1.1
Strasbourg, 31 juillet 1939.
Les rues pavées serpentaient entre les maisons à colombages, symbole d'une richesse culturelle unique. Harry Potter n'y restait pas indifférent, admirant la beauté des lieux comme s'il venait de poser les pieds sur le sol alsacien. Il s'avançait très lentement au milieu des passants, en effleurant parfois par mégarde. Il souriait librement, heureux.
Il appréciait cet endroit, s'y sentant presque comme chez lui. Arrivé par train deux semaines auparavant, il ne se lassait pas de ce cadre singulier. L'Ill léchait les rives et poursuivait son chemin, tranquillement. Même l'effervescence du centre-ville ne suffisait pas à dénaturer l'agréable torpeur de ce tout début de journée. La magie opérait à l'instant même où l'aube laissait sa place à un soleil d'un jaune éclatant.
Harry s'arrêta finalement au bout de longues minutes. Devant lui se dressait l'un des plus beaux monuments construits par l'Homme. Un ensemble complexe et somptueux que les maîtres d'œuvre morts il y a des siècles avaient entrepris d'élever jusqu'au ciel. Le sommet de la Cathédrale de Strasbourg taquinait les nuages rares en cette chaude matinée de juillet.
Le jeune homme comptait vingt-et-un ans en ce jour et cela le grisait d'euphorie. Un sentiment de liberté étreignait son cœur alors qu'il s'asseyait devant l'imposant édifice, une pomme à la main.
Il croqua dans la chair tendre du fruit sans lui accorder un seul regard, comme hypnotisé par la beauté dont il était témoin. Ce n'était peut-être rien mais, en cet instant, cela suffit à son bonheur. Les choses simples étaient souvent les plus belles au monde et cela, Harry l'avait bien compris. Le soleil caressait la peau hâlée de son visage et le vent s'engouffrait dans sa masse capillaire indomptable. Un sourire fendait son visage ravi comme l'astre fendait l'obscurité ambiante.
—Harry ! le héla une voix devenue familière.
Le susnommé se retourna pour découvrir le visage de son ami, celui qui avait été son ultime soutien durant plusieurs semaines. Ron Weasley se tenait face à lui, ses cheveux roux cuivré ondulants sous l'effet de la brise légère. Ses yeux bleu vif détaillèrent la silhouette chétive du jeune juif ainsi que les petites lunettes qui cachaient que très peu les étonnantes prunelles vertes.
—J'étais certain de te trouver ici.
—Je suis si prévisible ?
—C'est Hermione qui m'a dit de commencer par la Cathédrale si je voulais te trouver.
Cela n'étonna pas un seul instant Harry qui sourit encore un peu plus largement avant de mordre une dernière fois dans sa pomme. La clairvoyance de l'Alsacienne égalait presque son intelligence.
—Elle a bien pensé, commenta-t-il, j'aime beaucoup cet endroit.
—Oui, il semblerait qu'elle ait raison. Encore une fois.
Ron redressa son regard vers le monument qu'il détailla quelques secondes. Il n'était pas particulièrement sensible à l'art mais ne pouvait nier le génie de cette œuvre. La rosace au centre attirait immédiatement le regard tout comme la hauteur de l'ambition des hommes qui s'étaient attelés à construire cette immense bâtisse. Il reprit rapidement ses esprits, se rappelant l'objet de sa venue :
—Hermione t'attend, d'ailleurs. Il y en a un nouveau qui vient d'arriver. Ce n'est pas trop grave apparemment mais elle aurait besoin de ton aide.
Harry opina. Très intéressé par le domaine de l'art, il se passionnait également pour la médecine. Cette science attisait sa curiosité comme son désir d'empêcher la mort de sévir, de réparer les corps et de sauver les vies menacées.
Ron avait mené Harry à Strasbourg deux semaines plus tôt, le présentant à une jeune femme de sa connaissance, Hermione Granger. Un être d'une redoutable perspicacité capable de faire perdre la face à n'importe quel homme. Elle étudiait la médecine aux côtés de son père et Harry s'était directement proposé pour les assister, pour apprendre les ficelles du métier. Une occasion en or dont il s'était emparé et dont il chérissait toutes les facettes.
