SHERLOCK VS LUPIN

Paris,

Les néons de la Tour Eiffel clignotaient harmonieusement dans la sombre nuit. Dans cette ville remplis d'histoire, le silence régnait en maitre à cette heure tardive. Les rues désertées de ses touristes, quelques curieux voulant profiter du calme ambiant, d'autres sortants d'une soirée bien arrosée. Quelques silhouettes rompaient pourtant cette monotonie par leurs déplacements furtifs.

Se faufilant par-dessus le grillage avec une aisance déconcertante, le duo pénétra dans le champ de Mars. La nuit, la féerie de ce lieu magique se transformait sinistrement en créature obscure. Ils progressèrent à pas de loup, gardant l'œil attentif au danger. Enfin, ils gagnèrent les piliers de la Dame de fer. L'un d'eux sortit une pince de son sac et trancha les chaines de métal. Elles tombèrent lourdement sur le sol, le bruit résonnant lugubrement. On ne s'en formalisa pas. Un seul garde s'occupait de la surveillance et tous deux savaient qu'il n'entendrait rien. Ils avaient bien préparé leur coup.

Ensemble, ils sautèrent par-dessus les portiques de sécurité puis amorcèrent la montée des marches. Une tâche fastidieuse rendue difficile par la demi-obscurité. Atteignant le premier étage, ils ne s'arrêtèrent pas, grimpant encore et encore pour atteindre le troisième étage par l'escalier de secours. Les deux reprirent leur souffle puis s'engagèrent prudemment dans les coursives. Les fenêtres permettaient d'observer la vue panoramique de Paris. Les deux hommes sortirent leur lampe torche, s'en détournant aussitôt. Leur objectif était ailleurs. Ils s'engagèrent dans l'escalier menant à l'étage supérieur. L'air frais, dénotant l'altitude, les enveloppa une fois dans le point le plus haut de la Tour Eiffel. Ici, un grillage aux mailles larges infiltrait la pression du vent, bien loin de l'espace fermé sous leur pied.

Le souffle brouillait tous les sons et le froid n'enlevait en rien la difficulté de l'exploration. La galerie n'était pas très large, assez pour laisser les touristes prendre leur pied sans compromettre l'effondrement du monument historique. Les deux cambrioleurs redoublèrent de précautions en s'approchant du bureau de Gustave Eiffel, une pièce rectangulaire assez grande pour les laisser entrer. Conforme ou non, nos deux protagonistes n'étaient pas venus clandestinement jusqu'ici en pleine nuit pour admirer un pan d'histoire. Au contraire, brisant respectueusement les vitres, le duo pénétra en ce lieu dis sacré : la rencontre de Thomas Edison et Gustave Eiffel ! Des mannequins représentaient les deux célèbres personnages, maladroitement éjecté au dehors pour faire plus de place.

En s'accroupissant, un des hommes se posta devant le petit meuble de rangement sur lequel reposait le fameux phonographe. Il était maintenant étendu sur le sol. Les doigts experts de l'homme ouvrirent le tiroir, s'éclairant à la lumière de la lampe torche. Rien. Complètement vide seulement après quelques petits coups sur le bois, un double fond se dévoila. Satisfait, il palpa à la surface puis enleva le couvercle en l'agrippant par les bords.

- Sors la clé ordonna-t-il, d'une voix rauque.

L'autre obéit et la lui tendit, prenant à la place le faux-fond du tiroir. Un sourire se forma sur le visage de l'homme qui, plongeant ses yeux dans le meuble, parvint à discerner la petite serrure dans un coin refoulé, à moitié obstrué par la poussière. C'était là l'erreur de bien d'autres voleurs. Tous avaient entendu parler du célèbre diamant dérobé par Claire, la fille de Gustave Eiffel dont le récit est compté dans son journal. D'une valeur approximant les un milliard d'euros, elle l'avait caché dans le bureau de son père, certaine de passer aux travers des mailles du filet. Selon la croyance populaire, il s'agissait d'une histoire inventée pour attirer les regards, la fille prête à tout pour sortir de l'ombre de son paternel. Cependant, il avait bien un diamant disparu à la même époque et des soupçons suffisaient à motiver les voleurs les plus chevronnés. Jusqu'ici, aucun n'était pourtant allé au bout de sa quête. Les années passèrent, la piste devint de moins en moins évidente, tombant même dans l'oubli. La poussière recouvrant d'une main de maitre le fin mot de l'histoire.

