Chapitre 30

La nuit tombe doucement sur mon domaine, enveloppant le grand manoir dans une lueur dorée. La musique et les rires résonnent dans les jardins illuminés par des lanternes suspendues aux arbres, créant une ambiance féérique.

C'est le soir de mon mariage, une célébration grandiose, organisée avec soin pour marquer cette union d'amour véritable, si rare à notre époque. Ma bien-aimée, Juliette, resplendit dans sa robe de satin blanc, et nous échangeons des regards complices, remplis d'une tendresse infinie.

Je me fonds parmi les invités, saluant nobles et dignitaires venus de loin pour honorer notre union. Le champagne coule à flots, les discussions animées réchauffent l'atmosphère encore fraîche du début de soirée.

Mais, malgré l'euphorie ambiante, je n'attends de voir qu'une seule personne que j'ai fais quérir d'Europe.

Nikolay.

Mon ami de toujours, mon guide et mentor. Lorsque mes parents m'ont légués le manoir, tous on voulut s'emparer de ma fortune. Lui, m'a guidé pour gouverner comme un duc fort et bon. 

Il est à mes yeux comme un second père.

Tous les regards se tournent vers l'entrée et un sourire innocent vient éclairer mon visage. Je sais déjà qu'il vient de se présenter sur le perron car dès qu'il fait son entrée, nul ne peut détourner ses yeux de son élégance.

Son charisme naturel et son sourire énigmatique captivent l'assistance, mais c'est son détachement apparent qui le rend si mystérieux. Il m'aperçoit au loin et s'avance vers moi, les mains dans les poches, l'air nonchalant.

-"Zephyr, mon cher ami, il semble que vous soyez devenu un homme", dit t'il d'une voix douce, presque chantante, mais teintée d'une mélancolie que je ne peux définir.

Je le prend dans mes bras, d'une étreinte joviale, ne cachant pas mon bonheur de le retrouver.

-"Nikolay, je n'aurais jamais pensé vous revoir à temps pour le mariage", m'extasié-je , ne pouvant cacher ma surprise ni ma joie de le voir ici, en ce jour si spécial. 

Il esquisse un sourire doux et salue Juliette d'un baise main amicale.

-"Comment aurais je pu manquer une si joyeuse nouvelle que l'union d'une sublime demoiselle avec un homme de votre envergure", sourit Nikolay à pleine dent en attrapant une coupe de champagne.

Nous discutons un moment, échangeant des souvenirs de notre jeunesse, des jours insouciants passés à explorer les terres de mes parents, avant qu'ils ne quittent ce monde trop tôt, me laissant avec des responsabilités bien trop grandes pour mes frêles épaules d'adolescent.

Nikolay avait été là, à mes côtés, me guidant avec une sagesse et une patience qui dépassaient son âge apparent. 

A mesure que la soirée avance, nous continuons de discuter, s'invitant même sur le balcon pour un peu d'intimité. A l'écart du tumulte de la fête, je peux sentir l'air frais me caresser le visage.

 La vue depuis le balcon est splendide, les jardins illuminés contrastant avec la noirceur du ciel étoilé. Juliette se découpe dans l'obscurité son sourire éclairant chaque recoin où l'obscurité semble apparaitre.

Elle est vraiment magnifique.

-"Zephyr, vous êtes devenu un homme admirable, un duc respecté et aimé de ses sujets. Mais êtes vous heureux ? Est ce la vie que vous désiriez saisir depuis le début où êtes vous avide de connaitre plus de femmes, de richesses ou d'or ?", me questionne Nikolay.

Sa question me prend au dépourvu. J'ai presque l'impression qu'il cherche à me tester, à tester ma foie envers mon épouse, envers mon peuple et mon dieu que je chéris tant.

Mes sourcils se froncent et ma mâchoire se crispe. J'espère qu'il ne me pense pas noble à céder aux péchés de la gourmandise ou de la luxure. J'exècre ceux qui ne cherchent que le pouvoir et le plaisir. 

Je resterais un homme droit et bon jusqu'à ma mort.