Le juif sauta sur ses pieds et emboita le pas à son aîné. Les mains enfoncées dans ses poches, il ne tarda pas à apostropher son homologue :
—Elle est de quelle humeur aujourd'hui ? Bonne ou mauvaise ?
Ron grimaça.
—Evite juste le sujet des Allemands et de la guerre. En fait, de tous les sujets qui fâchent et tu devrais t'en sortir vivant.
Ils rirent de bon cœur sans jamais ralentir l'allure. Les grands discours de leur amie étaient l'objet de moqueries toutes dépourvues de méchanceté.
—C'est à ce point ?
Ron opina avec une gravité mêlée d'humour. Hermione ne cessait, depuis quelques jours, de parler de la guerre. Une guerre qui n'avait pas encore commencé mais qui pendait au nez de l'Europe entière. Une guerre que la France se refusait à envisager. Une guerre que l'Allemagne nazie souhaitait et envisageait comme une revanche face à l'humiliation du premier conflit mondial. Une guerre qui détruirait tout.
—Elle a répété pendant tout le petit-déjeuner que ce n'est plus qu'une question de mois et que la France devrait arrêter de l'ignorer, qu'Hitler a déjà envahi des tas de pays et que rien ne l'empêchait de faire pareil avec la France. J'ai beau lui parler de la Ligne Maginot et lui dire que les Allemands ne la traverseront pas, elle ne veut rien entendre. Tu la connais, tout de suite les grands mots !
Si le rouquin ignorait, comme le gouvernement du pays, le danger qui planait au-dessus de leurs têtes, Harry ne cessait d'envisager, au contraire, les conséquences de la passivité d'une grande partie du monde. Cette peur qu'une partie de la patrie ressentait comme une évidence et que l'autre, niait systématiquement.
La Ligne Maginot, cette ligne de fortification destinée à protéger la frontière française contre l'envahisseur allemand, peinait à convaincre la population alsacienne. Elle avait fait l'objet de bien des fantasmes mais la puissance ennemie déroutait les rêveurs et si certains se surprenaient encore à espérer, ce n'était plus le cas de la majorité.
Hermione possédait une vision arrêtée du conflit qui s'apprêtait à éclater. Elle prévoyait de manière très précise ce qui, selon ses hypothèses, allait se produire. Elle mettait d'ailleurs en garde qui voulait bien l'entendre sur la menace nazie et sur les risques encourus. Plus les jours passaient, plus elle s'insurgeait sur les ignorants qui s'accrochaient à un espoir de paix. Un espoir incongru qui les menait droit à leur perte d'après ses propres dires. Heureusement, beaucoup de ses contemporains ne demeuraient pas aveugles et s'inquiétaient, eux aussi, des tentatives d'invasions de leur voisin.
Elle s'aventurait plus loin dans sa réflexion et avait fait par à Harry d'une de ses peurs : la dominance de l'Allemagne sur l'ensemble des pays voisins et l'instauration de leur politique antisémite. Des théories parfaitement fondées que son brillant esprit lui dictait, incroyablement réalistes. De quoi effrayer n'importe qui et le jeune juif ne faisait pas exception. Cela paraissait trop réel à ses yeux et il envisageait cette perspective avec craintes. Parfois, oublier de telles choses ne pouvait que le soulager.
—J'essayerai d'éviter le sujet, alors, énonça-t-il, à l'égard de son ami.
Voilà pour ce premier chapitre !
Comme vous pouvez le remarquer, c'est plutôt court. La taille des parties varie en fonction de la découpe que j'ai fait. Ce découpage essaie de respecter une logique. Il n'y a pas de grosses accroches ici (ce qui me gêne légèrement) mais j'espère tout de même que cette mise en bouche (et présentation sommaire d'Harry) vous aura plu :3
A la semaine prochaine pour clore ce premier chapitre ~
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