Mais, des yeux affutés avaient su déterrer le mystère et résoudre l'énigme. Tous s'étaient concentrés sur Claire, sans se douter que ses frères rentreraient dans la confidence. A partir de là, remonter la piste à travers les objets exposés dans les musées était un jeu d'enfant. C'est là qu'une clé avait attiré l'attention. Gravé en tout petit, à moitié dissimulé par la rouille, la lettre « A ». Elle pouvait appartenir à Albert Eiffel, comme le suggérait l'écriteau informatif. Une théorie plausible si ce n'est les nombreuses fois ou Claire s'était faites représenter avec. Le lien était on ne peut plus évident.

C'est donc avec des mains tremblantes que l'homme enfonça la fameuse clé dans le minuscule trou. Un mécanisme se déclencha, ouvrant un boitier coulissant. La surprise se mêla à la contrariété en constatant l'absence de son trésor.

- pour des voleurs, vous n'êtes pas très malin.

Le duo se retourna d'un bond. Un homme s'était avancé à la place de la vitre brisée. Coiffé d'un béret et d'un long manteau bleu marine, il leur souriait.

- On ne grille pas la priorité à un collègue, ça fais partie des règles. Et puis c'est malpoli.

- C'est toi qui a le diamant ? Croassa le second homme, rouge de colère.

- Quoi, là maintenant c'est tout ce à quoi tu penses Arnaud ?

Arnaud tressaillit à l'entente de son nom. L'autre l'empêcha de s'avancer.

- et toi tu es Mathéo, son frère. Vous pensiez vraiment vous en tirez en si bon compte ? Je n'embauche pas sans avoir fait des recherches au préalable.

- alors quoi qu'est-ce que tu veux ?

- Vous donnez une leçon. Nous étions complices et vous avez décidé de me doubler. Des égoïstes avides d'argent. C'est dommage. Vous m'aviez impressionné pour le vol de la clé. Si je n'aurais pas été aussi prévoyant, ceci serait déjà entre vos mains.

L'homme sortit le fameux diamant de la doublure de son long manteau.

- j'avais l'intention de partager équitablement le butin mais je suis avant tout un homme de parole. On ne tourne jamais le dos à Arsène Lupin.

- Salaud ! Ce n'est qu'un personnage de roman. Es-tu à ce point lâche pour ne pas nous dévoiler ton identité ?

Un sourire lui répondit. Lupin porta le diamant à hauteur des yeux, faisant mine de le contempler alors qu'il se savait générer la haine chez les deux hommes. Les voleurs prient à leur propre jeu. Une idée qui lui plaisait énormément.

- Rend-nous notre diamant !

Mathéo sortit le pistolet qu'il gardait bien au chaud dans son étui. Le canon pointé sur Lupin, la victoire se lisait sur son visage étincelant de sueur. En face, l'homme ne parut point impressionné.

- Je vais tirer !

- Pas besoin d'aboyer. Je le vois bien. Je suis en très mauvaise posture.

- Tu nous fais pas peur, quel que soit ton nom et ta notoriété.

- Je crois que vous devriez quand même. J'ai appelé la police.

Et, bizarrement, malgré le vent et la hauteur, l'ambiance changea. Lupin ne bluffait pas. Jamais. Le trio se retrouvait coincé au sommet d'une tour. Ils étaient pris au piège, la police n'aurait qu'à les cueillir. Lupin rangea le diamant dans sa poche puis s'effaça, les invitant à passer d'un mouvement du bras très courtois. Alors, instinctivement, les deux frères baissèrent la garde pour aller se poster au bord de la passerelle, observant en contrebas les gyrophares illuminant la nuit.

- tu oublies un détail, toi aussi tu es pris au piège.

