3.7 - Is it time for violence?
Is it time to speak up
or time for silence?
Time for peace
or is it time for violence?
×××
Le soleil se levait lentement derrière les arbres. Dans la plaine à la sortie des bois, il devait déjà illuminer les champs depuis plusieurs dizaines de minutes mais le village était coupé du monde de bien des manières.
Tout semblait arriver ici en décalé. Le soleil, les nouvelles... Nous étions un peu hors du temps. Il était presque facile de s'abandonner à l'illusion que nous étions en sécurité. De penser que personne ne pourrait jamais nous retrouver ici.
Si je me concentrais suffisamment sur les aiguilles des cèdres qui se balançaient devant les fenêtres de l'infirmerie, j'arrivais presque à oublier l'existence du monde réel.
Drôle comme ce monde que je voulais nier avait été ma seule et unique réalité jusqu'à il y a quelques mois de ça. Moins d'un an auparavant, c'était l'existence des mutants et de cette épidémie que j'essayais d'oublier.
Je comprenais ces gens inquiets dans le journal. Je comprenais ces familles qui voulaient juste que tout s'arrête, que les mutations soient rayées du décor, qui avaient encore espoir que tout redevienne 'comme avant'. J'en avais fait partie. J'avais cru qu'éliminer les mutants était la solution, même si à l'époque je pensais que nous les éliminerions en les soignant.
J'aurais aimé pouvoir me dire que tous les tuer m'aurait secoué, que j'aurais fait partie de ceux qui s'indignaient. Mais cela aurait-il vraiment été le cas?
Combien de temps m'aurait-il fallu pour accepter un génocide? Combien d'émissions spéciales, de discours, de "c'est la seule solution" cela aurait-il pris?
De toute façon, ils ne sont plus humains.
Ce qui est humain, c'est de mettre un terme à leurs souffrances.
Je collai mon front contre la vitre fraîche et fermai les yeux. Essayant de me replonger dans l'homme que j'étais avant.
Que m'aurait-il fallu pour changer d'avis? Pour effacer ces quinze ans de conditionnement, de lavage de cerveau? Qu'est-ce qui pourrait tous leur faire voir la réalité en face?
Il fallait qu'ils voient notre humanité, comme j'avais vu celle des autres mutants de la Cage. Mais comment, vers qui se tourner ?
Nous n'avions pas un ordinateur, pas un téléphone portable. Diffuser un message serait risqué, et nous ne savions même pas à qui l'adresser...
La veille, le président Lee avait annoncé que chaque citoyen désirant entrer dans un bâtiment public devrait présenter le résultat négatif de son Test le plus récent, celui effectué pendant la vague de vérification quelques semaines plus tôt. Nous ne pouvions aller nulle part. Seokjin était furieux. Nous étions limités au kyosque à journaux en plein air et à quelques supérettes de village qui n'appliqueraient peut-être pas à la lettre le protocole...
Mais nous devions tout de même essayer, non? Nous devions trouver un moyen de nous faire entendre.
Mais qui appeler, qui ne rejetterait pas en bloc notre histoire en croyant à un canular, un piège ou un mensonge éhonté?
Une réponse me trottait dans la tête depuis que j'avais épluché les dossiers volés au centre. Depuis que j'étais tombé sur ces photos. Sur le visage souriant de la mère de Taehyung, si c'était bien elle.
Ces femmes... Elles ne savaient pas exactement pourquoi elles avaient dû porter ces enfants, mais elles devaient forcément se douter de quelque chose vu l'ampleur de ce qui était arrivé ensuite.
Elles étaient parfaitement humaines. Les autres les écouterait peut-être. Il suffisait d'une pour semer le trouble, deux pour installer un réel doute?
Ces femmes avaient accouché il y a très longtemps et je doutais qu'elles aient tenu leur bébé dans leurs bras. Il était possible qu'elles veuillent avant tout oublier toute cette histoire... Mais est-ce que ça ne valait pas le coup d'essayer? Si l'une de ces femmes apportait les dossiers que j'avais volé dans un journal indépendant par exemple... Entre les pages compromettantes et leurs témoignages, il y avait peut-être une chance.
