PROLOGUE

Ennemi

La passion est une très forte émotion tournée vers un concept, un objet ou une personne.

Animé d'un amour ardent, dépassant la plupart du temps le raisonnement, l'individu éprouve des sentiments si intenses qu'ils sont capables de produire un déséquilibre psychologique.

Chez certaines personnes, la passion amoureuse peut avoir des conséquences assez fâcheuses comme la perte d'appétit, le manque de sommeil ou encore l'obsession de l'objet aimé.

***

Cher admirateur,

Ta toute dernière lettre ne m'a pas laissée indifférente.

Oui j'essaie de faire bonne figure. Mais pour être honnête elle m'a profondément chiffonnée (et encore le mot était faible.)

Au début, j'hésitais à te répondre. Mais il fallait bien que je le fasse un jour ou l'autre... et puisque ton dernier courrier ne m'a finalement pas réduite à néant je me surprends à t'écrire une fois de plus.

Même après tout ça.

Comme si ma vie en dépendait.

Comme si je n'en avais pas eu assez.

Oui, je dois admettre que je suis incapable de faire une croix sur nos échanges. Tu m'as rendue accros à toi, en jouant le rôle de la boisson censée me délivrer de mes soucis.

C'était donc sans surprise que me revenait le mauvais personnage.

En vilain petit canard, je me suis vue attribuer celui de la pauvre alcoolique, qui a réalisé.. hélas trop tard à quel point tu la tuait à petit feu.

J'aurais dû voir que tu n'étais qu'un antidote éphémère... et sentir que tu ne dissimulais rien d'autre qu'un poison pâteux, ardant et meurtrier se déversant dans mes veines.

Trop tard, je suis ivre de toi.

Tu me reproche de ne jamais rire, ni sourire.

C'est triste à dire, dur à entendre et difficile à comprendre mais je ne me souviens plus du son de mon rire, et j'ai beau étirer mes lèvres du mieux que je peux, en une grimace qui se veut aimable, ou même essayer de montrer mes dents blanches.

Le résultat reste le même, mon rire est éteint et mon sourire effacé.

Car mon histoire, est une de celles qui te laisse sans voix, te prends par la gorge et resserre lentement son emprise comme pour t'étrangler, te couper le souffle et te mettre en miette.

Parce que ma vie, ne rime a rien, que c'est une succession de défaites sanglantes et de lourdes catastrophes. Sans compter que mon existence toute entière est dénuée de sens et synonyme de punition, à durée indéterminée.

Toi tu es l'inverse de tout ça. Tu représente l'indéfini, l'inconnu et tu laisse tout au hasard, tu arrives dans ma vie et tu mélange tout, comme si tu en avais le droit. Quand tu t'en va je suis malade.

Si ça se trouve, c'est peut être l'une des raisons qui me poussent à t'écrire.

Je ne suis pas une fille heureuse tu entends ! Alors pourquoi devrais-je faire semblant de sourire dis-moi ?

Je garde en mémoire que depuis mes seize ans, il m'arrive d'être assaillie, écrasée et piétinée par la tristesse. Et j'ai cru trouver la "solution" en découvrant qu'il existe deux douleurs ! Le savais-tu ?

L'une est mentale et l'autre physique mais quoi qu'il arrive elles sont en toi, te détruisent de l'intérieur et te rongent jusqu'aux entrailles.

Je me suis alors servie de l'une afin d'oublier l'autre.

Et oui, je garde encore les affreuses cicatrices du mal que je me suis affligée, dissimulées sous les longues manches de mon pull.

Je suis affreusement seule, extrêmement fragile et complètement paumée... Et contrairement à ce que tu te permets de croire, je ne fais pas mine d'être souffrante. Je le suis.

Je suis sous antidépresseurs et anxiolytiques depuis presque toujours. Du moins, jusqu'à toi. Je dois dire que je ne me souviens pas de la dernière fois que j'ai suivi mon traitement depuis que tu es entré dans ma vie.

Toi, tu es mon danger, le rayon de soleil qui me fait flancher. La menace qui me mènera tôt ou tard à ma perte.

Je n'attends pas vraiment ta réponse.

Je ne t'embrasse pas.
Kamila

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