Arnaud ricanait nerveusement mais en se retournant, Lupin avait disparu. Cela ne devrait pas les surprendre,. Une telle prise de risque nécessitait un plan de secours. Ils s'étaient laissé entrainer dans un piège comme de vulgaires débutants. Sous la panique, Mathéo tira sur l'ombre mouvante créé avec la clarté de la lune.

- Reprend toi, c'est pas le moment de tirer sur tout ce qui bouge ! Le réprimanda aussitôt son frère.

Mais il n'écoutait plus, tirant là ou son esprit imaginait l'ennemi. Les balles ricochaient sur le fer, sans l'affecter outre mesure.

- Crétin, arrête tu vas nous tuer !

Sortant de sa transe, Mathéo laissa tomber son arme. Maintenant que l'adrénaline redescendait, la dure réalité le frappa.

- Qu'est-ce qu'on va bien pouvoir faire ?

Une vingtaines de minutes plus tard, le duo était genou à terre, menotté. Après une inspection minutieuse de l'étage, la police les avait reconduits au pied de la tour Eiffel.

- Je vous jure. Il y a un voleur là-haut et nous, on est les victimes collatérales ! On s'est fait rouler, comme vous. Je croyais que vous étiez de la police, faites un putain d'effort ! On a rien voler en plus !

Arnaud argumentait inutilement tandis qu'on le conduisait, lui et son frère, jusqu'à une voiture de police.

- Nous avons fouillé l'étage entier. Il n'y avait personne d'autre.

- Alors vous l'avez manqué. Qui d'autre aurait appelé la police alors hein ? C'est pas moi qui vais vous apprendre votre boulot ! Râla Mathéo.

- Ecoutez, un témoin vous a vu grimper le grillage menant au champ de Mars. Il a trouvé ça suspect et nous a avertis. L'intrusion est un acte puni par la loi ainsi que le vandalisme, vous devriez le savoir. De plus, vous êtes en possession d'une arme non déclaré. Ces deux motifs sont suffisants pour vous inculper. Tout ce que vous dirais maintenant pourra être utilisé contre vous alors gardez le silence jusqu'à l'arrivée de votre avocat soupira l'inspecteur de police, au côté de ses collègues aux prises avec les deux frères.

- Puisque je vous dis qu'il était là ! Arsène Lupin était ici ! Il nous a piégés, vous comprenez ?

- Bien sûr, et moi je suis la reine d'Angleterre, allez monter là-dedans. J'ai du sommeil à rattraper.

Le policier vérifia qu'ils entrèrent sans faire d'encombre puis ferma la portière et fit signe au conducteur d'avancer. Ses yeux suivirent le véhicule, dépassant le périmètre de sécurité pour disparaitre derrière une foule de curieux, armés de téléphones et d'appareils photos. Un tel évènement était l'attraction de tous.

- Vous prendre pour la reine d'Angleterre est outrageux car à l'évidence, vous faites preuve de stupidité

- Pour faire simple, ces deux hommes disaient la vérité. Désolé, Docteur John Watson.

Pris de court, l'inspecteur pivota pour se retrouver face à deux hommes à l'air britannique incontestable. Le plus petit, John Watson lui tendait la main. Il s'exprimait avec un fort accent et son français hésitant contrastait fortement avec celui de son ami. De plus grande taille, le regard scrutateur et hautain, Sherlock Holmes parlait français aussi naturellement qu'un natif et ce, pour une langue qu'il ne connaissait que depuis peu.

- Quoi ? Le célèbre détective britannique ? Que venez-vous faire à Paris ? Balbutia l'homme aussi honteux que subjugué par la prestance et la réputation qui précédait ses interlocuteurs. S'il pensait à un mensonge, le souvenir des photos souvent vu dans les journaux lui revint immédiatement.

- Ce n'est pas la priorité actuellement. Nous avons un voleur à trouver s'exclama le détective, l'œil pétillant d'excitation. Si on l'avait obligé à prendre des vacances, il ne pouvait tout de même pas laisser passer une telle occasion.

