Epilogue

Dans les limbes, je me tiens, immobile. Le néant autour de moi semble paisible, comme un voile de sérénité trompeuse. Mais elle approche déjà, Eleonora, sa silhouette éthérée s'avance dans l'ombre. Ses sourcils sont froncés, son regard est perçant. Elle m'observe en silence, jusqu'à ce qu'elle lâche enfin :

— "Tu es bien calme, Nikolay. Étonnamment calme... pour quelqu'un qui a échoué."

Sa voix glisse dans l'obscurité, teintée de cette froide certitude qui m'a toujours agacé. Elle croit que tout est fini. Pourtant, c'est elle qui ne comprend rien.

Je croise son regard et, doucement, un sourire s'étire sur mes lèvres.

— "Je n'ai pas encore perdu", je murmure.

Elle incline la tête, comme pour sonder mes pensées, un brin de mépris au coin des yeux.

— "Zéphyr", soufflé-t-elle. "C'est de lui que tu parles ? Tu penses vraiment que tout cela est encore jouable ?"

Mon sourire s'élargit, une lueur de satisfaction traversant mon regard.

— "Oh, cela va bien au-delà de Zephyr."

Elle avance de quelques pas, scrutant mon visage, comme si elle voulait y déceler une faille, un indice qui trahirait mon calme.

— "Tu es vraiment impossible", murmure-t-elle avec un soupir. "Regarde-toi... Tu n'as toujours pas compris que tout cela ne mène nulle part."

Je m'apprête à répondre, mais soudain, une vision nous frappe. Une scène du monde des vivants : Lyssandra, enragée, désespérée, erre à la recherche de Zephyr. La haine et la douleur se dessinent sur son visage, mais elle n'est pas la partie la plus captivante de ce spectacle. Ce qui me fait vraiment sourire, c'est celle qui arrive après elle.

Evelyne. Elle se tient là, au milieu des ruines et des cadavres, un sourire dément fendant son visage ensanglanté. Ses yeux débordent de folie, chaque geste, chaque pas, chaque éclat de rire montre à quel point elle est perdue dans sa démence. Elle est devenue ce que je voulais qu'elle devienne.

Eleonora tourne les yeux vers moi, horrifiée.

— "Pourquoi souris-tu ainsi, Nikolay ?" Sa voix tremble légèrement. "Qu'est-ce que tu as fait à cet enfant ?"

Mon sourire ne faiblit pas. Je croise les bras et observe Evelyn avec une satisfaction glacée.

— "Je n'ai fait que préparer le terrain, Eleonora. Evelyn... c'était un projet de longue haleine."

Elle m'écoute, tendue, incapable de détourner les yeux de la scène qui se déroule sous ses yeux.

— "Au début, elle n'était qu'une âme fragile, abîmée. Je l'ai modelée, façonnée, lentement, patiemment. Je lui ai murmuré des promesses, soufflé des mots doux. Je l'ai enchaînée, sans qu' elle ne la voie, à un amour obsessionnel pour quelqu'un d'autre."

Eleonora fronce les sourcils, choquée.

— "Tu parles de Lyssandra..."

— "Exactement." Je ricane doucement. "Evelyn était la clé pour m'approcher de Lyssandra, une simple marionnette dans un jeu bien plus vaste qu'elle ne pouvait l'imaginer."

Elle secoue la tête, incrédule.

— "Mais pourquoi lui avoir fait croire que tu tenais à elle ?"

Je ris doucement, un rire sans chaleur.

— "Parce qu'elle a toujours été un esprit vulnérable. Un esprit vif, mais brisé. Elle était déjà un peu instable, il ne me restait plus qu'à attiser cette folie latente."

Je fixe Eleonora, mon regard prenant une intensité cruelle.

— "Tu veux savoir pourquoi, Eleonora ? Pourquoi je l'ai tuée, finalement ? Parce qu'elle représentait encore un fragment de mon humanité. Ce reste faible, ce souvenir inutile de l'amour..."

Elle écarquille les yeux, horrifiée.

— "Alors tu l'as... anéantie, juste pour devenir ce monstre sans entraves."

— "Exactement. Elle ne servait plus qu'à une chose, maintenant : achever ma résurrection et accomplir ma volonté."

Eleonora reste sans voix, choquée par l'horreur de mes aveux.

— "Elle va ramener ta folie dans le monde des vivants", souffle-t-elle, glacée.

Je m'approche d'elle, mon regard rivé dans le sien.

— "Eleonora, je ne te laisserai pas le choix. Tu reviendras avec moi, que tu le veuilles ou non."

Elle recule, dégoûtée, mais je continue, implacable.

— "Elle m'aimait follement, Eleonora, mais elle n'était rien de plus qu'un outil. Evelyn est devenue exactement ce que je voulais qu'elle devienne : un démon dans la peau d'une humaine, prêt à tout pour me ramener à la vie et satisfaire mes désirs."

Je m'arrête, satisfait de son silence horrifié. Elle s'efforce de parler, de trouver les mots.

