nos camarades durant quelques semaines avant de sombrer dans l'oubli. Pour Steven et moi, nous demeurerions invisibles aux yeux de tous. C'était ainsi depuis toujours et ça le resterait.

D'ailleurs, je ne comprenais pas pourquoi la venue de ce type intéressait-il tant la population de cette école. En plus, il venait d'Angleterre. On ne pouvait pas faire plus cliché ! C'était un mec comme les autres, avec un accent qui ferait craquer plusieurs filles. Mais il n'y avait pas de quoi en faire un plat de frites.

— Hey, Gubler ! interpella une voix familière dans mon dos qui domina le brouhaha autour de nous.

D'un même mouvement synchronisé, Steven et moi, on se retourna pour découvrir face à nous, Alex et sa bande. Alex Rivers. Celui que je considérais comme étant la plus grosse brute du lycée. À mes côtés, je sentis Stev' se liquéfier sur place. Ma main s'empara de son bras pour l'empêcher de s'effondrer de peur.

D'un pas assuré, Rivers s'approcha de moi. Son regard hautain voilé d'une lueur de dégoût qui m'était adressé me reluqua de haut en bas.

— Tu t'es crue où ? On n'est pas à un concert de métal ici.

Derrière lui, ses amis s'esclaffèrent de rire, tandis que je levai les yeux au ciel. C'était presque un soulagement de savoir qu'il s'en prenait à mes cheveux coupés à la garçonne et teint d'un noir charbon. Alex aimait non seulement user de sa grande taille pour dominer et effrayer les autres. Il éprouvait particulièrement un malin plaisir de s'en prendre à moi et ce, même si j'étais une fille et lui, un mec. Il prétendait avoir trouvé un adversaire à sa taille, ce qui n'était pas tout à fait vrai. Du haut de mes un mètres cinquante-trois, face à lui, je me sentais certes, petite, mais pas effrayée.

Parce que bien qu'étant impressionnante, sa carrure ne se constituait que d'un surplus de graisse. Et pour ne pas arranger son cas, il ne réfléchissait pas avec son cerveau, mais avec ses poings.

— Mais puisqu'il n'y a rien qui va chez toi, ça ne m'étonne pas.

Cette fois, c'étaient mes yeux vairons qui étaient pris pour cible. Alex pouvait s'attaquer autant qu'il le voulait sur mon physique, ses remarques ne me touchaient pas. Parce qu'il ignorait quelle était ma véritable faiblesse. Et il valait mieux pour moi qu'il ne découvre jamais ma boite de Pandore.

— Rivers, si tu veux que tes menaces aient de l'effet, va dans une salle de sport pour retravailler un peu ton physique.

Contrairement à lui, je connaissais sa faille qui était son surpoids. À la vue de son visage qui s'assombrit, je compris que ma pique ne lui plus guère. D'une grosse poigne, il me saisit par ma veste en cuir pour m'amener vers lui. Je sentis sa colère qu'il contenait mélangé à sa respiration qui vint s'écraser contre mon visage. Mon cœur commençait à s'affoler, mais je ne montrais aucun signe de peur. Je conservais un visage impassible. Parce qu'au fond, je savais qu'il ne me ferait rien, en tout cas pas ici.

— Tu as de la chance qu'on soit au lycée, Gubler, sinon j'aurais éclaté ta sale petite gueule, me susurra-t-il sur un ton menaçant.

Une cascade de frisson dévala mon échine dorsale. Néanmoins, je conservais mon air sérieux. Ce n'était pas la première fois que je me confrontais à cette brute sans cervelle, je m'en étais toujours bien tirée. Je préférai cependant qu'il s'en prenne à moi, plutôt à Stev'. Ce dernier s'interposa entre nous de manière timide, en demeurant proche de moi.

— Fous-lui la paix, Rivers, souffla-t-il d'un ton insistant.