- Il est toujours comme ça s'excusa à nouveau Watson, avec un petit sourire en coin. Notre logeuse l'a menacé avec sa mitraillette pour le contraindre à prendre des vacances.

- Je vous demande pardon ?

- Vous pouvez. Seul un idiot ne verrait pas l'évidence même intervint Sherlock en revenant, escorté par deux policiers à l'air furibond. Vos hommes manquent de clarté dans leur travail.

John leva les yeux au ciel tandis que l'inspecteur se demanda si le destin avait décidé de lui priver définitivement de sa nuit de sommeil. L'image d'une vieille femme poursuivant, mitraillette à la main, un détective fuyant, lui traversa l'esprit. Il s'épongea le front.

- Bien entendue Sherlock. Tu es entouré d'idiot c'est bien connue.

- Sauf toi John. Tu as la chance d'être d'une intelligence supérieure à la moyenne.

- Hum merci.

L'échange en anglais échappa aux trois policiers. Alors, faute d'alternatives, les deux derniers arrivés cherchèrent des explications à leur supérieur :

- Monsieur, nous avons retrouvé cet homme essayant d'utiliser l'ascenseur lança l'un d'eux.

- Vous comptez rester planté là comme un idiot ou vous allez enfin vous décidez à accepter votre erreur ?

- Sherlock n'exagère pas. Ces deux hommes étaient trempés dans l'affaire aussi.

- je n'exagère jamais John, je souligne les faits devant un policier pour le moins incapable de faire son travail correctement.

- D'accord d'accord, admettons que ce que vous dites est vrai soupira l'inspecteur, faisant signe à ses collègues de lâcher le détective. Comment vous pouvez en être aussi certain ? Je veux dire, je connais vos méthodes seulement, vos déductions s'appuie sur quoi ?

- Ces hommes sont trop stupides pour mentir correctement. C'est aussi flagrant que votre alcoolémie. Enfin, le divorce en cours doit être la cause de votre scepticisme agaçant. Vous devriez travailler votre confiance si vous voulez que votre relation avec votre amant dure. On peut y aller maintenant ?

Et il repartit sans demander son reste, laissant l'inspecteur bouche bée.

- Désolé. Merci de ne pas l'avoir frappé. Il est toujours comme ça. Nous allons vous aider.

- J'allais boucler l'enquête. Nous n'avions pas besoin d'aide !

- Bien sûr que si. Vous êtes à la ramasse rétorqua Sherlock comme une évidence lorsqu'ils le rejoignirent au pied de l'ascenseur.

- Donc vous me dîtes que vous vous basez sur la parole douteuse d'un voleur pour faire tout ceci ?

- Des voleurs certes mais qui ont l'avantage d'être trop cupide pour devenir une vraie menace. Comparez-les à un problème amusant. Toutefois, posez des questions évidentes ne vous aidera pas ou alors (il se retourna vivement vers l'inspecteur, suspicieux) me suis-je trompé en vous analysant ?

- Ma foi non mais...

- Tant mieux. Pour le reste, faites marcher vos neurones.

- Sherlock...

- Les portes s'ouvrent John. C'est par ou l'ascenseur menant au troisième ? Non ne répondez pas.

Dix minutes plus tard, le trio se retrouva devant le bureau dévasté de Gustave Eiffel.

- C'est évident qu'un troisième individu se trouvait ici conclut Sherlock.

Comme un enfant ouvrant son cadeau de Noël, il analysa minutieusement la scène devant lui, observant en plissant les yeux le petit meuble de rangement et le double fond dépassant d'un des tiroirs, maintenant étalé sur le sol. Il vit allant jusqu'à s'accroupir à hauteur des morceaux de verres parsemant la devanture.

- Je ne crois pas qu... Commença l'inspecteur, mal à l'aise.

- Taisez-vous. Vous faites baisser le Q.I de tout l'étage (puis, après un examen approfondit de la serrure sur la porte d'entrée) bien, dites à vos hommes de boucler toutes les sorties de la tour. Votre homme est encore là.

- Je crois avoir mal entendu ? L'inspecteur n'était pas réputé pour sa perspicacité.

