― Bon, assez parlé de Jung Wooyoung ! Quel film te ferait plaisir ? - lâcha San en attrapant la télécommande posée sur l'accoudoir du canapé.

Il s'adossa bien au fond du sofa en croisant ses jambes sur la table basse et alluma la télévision. Il fit défiler les différentes chaînes du câble à la recherche de quelque chose qui lui plairait et tomba sur Le Parrain, un film de gangsters prenant place à New York en 1945. Il ricana à la coïncidence.

― Un film de mafieux, ça te dit ? Quoi que ça va probablement me faire paniquer à propos du taré aux yeux bleus et de Chicago la capitale du crime ? - dit-il en rigolant. Je plaisante.

Wooyoung aboya un coup, il avait l'air partant pour Le Parrain. San reposa donc la télécommande à côté de lui et se rapprocha de son chien, enroulant une couverture autour d'eux. Wooyoung déposa ses pattes sur les genoux de San et laissa reposer sa tête dessus.

Il se détendit lentement, oubliant presque un instant les lourdes responsabilités de sa vie humaine. San avait un super-pouvoir apaisant, ses doigts gratouillant doucement sa fourrure avaient le don de tout lui faire oublier.

Et entre deux caresses, San ne s'arrêtait pas de commenter le film et d'imiter les personnages avec des voix ridicules.

― J'aime pas la violence, Tom. Je viens d'égorger un homme mais, j'ai glissé c'est pour ça !

― Je me suis pris cinq balles dans le corps mais je survis car je suis en réalité... un robot !

Wooyoung trouvait ses remarques stupides, au début, mais il finit par les trouver tellement stupides qu'elles en devenaient drôles. Et il attendait maintenant chacune d'elle avec impatience, voulant même partager avec le jeune homme les idées qui lui venaient en tête. Malheureusement, il ne pouvait pas articuler un seul mot. Il aurait aimé pouvoir faire rire San à son tour. Mais avec lui, il ne restait qu'un... chien.

Il se mit à imaginer ce que ça donnerait si c'était Wooyoung qui était assis là à côté de Choi San sous la couverture, et non Wooh. Ce ne serait pas correct, deux hommes dont un chef de gang ne passeraient jamais une soirée comme ça, l'un contre l'autre à se câliner. À moins que... ça le soit.

Quelque chose de brûlant se réveilla dans le ventre de Wooyoung, du désir et de la panique. C'était absurde ! Mais tout comme les blagues de San sur le film, plus cette notion prenait place dans son cerveau, moins stupide et plus attrayante elle devenait.

Son chien intérieur ne ressentait aucune quelconque attirance sexuelle pour San ni pour aucun être humain, mais son esprit et son instinct d'Homme prirent le dessus quand il se mit à considérer un monde dans lequel le brun serait intime avec Wooyoung le chef de gang.

Après tout, San avait dit qu'il le trouvait sexy, et Wooyoung avait perçu des hormones brûlantes émaner du jeune homme lorsqu'ils s'étaient vus au parc un peu plus tôt. Quelque chose était donc bien possible ? Même si sa présence rendait San nerveux et craintif ?

Quelque chose ? De possible ? Mais à quoi est-ce qu'il était en train de penser ??

Il descendit du canapé dans un élan de réalisation, paniqué, et s'assit sur le sol du salon.

― Qu'est-ce qu'il y a Wooh ? T'as trop chaud ? On peut se débarrasser de la couverture si tu veux - lâcha San en tirant le plaide et en tapotant l'espace vide à côté de lui.

Wooyoung fixa le jeune homme qui le regardait avec de grands yeux attentifs et se délecta de son visage attendrissant.

Merde. Que Wooh aime bien San, c'était une chose, mais Wooyoung... Wooyoung n'avait pas le cœur à s'attacher à quelqu'un. Pas de cette manière. Qu'aurait-il à offrir ? Que connaissait-il à l'amour ?

