Chapitre 42
J'observe du coin de l'oeil Lyssandra qui s'agite dans la cuisine. Sa silhouette fine glisse de l'évier à la table comme une ombre familière, presque comme si elle n'avait rien à se reprocher. Son esprit semble serein comme si Ezren n'avait jamais existé et que j'avais tout inventé.
Alors je fixe de loin cette femme dans ma cuisine que je ne reconnais plus.
Où est passé la jeune femme perturbée par le décès de ses parents ?
Où est passé celle qui se souciait des autres ? A-t'elle seulement existé ?
-"Cassian ? Tout va bien ?", me demande t'elle doucement en sentant mon regard prolongé sur elle.
-"Oui bien sur Lys, je me demandais juste ce que tu étais entrain de faire", je lui mens en affichant mon plus grand sourire hypocrite.
Elle fronce les sourcils et se tourne pour me faire face complétement, ses bras croisés sur sa poitrine.
-"Qu'est-ce qui se passe avec toi ? Tu es vraiment distant en ce moment, c'est à peine si tu m'adresses la parole", s'inquiète t'elle en continuant de vaquer à droite et à gauche, "Au passage, tu n'aurais pas vu mon téléphone ? Je dois aller partir à Blisscrystal et il est introuvable !".
Mon cœur rate un battement, mais je reste impassible. Je connais ce regard. Elle cherche à comprendre ce que je cache, mais je ne suis pas prêt à tout lui dire. Pas encore. Elle ne doit pas savoir que je suis un loup garou pas plus que c'est moi qui l'ai attaqué ce soir là.
-"Ton téléphone ?", je hausse un sourcil, l'air détaché, " Je ne sais pas. Peut-être que tu l'as oublié quelque part".
Je tâte la poche de mon jean pour vérifier qu'il est toujours bien caché à l'intérieur. J'en ai besoin pour mener à bien la mission que je me suis confié. Bien sur, j'en ai profité pour fouiller et chercher des réponses à ce changement brutal et à ce qu'elle est exactement.
Ce que j'ai trouvé...Ça m'a glacé le sang.
Une nécromancienne. Un être proche de la mort et de la décomposition.
Un être qui vit en symbiose avec ceux qui ne sont plus là.
Rien que de l'imaginer, j'en ai des frissons.
Lyssandra soupire, frustrée.
-"Cassian, arrête. Ça devient bizarre. Tu agis comme si quelque chose te rongeais et tu ne veux rien dire. Je n'aime pas ça", me dit elle, ses yeux brillant d'une lueur inquiète.
C'est dur de ne plus voir la sincérité dans ses actes, de ne ressentir que son hypocrisie et son mensonge. Je suis même tenter de lui révéler ce que je sais sur elle, sur ce qu'elle est devenue.
Mais je ne peux pas. Pas maintenant.
Je l'observe en silence, mon regard s'attardant sur elle, et un nœud se forme dans ma gorge. La vérité est trop lourde et lorsqu'elle me regarde de la sorte, j'ai envie d'oublier ce qu'elle a fait. Je préférais qu'on m'avoue que je suis fou et que je l'ai imaginé.
Comment lui avouer que je l'ai vue arracher ses jambes, sans pitié, comme une poupée de chiffon ?
Elle n'a pas la moindre idée qu'elle a mutilé quelqu'un que je considérais comme un frère. Et surtout, elle ne sait pas que je suis un loup-garou, que je sens son aura sombre et perverse, cette énergie de nécromancienne qui grandit en elle.
Mais moi, je le sais. Je sais que Zephyr l'a incité à prendre ce chemin. Et ça me tue.
-"Rien", je finis par répondre d'une voix plus sèche que je ne le voulais.
Elle plisse les yeux, scrutant mon visage comme si elle pouvait lire à travers mes mensonges. Puis, sans un mot de plus, elle attrape son sac et se dirige vers la porte. Ses talons claquent sur le sol, chaque pas résonnant comme un coup de marteau dans ma tête.
-"Je vais à Blisscrystal", dit-elle en ouvrant la porte, "Si tu as décidé de me parler, tu pourras le faire après".
Elle claque la porte derrière elle, et le bruit me laisse un goût amer dans la bouche. Je reste immobile un instant, les poings serrés, tentant de maîtriser la tempête de colère qui gronde en moi.