- Sourd en plus de tout le reste. Bien plus personne de nos jours n'est en mesure de réfléchir.

- Qu'est ce qui te fait dire qu'il serait encore ici ? Demanda Watson en français. Il aurait pu s'enfuir avant l'arrivée de la police, ce qui expliquerait qu'il n'est pas encore été retrouvé.

- N'est-ce pas évident ? Personne n'a vu quelqu'un sortir de cette tour et qu'à cela se tienne, aucun humain n'a encore démontré la capacité de voler dans les airs. De plus, vos systèmes de sécurité sont faits de telles sortes à empêcher ce type d'accident. Essayez de suivre un peu. C'est cet individu qui a appelé la police car il s'agissait d'un règlement de compte.

En se relevant, un sourire satisfait était scotché sur son visage. Le détective se délectait de l'incompréhension qu'il provoquait.

- Sherlock, pour le bien-être de ton ego, ne te prive surtout pas d'explication encouragea Watson, croisant les bras en soupirant.

- Pourquoi ces deux hommes seraient-ils venus ici en pleine nuit pour ne rien prendre ?

- Ils n'en ont pas eu le temps ?

- C'est une bonne réponse sauf que l'on se trouve sur la Tour Eiffel, l'une des sept merveilles du monde. Qu'en est-il de votre garde de nuit ?

- Nous l'avons appelé mais il n'a toujours pas répondu dit l'inspecteur, renonçant à poser des questions.

- Evidemment. Vous devriez le retrouver quelque part au premier étage, occupé à dormir profondément par le somnifère mélangé à son café. Cette intrusion était délibérée. Ils avaient tout préparés. Et ils venaient chercher le contenu de cette boite.

Du doigt, il désigna le tiroir au sol.

- il y a une serrure, donc une clé et cette dernière manque à l'inventaire. Nos deux voleurs n'auraient eu aucun intérêt à la reprendre car notre troisième individu s'était déjà emparé de l'objet mystère. Une pierre de valeur certainement, sans doute un diamant si je m'en réfère au mythe répertorié dans mon palet mental.

- C'est absurde. Un diamant ! Vous inventez tout !

- Ne soyez pas ridicule. Personne ne prend la peine de faire un coffre secret s'il n'a rien à cacher. Notre homme connaissait lui aussi cette cachette, comme je le disais mais il n'est pas parti. Il devait s'assurer que ses deux anciens complices subiraient le poids de leur traitrise. L'appât du gain a conduit à leur perte. Paniqué, l'un a tiré au hasard, ce qui explique les impacts de balles à l'extérieur.

- Ca se tient. Mais comment l'inconnu serait entré sans casser une vitre ?

- Ne vous ais-je pas parlé du garde de nuit ? Si vous le retrouvez, vous remarquerez que son trousseau de clé manque à sa ceinture.

- C'est brillant lâcha l'inspecteur, ahuri.

- Enfin vous dites quelque chose de censé. Je commençais à m'impatienter.

- Alors d'après vous, ou se trouve cet homme ?

L'excitation dans ses yeux avait remplacé la lassitude. Sherlock esquissa une grimace contrastant avec l'excitation dans tout son être. Il ne pouvait pas tenir en place, sautillant dans les corridors jusqu'à l'ascenseur.

- J'en ai aucune idée ! N'est-ce pas exaltant ?!

- Eh bien réfléchissez. Faites une déduction comme tout le reste.

- quelque chose m'échappe. Mais quoi... oh ! C'est évident !

Son regard passa au scribe les policiers en uniforme, allant et venant pour sécuriser, vérifier, analyser. Rien qu'à cet étage, ils devaient être une vingtaine. S'ajoutait ceux assurant le maintien du périmètre au pied de la tour. Le monument profitait d'une priorité maximale avec une telle affaire.

Les portes de l'ascenseur se refermèrent sur le trio. En arrivant au premier étage, une foule de policier s'affairaient aux mêmes tâches que leurs collègues. La rigueur qu'exigeait leur métier se devait d'être irréprochable. Souriant, Sherlock suivit des yeux les pas et les mouvements réguliers, oubliant presque la compagnie de John et de l'inspecteur. Soudain, il tourna la tête vers son ami.

