10.2

Sur ce commun accord fraîchement décidé, l'Alsacienne s'attela à sa tâche. Avec tout le sérieux qui la caractérisait, elle passa en revu tous les membres de son patient. Elle examina avec précaution et minutie l'épiderme blessé avant d'aligner le matériel médical sur un linge propre. Une sueur froide descendit le long de la colonne vertébrale de Draco qui s'efforçait de demeurer impassible. Ces « instruments de torture » ne lui attiraient guère confiance.

—Racontez-moi ce qui lui est arrivé, exigea Hermione, autant par curiosité que par volonté de meubler un semblant de conversation.

—Des hommes l'ont frappé, répondit sommairement l'Allemand.

—Et c'est tout ce que vous savez ? sourcilla la jeune femme, sans y croire une seule seconde.

Draco songea à mentir, à ne pas faire part de la vérité à son interlocutrice. Il n'avait pas la moindre envie de se confier à elle, jugeant que se livrer au juif avait été suffisamment humiliant. Une énième preuve de son inavouable faiblesse. Il soupira lourdement, s'approchant du lit pour surveiller les actes de la prétendue médecin et l'état de son meilleur ami. Il articula finalement, à contre cœur, ne remarquant même pas la venue discrète du second homme :

—Il n'a pas pu m'accompagner ici, en Alsace. Le seul endroit où il a été accepté malgré l'influence de mon père a été le camp situé à côté de Munich. Il y était gardien, un parmi les autres. Des types l'ont attaqué. J'ai décidé de le faire venir ici pour le soigner. C'est tout ce qu'il y a à savoir.

—Le voyage a dû aggraver ses blessures, affirma Harry, tout en déposant son butin sur la table de chevet.

—Oui, approuva Hermione, d'un hochement de la tête. Il n'a reçu presque aucun traitement vu son état et il semblerait qu'une infection se soit développée. Je ne sais pas encore de quel type mais...

—Mais elle compte bien le découvrir, acheva l'autre, soucieux de supprimer les doutes du blond.

Draco semblait réellement soucieux de l'état de son ami, une inquiétude sourde rongeait ses traits. Son homologue le dévisageait tout en secondant le médecin. Il distinguait le même abattement sur son visage fin, une peur panique de perdre un ami très cher. Il semblait ainsi terriblement humain, capable d'attiser la pitié voire la sympathie. Et, cette fois encore, Harry s'y risqua, se laissant amadouer par le reflet qu'il apercevait, derrière le masque. L'onde troublait la surface lisse de l'eau, repoussant l'image uniforme qui s'y trouvait pour qu'une autre se dessine, à la fois mystérieuse, attirante et éphémère.

Les doigts fins et délicats d'Hermione effleuraient l'épiderme de Blaise principalement à l'endroit où l'inquiétant hématome prenait place. Elle palpa précautionneusement la zone meurtrie, tentant d'en deviner les secrets. De quel mal souffres-tu ? Es-tu prêt à endurer les soins nécessaires à ta guérison ? Me laisseras-tu te sauver la vie ?

Elle repoussa une nouvelle fois la couverture qui couvrait la nudité de son patient. Sans égard pour la virilité de l'homme, elle poursuivit son auscultation. Une longue minute lui suffit pour annoncer, gravement :

—Je compte trois côtes cassées, dont une qui m'inquiète particulièrement. Je ne peux pas en être certaine, mais il est possible que l'os brisé ait crée une hémorragie interne. Si c'est le cas, je dois l'opérer de toute urgence, il est déjà étonnant qu'il ait survécu autant de temps dans cet état.

—L'os a pu se déplacer pendant le voyage, proposa Harry, muni du même sérieux que sa cadette.

Draco demeurait silencieux, penché au-dessus de son ami inconscient. Par réflexe, il réarrangea le drap afin que celui-ci couvre son sexe. Il déglutit péniblement, une boule semblant se former au creux de sa gorge, identique à celle qui écrasait son estomac. Un bref vertige le prit, mettant à mal son équilibre. Pendant ce temps, Hermione reprenait son énumération de plus belle :

—De multiples hématomes sur l'ensemble du corps et le nez est également cassé, tout comme son poignet. Je m'occuperai de ces blessures plus tard, l'opération est urgente.

—Opération ? Vous voulez dire que vous allez... demanda l'aristocrate, la bouche sèche.

—L'opérer ? Oui, je n'ai pas le choix si je veux avoir une chance, même minime, de le sauver.

