Chapitre 15

Do#, La, Do# La. J'ouvre les yeux. La lumière traverse le rideau encore fermé. Do#, La, Do#, La, Re, La, Do#, La, Do#, La, Do#. "Expérience", Ludovico Einaudi. Je me lève et m'avance vers la provenance des notes de piano. Je m'arrête au début du couloir et m'épaule contre le mur blanc. J'observe les doigts de Valentin qui glissent si facilement sur les touches, sans aucunes fausses notes. Son regard va et vient entre sa main droite et sa main gauche. Il semble si concentré et si serin à la fois, comme s'il faisait ça depuis toujours. Le morceau se termine, il tourne la tête en ma direction et me sourit de toutes ses dents. J'esquisse un petit sourire timide. Il se lève et m'embrasse sur le front.

-Comment tu vas ? Me demande-t-il.

-Bien.

Je sais très bien là où il compte en venir, et ça me fait stresser.

-Tu te réveille souvent la nuit ?

Voilà.

-Souvent, oui. Répondis-je en haussant les épaules, le regard fixé au sol.

-Faustine...

Une larme tombe, puis deux. Combien de temps cela va encore durer ? Combien de temps cela va encore me pourrir la vie ? Valentin me relève la tête.

-Eh, si tu n'as pas envie de m'en parler je comprends, d'accord ? Me rassure-t-il. Je veux juste que tu ailles bien, je veux juste que tu sois heureuse, heureuse avec moi.

Ses paroles me touchent. J'hoche la tête. Il me rend heureuse, oui, mais le passé me rattrape bien trop souvent pour que cela dure.

-Et Faustine, reprend-il, sache que je ne te jugerai jamais.

Si. Si tu me jugeras, comme m'importe qui qui venait à apprendre ce que j'ai accepté de faire. Alors oui, tu me jugeras. Je détourne le regard.

-Viens habiter avec moi quelque temps. Je ne peux pas te laisser seule comme ça, je te veux près de moi.

-Valentin, ça fait un an que j'habite seule et que tout se passe très bien, alors ça ne va pas changer grand-chose.

Il semble s'impatienter, comme impuissant face à la situation.

-J'espère ne jamais rencontrer la personne qui t'a rendue comme ça. Me répond-il, le visage crispé de colère.


J'ai finalement accepté. Passer quelque jour avec lui m'aiderai peut-être à penser à autre chose. Après maintes réflexions, j'ai aussi décidé de lui présenter Grâce et Connor ; alors demain, nous irons déjeuner ensemble.

-Qu'est-ce que tu prépares ? Me demande Valentin en me prenant pas la taille.

-Les lasagnes de ma mère. Répondis-je, fière de moi.

-Ca sent bon. Reprend-il en m'embrassant le cou.

Je pose les maniques sur le plan de travail et colle mes lèvres aux siennes. Il ajoute de l'intensité à notre baisé avant que je le rompe.

-Je suis heureuse de t'avoir rencontré, que tu m'ais demandé mon numéro, ce jour là, sur la plage. Lui avouai-je, en replaçant sa mèche rebelle.

-Et moi je suis heureux que tu sache faire des lasagnes. Me répondit-il.

J'attrapai la manique et le frappai avec pendant qu'il reculait pour se protéger. Il rigola.

-C'est que tu es coriace comme fille. Je devrai peut-être penser à t'inscrire à des combats illégaux en Allemagne, on pourrait gagner pas mal d'argent.

Je lui souris, désespérée par sa réponse.

-Tu te surélève, mais je suppose que tu ne sais même pas comment dire ton prénom en Allemand. Dis-je fière de mes 6 ans d'études de cette langue qui m'ont seulement permis d'apprendre les phrases les plus basiques.

-Quizás, pero hablo español. Me répondit-il dans sa langue natale.

-Ce n'est pas drôle, je ne comprends pas l'espagnol. Rétorquai-je.

-Alors répète ça : Valentin es el más sexy.


Flashback :

Nous avons contrôle d'anglais, ou plus précisément, un oral d'anglais. Je sais que je vais bien bientôt passer. Emma finit son oral et retourne s'assoir. Une boule se forme dans mon ventre.

-Faustine. M'appela la professeure.

Je me levai, m'assis en face d'elle, puis débutai mon oral la voie tremblante.

-Tu peux répéter « he is known through the centuries » s'il te plais. Rigola Martin lorsque nous sortons du cours.

Je me doute bien que j'ai du mal prononcer cette phrase et même si je faisais en sorte de ne pas m'exprimer trop fort, il a dû entendre.

-Pourquoi ? Demandai-je.

-Vas-y répète.

Je répète la phrase, ce qui ne fais qu'accentuer sa moquerie.

-Si c'est pour te moquer de moi, je ne répéterai plus. Lui répondis-je vexée.

-Roh, ça va, ce n'est pas de ma faute si t'es nulle en langues.


-Faustine ? Me rappela Valentin.

-Je n'aime pas parler en langues étrangères devant les gens, ça me stresse. Lui expliquai-je.

Et ce n'est pas un mensonge.

-Je peux savoir pourquoi ? Me demanda Valentin en se rapprochant tel un félin.

Je me mordis la peau de mon index, sûrement un peu anxieuse de lui ouvrir une première porte, une première porte de mon passé.

Valentin soutient mon regard. Je souffle un bon coup.

-En terminale, un garçon se foutait de moi, lorsque je parlais anglais.