- J'ai rien dit se défendit Watson.

- Je le sais bien John. Tes sourcils froncés en disent longs.

Il lève les yeux au ciel.

- Alors quoi ? Vous avez trouvé ? S'impatienta l'inspecteur, à bout de patience. On va pas resté ici toute la nuit.

- Y-a-t-il des escaliers qui mènent au troisième étage ?

- Ils sont interdis au public.

- La porte de service était ouverte. Si vous vous dépêchez, vous pourrez coincer notre voleur. Mon travail s'achève. Ravi d'avoir pu travailler avec vous.

L'inspecteur partit en courant, demandant des renforts à travers sa radio. Il était bien trop enjoué pour lire entre les lignes.

- Sherlock ? Demanda John, soupçonneux.

- Oui je sais. Les inspecteurs français sont bien pire que Lestrade marmonna-t-il, son regard s'attardant sur un policier consultant son appareil photo. Soudain intrigué, il s'approcha de lui :

- Est-ce vous le voleur de diamant ?

Le jeune homme redressa la tête, apeuré par l'intrusion inopportune du détective dans son espace de travail. Sherlock plongeait ses yeux dans les siens, les plissant légèrement en cherchant un détail que lui seul pouvait discerner. Finalement, il fit volte-face pour rejoindre Watson, plantant le policier sur place.

- Une quelconque explication pourrait m'aider tu sais.

- Ne t'en fais pas pour ça. Regarde juste derrière moi. Le policier que j'ai interrogé n'était qu'un leurre. Je voulais attirer l'attention de l'homme juste derrière lui.

John se pencha pour regarder derrière son ami.

- Cet homme nous a suivis. J'ai été trop lent pour le remarquer mais maintenant j'en suis persuadé. Regarde sa posture alerte, son regard perçant, son uniforme trop grand pour lui et...

- Tu parles de l'homme qui s'éloigne rapidement?

Se retournant d'un bond, le détective le repéra avant qu'il ne pénètre dans l'ascenseur. Etouffant un juron, il voulut le rejoindre mais se ravisa. Les policiers s'entassaient dans la cabine, et plusieurs mètres l'en éloignait encore. Il intima alors à Watson de le suivre lorsqu'il lui passa devant.

- Les escaliers.

Le duo s'engagea dans la descente à toute allure, bousculant quelques policiers au passage. Habitué aux courses poursuites, le duo arriva au pied de la tour Eiffel, essoufflé mais en ayant battu sans aucun doute un record. L'ascenseur était arrivé et ses passagers en sortaient déjà, s'éparpillant dans l'espace avec un naturel déconcertant. Sherlock s'arrêta, ses yeux analysant avec précision chaque individu.

- il n'est pas là remarqua John.

- La ferme John.

Ignorant les ricanements de son partenaire, il se dirigea vers l'ascenseur. C'est lorsqu'il fut assez près des portes qu'il remarqua un morceau de papier coincé entre elles. Assez visibles pour un œil averti mais passant inaperçu dans la faible luminosité. Le détective s'en empara prudemment, jetant un regard par-dessus son épaule.

- Une adresse ?

- Evidemment. Notre voleur cherche à attirer notre attention.

- Ou alors il veut nous tendre un piège.

- Il ne se serait pas donné autant de mal.

Le duo quitta furtivement la zone sous vigilance policière puis, esquivant la foule de curieux, ils sortirent du champ de Mars.

- Laisse-moi deviner, tu as mémorisé le plan de Paris.

- Mieux. J'ai Google Maps.

Souriant, il pianota sur son téléphone avant de les guider dans une zone résidentielle bien plus modeste que ce qu'ils venaient de quitter. Sherlock se dirigea rapidement jusqu'à une grande porte en bois, qu'il poussa de la paume de sa main. L'ouverture grinça, dévoilant un vaste espace en travaux. Un faisceau lumineux les appelait jusqu'à une seconde pièce

- Je passe devant grogna John, sortant le pistolet qui ne le quittait jamais de sa ceinture.