Draco acquiesça certainement trop exagérément pour que son comportement semble normal. Intriguée, le scalpel déjà en main, elle remarqua l'extrême pâleur de l'Allemand. Elle tendit un linge imbibé de chloroforme à Harry tout en indiquant, d'une voix ferme :

— Une petite dose devrait suffire.

Le juif approcha sensiblement les deux lampes qui brûlaient de part et d'autre du lit du corps inanimé. Il pressa ensuite le contenu sur le nez et la bouche du métis, précaution exigée par le médecin elle-même. Celle-ci déclara, à l'égard du soldat et d'un ton ne laissant sa place à aucune forme de protestation :

—Vous ferez bien de sortir.

—Non, je reste à ses côtés, contra immédiatement Draco, envers et contre tout.

—Votre présence n'est pas utile et je ne tiens pas à avoir à gérer un malaise.

—Un malaise ? Pour qui me prends-tu ?

—Vous feriez bien de l'écouter, elle n'a pas tort, insista Harry.

Ce dernier croisa le regard de l'Allemand qui le défiait purement de le contraindre à quoi que ce soit. Le plus jeune ne s'y risqua pas, maudissant le sale caractère de l'autre homme.

Hermione incisa la peau de Blaise dans la longueur et à l'endroit où l'hématome s'étalait. Le sang perlait alors qu'elle poursuivait sa tâche, les sourcils froncés de concentration et les doigts aussi agiles que précis. Une goutte de sueur dévala le long de la tempe de Draco qui s'efforçait de respirer calmement. La vision de son ami blessé et sur le point de subir une opération chirurgicale le bouleversait bien plus qu'il n'aurait pu l'imaginer.

Une puis plusieurs minutes s'écoulèrent. Un véritable calvaire, une torture que l'organisme du jeune homme s'efforçait de supporter. Il luttait contre la vue de l'hémoglobine à laquelle il avait été si souvent confronté. Cela ne lui avait jamais fait le moindre effet, comme si cette fois-ci se révélait différente. Évidemment puisqu'il s'agissait du sang et de la vie de l'être le plus cher à ses yeux. Harry capta le regard insaisissable de son vis-à-vis, y retenant la panique et la trahison de son corps. Il s'enquit, sans jamais relâcher son attention déjà retenue ailleurs :

—Malfoy ?

—Fais le sortir, Harry, ordonna Hermione, sans même lever les yeux de la plaie béante.

—N-Non, protesta Draco, maudissant le tremblement irrépressible de sa voix.

Le juif hésita un moment entre obéir à son amie et ne pas importuner l'Allemand, s'évanouir en pleine opération lui apprendrait peut-être à ne pas se surestimer, qui sait. Un éclat de vengeance purement puéril mourait d'envie de le voir s'écrouler de la sorte, la peau d'une blancheur maladive et la bouche close pour de longues minutes. Il dit, sans jamais cesser de tendre au médecin les instruments nécessaires :

—Je ne peux pas te laisser travailler seule.

—Comment crois-tu que je faisais, avant ? Quand mon père était occupé ? Raccompagne-le et reste avec lui, je m'occupe du reste.

Comme en écho aux paroles d'Hermione, la jambe gauche de Draco flancha et il manqua de peu de perdre l'équilibre. Une fine pellicule de sueur recouvrait son front blême et il respirait avec difficulté. Harry ravala l'envie perverse de le railler haut et fort alors que la jeune femme reprenait, pressement :

—Dépêche-toi, Harry. Je m'en sortirai très bien toute seule.

Le susnommé s'empressa d'empoigner la manche de celui qui aurait pu devenir son bourreau. Il le traîna presque jusqu'à la sortie, ignorant les protestations décousues de ce dernier. Il referma la porte derrière lui, abandonnant le sort de Blaise Zabini aux mains expertes d'Hermione.

Le destin était scellé, quoi que puisse en penser le blond. Draco Malfoy n'était d'ailleurs plus que l'ombre de lui-même. 


Une fin de chapitre qui donne une perspective sur la faiblesse de Draco (il détesterait que je parle ainsi de lui, mais soit). 

Désormais, la vie de Blaise repose uniquement entre les mains de fée de cette chère Hermione. Vos pronostics ? 

Le prochain chapitre se centrera sur une petite conversation entre hommes, entre Harry et un Draco plutôt sur les nerfs, dirons-nous. 

Je vous dis à la semaine prochaine pour retrouver l'objet de ce joyeux programme :3

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