— "Tu as peut-être ressenti de la passion pour elle", murmure-t-elle finalement, "mais tu n'as jamais connu l'amour".

Je m'approche, un sourire glacial étirant mes lèvres.

— "L'amour ? L'amour est une faiblesse, Eleonora. Une chaîne pour les esprits faibles. Je n'ai plus d'âme humaine, plus de compassion. Tout ce qui m'importe, c'est de voir ce monde brûler à mes pieds, et de t'avoir à mes côtés pour y assister.

Elle secoue la tête, reculant.

— "Tu es vraiment perdu, Nikolay."

Je la fixe, mon regard impitoyable.

— "Peut-être. Mais ce monde va se consommer avec moi."

Soudain, un éclat de lumière aveuglante déchire les ténèbres, brûlant Eleonora d'une clarté brutale. Elle recule, éblouie, les mains portées à son visage pour se protéger de cette lueur incongrue qui fait pulser la pénombre d'un blanc féroce. Une saisissante  lueur l'engloutit, la poussant à fermer les yeux dans un mélange de stupeur et de crainte, l'air autour d'elle vibrant comme si une force lointaine était sur le point de franchir une barrière invisible.

— "Non..." murmure-t-elle, le souffle coupé. 

La lumière s'intensifie, presque vivante, comme si elle menaçait de la consumer, de l'arracher à ce lieu entre deux mondes. La vision déferle, violente et tangible, jusqu'à ce qu'elle sent une présence ; un murmure, un battement... Elle se fige, glacée d'horreur.

À l'autre bout de cette clarté dévorante, ma silhouette apparaît, une masse d'ombres et de contours troublés, flottant dans cette lumière perverse. Puis une sensation étrangère, aiguë, monte dans son esprit : une pression brutale, comme si un étau me comprimait, mais soudain... J'inspire, une première bouffée d'air. 

Gelée. 

Ma poitrine se soulève, et chaque muscle, chaque nerf se tend alors que la douleur d'une vie redémarrée brutalement irradie de chaque fibre de son être.

Je sens d'abord le poids de mon corps, lourd et douloureux, puis les battements de mon cœur... lents, puissants, faisant vibrer chaque artère avec la force de l'immortel. Ma respiration se fait haletante, rauque, comme un râle. La sensation du froid sur ma peau nue me rappelle la dureté du pieu et du sol. 

Mes doigts se crispent autour du morceau de bois et je l'arrache d'un coup sec de mon corps.  Lentement, je parviens à redresser la tête, le goût âpre de la belladone encore au fond de sa gorge, un goût amer et empoisonné. 

— "Simple extrait de belladone et un peu de magie... Rien de mieux pour simuler une mort plus vraie que nature. Une mort cérébrale de quelques heures" murmuré je, un rire bas et méprisant naissant au fond de sa gorge. 

Alors que je reprends pleinement possession de son corps, une onde d'exultation, une euphorie noire me traverse. Je savoure le triomphe de cette résurrection réalisée. Leurs visages terrifiés défilent déjà dans mon esprit, chacun ignorant que je me suis joué d'eux, de leur naïveté et de leurs illusions.

Cette sorcière me devait vraiment un bon service.

Puis je murmure, ma voix se répercutant dans l'obscurité profonde : 

— "Il faut être stupide pour penser que le premier vampire peut mourir aussi simplement..."

Le silence retombe, assourdissant. Et, dans un sourire cruel, j'ajoute, d'une voix plus lente, chaque mot appuyé comme un venin se diffusant dans le noir :

— "Lyssandra... ton frère est un loup-garou. Tu crois aux vampires et aux nécromanciens... mais comment peux-tu être si ignorante, pour ne pas penser que les sorcières existent ?"

Mon rire s'élève, glacial, implacable, important tout vestige de lumière. Je souris, assis dans l'ombre, et murmurant dans l'obscurité :

— "Alors même que les nécromanciens sont de la même famille".

Quelle ironie du sort. Ne pas savoir d'où on vient... Se rappeler simplement des ouï-dire et Zephyr qui fait persister le mensonge....

Mais bon, ça rend cette partie vraiment amusante. 

Pour une fois, peut être que j'arriverais à allier l'utile à l'agréable.

— "Je suis sur que la prochaine phase du jeu sera intéressante. J'ai hâte de voir quel pion tu vas jouer cette fois...Lyssandra Cooke", je ricane d'un air glacé.

*************************
Bonjour à tous !
Je vous retrouve à ce chapitre 50 pour vous dire que les aventures de nos personnages sont finis pour ce premier tome !
Qu'en avez vous pensé ? 
Une réécriture sera prévu bientôt, pour corriger le tout et le rendre plus fluide. Bien sur un tome 2 est prévu mais ne sortira pas tout de suite. Je préfère faire une pause dans cet univers pour me concentrer sur un autre quelques temps. 
Merci à vous d'avoir donné une chance à ce roman et pour tous vos conseils. 
Lunarae.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top