Si le détective grimaça, il obéit, décidant qu'il serait bien plus productif en couvrant ses arrières. Ensemble, ils progressèrent à pas de loup et dans un silence inquiétant. Arrivant à l'entrée dénuée de porte, Watson entra brusquement, l'arme au point.

- Sherlock ? appela-t-il.

Le détective entra à sa suite. John avait abaissé son arme et contemplait, intrigué, une petite table basse. Dessus reposait une lanterne fraichement allumée quand derrière, une unique chaise les jugeait en son centre.

Watson reporta son attention sur son ami. Celui-ci ne semblait même pas surpris, l'intérêt surgissant alors dans son regard perçant.

- Vous avez le sens du spectacle dit-il enfin, sans s'adresser à John. Sherlock fit volte-face, accueillant le voleur avec un naturel qui ne cessera jamais d'impressionner son ami. Voyez-vous ça, le Arsène Lupin des temps contemporains.

- A votre service répondit Lupin, avec un sourire, s'exprimant dans un anglais impeccable.

- John, tu peux baisser ton arme, il est seul et non armé. Il ne nous veut aucun mal.

- Vous semblez en être certain ?

- Je le suis. Vous voulez me parler sinon vous ne seriez pas venu sans défense, tout en sachant que John avait une arme. Vous voulez me prouver votre bonne foi alors j'en fais de même.

John alterna entre les deux hommes. La lueur de défi qui se dégageait d'eux n'avait rien de comparable. Un mélange de curiosité, d'animosité et surtout, de malice. Deux grands esprits se confrontant. En détaillant le nouveau venu, il pouvait lui donner une origine africaine et c'était à peu près la seule chose dont il avait la certitude. Comment être certain de ce qu'on voit lorsqu'on se prend pour le roi du déguisement ?

- Vous semblez être à la hauteur de votre réputation commenta joyeusement le voleur.

- Tout comme la vôtre monsieur Diop. Assane Diop, c'est bien ça ? Héritier autoproclamé d'Arsène Lupin ! Vos exploits nous sont parvenu jusqu'en Grande Bretagne.

- C'est bien moi. Content d'avoir titillé votre curiosité. C'est pour cette raison que vous n'avez pas encore alerté la police ?

- Vous êtes doués pour vous fondre dans la masse, très doué. Vous auriez pu vous échapper facilement mais vous avez choisi de nous suivre. Vous vouliez me parler alors faites le maintenant ou John se fera une joie d'appeler notre cher inspecteur policier.

- Je ne recule jamais devant un bon challenge monsieur Holmes mais d'abord je suis curieux, qu'avez-vous déduis de la scène à la tour Eiffel ? Si vous avez tout bon, je me rends sans faire d'histoire, vous avez ma parole.

Assane Diop souriait, le regard joueur. Tel un miroir, Sherlock répondait à ses attentes, s'abaissant aux règles du jeu aussi docilement qu'un débutant.

- J'ai reconstitué le puzzle et je vous ai vu et observé. Rien de bien compliqué. Vous connaissiez les deux voleurs avant qu'ils ne vous trahissent. Autrement, comment auriez-vous su qu'ils viendraient durant cette nuit ? Vous étiez complice. Un autre aurait pris le trésor et s'en serait allé. Pas vous. Vous, c'était personnel. Un règlement de compte. Vous vouliez vous venger, De plus, vous êtes un homme de l'ombre. A l'image de votre fuite, ce cambriolage ne se serait pas fait remarquer.

- Excellent ! Et à votre avis, comment me suis-je pris pour échapper à la sécurité ?

- Vous avez endormis le garde et vous êtes procuré sa clé. Ensuite, vous vous êtes introduit dans le bureau d'Eiffel pour voler le diamant avant les autres. Lorsqu'ils sont arrivés, vous avez appelé la police puis êtes retourné vous cacher. Les coups de feu n'étaient que la conséquence du manque de sang froid de vos anciens associés (Assane souriait toujours, ne trahissant aucune peur. John se méfiait et, du coin de l'œil, il savait Sherlock dans le même état d'esprit). Dans le sac que vous transportiez avec vous, une tenue de policier, que vous avez enfilé pour vous mêler à la vraie police. Un plan méticuleux et réussi, si ce n'est que je me trouve maintenant en face de vous. Laissez-moi deviner, l'arrogance vous a perverti ?