En revanche, je ne savais pas si je devais parler de ma découverte à Taehyung... Plus je regardais la photo de Im Saebyeok, plus la ressemblance me semblait frappante, mais rien ne prouvait qu'il s'agisse de sa mère. Et si elle l'était, il restait des chances qu'elle soit morte, ou refuse d'avoir le moindre contact avec lui. Je ne voulais pas lui donner de faux espoirs, et surtout pas le perturber en ce moment. C'était une période décisive pour Taehyung et son processus de guérison.
Lui parler de cette photo pouvait faire infiniment plus de mal que de bien.
Du bruit sur le côté me fit tourner la tête et je refermai doucement le dossier en regardant Taehyung se redresser dans le lit de l'infirmerie. C'était la dernière nuit que nous passions ici, on nous avait annoncé hier qu'une cabane avait été mise en service et que nous pourrions nous y installer.
Il frotta l'un de ses yeux d'un geste paresseux des phalanges et jeta un regard par la fenêtre, constatant que le soleil n'était pas levé depuis très longtemps. Ici, au milieu de la forêt, il faisait encore sombre. On devinait seulement l'astre au loin entre les branches épaisses et les aiguilles des cèdres.
- Tu veux de l'eau? demandai-je.
Taehyung secoua la tête et une grimace s'installa sur son visage. Sa main précédemment posée sur son visage partit vers l'arrière puis s'arrêta assez brusquement, se laissant retomber sur son épaule.
- Ton dos te fais mal?
Je me rapprochai prudemment du lit, pas encore bien sûr du niveau de spontanéité et de contact que Taehyung pouvait tolérer de bon matin, mais il me laissa me placer derrière lui et détacher une partie des bandages.
- Ça pique juste... grogna-t-il. Ça ne fait pas mal mais c'est désagréable.
Je hochai machinalement la tête tout en posant les yeux sur les cicatrices fraîches qui baraient son dos. Elles avaient l'air très saines, je ne me faisais pas trop de soucis pour la guérison physique de Taehyung.
- Tes muscles et tes nerfs ont été gravement traumatisés, c'est normal que ce soit désagréable, le temps qu'ils... S'habituent à leur nouvelle position.
Je restai silencieux le temps de lui retirer entièrement ses bandages et de lui faire sa toilette. Ici il n'y avait pas de douche, comme à l'infirmerie de la Cage, alors nous étions de retour à la bonne vieille bassine et à la serviette chaude. Je posai mes lèvres une seconde sur son épaule après l'avoir lavé et il pencha la tête en arrière, posant le crâne contre ma clavicule.
Il avait l'air de se sentir en paix, en sécurité. J'espérais que cela reste ainsi. J'aurais aimé pouvoir le garantir.
- Tu te souviens quand Solar t'as fait exploser le bras?
Je frissonnai en me remémorant la scène et il attrapa ma main presque aussitôt.
- Oui, très bien.
- Ce jour-là je croyais que tu reviendrais estropié. Si tu revenais. J'étais mort d'inquiétude et pourtant une part de moi était soulagée. Parce qu'elle ne pourrait plus t'envoyer te battre s'il te manquait un membre.
- Où est-ce que tu veux en venir?
- Je ne sais pas trop. J'y pensais juste, parce que...
Il fit une pause, se mit à tracer des lignes inconscientes sur le dos de ma main, suivant les courbes de mes phalanges.
- Parce que même s'il me manque des membres je ne veux pas renoncer à me battre.
- Contre qui est-ce que tu voudrais te battre? murmurai-je contre son cou. Le docteur Choi est mort, comme le sont les soldats qui nous retenaient prisonniers... Et Jooheon.
Il ne réagit pas spécialement à la mention de ce dernier nom. J'ignore si je m'étais attendu à ce qu'il nie ou qu'il s'excuse, mais quoi qu'il en soit je dus ravaler ma surprise.
- Contre le monde entier, souffla Taehyung. J'en veux à peu près au monde entier.
Les mises en garde de Seokjin retentissaient dans ma tête, semblant ne pas vouloir me laisser tranquille.
La fragilité et le deuil de Taehyung s'estompaient, mais je n'aurais pas cru devoir me méfier de ce qui se cachait en dessous.
- La haine ça ne mène nulle part Tae...
