Imposteur
Cette fille connaît quelques enfants qui ont un jour eu un ami imaginaire. Des monstres, des fées, des animaux farfelus aux couleurs acidulés, que sais-je... Des créatures dont les contours se brouillent entre réalité et fantasme.
Son ami imaginaire à elle s'appelait « Syndrome de l'Imposteur ». Il ne s'agissait pas vraiment d'un ami, mais il était bien réel. Elle sait qu'on ne peut pas échanger ce genre d'amis, qu'on ne peut les retourner à la caisse comme un jouet défectueux. Insatisfaite et non remboursée. Si seulement elle avait pu remplacer cet ami en papier mâché contre une peluche inoffensive...
Imposteur n'est pas toujours tendre avec cette gamine, et ses mots résonnent souvent dans les recoins ombragés de son petit crâne.
« Oui, t'as réussi, mais c'est un coup de chance.
Les autres sont bien meilleurs que toi, tu leur voles leur place.
Ils disent ça pour te faire plaisir, tu sais que tu n'arrives à rien.
Tu travailles dans le vide, au fond tu es une incapable...
Tu ne mérites pas tout ça... »
Elle a souvent pleuré à cause de lui, quand plus rien n'avait de sens. À force d'emmêler les fils qui relient ses pensées distordues, Imposteur s'est infiltré entre ses neurones, ses pulsations de coeur. Il s'est terré au plus profond de son âme. Petit à petit les mots durs ne sortaient plus de la bouche du monstre mais de celle de la gamine. Lors de l'ultime éclipse de son coeur teint de noir, ils n'ont fait plus qu'un, et elle est devenue son propre démon.
« Je ne sers à rien,
Je ne mérite ni la réussite ni l'amour des gens.
S'ils s'attachent c'est seulement parce qu'ils ne me connaissent pas assez... »
Elle l'a pensé si fort, si tu savais.
« Je me déteste, je me déteste, pitié que tout s'arrête »
Soyons honnête, Imposteur est toujours là, même s'il préfère observer de loin. Elle n'a pas encore réussi à couper tous les fils qui la relient à lui. C'est un travail de tous les instants, d'essayer de quitter celui qui partage des années à nos côtés, voire notre existence toute entière. Rompre avec soi-même, c'est malheureusement un peu plus compliqué qu'un chagrin d'amour. Mais Imposteur ne voulait pas partir, il s'était attaché à cette fille aux doigts tachés d'encre.
À force qu'elle rompe ses fils, Imposteur a changé de forme. Il s'est fait appeler « Perfectionnisme », mais il n'était pas si différent. Peut-être que c'est là qu'il est devenu si dangereux, qu'il lui a fait tant de mal. Pour lui, cette fille s'est perdue en insomnies, elle a pleuré à chaque déception, elle s'est tétanisée à l'annonce de chaque nouvelle note qui lui rappelait qu'elle n'était bonne à rien, ou qu'elle travaillait dans le vent. Les mots innocents de ses professeurs confirmaient les murmures de ce nouveau monstre. Il arrivait à changer les conseils en poignards. À cause de lui, elle a vu de la déception dans le regard de ses parents, là où il n'y avait qu'amour et inquiétude pour elle.
Perfectionnisme était bien plus tenace qu'Imposteur, mais elle continuait de rompre les fils dans l'espoir de cesser d'être sa marionnette. Tant pis si elle brisait les fils qui la maintenait en vie dans la bataille, tant qu'elle parvenait à s'extraire de son emprise. Elle sait que les derniers fils seront les plus durs à briser, car elle ignore ce qu'il restera encore d'elle après coup. Elle s'est déjà fait tant de mal, alors qu'elle avait toujours rêvé de repeindre ses pensées noires en bleu (le blanc viendra un jour, quand Perfectionnisme aura disparu). Il faudra du temps pour réapprendre à vivre...
Le temps passe, et soyons honnête, Perfectionnisme est toujours là. Cette gamine n'en est plus tout à fait une, et elle a tissé elle-même de nouveaux fils vers d'autres amis : Amour de soi, Confiance, Liberté. Elle commence à se trouver, du moins à se chercher. Peu importe si elle chute, si elle se trompe, si elle réussit sur un coup de chance. Elle veut avancer, réduire en miettes ce qui reste de Perfectionnisme et ses acolytes Anxiété, Rejet, Colère. Peu importe si elle incarne la déception dans les yeux de certains, si on finit par la détester. Pour l'instant, elle va agir pour elle, seulement pour elle.
Aujourd'hui c'est toujours difficile. Perfectionnisme vient souvent la tourmenter à grands coups de culpabilité, lui hurler de travailler, lui répétant qu'elle n'est bonne qu'à ça.
Mais aujourd'hui, je vous le promets, elle commence à comprendre sa valeur sans passer par l'approbation des autres.
Aujourd'hui, je vous le promets, elle n'a jamais été aussi fière, optimiste et heureuse sans contre-partie. Tout ne tient plus qu'à un fil entre elle et ce vieux démon de son adolescence.
Aujourd'hui, je crois que cette gamine a enfin grandi.
Aujourd'hui, pour la première fois, elle a envie de s'aimer pour de vrai.
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Ça fait une éternité que j'ai pas écrit sur Wattpad et je reviens avec un texte pas terrible écrit sur un coup de tête... Quelle auteure en carton ! Si tu lis ceci, n'hésite pas à critiquer (en positif ou négatif tant que c'est constructif), ça me motiverait énormément.
Au passage, j'ai lancé un compte d'écriture sur Instagram (le compte est encore en chantier mais quelques textes inédits sont dispo, n'hésite pas à aller voir si le coeur t'en dit) : le pseudo c'est aussi « delarmesetdencre » pour ne pas changer les vieilles habitudes.
Porte-toi bien et peut-être à une prochaine, qui sait !
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