Réunion de soutien pour jouets abandonnés
« Merci beaucoup B-Max pour ton témoignage. » dit Woody au robot dodu qui tenta de s'asseoir sur sa chaise, décidément trop petite pour lui. « Qui veut, à son tour, prendre la parole ? » continua le cow-boy à l'habit taché.
« Moi ! Moi ! s'écria un dinosaure vert en sautant de sa chaise et levant son petit bras le plus haut qu'il pouvait.
- Rex, tu as parlé juste avant B-Max, soupira le jouet. Laisse la parole aux autres. »
Le dinosaure en plastique se rassit en soufflant, déçu, apparemment, il avait très envie de raconter une nouvelle fois son expérience de jouet du Jurassique. Une poupée Elsa de la Reine des Neiges ayant eu le visage barbouillé au feutre par son ancienne propriétaire de cinq ans, posa sa main aux doigts mordus sur le vieux jouet aux couleurs délavées, pour tenter de le réconforter.
« Quelqu'un veut-il prendre la parole ? »
Tous les jouets se regardèrent entre eux, mais personne ne semblait vraiment décidé à prendre la parole.
« Bon... dit alors le cow-boy, je déclare...
- Attendez ! s'écria alors une voix électronique. Je suis volontaire. »
Tous les regards se posèrent alors sur un petit robot qui semblait tout droit sorti de la boîte à jouets des parents des actuels enfants
« Je suis volontaire, répéta-t-il comme si son disque était rayé.
- Nous t'écoutons, annonça le cowboy en faisant un geste approbateur. »
Le jouet en métal s'éclaircit la voix, et commença :
« J'ai vécu des aventures extraordinaires. J'ai traversé les âges, littéralement et imaginairement. J'ai été un gentil et un méchant, un cow-boy et un indien, un robot exterminateur et un robot soigneur...
- Oh, un collègue ! s'exclama B-Max. »
Sa remarque entraîna une vague de « chut » et Woody fit signe au robot de continuer.
« Un autochtone et un envahisseur, un maître et un serviteur et j'en passe... J'ai croisé beaucoup de personnes pendant mon existence. Mes premières rencontres sont aujourd'hui des adultes, des parents. J'ai été leur propriété ainsi que celle de leurs enfants. Même s'ils m'ont un peu abîmé au cours du temps, ils ont toujours fait en sorte que je sois réparé, repeint, brillant, dépoussiéré... J'ai aussi beaucoup voyagé ! Tout d'abord, je ne suis pas d'ici, mais ce pays m'a très vite adopté...
- Et d'où viens-tu ? demanda une Barbie dont la tête était tournée dans le mauvais sens, si bien que sa chaise se trouvait dos au reste du cercle.
- Par-delà la mer ! J'ai été ramené d'un voyage ! C'était assez différent... Et assez triste...
- Ton pays était triste ? questionna la poupée. »
Le robot resta quelques instants silencieux, perdu dans ses pensées.
« Je crois. Je n'ai pas beaucoup de souvenirs de cette époque, seulement qu'avec mes semblables, nous étions alignés dans un rayon, dans des boîtes.
- Bref, un magasin. » dit une figurine de rocker. Un ours en peluche aux yeux recollés, et au nœud papillon recousu se leva alors de sa chaise pour aller taper la figurine, entraînant l'évanouissement de quelques princesses qui tombèrent dans les bras de ceux qui ressemblaient le plus, de près ou de loin, à des princes charmants.
« Mais il est complètement malade ! Qu'est-ce qui t'a pris le nounours ? continua le musicien. Tu veux un highway to hell ? Approche que je te thunderstruck ! »
Il se saisit de sa guitare, leva son bras au-dessus de sa tête et prit une profonde inspiration. Woody se précipita pour l'empêcher de jeter l'instrument à la tête l'animal, puis se tourna vers la peluche qui grognait.