Je me tais, c'est bien plus compliqué que ce que je pensais. Je regarde mes pieds, afin d'éviter d'affronter son regard interrogateur.

-Parlait-il mieux en anglais que toi ? Me demande-t-il afin de comprendre.

-Il venait d'Angleterre, répondis-je, donc oui, il était bilingue.

-Je suis désolé, je ne voulais pas te brusquer avec un truc aussi débile. Tenta de me rassurer Valentin.

-Ce n'est pas grave, tu ne pouvais pas savoir.

Valentin me prit dans ses bras. Je collai ma tête contre son torse. Ses battements de cœur de parviennent à mes oreilles.

-Il faut les éviter les connards de ce genre Faustine. Me chuchota-il.

Oui, les éviter, c'est exactement ce que je n'ai pas fait.


C'est lundi de Pâque. Julien, Martin et moi avions initialement prévu de se voir pour finir notre travail de philosophie. Je ne suis pas bien. Je ne sais plus comment gérer tout ça, quoi en penser. Julien est resté avec Grâce, à qui on est allé dire bonjour, pendant que je rejoins Martin, un peu plus loin. Il m'a fait mal, ses mots m'ont fait mal. Je me stoppe à quelques mètres de lui. Il me regarde et me sourit.

-Ça va ? Me demande-t-il.

-Oui très bien. Répondis-je. Alors, qu'est-ce que tu voulais me dire ? Dépêche-toi, tu as cinq minutes, Julien nous attend.

-Non mais Faustine, on ne va pas faire ça comme ça. Râle-t-il.

-Tu es en train de perdre ton temps. Lui répondis-je le visage fermé.

-Alors qu'est-ce que tu veux que je te dise ? Me demande-t-il, un peu sur les nerfs.

-Je pense qu'il vaut mieux stopper tout ça maintenant avant que ça devienne bien trop compliqué. M'expliquai-je.

-T'es sérieuse ? Me demande-t-il.

-Je n'ai pas envie d'une relation comme ça Martin ! M'énervai-je. Et je sais très bien que toi, au contraire, c'est ce que tu veux ! Pas moi, c'est clair ? Je n'ai pas envie de compter les jours ! On avait fait un deal et toi, tu m'as mentis.

-Je ne t'ai pas mentis, je me suis juste mal exprimé.

- « De toute façon, ça se finira lorsque je partirai ». Je lui cite.

-Je n'ai pas dit ça. Me répond-il.

-Tu n'as pas dit ça ? Arquai-je mes sourcils. Tu veux que je te ressorte le message ? M'énervai-je de plus belle. Sache que ça m'a fait du mal.

-Je suis désolé.

Ma bouche se crispa.

-Je voulais juste dire qu'on ne peut pas savoir quand est-ce que ça se finira.

-Tu mens.

-Faustine...

-Tu me mens. Répétai-je.

-J'ai changé d'avis tu sais. Lorsque je t'ai dit ça, j'ai vite changé d'avis. Je... Je voudrais rester avec toi le plus de temps de possible.

Je m'assois sur un banc. Il me rejoint.

-Je suis désolé, s'il te plait, pardonne-moi. Me demande-t-il.

Je n'ose pas le regarder dans les yeux.

-S'il te plait... Insiste-il.

-Oui, je te crois. Lui répondis-je.


Des gouttes de sueurs perles sur mon front. Il fait bien trop chaud. Une lueur émanant du lampadaire du coin de la rue se faufile à travers le rideau. Je sais que Valentin est réveillé. Il ne dit rien, se contente juste de me serrer dans ses bras, ses veines ressortissants légèrement. Mon cœur bat vite. Le sien est lent et régulier. Je me relève et m'assois au bord du lit, culpabilisant de l'empêcher de dormir.

-Un cauchemar ? Me demande-t-il d'une voix rauque en se replaçant dans le lit.

J'hoche la tête, sachant très bien qu'il épie mes moindre faits et gestes. Il veut comprendre, mais il ne doit pas comprendre. Je ramène un genou à ma poitrine et pose mon menton dessus. Je ferme les yeux. C'est si compliqué.

-Je sais que c'est une phrase que tu as souvent dû entendre, mais si tu as besoin, je suis là pour t'écouter. Continue-il.

Oui je l'ai souvent entendu, mais eu-ce été utile de perdre du temps à parler de son ressenti ? Non.

Valentin se colla à mon dos.

-Et je ne suis pas là que pour t'écouter, je suis aussi là pour te protéger. Me murmura-t-il à l'oreille.

Une larme coula. Voilà l'inconvénient de ce couple : être obliger de faire face à des vérités qu'on n'arrive pas à entendre, se sentir nue devant l'autre, exposée à son regard interrogateur.

Valentin me rejoint. Ses doigts chauds relèvent mon menton encore tremblant. Il est magnifique, les yeux mi-clos, dus à l'heure tardive ou plutôt fort matinale, ses cheveux or en bataille, sa mâchoire bien dessinée.

-Je vais te faire une promesse Faustine. Même si ton passé te hante, tout ça, tout ce que tu as vécu, je te promets que je ne te laisserai jamais l'occasion de le revivre.

Valentin rapproche ses lèvres des miennes. Seulement quelques millimètres nous séparent.

-Je te le promet tu entends ? Répéta-t-il pendant que j'hochais difficilement la tête.

Et nos lèvres se scellèrent langoureusement.


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Hey ! J'espère que ce chapitre vous aura plu !

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