Elle n'a aucune idée de ce que je fais pour elle. Aucune idée du prix que je paye pour la protéger. Si elle savait que tout ce que je fais, c'est pour son bien...
Peut-être qu'elle comprendrait...
Peut-être qu'elle me verrait enfin comme son frère, comme le héros de cette histoire.
Mais avant de m'occuper de Lyssandra, il y a quelque chose d'autre à régler ce soir. Quelqu'un qui a tout changé en elle : Zephyr.
Ce foutu vampire arrogant.
Nikolay aurait pu me l'emmener sur un plateau d'argent mais je veux qu'il me voit. Je veux qu'il sache que c'est moi qui l'aurait fait sombrer et que Lyssandra ne lui reviendra plus.
J'attrape le téléphone de Lyssandra et envoie un message à Zephyr. Il pensera que c'est elle. Et il viendra.
***********************
Il ne tarde pas à arriver. Je me tiens dans le salon, prêt, l'adrénaline coulant dans mes veines, mes sens aiguisés. Je l'entends avant même qu'il franchisse la porte. Un léger souffle, un déplacement d'air à peine perceptible pour quelqu'un de normal, mais pour moi, c'est suffisant.
Zephyr entre comme s'il était chez lui, arrogant, sûr de lui, une silhouette mince et élégante qui semble glisser sur le sol. Je ne l'ai jamais rencontré, mais je sais que c'est lui rien qu'en sentant l'odeur alléchante de son sang de vampire.
Il est comme je l'imaginais, avec la tête du parfait emmerdeur.
-"Cassian j'imagine, on m'a beaucoup parlé de toi", marmonne t'il d'un ton tranchant, d'un mélange de mépris et de supériorité, "Où est Lyssandra ? Elle veut me voir".
Je ne réponds pas tout de suite, mes yeux le fixant avec une haine froide. Lui, c'est lui le responsable de tout. C'est lui qui a perverti ma sœur, qui l'a entraînée dans ce monde sombre et pourri.
Je veux qu'il souffre, qu'il sache que son sort est scellé, qu'il va juste servir à convaincre Lyssandra avant d'être utilisé par toute la meute.
J'agite devant moi son téléphone et immédiatement il comprend. Je vois ses yeux se plisser et ses pupilles se teinter de rouge. Pourtant il n'est pas le moins du monde impressionné, un petit rictus amusé passe sur son visage.
-"Pourquoi elle, Zephyr ?", je crache presque mes mots incapable de contenir la colère qui gronde en moi, "Qu'est-ce que tu lui as fait pour qu'elle change à ce point ?".
Je n'ai pas pu me retenir, mes crocs et mes griffes s'allongent. Je sens mon loup gronder, demander à ce qu'on le libère pour que je lui arrache la tête après mettre repus de son sang.
Zephyr plisse les yeux, un sourire narquois aux lèvres.
-"Lyssandra sait qu'elle cache un loup garou chez elle ?", ricane Zephyr.
Je ne peux m'empêcher de grogner, la machoire serrée.
-"Je t'ai posé une question", je hurle colérique.
Zephyr arque un sourcil.
-"Moi ? Tu penses que c'est moi qui ai changé Lyssandra ? Qui t'a fais entrée une idée aussi stupide dans le crane ?", ricane Zephyr, secouant légèrement la tête, "Tu ne sais rien, petit clébard. Tu ne comprends rien à ce qui se passe".
Le mot "clébard" résonne en moi, et je sens la bête gronder, prête à sortir. Je serre les poings, tentant de garder mon calme, mais c'est inutile. La rage monte, et je ne la retiens plus.
-" Tu crois que je vais te laisser la détruire ?", je crache, ma voix tremble de haine, "Je sais ce que tu es, Zephyr. Je sais ce que tu fais. Et je sais aussi qu'une morsure de loup garou peut vous faire délirer pendant des jours avant de vous tuer".
Il ricane à nouveau, cette fois avec une arrogance insupportable.
-"Oh, mais tu ne sais rien, Cassian. Tu penses être le chevalier blanc qui sauve sa sœur du méchant vampire ? Laisse-moi te dire une chose... elle n'a pas besoin de toi. C'est toi qui es un problème pour elle. Je connais Nikolay et toutes ses petites combines depuis des siècles et c'est encore un de ses pièges pour mettre la main sur Lyssandra", m'explique Zephyr, faisant un pas en avant, son regard perçant comme des lames.