Et pourtant, il le comprit à cet instant précis en plongeant ses yeux dans ceux du brun, il aimait vraiment bien San.

― Quoi, je t'ai trop assommé avec mes câlins ? Je suis trop collant à ton goût ? - dit San pour embêter son chien, se levant et le rejoignant pour lui attraper les babines des deux mains et le noyer de bisous.

Wooyoung lâcha un petit grognement agacé qui fit rigoler le jeune homme.

― Ooooh, je vois... T'es un petit vieux grincheux et aigri, c'est ça ? - dit-il en se redressant sous le regard furieux de son chien. Il vaut mieux que tu restes allonger là pépère, papi, tu pourrais te coincer le dos.

Le concerné répondit à sa provocation, il ne pouvait pas se laisser insulter de petit vieux sans rien faire ! Il se leva et aboya, sautillant autour de la table basse pour prouver à San qu'il était en pleine forme.

― Mouais, ça reste un peu mou... Je suis sûr que t'es pas cap de faire trois fois le tour de la maison en courant !

Wooyoung aboya avec énergie pour signifier qu'il acceptait le défi.

Je pourrais courir cent tours de plus que toi, humain.

Il sortit de la maison accompagné de San qui se mit à courir avec lui pour ne pas le laisser seul dans son épreuve. Le jeune garçon entama une chanson dans sa course.

― Moi et mon chieeeen, on est les meilleurs copaaaaains !! ~

Il s'arrêtèrent après trois tours et le jeune homme reprit son souffle, haletant d'avoir couru en criant et rigolant avec son chien.

― Okay t'as gagné, t'as pas l'air si vieux !

Wooh se jetait encore et encore sur lui avec énergie en remuant la queue pour le provoquer à son tour.

Déjà à bout de souffle ? Je pourrais courir encore des heures !

― Ça va, j'ai compris ! T'es une pile électrique quand tu t'y mets, toi - lâcha San en jouant avec son chien, balançant ses bras vers lui pour essayer de l'attraper.

Wooh était hystérique. Son humain était heureux et ça rendait son chien intérieur fou de joie. Non, Choi San était heureux, et ça rendait Jung Wooyoung plutôt content aussi.

― Bon, c'est pas tout mais je commence à avoir sacrément froid.

Les deux compagnons retournèrent à l'intérieur pour finir leur film et Wooyoung remonta sur le canapé avec San, le mal avait déjà été fait de toute façon. Cette nuit encore, il dormit dans le salon et le jeune homme laissa la porte de sa chambre entrouverte au cas où son chien voudrait le rejoindre.

Puis, à l'aube, Wooyoung quitta le chalet sans un bruit.

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― Crache le morceau ! - ordonna Jackson à son chef alors qu'ils étaient assis au comptoir de leur bar préféré.

― Il n'y a rien à dire !

― Qu'est-ce qu'il se passe encore ? - s'impatienta Lisa en entendant ses deux amis se chamailler pour la centième fois.

― Il ne veut pas me dire où il passe toutes ses nuits ! Cinq jours qu'il n'a pas dormi au QG, je suspecte une jolie fille d'être entrée dans sa vie... ~ lâcha Jackson à la serveuse d'un air malicieux en cachant sa bouche avec sa main, ce qui était inutile car il avait prononcé cette phrase bien assez fort pour que Wooyoung puisse l'entendre.

Ce dernier claqua sa langue, agacé par le comportement enfantin de son ami. Quand quelqu'un l'ennuyait, il avait l'habitude de lui faire fermer sa bouche d'une remarque cinglante, mais quand c'était Jackson, il le laissait simplement parler jusqu'à ce qu'il s'essouffle tout seul.

Ou peut-être qu'au fond, il aimait juste bien son côté emmerdeur ?

― Une jolie fille ? - demanda Lisa curieuse en se penchant par dessus le comptoir vers Wooyoung pour le flairer de plus près.

Le chef de gang resta stoïque, elle aussi était une sacrée commère. Il se contenta de lever les yeux au ciel.