Mes yeux emplis d'aplomb demeurèrent implantés dans les iris ténébreux de mon ennemi. Ses lèvres étaient pincées, la frustration montait en lui et moi, la satisfaction me gagnait. Il ne pouvait pas nous toucher, pas dans l'enceinte du lycée. Alex finit par me relâcher, sans doute avait-il perçu le regard appuyé d'un des professeurs braqué sur nous, qui était prêt à nous bondir dessus au moindre geste violent.

— Je n'en ai pas fini avec vous.

Il m'adressa un dernier regard obscur avant de nous tourner les talons, s'en aller au loin pour se fondre dans la foule. Tout en poussant un soupir de soulagement qui délesta mon estomac de ce nœud insupportable, je poursuivis ma route.

— Quel crétin, ce Rivers, grogna Steven.

Je lui témoignai un sourire attendri. Depuis peu, il essayait de s'imposer face aux autres, sous mes encouragements. C'était quelque chose qu'il n'était pas parvenu à faire autrefois, ce qui lui avait valu cette étiquette de trouillard. De façon inattendue, il passa un bras affectueux autour de moi pour me plaquer contre son corps.

— Ma petite voisine d'utérus, ne te laisse pas atteindre par ce qu'il te dit. Tu es magnifique.

Je sentis le chaud me monter aux joues et emplir mon cœur. Stev' avait toujours les mots qu'il fallait pour me remonter le moral. Aussi, il reconnaissait les moments où il pouvait ajouter sa touche d'humour en usant de ce surnom qu'il réservait qu'à moi. Voisine d'utérus.
Un ricanement s'échappa de ses lèvres, au plus grand plaisir de mon jumeau. À mon tour, je passai mon bras derrière son dos et nous foulâmes le couloir d'un pas déterminé. C'était comme ça qu'on fonctionnait. Lorsque l'un n'avait plus assez d'énergie, l'autre se collait à lui pour le transfert.

— Mais je m'en fous de ce qu'il me balance. Ça ne me touche plus, parce que je sais que...

Durant la fraction de seconde qui suivit, j'aperçus une porte en bois qui s'abattit sur mon visage. L'ayant remarqué trop tardivement, je n'eus pas le temps de l'esquiver. Une douleur virulente électrisa mon visage, notamment mon nez. Oh, bordel !

Sous l'effet du mal, je portai mes mains à mon visage en grimaçant. Les yeux clos, je priai pour que rien ne soit cassé. Autour de moi, j'entendais les rires des élèves témoins de cette scène. J'espérai que personne n'avait filmé ça, au risque de finir sur le net et d'aggraver ma réputation au lycée.

Lorsque je rouvris mes paupières, mes iris se posèrent sur un jeune homme à la chevelure blonde qui venait de quitter la salle. Lorsque son regard croisa le mien, il m'étudia longuement, avec une curiosité présente sur les traits de son visage. Je me surpris à le détailler également. Il était vêtu d'une veste en jean, avec un T-shirt portant le nom de Green Day. J'étais prête à parier qu'il portait ce haut en ignorant que c'était un groupe de punk rock. Un ignorant, comme la plupart des élèves de ce lycée.

— Tu ne peux pas faire attention ? Débile profond ! aboyai-je, agacée par son silence et sa manière de me reluquer d'un regard insistant.

Sans lui laisser le temps de répondre, je poursuivis ma route sur un pas furieux. Ma destination ayant changé, j'avançai en direction des toilettes pour mettre un peu d'eau froide sur mon nez endolori.

— Polly, c'était lui, me souffla Steven.

— Qui lui ? questionnai-je sans comprendre de quoi il me parlait.

— Le nouveau !

Je m'arrêtai et le toisai d'un air confus. Lui, le nouveau ? Je n'avais pas entendu son accent, mais en même temps, je ne lui avais pas laissé l'occasion d'en placer une. Mais qu'est-ce que ça pouvait faire ? C'était un débile profond qui n'avait même pas pris la peine de s'excuser. Au lieu de cela, il s'était contenté de me contempler comme si j'étais une bête de foire.