- Tu n'es pas en colère toi? Contre le gouvernement, tous ces gens qui suivent sans rien faire et qui ont tout ce qu'on nous refuse? Contre ces gens qui forcent des enfants comme Jungkook à se terrer dans les bois pour exister? Contre tes parents?
Je pris une minute pour vraiment y réfléchir, mais je n'arrivai pas à trouver assez de colère en moi pour la diriger vers eux.
Ce que le monde nous avait fait, c'était injuste et révoltant, mais mon envie de me battre était comme... Éteinte depuis ma courte discussion avec Choi.
- Je suis surtout triste et désemparé, répondis-je. Je ne sais plus vraiment quoi faire. Le seul contre qui je suis en colère, c'est moi, parce que j'aurais aimé voir certaines choses venir avant qu'elles ne dégénèrent. Parce qu'il y a des années j'ai prêté serment de toujours protéger la vie et de ne jamais la prendre, de ne jamais utiliser mes connaissances médicales pour nuire à autrui et de toujours rester impartial, et pourtant il y a quelques jours j'ai comploté et tué des gens. Des gens qui avaient des familles et qui étaient en pleine santé, de sang froid.
Je ne l'avais pas fait pour défendre ma vie, pas toujours. Je l'avais fait pour leur arracher Taehyung. Parce que j'étais en colère et que je croyais me battre pour une cause juste, pour ma liberté. Au lieu de ça... Nous étions devenus des cibles.
Et je n'osais même pas penser à tous les morts que j'avais sans doute provoqués depuis ces derniers jours en lâchant dans la nature une horde de mutants inconnus à peine sortis d'un long sommeil et pleins de ressentiment.
Si les journaux s'affolaient c'était bien parce que la situation échappait à tout contrôle.
- Ils le méritaient.
- J'ai condamné à mort un de mes anciens collègues. Son seul crime était d'être un peu trop cupide et d'être un sale con étroit d'esprit. Je l'ai regardé dans les yeux et je l'ai laissé mourir, je ne l'ai pas aidé. Parce que j'étais en colère contre lui. Aujourd'hui quand je pense à ses yeux je m'en veux terriblement.
Je pris une courte inspiration, essayant de ne pas trop revenir sur cette image.
- La haine, répétai-je, ça ne mène nulle part. Si tu y cèdes tu finiras juste par te haïr toi-même.
La main de Taehyung arrêta de bouger au dessus de la mienne. Je me concentrai sur le rythme régulier de sa respiration, espérant qu'il n'était pas en train de m'échapper comme Seokjin l'avait sous-entendu.
- Il y a quelque chose que je voudrais faire aujourd'hui, finit par dire Taehyung.
J'acceuillis le changement de sujet avec plaisir, me redressant derrière lui en forçant un sourire.
- Qu'est-ce que c'est? demandai-je.
- Je voudrais aller voir Seokjin.
×
La maison de Seokjin et Jungkook n'était pas bien grande, mais elle était au centre du petit village, au pied d'un arbre imposant.
La plupart des larges chemins de terre formés par les nombreux passages des membres du Phénix menaient au pas de sa porte. Cette dernière devait avoir été peinte en bleu ciel aux tous débuts de leur installation, aujourd'hui il ne restait plus que quelques écailles de peintures dans les rainures du battant en bois.
Taehyung portait un t-shirt, un pull et une veste. Cela faisait drôle de le voir ainsi. De lui apprendre à se servir d'une fermeture éclair aussi. Il était encore un peu maladroit avec la chose, mais il arrivait à s'habiller tout seul.
Par ce temps et de bon matin, le village n'était pas très actif, mais les rares personnes se promenant dans les bois posaient sur nous des regards intrigués. Taehyung n'était pas encore sorti de l'infirmerie jusqu'à présent, je me demandais combien de ces personnes le connaissaient. Il évitait de croiser leur regard, semblant ignorer délibérément leur présence.
Il frappa à la porte de Seokjin sans dire un mot, puis recula d'un pas pour se mettre à mon niveau, ou plutôt presque derrière moi.
Il regardait autour de lui, au niveau du sol, il avait l'air nerveux.
J'attrapai doucement son bras et il se retourna vers moi, cessant de s'agiter. Du moins jusqu'à ce que la porte ne s'ouvre.