Je me mords la lèvre, les bras ballants. Le doute m'assaille.
Et si Zephyr avait raison ? Et si Nikolay me déplaçait comme un pion sur son échiquier ?
Peut être que depuis le tout début, je vise la mauvaise personne.
Mais si c'était vrai, cela reviendrait à croire que Lyssandra en pleine conscience à arracher les jambes d'un innocent.
Et ça je ne peux pas l'imaginer.
-"Tu essayes juste de me retourner le cerveau comme tu l'as fait avec ma soeur", je lui crache, rempli d'amertume, mes pupilles oscillant entre le jaune et le bleu.
-"Tu ne veux juste pas avouer que tu as fais une erreur...", soupire Zephyr d'agacement.
La colère enflamme mes veines. Mes muscles sont tendus à l'extrême, et mes mâchoires se serrent si fort que je pourrais briser mes propres dents.
C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase.
Zephyr.
Ce parasite, ce monstre, se pavane chez moi depuis trop longtemps, insinuant sa présence comme un poison. Il veut sa main mise sur ma sœur, il la corrompt, et elle... Elle ne le voit pas. Elle ne comprend pas à quel point il est dangereux.
Mais moi, je le vois. Je le sais.
Ce n'est qu'un monstre empli de perversion, de luxure, qui cherche à la dévorer vivante, à l'éloigner de moi. Lorsque j'ai senti pour la première fois son odeur sur elle, j'ai su. J'ai su ce qu'il avait fait mais je me suis tu par égard pour elle et pour ces choix. Avec le recul, j'aurais du réagir.
La rage explose en moi, sauvage, violente, incontrôlable. Un rugissement s'échappe de ma gorge avant même que je puisse le retenir, et avant même que je réalise ce qui se passe, je me jette sur lui avec une rapidité qui me dépasse.
Le monde autour de moi devient flou, brouillé par la vitesse et la fureur de mon mouvement. Mes griffes jaillissent de mes doigts comme des crocs prêts à déchirer, mais Zephyr... Il bouge. Trop vite. Il esquive mon premier coup avec une aisance déconcertante, glissant sur le côté, son corps se tordant comme une ombre dans la nuit.
Ma main frappe l'air, un sifflement strident, mais il n'y a rien.
Il est si rapide que c'est à se demander s'il ne se téléporte pas.
La frustration monte encore d'un cran. Je me retourne avec une hargne bestiale, mais à cet instant précis, il réapparaît derrière moi, aussi fluide qu'une ombre fuyant la lumière. Il est là, à quelques centimètres de moi, si proche que je pourrais sentir son souffle.
Ses yeux. Ils brillent d'une lueur dangereuse, glaciale, et pourtant pleine de moquerie. Il est rapide. Si rapide. Je n'ai presque pas le temps de réagir. Je me tourne juste à temps, sentant à peine la caresse de son poing frôler mes côtes. Si je n'avais pas bougé, il m'aurait brisé en deux.
Chaque fibre de mon être est tendue à l'extrême. La haine, la rage, le désespoir... Tout se mêle, se mélange et je n'arrive plus à savoir où commence chaque émotions et ou elle se finit.
-"Tu es rapide pour un loup," murmure-t-il, sa voix traînante, son sourire sadique qui m'insupporte, "mais pas assez."
Sa voix s'infiltre dans mon esprit, se moque de moi, mais je n'ai pas le luxe de l'écouter. Pas maintenant. Il fonce sur moi, ses mouvements flous, presque imperceptibles, mais cette fois, je l'anticipe. Mon instinct, celui du loup qui sommeille en moi, s'éveille.
Mon bras se tend et j'attrape le sien avec une force brutale. Le choc est comme une détonation dans l'air. Nos deux corps se percutent, et pendant un bref instant, le monde entier s'arrête. Je sens les os de son bras se plier sous mes doigts, et je le propulse contre le mur, la puissance de l'impact résonnant à travers la pièce.
Il grogne, un bruit rauque, animal. Mais, avec une souplesse presque surnaturelle, il se dégage. Sa facilité à se libérer me rend fou.
Comment fait-il ça ? Pourquoi ne tombe-t-il pas ?
Ce vampire n'en ait pas à son coup d'essai. Il sait se battre, il a taillé son corps pour ça.