-"Oui, plus que tout ! Les mariages par amour ne sont pas courant mais Juliette est celle que mon cœur a choisi, et il est hors de questions que j'échange ce que j'ai contre des pêchés", je lui assure en prenant une goutte du champagne. 

Nikolay se rapproche de la rambarde, un rictus amusé et mesquin sur le visage. 

-"Vous savez Monsieur Maxwell, vous êtes le premier à me répondre de la sorte. Il est bien plus facile de posséder des gens avares et malheureux car ils sont prêts à tout. Mais vous... vous êtes unique en votre genre et c'est ce qui m'a intéressé dès que j'ai posé mes yeux sur vous", s'exclame Nikolay, ses pupilles dénués d'intérêts au fil des années, finissant finalement par pétiller. 

Il s'avance alors que je fronce les sourcils en grimaçant.

-"Que... Que racontez vous ?", je bégaye en sentant son aura oppressante.

-"J'ai hâte de savoir ce que vous deviendrez une fois que vous ferez parti de ces malheureux. Je sens que je pourrais enfin retrouver de l'intérêt", ricane Nikolay, son expression changeante, plus sombre.

Avant que je ne puisse réagir, il s'approche rapidement, bien trop pour que mes yeux humains puissent le suivre. Ses pupilles se mirent à bruler et deviennent d'un rouge sang. Je veux hurler et courir mais mes jambes restent pétrifiés, complétement terrifié par cette vision d'horreur.

Une douleur fulgurante explose dans mon cou alors que ses crocs percent ma peau. Je veux crier, me débattre, mais une faiblesse étrange m'envahit. Je suis paralysé, incapable de bouger ou de fuir.

La morsure est à la fois terrifiante et envoûtante. Je sens mon sang se retirer, ma vie s'effacer peu à peu, remplacée par une sensation de vide et de désespoir. Quand Nikolay relâche enfin son emprise, je tombe à genoux, respirant difficilement.

-"Pourquoi ? Je vous pensez mon ami. Qu'êtes vous au juste ?", murmuré je, les larmes aux yeux, la voix brisée, rampant pour tenter d'apercevoir Juliette derrière la rambarde. 

Nikolay me regarde, ses yeux remplis d'une tristesse insondable.

-"Parce que tu es spécial, Zephyr et que je sais que tu m'aideras à trouver une nécromancienne. Je ne pouvais pas laisser vieillir et mourir un homme aussi loyal", ricane Nikolay. 

Ses pupilles me figent sur place et son regard terrifiant m'enveloppe accentuant les tremblements dans mon corps. Jamais je n'avais connu une terreur aussi forte que ce jour là. 

Et le pire que tout, ce gout amer de trahison et de défaites qui emplit ma bouche.

Il me soulève avec une facilité déconcertante et m'emporte dans une pièce isolée. Là, il complète son acte odieux, m'entrainant dans une nuit d'horreur et de douleur que je ne pourrais jamais oublier.

Il me prenait ce que j'avais toujours gardé pour ma femme.

Ses mouvements et son sourire si détaché resteront pour toujours imprimé dans mon esprit.

Puis, mon esprit s'est brouillé, s'enfonçant dans une obscurité totale.

Quand je reprends conscience, je ne suis plus le même. Une marque trône sur mon coup et je ressens une soif insatiable qui me consume. Une douleur envahit ma gorge sèche et des voix lointaines m'incitent à prendre mon dû. 

Je suis froid, vide, et complétement inhumain.

Nikolay n'est plus là, il m'a délaissé sur le parquet de la chambre d'invité comme un vulgaire déchet dont on ne veut plus. Je devrais être en colère et le haïr mais pourtant je ne ressens qu'une profonde tristesse.

Pour lui j'étais simplement le fruit d'une sordide expérience.

Je m'échappe de la pièce, titubant jusqu'à notre chambre nuptiale. Juliette est là, inquiète mais rassurée de me voir. Elle s'avance vers moi, ses yeux pleins d'amour et de sollicitude.