- Du tout. Je voulais juste m'assurer que vous êtes tel qu'on le dit. Dites-moi, de nous deux, qui est le plus arrogant ? Le voleur qui invite le détective dans son antre ou le détective qui se laisse inviter chez le voleur sans appeler de renforts ?

John ricana. Assane avait autant d'audace que son ami, si ce n'est plus.

- Vous ferez moins le fier une fois en prison grogna Sherlock Holmes, furieux envers Watson, ce qui ne fit qu'amplifier son hilarité.

- Ah oui j'avais oublié ! Une promesse est une promesse. Vos déductions sont exactes...si l'on ne regarde qu'en surface. Hors, je vous ai dit que je me rendrais si vous aviez TOUT compris et ce n'est pas le cas.

Lupin sourit. Le détective fronça les sourcils, déroutés. John cessa de rire.

- Qu'est-ce que vous voulez dire ? Demanda-t-il.

- C'est simple. Vous êtes intelligent monsieur le détective mais vous êtes passé à côté de l'essentiel. Rappelez-moi la raison de votre venu à Paris ?

Sherlock ouvrit grands les yeux, incapable de répondre. La compréhension le frappa de plein fouet, de même qu'une image désormais remplis de respect pour le voleur.

- C'est Lestrade qui nous a donné les billets pour l'opéra Garnier commença-t-il.

- Un cadeau de ma part je l'avoue. Je connais vos gouts prononcés pour la musique classique. Et puis, il se peut que j'aie eu un peu pitié pour ce pauvre inspecteur de police. La gestion de votre ennui l'aurait mis au chômage en moins d'une semaine.

- Donc en fait, vous nous avez manipulé depuis le début comprit Watson, ne se souciant peu d'exprimer l'évidence devant deux génies.

- C'est brillant lâcha alors le détective.

- Moui donc tout va bien

John leva les yeux au ciel, un sourire en coin scotché aux lèvres.

- Je me suis dit que ça pourrait être l'occasion de vous rencontrer compléta Assane Diop, désinvolte.

- Pourquoi ?

- Allez faites un effort. Je sais que ça vous a déjà traversé l'esprit. Vous êtes comme moi. Toujours à la recherche d'un défi à relever. D'un adversaire digne de notre intelligence. J'ai piqué votre intérêt et j'attendais avec impatience notre rencontre. Est-ce un crime de forcer le destin ?

- Vous êtes un voleur.

- Je suis un voleur mais je ne suis pas un meurtrier. Vous m'avez analysé, vous connaissez mes méthodes.. Certes, je suis en dehors de la loi mais qui ne l'ai pas ? Je vous permettrais d'attraper des criminels beaucoup moins réglos que moi, en France ou même à Londres. Aussi, je m'engage à vous donner toutes les informations concernant mes futurs vols. Pour vous donner une chance de m'arrêter, si l'envie vous plaît, même si vous n'y arriverais pas. Un challenge pour moi et un moyen de vous divertir, autre que les substances illicites. L'ennui ne vous submergera plus avec moi dans les parages.

Tout fier de sa tirade, son sourire s'élargit davantage en même temps que John laissait échapper un « oh » de stupéfaction. La mentalité des génies le dépassait définitivement. Il supplia son ami du regard et su que ce serait perdu d'avance.

- J'accepte dit Sherlock Holmes, tendant la main.

Arsène Lupin la serra avec joie, scellant leur marché tandis que John commença à planifier sa vengeance pour les dix prochaines années. Puis, le voleur recula vers la porte.

- eh mais vous devez nous donner le diamant ! Se souvint alors Watson.

- Quel diamant ?

Et lupin disparut. John lança alors un regard réprobateur à son ami.

- Il n'est pas comme Moriarty dit celui-ci, devinant sans effort les raisons de sa désapprobation. Assane Diop est notre nouvel allié. 

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