Et soudain, son poing s'écrase contre ma mâchoire. Une explosion de douleur traverse mon crâne, et pendant une seconde, le monde autour de moi vacille. Mes jambes fléchissent, mais je ne tombe pas. Je refuse de tomber.
Je me redresse, mon visage brûlant sous l'impact, mes crocs désormais visibles, mes griffes prêtes à déchirer. Je n'ai plus qu'une idée en tête : le déchirer, le détruire, le réduire en lambeaux.
Pour Lyssandra.
Chaque coup que je lance est empreint de cette rage, de cette obsession. Il esquive, encore et encore, mais je ne relâche pas. Pas cette fois. Mes griffes déchirent ses vêtements, mais presque comme s'il réussissait à le calculer, je n'effleure même pas sa peau.
Cela ne fait qu'ajouter à ma frustration. À ma fureur.
Ses yeux, deux perles froides et calculatrices, me regardent avec mépris. Il esquive mes assauts comme si je n'étais rien de plus qu'une nuisance, et cela m'enrage encore plus.
Puis, enfin, je vois une ouverture. Un moment, une fraction de seconde où il relâche sa garde, trop confiant. C'est là. J'en profite, je bondis sur lui, et mes crocs s'enfoncent dans son bras avec une force brutale, bestiale.
Je sens son sang glacial inonder ma bouche, son goût métallique envahissant mes sens. Je le tiens.
Zephyr pousse un grognement de douleur, ses yeux s'écarquillant un instant, réalisant ce qui vient de se passer. Ce simple coup, cette morsure... C'est le début de sa fin. Je peux sentir son corps se raidir sous moi, le venin de ma morsure se propageant rapidement, corrompant ses veines.
Son visage pâlit, et pour la première fois, je vois la peur dans ses yeux. Une peur qu'il tente de masquer derrière une grimace de sarcasme.
-"Sale clébard..." grince Zephyr entre ses dents serrées, son souffle court, ses yeux brûlant de haine. "Tu te rends pas compte que tu viens de condamner Lyssandra..."
Ses mots me frappent, mais je ne faiblis pas. Je serre mes crocs encore plus fort, m'assurant que le venin pénètre bien profondément. Goûtant son sang froid, je sens une satisfaction sombre m'envahir. Je le relâche brutalement, son corps tombant mollement au sol.
Il tente de se redresser, mais je ne lui en laisse pas l'opportunité. Cette fois, je suis plus rapide. Mon poing s'abat sur sa tempe avec toute la force de ma rage accumulée, et je sens l'impact vibrer jusque dans mon bras.
Zephyr s'effondre, inconscient.
Le silence retombe, lourd et oppressant, mais je reste là, essoufflé, tremblant de rage et d'épuisement. Je l'observe, ce monstre, étendu à mes pieds. Je l'ai eu. Enfin il est à ma merci et je dois me faire fureur pour ne pas céder à mes pulsions animales et le dévorer.
Je prends mon téléphone, les doigts encore tremblants d'adrénaline. Je compose rapidement le message, en évitant de réfléchir à tout ce que cela implique.
C'est fait. Il est là. Je vous l'amène à Grimhill, mais souvenez vous de notre accord, ne faites pas de mal à Lyssandra.
J'appuie sur envoyer, le cœur lourd. C'est la seule solution. C'est ce qu'il faut pour sauver ma sœur.
Je fixe Zephyr, encore assommé, sa poitrine se soulevant à peine. Il se réveillera bientôt, et lorsqu'il le fera, il sera furieux mais bien trop faible, en proie à une douleur et une illusion terrible.
Il ne pourra rien faire pour ramener Lyssandra dans l'ombre, et Nikolay la guidera. II m'a débarrassé de Zephyr et il veut juste retrouver sa sœur.
Si c'était Lys, j'aurais fait pareil... Il réussira à lui faire entendre raison...
Je fais ça pour Lys.
Je suis un héros. Je la sauve de cette engeance, de ce vampire qui l'a corrompue, changée.
Après tout, chaque grand frère aurait fait pareil.
Mais mes pensées sonnent étrangement fausses.
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Bonjour,
On se rapproche de la fin, moins de 10 chapitres et on clôture la fin de ce premier tome avant la réécriture !
Merci beaucoup pour vos commentaires, vos votes et votre amour pour mes personnages.
Lunarae.
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