-"Zephyr, que s'est-il passé ? Je ne t'ai pas vu de toute la nuit. Tu veux voir un médecin ? Tu as l'air si pâle", s'inquiète t'elle en passant une main contre ma joue. 

Mais à travers sa voix douce tout ce que je perçois sont les pulsations de son coeur qui délivre du sang à son corps. Je le sens affluer dans chacune des artères. Il est si bon, si chaud et si vivant que je meurs d'envie de m'en emparer.

-"Eloigne-toi, Juliette. Je ne suis plus moi-même. Je ne sais pas ce qu'il m'arrive", je lui hurle, d'une voix rauque et étrangère.

Elle secoue la tête, refusant de m'écouter.

-"Je ne partirai pas. Nous sommes unis, pour le meilleur et pour le pire", m'assure t'elle avec un petit sourire. 

Elle aurait mieux fait de m'écouter. L'homme que j'étais avant aurait tout fait pour se retenir, peut être aurait t'il réussi... Mais le monstre que je suis devenu ne jurait que par le sang et la mort.

Et celui là, jamais je ne pourrais le contrôler. 

La soif est trop forte. Je me jette sur elle, incapable de résister. Ses cris déchirent la nuit alors que je la vide de son sang, son corps devenant de plus en plus froid dans mes bras. La bête en moi réclamant son dû. Ses cris résonnent dans ma tête, mais je ne peux m'arrêter.

Quand enfin la soif est apaisée, je suis horrifié par ce que j'ai fait. Son corps sans vie, pâles et vidés de son essence, git devant moi. Juliette, même dans la mort, garde cette expression de peur et de douleur.

Mais le pire reste ces yeux, exorbités, me regarder avec une expression glaçante. On aurait dit qu'elle voyait un monstre et qu'elle s'était résignée à la mort.

Je murmure, désespéré :

-"S'il te plaît, ne me regarde pas avec ces yeux-là."

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Je jette un coup d'œil las pour observer la réaction de Lyssandra. Etrangement, elle ne me fixe avec aucune appréhension ou crainte, elle se contente d'écouter sagement avec une grande gentillesse.

-"Les jours qui ont suivis m'ont plongé dans un tourbillon de désespoir et de haine de soi. Je n'étais plus qu'une ombre, une bête assoiffée de sang, condamné à errer sans fin. Les rumeurs se propagent rapidement, et bientôt, on me surnomme Zephyr, le vampire vorace, celui qui arrache les yeux de ses victimes pour échapper à leur regard accusateur", je ricane amer et sarcastique. 

Au final, tu avais tord sur une chose Nikolay, je n'étais pas différent des autres. J'étais même pire. Face à l'appel du sang, je devenais addicte.

-"Je n'oublierais jamais comment il a réussi à m'arracher tout ce que j'aimais, me condamnant à une éternité de souffrance et de culpabilité", je conclus doucement en soufflant une bouffée de cigarette, le regard dans le vague.

Je suis maintenant une légende macabre, une figure de terreur dans la nuit. Mais au fond de moi, l'homme que j'étais autrefois pleure encore, pris au piège entre la vie et la mort, cherchant désespérément un moyen de mettre fin à cette existence maudite.

Alors je le tuerais, pour venger celui qu'il a tué ce soir là. 

Lyssandra reste silencieuse un moment, absorbant chacun de mes mots . Elle me regarde avec une tendresse infinie, sans la moindre trace de peur ou de jugement dans ses yeux. Lorsqu'elle se décide enfin à parler, sa voix est douce, presque un murmure.

"Zephyr, ce que tu as vécu, ce que tu ressens... c'est inimaginable. Je ne c'est pas si je suis vraiment celle qui peut t'aider à traverser cette horreur mais je t'aiderais", m'assure Lyssandra.

Elle s'approche lentement, jusqu'à ce que nos visages soient à quelques centimètres l'un de l'autre. Ses doigts viennent doucement effleurer ma joue, traçant un chemin invisible et réconfortant sur ma peau froide.

Little Swan, tu es la seule qui me rappelle à quel point les sentiments peuvent être beau et jouissif.