Ce n'était pas Seokjin, ni Jungkook.
- Jimin, Taehyung, salua Moonbyul.
Je ne pus m'empêcher de froncer les sourcils et de regarder autour de moi une seconde. Mais nous ne nous étions pas trompés d'endroit.
- Vous venez voir Seokjin je suppose, je vous ai vus arriver par la fenêtre.
Vraiment? Par la fenêtre ou dans l'une de ses visions?
J'aurais voulu ne pas avoir à être suspicieux avec Moonbyul, mais j'avais du mal à ne pas me poser de questions autour d'elle.
- On peut lui parler? demandai-je.
- Bien sûr, j'allais justement partir.
Elle fit un pas à l'extérieur et s'écarta pour nous laisser la place d'entrer.
Taehyung ne semblait pas enchanté, j'ignorais s'il était agacé par la présence de Moonbyul ici ou s'il appréhendait ses retrouvailles avec Seokjin.
Il avança à contre coeur et m'attendit dès l'encadrement dépassé.
- Bonne journée Moon, soufflai-je en passant à côté d'elle.
Elle me répondit d'un simple hochement de tête et referma derrière elle, nous laissant seuls. La porte la plus proche, celle du bureau dans lequel le chef du village nous avait reçus l'autre jour, était entrouverte et la pièce semblait vide. La lumière venait de plus loin.
Je ne perdis pas de temps et attrapai la main de Taehyung, l'entraînant avec moi vers la pièce principale.
Mieux valait crever l'abcès tout de suite. Si leur rencontre devait être tumultueuse, tant pis, il fallait bien qu'elle se fasse... Taehyung ne résista pas, mais je sentis sa main se crisper autour de la mienne.
Seokjin était là, assis sur l'une des trois chaises disposées autour d'une table en formica. Il avait visiblement pris le thé avec Moonbyul, une deuxième tasse était posée devant l'une des chaises vides. Autour de lui la cuisine était simple, ne comprenait qu'un four surmonté d'une petite gaziniere et d'un évier, mais de petites fleurs peintes à la main sur tous les placards aux portes en bois rendait le tout plutôt chaleureux.
Seokjin releva les yeux vers nous, mais bien que Taehyung m'ait laissé lui passer devant, j'eus soudainement l'impression d'être invisible.
Les deux hommes se fixèrent quelques secondes, parfaitement immobiles, jusqu'à ce que Seokjin tende une main vers les sièges innocupés et brise le cocon de glace qui semblait nous avoir tous enveloppés.
- Je vous en prie, asseyez-vous.
Je bougeai le premier, entraînant Taehyung avec moi, soulagé de voir qu'il n'opposait aucune résistance.
Mais après tout, il avait demandé à venir.
Nous nous retrouvâmes tous assis autour de la petite table rectangulaire. Taehyung avait l'air tendu, mais c'était aussi parce qu'il se tenait droit comme un piquet sur l'extrême bord de son siège de peur que son dos sensible effleure le dossier rigide.
- Ça faisait longtemps, souffla-t-il simplement à l'égard de celui qui avait un jour été son meilleur ami, son frère.
- En effet, répondit simplement Seokjin.
Ils se fixèrent pendant un bon moment, peut-être bien une minute entière. Minute pendant laquelle je ne me sentis pas très à l'aise, mais essayai de ne pas rendre la chose trop évidente en jouant nerveusement avec tout ce qui aurait pu me passer sous la main.
- Je suis venu m'excuser, expliqua Taehyung d'une petite voix. Je ne pensais pas ce que j'ai dit en partant, et je suis heureux de voir que toi et Jungkook vous allez bien.
- Je suis heureux de te revoir aussi Tae, j'ai cru pendant des années que ça n'arriverait plus.
Taehyung acquiesça et jeta un oeil autour de lui, comme s'il cherchait quelque chose.
- Où est Dabin?
Je ne savais pas qui était Dabin, mais au vu du regard assombri de Seokjin, je pouvais le deviner. La mère de Jungkook, la guérisseuse.
- Elle nous a quitté il y a bientôt quatre ans. Sa mutation l'a emportée.
- Elle est...?