« Paddington ! Qu'est-ce que je t'ai dit ! Interdiction de taper les autres ! Quant à toi, ne chante surtout pas et je ne veux plus entendre un seul de tes commentaires à moins qu'on t'ait autorisé à prendre la parole ! Maintenant retournez à vos places ! »
Les deux jouets obtempérèrent, non sans avoir fait auparavant un ou deux gestes d'affrontement.
« Reprends, je t'en prie.
- Une fois arrivé ici, j'ai également suivi mes propriétaires dans beaucoup de leurs voyages. Du coup, je suis fier de dire que j'ai vu le monde, visité des endroits que jamais mon imagination de petit robot en métal n'aurait pu concevoir ! » s'exclama la boîte de conserve parlante, prête à s'élancer dans une envolée lyrique.
Tous les jouets retinrent leur souffle.
« Mais tout a une fin. » dit-il, sobrement.
Le rire automatique d'un clown en plastique raisonna dans la salle, accompagné d'un soupir collectif.
« C'était brutal. » commenta-t-il.
Le petit robot s'éloigna de sa chaise et se dirigea vers la fenêtre de la salle pour regarder l'extérieur.
« Et puis, comme chacun d'entre vous, on m'a délaissé. Mon propriétaire est devenu trop vieux pour jouer avec moi. La première fois, j'ai été exposé dans une vitrine à le regarder grandir, mais sans jamais croiser son regard. Ce ne fut que quand il a fallu quitter la chambre qu'il a de nouveau posé les yeux sur moi. Je sais qu'il a hésité à me jeter, mais il ne l'a pas fait. Non, il a commencé par me mettre au grenier...»
Il y eut un grand frisson collectif.
« Le grenier !» murmurait-on.
Le jouet en métal se tourna vers ses compagnons qui avaient dû, pour certains, eux aussi connaître cette pièce sombre et poussiéreuse, où se retrouvaient les meubles et objets que l'on voulait stocker, où il n'existait que trois moyens de sortir : la poubelle, le vide-grenier ou la réutilisation.
« Là-bas, il a fallu lutter contre des armées d'araignées ! Mais je n'étais pas seul ! J'avais avec moi un de leur semblable ! Enfin... Un homme araignée !
- Un homme araignée ? S'exclama la figurine d'un jeune garçon, armé d'un appareil photo, qui avait dit s'appeler Peter Parker. Cela me dit quelque chose...
- Mon frère d'armes et moi, nous nous sommes battus vaillamment, jusqu'à la rédemption ! Les propriétaires sont venus nous rechercher !
-Libéré, délivré ! commença à chanter Elsa, avant de croiser le regard, réprobateur, de ses compagnons. Désolée, c'est un réflexe !
-Plusieurs années étaient passées, continua le robot, mais je l'ai tout de suite reconnu. Et il nous a donné à ses enfants, qui ont, à leur tour, joué avec nous. Mais vous connaissez la suite : eux aussi ont fini par grandir. Ils m'ont, cette fois-ci, donné à une garderie. Et me voilà aujourd'hui à vous parler de mon expérience.
- Et qu'est-il arrivé à l'homme araignée ? s'enquit Peter.
- Il est tombé sur le champ d'honneur, démembré par un chien...»
Le jeune photographe gémit. Quant au robot, il retourna s'asseoir sur sa chaise en grinçant et cliquetant. Paddington lui tendit un mouchoir qu'il refusa :
« Merci beaucoup, mais je ne peux pas me moucher. »
Le cow-boy qui présidait la séance se leva :
« Nous allons nous arrêter là pour aujourd'hui. Merci beaucoup... Au fait, tu ne nous as pas dit comment tu t'appelais.
-Mon nom est Zurg. »
Il y eut un grand fracas.
« Aye Caramba ! Emperador Zurg, s'écria une voix en approche, en nombre de la Alianza Galáctica, estás arrestado. »
****
Donc, voici mon nouveau texte pour le concours de LaMachineARever, j'espère qu'il vous a plu ! Pour tout vous avouer ce n'est pas mon préféré... Mais je me suis quand même amusé quand il a fallu l'écrire et j'ai notamment placé des références. Sauriez vous les trouver ?
A.
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