Découverte


Si Leandru avait quitté Ponte Leccia comme prévu à la fin du mois de mars, Elisabetta, elle, dut attendre le début du mois de mai. Avant son départ, elle avait eu une très longue discussion avec sa grand-mère et elle lui avait indiqué les projets de Leandru afin qu'elle puisse communiquer les informations à Rose Venazzi.

Alba Casaleccia connaissait bien évidemment Teresa, la tante de Leandru et au grand étonnement d'Elisabetta, elle confirma les dires du jeune homme.

La vieille femme était très émue de laisser partir sa petite-fille mais cette dernière lui promit de venir la voir régulièrement afin qu'elle ne se sente pas trop seule.

Elisabetta n'avait qu'une crainte : que la cohabitation avec Matteu se passe mal. Au moins, la jeune fille ne serait pas seule : Caterina avait décidé d'accompagner le frère et la sœur de son défunt mari car elle ne supportait plus de vivre dans la maison où elle avait vécu avec Jean Casaleccia.

Elisabetta adorait la fille de son frère et elle était ravie à l'idée de partager sa maison avec sa belle-sœur et sa nièce. Elle comprenait parfaitement que Caterina souhaite se changer les idées et comme elle était une excellente cuisinière, son aide ne serait pas superflue pour faire marcher leur commerce.

Très prise par son installation, Elisabetta n'eut pas une seconde à elle pendant les quinze premiers jours suivant son arrivée à Corti. Ne sachant pas si les clients allaient affluer dans leur boutique, la jeune fille, Matteu et Caterina décidèrent de limiter les heures et les jours d'ouverture pendant les deux premiers mois et de noter scrupuleusement le nombre de visites reçues.

Ce n'est finalement qu'au début du mois de juin qu'Elisabetta, profitant de son jour de congé et de l'absence de Matteu parti à Ponte Leccia, put enfin se promener dans les rues de Corti. Naturellement, elle se dirigea vers la place Gaffory mais elle stoppa à une dizaine de mètres de l'hôtel-restaurant géré par la tante de Leandru.

Elisabetta se doutait que son amant était au courant de son arrivée mais elle ne savait pas s'il était en ville ou au domaine de son père à Ponte Leccia.

Elle eut alors la surprise de le voir sortir de la demeure, comme s'il la guettait et se doutait qu'elle allait venir sur place.

Leandru fit un signe à la jeune fille pour lui indiquer qu'elle pouvait s'approcher. Elisabetta se dirigea alors vers lui d'un pas hésitant mais rassuré par le fait que la place était vide et que tous les volets des maisons environnantes étaient fermées, elle accéléra rapidement l'allure pour venir se blottir dans les bras puissants de l'homme qu'elle aimait.

Leandru entraîna rapidement Elisabetta à l'intérieur :

- Enfin ! J'ai cru que ton frère te retenait prisonnière !

- Non, non, mais il y avait tant à faire...

- Viens. J'ai parlé de toi à ma tante. Elle a hâte de te rencontrer.

- Ah oui ?

- Oui. Pourtant au début....et bien, elle a réagi comme ma grand-mère et je...j'étais si bouleversé que je me suis enfui de la maison et...je ne suis revenu que le lendemain.

Ma tante était si inquiète qu'elle a consenti à m'écouter et...elle a été très surprise lorsque je lui ai révélé que je t'aimais. Il faut dire que...il n'y a pas si longtemps j'avais plutôt tendance à...à...hum...

La voix de Teresa Venazzi retentit alors derrière les deux jeunes gens, permettant ainsi à Leandru d'éviter de rappeler à Elisabetta qu'il ne se privait pas de l'insulter il y a encore peu de temps.

La sœur d'Antoine Venazzi observa un instant le jeune couple et elle sourit : à voir le regard d'adoration de Leandru sur Elisabetta, Teresa comprit que son neveu était bel et bien épris de la petite dernière des Casaleccia.

Elle avait refusé d'écouter son neveu lorsqu'il avait commencé à évoquer sa relation avec la jeune fille car Teresa n'oubliait pas tous les tourments que lui avait causés le clan Casaleccia. Mais ensuite, elle avait réfléchi, seule, et lorsque Leandru n'avait pas regagné sa demeure après s'être enfui en pleurs, la sœur d'Antoine Venazzi avait pris peur qu'il ne fasse une grave bêtise. Quand il était rentré le lendemain matin, les traits tirés et au bord du désespoir, Teresa avait compris qu'elle ne pourrait refuser plus longtemps de lui venir en aide.

Et lorsque son regard croisa celui très inquiet et timide d'Elisabetta, Teresa Venazzi, qui avait elle-même deux filles déjà mariées, ne se sentit pas le courage de faire payer à cette enfant les erreurs commises par les siens.

Lorsque sa tante s'approcha d'eux, Leandru plaça instinctivement un bras autour de la taille d'Elisabetta.

- Bonjour Elisabetta. Je suis Teresa la tante de Leandru. Je veux que tu saches que tu pourras toujours venir chez moi sans crainte. Lorsqu'il m'a parlé de toi la première fois, je dois reconnaître que j'ai voulu avertir mon frère mais ensuite, j'ai réfléchi. Je me suis installée ici à Corti pour fuir moi-même ces conflits incessants entre nos deux clans. Leandru et toi vous avez été élevés sans jamais connaître autre chose que cette haine que se vouent les différents membres de nos familles respectives et j'ai d'ailleurs été très surprise lorsque mon neveu m'a confié qui était la jeune fille qu'il avait choisie. J'ai également pu remarquer qu'il était prêt à tout pour toi et je dois admettre qu'il a su trouvé les mots pour me convaincre de vous soutenir.