-"Si tu as connu une femme comme elle, pourquoi...pourquoi as-tu dit que je comptais énormément pour toi à Zachaeus", finit t'elle par me questionner en se mordant la lèvre.

La curiosité a toujours été un de tes défauts.

-"Il fallait que je détourne son attention de toi. Rien de plus, tu sais que c'est pour le bien de notre pacte, n'est ce pas Little Swan ? ," je lui réponds sans perdre mon sourire amusé.

J'aimerais tellement pouvoir être sincère juste une fois dans ma vie.

Je ricane intérieurement. 

Comment puis je avoir ces pensées alors que je suis un vampire. C'est terriblement risible. Je suis censée devenir bien plus courageux et ne rien craindre, pas même la mort. 

Et pourtant... Toi... Tu arrives à me rendre si faible. Je n'arrive même pas à t'avouer la vérité que tu mériterais d'entendre.

En même temps, comment pourrais tu réagir,...si
 tu découvre que ce soir là, à Blysscristal ça faisait déjà un demi siècle que je te cherchais. 

Comment réagirais tu ? Comment est ce que tu me regarderais ou me hairais, si tu apprenais que la seule femme qui hantait mes pensées, ça a toujours été toi ? 

Décennies après décennies... Recherche après recherche. Même alors que tu n'as aucun souvenir de moi, même alors que tu n'as même plus le même prénom.

Même un siècle n'a pas réussi à effacer mes sentiments et pourtant... Quand je te vois ainsi, je suis toujours autant craintif de t'avouer que... je t'aime. 

Et oui bordel, je t'aime et cette émotion me consumme de l'intérieur, brule mon être qui ne veut que l'attiser encore plus. 

Je sais que je ne récolterais que ton mépris, mais je ne peux m'empêcher d'apprécier cette flamme, quitte à oublier que le feu, ça brule...

Alors je continuerais de te protéger dans l'ombre comme je l'ai toujours fait. Quitte à n'être rien d'autre pour toi qu'un moyen d'atteindre tes fins. Je préfère que tu m'utilises plutôt que je ne sois rien pour toi.

Que s'est risible...

Lyssandra si tu connaissais mes pensées impures, tu ne me regarderais pas avec cette affection grandissante. 

Le silence s'installe entre nous, mais ce n'est pas un silence gênant. C'est un moment de paix, un instant où le temps semble suspendu, où le monde extérieur, avec ses dangers et ses horreurs, n'a plus d'importance.

C'est un moment où je me permets d'oublier, même brièvement, que je suis un monstre.

Finalement, Lyssandra se lève, prête à partir, mais avant qu'elle ne puisse atteindre la porte, je la retiens doucement par le bras. Je sors un parapluie noir, simple, mais robuste.

-"Prends-le," dit-il en lui tendant l'objet. "Je sais que la pluie te terrifie, et il commence à pleuvoir dehors."

Lyssandra me regarde, surprise que je me souvienne d'un détail aussi personnel. Un sourire timide éclaire son visage alors qu'elle accepte le parapluie.

-"Merci, Zephyr. Vraiment."

Je me contente d'un léger hochement de tête, incapable de trouver les mots pour exprimer ce que je ressens, préférant m'enfumer qu'assumer un seul moment de faiblesses. Alors qu'elle s'apprête à partir, je la regarde une dernière fois comme pour imprimer toutes ses courbes dans mon esprit.

Elle ignore tous des dangers qui m'entourent.

Des loups garous qui me traquent sans relâche à Nikolay qui rôde toujours dans l'ombre. 

Je la regarde disparaître dans la nuit, mon cœur lourd de sentiments inavoués et de secrets non partagés.

Je ne suis pas entré dans ta vie pour être aimé, mais pour être le monstre qui te sauveras lorsque tous les héros auront échoué.

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Bonjour, 
Voici un chapitre entièrement dédié à Zephyr. 
Que pensez vous de lui ? 
Des mystères se resserrent et perdurent. 
Arriveront t'ils à communiquer ? 

Merci beaucoup pour votre lecture.
Lunarae

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