6. Sapin
«Je voulais fêter Noël.»
La plainte d'Antonio brisa le silence qui s'était installé dans le commissariat, jusqu'alors uniquement perturbé par les reniflements de Farouk. Teteola pleurait intérieurement de ne point pouvoir tourner sa vidéo et la chroniqueuse, privée de son téléphone, tentait de trouver un sens à sa vie.
La seule à être hors de la cellule, Eleonore, affalée sur la chaise de Mireille (la plus confortable) leva les yeux au ciel face à la phrase enfantine d'Antonio. Mais le jeune homme ne le remarqua pas. Il regardait le sapin.
Ce n'était pas vraiment un beau sapin. Acheté au premier prix au Lidl du coin, il était juste assez grand pour qu'Eleonore soit incapable de disposer l'étoile au sommet. Les décorations dataient de Mathusalem (je ne choisis pas les expressions) et avaient été mises en places par Géraldine de l'accueil. Or on savait que celle-ci n'avait jamais eu beaucoup de goût pour l'esthétique. D'ailleurs finalement c'était peut être à cause des décorations qu'elle avait eu son torticoli.
Bref, c'était en fait un sapin particulièrement moche. Il fallait dire que l'argent avait plutôt été investi dans la nouvelle machine à café. (normal me direz-vous, mais désolé, je préfère le thé vert).
Pour autant, cela ne semblait pas déranger Antonio.
«Et pourquoi ? interrogea Miranda avec brusquerie.
Tous les moyens étaient bons pour échapper à l'ennui mortel dans lequel l'absence pesante de son téléphone l'avait plongée.
- Ils se passe toujours des choses merveilleuses à Noël... Je me souviens de mon enfance en Thaïlande... C'était magique, répondu l'autre sans quitter des yeux le sapin hideux.
- Tu es Thaïlandais ? » s'étonna Farouk en considérant le teint blanchâtre d'Antonio et ses boucles blond platine.
Le pauvre lorgnait depuis un bon moment vers le champagne qu'Eleonore avait confisqué à Antonio et qui trônait à présent fièrement sur le bureau de Mireille.
«Non, je suis Suédois.
Eleonore leva à nouveau les yeux au ciel.
- Mais mes parents adoptifs étaient des îles Galapagos.
- Et mon cul c'est du poulet, lâcha Miranda avec un ricanement stupide (très stupide).
Elle n'avait jamais suivi ses cours de géographie, mais trouvait qu'Antonio avait placé trop de phrases sans se faire insulter.
Farouk éclata de rire, mais bon, c'est parce qu'il était soûl en permanence. Et Teteola continua à regarder le mur.
- C'est toujours moi qui décorait le sapin. J'étais doué. Plus que vous.
- C'est Géraldine, grinça Eleonore, sortant de son mutisme pour la première fois. Maintenant tu te tais.
- Je peux le redécorer ? demanda Antonio.
- Je peux le frapper ? demanda Teteola.
- Je peux avoir mon téléphone ? demanda Miranda.
- Je peux aller faire pipi ? demanda Farouk.»
Pour toute réponse, Eleonore éteignit la lumière, les réduisant au silence. Dans l'obscurité, les décoration du sapin immonde brillaient. Elle le regarda et se dit que quand même, elle était en train de passer un drôle de réveillon.
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