Par contre, lorsque vos familles seront au courant de votre relation, je ne peux pas vous certifier que je pourrai vous héberger. Je pense que vous devrez envisager de quitter la région quelques temps et attendre que tous finissent par accepter la situation.

Je suis au courant de la mort tragique de ton frère Elisabetta et je te présente mes condoléances. Mais ce douloureux accident doit vous faire comprendre que vos deux clans ne sont pas prêts à faire la paix.

Teresa laissa ensuite les deux jeunes gens afin d'aller s'occuper des quelques clients de son établissement. Leandru emmena alors Elisabetta dans sa chambre et, d'un tiroir d'une commode il en sorti un petit sac en velours.

- Je ne sais pas encore quand j'aurai l'occasion de te revoir alors...je...je pense que je vais te donner ton cadeau pour ton anniversaire.

En tremblant légèrement, le jeune homme montra à Elisabetta la petite chaîne en argent au bout de laquelle pendait une petite goutte d'eau réalisée avec du corail rouge de Bunifaziu puis il l'attacha autour du cou de la jeune fille.

Stupéfaite, Elisabetta ne dit rien pendant un instant puis elle noua ses bras autour du cou de Leandru et elle l'embrassa avant de le remercier d'une voix émue.

Le jeune Venazzi tendit alors une petite clé à Elisabetta :

- Pour t'éviter de devoir passer par l'hôtel, ma tante a accepté que tu aies une clé de la maison en cas de nécessité. Tu pourras ainsi entrer par l'arrière et ,si je ne suis pas là, ma tante fera en sorte de me prévenir. Mais je ne sais pas vraiment comment nous organiser. Je travaille tous les jours sauf en général le dimanche et parfois le lundi. Bien souvent, je ne rentre ici qu'après dix-huit heures et je suppose que de ton côté ce sera la même chose...

- Pour l'instant nous n'ouvrons que trois jours par semaine pour nous laisser le temps de constituer des stocks. Ensuite, je discuterai avec Matteu et sur base de nos relevés, nous déciderons si nous étendons les jours d'ouverture.

Je ne vais pas avoir beaucoup de temps libre non plus car il...évidemment Gabriel lui a demandé de me surveiller.

- Évidemment.

- Aujourd'hui il est à Ponte Leccia mais je ne peux pas m'absenter trop longtemps. Caterina s'occupe de sa fille mais je suis certaine que Matteu lui a demandé de me surveiller. Je lui ai dit que j'allais me promener un peu en ville, je ne vais pas tarder à rentrer pour ne pas éveiller ses soupçons.

- Oui tu as raison.

A contrecœur Elisabetta ne s'attarda pas auprès de Leandru mais de le savoir aussi près d'elle la rassurait. A plusieurs reprises sur le chemin du retour, la jeune fille porta la main à son cou pour sentir la petite chaîne que Leandru lui avait offerte. Heureusement, sous ses vêtements elle était invisible et Elisabetta en fut réconfortée.

La jeune fille consacra sa journée à faire quelques aménagements dans le commerce familial puis elle salua Caterina et elle gagna sa chambre. Des bruits en dessous de sa fenêtre alertèrent Elisabetta en tout début de nuit. Prudemment, elle jeta un regard entre les volets de bois qui n'étaient pas totalement fermés et elle fut très surprise de voir son frère discuter avec un homme qu'elle ne connaissait pas.

Elisabetta tendit l'oreille et elle manqua de s'étrangler en écoutant la conversation. Comme elle le soupçonnait, Matteu était responsable de la disparition d'une partie de la production familiale afin d'ensuite accuser les Venazzi. Mais manifestement cette idée avait était abandonnée par ses frères qui avaient tous connaissance de l'affaire et ils avaient modifié leur projet : la charcuterie dont l'affinage n'était pas terminé était stockée à Gavignano et celle qui devait être consommée était vendue contre de menus services.

Elisabetta découvrit avec horreur que ses frères faisaient tout pour ruiner les Venazzi en convainquant les clients de leurs différentes entreprises de ne plus acheter chez eux ou de ne plus faire appel à leurs services.

Matteu et Jean de son vivant avaient développé tout un réseau leur permettant de favoriser certains commerces de Bastia, de Corte, du Nebbiu ou de Balagne en échange de la garantie que les personnes se fournissent dans l'exploitation familiale des Casaleccia et ils menaient une véritable campagne contre le clan Venazzi.

Écœurée, la jeune fille comprit que ses frères n'étaient pas prêts d'accepter qu'elle fréquente l'un de leurs ennemis.

Elle songea qu'elle devait prévenir Leandru mais également qu'elle devait mettre fin aux actes de ses frères car elle avait conscience qu'un jour ou l'autre cela se retournerait contre eux et contre leur famille.

Le lendemain matin, après une courte nuit, Elisabetta fut confrontée à une femme d'une cinquantaine d'années qui ne venait pas pour acheter des produits de l'exploitation mais bien pour se plaindre de Matteu qui l'avait ouvertement menacée parce qu'elle avait acheté quelques bouteilles au dépôt géré par Leandru.

Incapable de se retenir plus longtemps, la jeune fille exigea le soir même des explications de son frère.

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Voilà le début de l'explication pour les vols de charcuterie... Comment ça on parle encore de bouffe ??? MDR

Vous la voyez comment la discussion entre Elisabetta et Matteu ?

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