- Elle a toujours soutenu qu'elle ne souffrait pas, jusqu'au bout, tant qu'on n'essayait plus de couper les racines qui commençaient à prendre au sol. Maintenant elle est complètement végétale, le coeur s'est arrêté de battre.
Vu le choc qu'accusait à présent Taehyung en plus du stress de cette rencontre, je m'en voulais un peu de ne pas avoir abordé le sujet plus tôt, à l'abri dans l'infirmerie.
- Wheein, par contre, poursuivit Seokjin en voyant que Taehyung ne comptait rien ajouter, va plutôt bien ces temps-ci. Plus de cauchemars ou de crises de panique depuis quelques années déjà.
La tension accumulée dans les épaules de mon compagnon sembla redescendre légèrement. Les deux hommes continuèrent alors de discuter de la vie du camp et de tout de ce que Taehyung avait manqué pendant ses années de captivité. Taehyung lui raconta très brièvement sa vie à la Cage, arrivant très rapidement à la partie sur notre rencontre, ne souhaitant pas s'apesantir sur ces années qu'il avait passées seul sous terre à se battre pour survivre.
Seokjin refit chauffer du thé. Lorsqu'il vint se rassoir et versa le liquide encore fumant dans nos deux tasses, Taehyung croisa mon regard. Il n'avait plus l'air angoissé, mais je n'aurais pas été jusqu'à dire qu'il semblait détendu.
- Quelle est la situation à l'extérieur? demanda-t-il à Seokjin en se tournant à nouveau dans sa direction.
Le chef du camp resta silencieux un petit moment, remuant la contenu de sa tasse en observant la légère fumée qui s'en dégageait encore.
- Mauvaise. Des sondages circulent, le population a peur. On commence à parler de référendum dans les médias, ça pourrait vite mal tourner. Et pas seulement pour vous, les évadés, pour tous les mutants du pays.
Une petite part de moi continuait sournoisement de me murmurer que si nous étiez restés enfermés sagement dans ce centre de contrôle, si je n'avais pas décidé de libérer mes amis, le camp du Phénix n'aurait probablement pas été exposé à une telle menace avant un moment. Quant à mes amis... Ils seraient restés sous l'emprise des drogues administrés par les médecins du centre et ne se seraient rendus compte de rien, n'ayant plus conscience de qui ils étaient ou où ils se trouvaient.
J'aurais été le seul à en souffrir en définitive. J'avais été bien égoïste...
- Une idée de ce qu'on pourrait faire pour arranger ça...? demanda Taehyung d'une voix grave.
- Il faudrait que l'on soit plus nombreux. Les habitants de ce village ne sont qu'une poignée à pouvoir se battre, c'est loin d'être suffisant.
La mention d'un éventuel conflit ouvert eut des effets totalement opposés sur Taehyung et moi. Mon compagnon se redressa, intéressé, et s'il avait encore eut ses ailes ces dernières se seraient très probablement gonflé légèrement, trahissant ce qu'il pensait.
Mes épaules, quant à elles, s'afaissèrent légèrement sous le poids de l'incompréhension. Quelques jours plus tôt lorsque j'avais parlé à Seokjin, j'avais découvert quelqu'un de censé et d'opposé à entraîner son clan dans quelque guerre que ce soit. C'était même lui qui m'avait mis en garde contre la nature belliqueuse de Taehyung et m'avait conseillé de tout faire pour ne pas l'alimenter.
J'allais demander pourquoi lorsque je me rappelai du visage de Moonbyul nous accueillant quelques minutes plus tôt. Lorsque Seokjin poursuivit, je pus presque imaginer la voix de la voyante à la place de la sienne.
- Le nombre fait la force, pour le moment nous sommes tous éparpillés ou enfermés, prêts à être exterminés à loisir. Nous devons retrouver les mutants que vous avez relâchés, et les convaincre de nous aider à en libérer plus encore.
Mon ventre se serra. Ne voyait-il pas ce que mon sauvetage avait accompli quelques jours auparavant seulement..? Ne voyait-il pas que la situation était si terrible justement parce que j'avais voulu user de la force?
- On ne peut pas continuer sur cette voie en espérant que les résultats diffèreront de la libération du centre de Séoul Nord, soufflai-je en espérant doucher leur enthousiasme et réussir à leur faire retrouver un peu de raison. Notre problème actuel c'est l'opinion publique. Si un référendum se prépare effectivement, nous pourrions essayer de le tourner à notre avantage en essayant de rallier...