— Maudit Angleterrien.

— C'est un Anglais, me corrigea Steven.

Mon agacement emplissait presque la totalité de mon esprit. Je ne pris pas la peine de répondre à mon frère et fonçai dans les toilettes. Stev' m'attendait devant l'entrée, le temps que je puisse me remettre du choc subi.

Face au miroir, je constatai l'ampleur des dégâts. Heureusement, je ne saignais pas. En touchant délicatement de mon nez, je compris que rien n'avait été cassé. Ouf ! Si ça avait été le cas, le blondinet aurait payé les frais et subis les foudres de ma fureur. D'ailleurs qu'est-ce qu'il fichait là ? J'avais tellement été obnubilé par autre chose que je n'avais même pas fait attention de quelle salle il provenait.

Quelle importance ? Ma mâchoire se contracta, mon regard s'assombrit.

Entre lui et moi, c'était mal parti.

Je me dépêchai de placer un papier humide sur la zone touchée. Une nouvelle grimace défigura mon visage au contact désagréable et douloureux du froid sur mon nez. La sensation d'inconfort était telle que j'hésitais à retirer le morceau de serviette en papier. Mais rapidement, une sensation plus douce balaya la douleur que je ressentais.

Appuyée sur les rebords du lavabo qui tombait en ruine, j'admirais mon état pitoyable. Avec ce morceau de papier sur le nez, je ne ressemblais à rien du tout. J'espérai seulement que Stev' ne se moquerait pas de moi.

Je tressautai à l'entente d'un bruit qui provenait derrière moi. D'un mouvement furtif, je me retournai, contemplai avec anxiété, les cabines des toilettes qui étaient vides. Je pris concsience que la température avait brutalement chuté. Des frissons parsemaient mon épiderme. Un sentiment de malaise me gagna alors progressivement, comme si j'avais détecté une présence, alors que je me trouvais seule.

Je n'étais pas dans la zone la plus chaleureuse du lycée. C'était même un endroit vraiment glauque. Seule une vielle fenêtre laissait la lumière passer pour éclairer cette pièce faite entièrement de carrelage brunâtre – qui, autrefois, avait été blanc.

Je regardai à nouveau dans le miroir, persuadée que le contrecoup du choc me montait au cerveau. Cependant, mon sang se glaça dans mes veines, ma respiration se bloqua dans ma trachée. Derrière mon reflet, j'aperçus deux points brillants provenant des cabines, qui me fixaient avec une intensité effrayante. Cette fois-ci, la panique me gagna, provoquant l'affolement de mon rythme cardiaque.

Pitié, non! Ça ne va pas recommencer.

Cette chose, je l'avais déjà vue et j'espérais ne plus l'apercevoir. Ça ne devait plus se reproduire. Je fermai les yeux, conservant mon calme pour éviter de céder à la terreur qui me dévorait de l'intérieur. Je pris de profondes inspirations pour retrouver un rythme normal, tout en essayant de me convaincre que ce n'était que le fruit de mon imagination.

En ouvrant lentement mes paupières, je découvris qu'il n'y avait plus rien. Les cabines étaient vides, j'étais seule à mon grand soulagement. J'étais convaincu qu'il s'agissait d'hallucination dus au coup que j'avais reçu.

— Maudit Angleterrien, soufflai-je avant de quitter ces toilettes avec hâte.

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• Hey beautiful people ! 🤗

Voilà ce premier chapitre plutôt... fracassant •

•......•

• Votre avis sur ce premier chapitre qui met en lumière Polly ?

• Sur Alex Rivers ?

• Sur Stev', le jumeau de Polly ?

• Sur cet « Angleterrien » qui a bien amoché Polly ?

• Sur ce que Polly a aperçu dans les toilettes ?

•......•

☆ Le prochain chapitre sera sur le PDV de Marty ☆

Kissouilles !

📸 TikTok : aliiwriter

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