- Rallier des humains à la cause mutante? coupa Seokjin avec un léger rire qui sonnait tout sauf amusé. Qui est-ce que tu penses pouvoir rallier?
Je pinçai les lèvres et jetai un coup d'œil vers Taehyung avant de répondre, me demandant comment il prendrait l'idée.
- Les mères porteuses du tout premier centre. Certaines doivent toujours être en vie et avoir fait des rapprochements. Elles pourraient parler en notre faveur si on arrivait à les contacter.
Seokjin secoua immédiatement la tête, Taehyung était parfaitement immobile
- Si elles n'ont rien dit jusqu'à présent, rien ne certifie qu'elles le feront maintenant. Nous n'avons pas le temps d'essayer de les convaincre, il faut absolument agir avant que les référendums n'autorisent Lee à nous exterminer.
- Ce sont quand même vos mères? m'agaçai-je. Vous ne pensez pas que ça puisse peser dans la balance?
Le chef de village fronça les sourcils encore un peu plus et je me sentis assez petit sur mon siège.
- Jungkook m'a dit que ta mère était dans la police, déclara-t-il simplement. Alors ça m'est revenu, elle est dans les forces spéciales c'est ça? Une haute gradée. Tu penses qu'elle t'aiderait? Est-ce qu'elle l'a fait quand ta mutation s'est déclarée?
Je restai bouche bée une seconde, ne sachant pas très bien quoi répondre. Taehyung bougea sur son siège, son épaule se rapprochant de la mienne dans un geste conscient, ou non, j'aurais été incapable de le dire.
- Seokjin, vas-y doucement, siffla-t-il néanmoins.
Seokjin se laissa retomber contre le dossier de sa chaise en soupirant longuement. Je desserrai les dents en remarquant que j'avais tendu les mâchoires sans le vouloir.
- Tu as une cible entre les deux yeux Jimin, reprit-il. Et le peuple a déjà décidé qu'il nous haïssait, peu importe ce qui pourrait se passer. On ne peut plus se permettre de trop attendre, il faut frapper les premiers pour une fois.
Je pinçai à nouveau les lèvres pour ne pas répliquer avec trop de virulence et me levai, laissant mon thé à peine entamé.
- J'imagine que les promesses de Moonbyul sont alléchantes, mais n'oublies pas ce que cela nous a tous coûté la dernière fois que nous avons décidé de suivre aveuglement ses visions.
Taehyung baissa la tête et je m'en voulu instantanément. Bien sûr je parlais avant tout de lui, mais j'espérais surtout faire comprendre à Seokjin que l'avenir était incertain.
Si Taehyung semblait tout à coup bien moins enclin à suivre le plan de son ami, la volonté de ce dernier n'avait pas l'air d'avoir vacillé d'un pouce.
Il allait répliquer lorsque quelques bruits de pas nous firent tous trois tourner la tête vers une porte sans battant qui menait visiblement à un couloir.
Une jeune femme se tenait debout devant l'entrée de la salle à manger, le regard un peu vide mais errant visiblement dans notre direction. Ses cheveux blancs duveteux tombaient bas sur son front mais ne touchaient pas ses épaules, elle avait l'air de porter un casque au dessus de ses épaules frêles et de ses mains légèrement tremblotantes.
Seokjin et Taehyung ne semblaient pas surpris de la voir. Je soupçonnai donc qu'il s'agissait de Wheein, la 'sœur' de Seokjin, la petite fille qui avait été à l'origine de la propagation du virus dans tous le pays et qui avait payé un lourd prix pour cet accident.
Le regard des deux hommes se durcit en la voyant, pas à cause d'elle, mais de ce qu'elle représentait.
Taehyung le confirma lorsqu'il tourna la tête vers moi et souffla ces quelques mots.
- Et voilà ce qui est arrivé la dernière qu'on a gardé la tête basse et trop attendu avant d'agir.
×××
Bonjour tout le monde 💜
J'espère que vous avez passé une bonne semaine :)
Et que le chapitre d'aujourd'hui vous aura plu 🥰
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