― C'est vrai que tu portes une odeur que je n'avais encore jamais sentie sur toi, mais ce n'est pas une odeur de femme... Plutôt celle d'un homme.

Elle s'arrêta quelques instants pour réfléchir sérieusement puis afficha un visage éclairé, comme si elle avait eu une révélation.

― Est-ce que c'est ce à quoi je pense ?

― Ça dépend, à quoi est-ce que tu penses ?

― Sallie m'a dit que tu avais passé une nuit sous ta forme canine... Chez ce jeune homme qui avait pris un sandwich au bar.

Wooyoung perdit tout à coup son air sûr de lui et ouvrit grand les yeux, pris d'une gêne disproportionnée. Il se mit à rougir malgré lui et détourna le regard. C'était rare, qu'il détourne le regard. Et sa réaction valut un rire éclatant de la part de Lisa.

― Alors c'est vraiment ça ??

― Hein ? C'est qui ce garçon ? - demanda Jackson confus.

― Choi San. J'ai fait en sorte de dormir chez lui pour pouvoir fouiller sa maison. C'était pour savoir s'il était bien lié à cette histoire de drogue - répondit Wooyoung d'un ton sérieux en retrouvant ses esprits, se rappelant qu'il avait fait tout ça pour une raison convenable. Au départ...

― Choi San ?? Tu as encore des soupçons sur lui ?

― Non, je suis presque sûr qu'il n'a rien à voir avec tout ça.

― Alors... Pourquoi est-ce que tu continues de passer tes nuits chez lui..?

Wooyoung se raidit à nouveau.

―Je... Je ne.. !

― Est-ce que tu continues d'y aller sous ta forme canine ?

Le concerné ne répondit rien mais ça revenait à dire "oui". Il avait passé les cinq dernières nuits chez San en tant que Wooh. À dormir contre lui dans le canapé et à remuer la queue à son attitude idiote de maître gaga.

― Pourquoi joues-tu au chien avec lui, tu sais que c'est dangereux ! Et s'il découvrait notre secret à cause de toi ? Qui sait s'il n'est pas même déjà au courant, il cache peut-être très bien son jeu et pourrait te faire du mal, tu es bien plus vulnérable une fois transformé !

Voilà qu'il se faisait engueuler maintenant, c'était la meilleure ! Jackson avait pour habitude d'être sûr-protecteur et un peu parano sur les bords, Wooyoung ne supportait pas quand il lui faisait la morale ou qu'il s'immisçait dans ses histoires.

― San ne ferait pas de mal à une mouche ! Jamais il ne lèverait ne serait-ce que le petit doigt sur Wooh.

Merde...

― Wooh ?

Et hop, le chef de gang détourna les yeux pour la deuxième fois ce soir.

― Oui, c'est... c'est le nom qu'il m'a donné. À mon chien. Et alors ?

Jackson et Lisa échangèrent un regard perplexe avant de se remettre à fixer Wooyoung.

― Mince alors... Tu l'aimes bien - annonça la serveuse d'un air surpris en arrêtant d'essuyer le verre qu'elle avait dans les mains.

Cette fois, Wooyoung se força à tenir son regard.

― Tss, n'importe quoi. J'attends juste de voir germer les graines qu'il a plantées. Histoire d'être sûr à 100% qu'il ne s'agit pas de pavot ou de coca. Ou de Dieu ne sait quoi d'autre. Une fois que ce sera fait, j'arrêterai d'aller le voir. Oh et puis merde ! Je sais même pas pourquoi je me justifie ! Je sais ce que je fais, d'accord ?

― Si tu le dis - lâcha Jackson peu convaincu en faisant rouler son doigt le long du bord de son verre. Tu viendras pas pleurer s'il trahit "Wooh".

― Et puis quoi encore. S'il me trahit, je le tue - lâcha le chef de gang sans en penser un seul mot mais en veillant malgré tout à feindre un air sec et convainquant qui en aurait trompé plus d'un.

Plus d'un, mais pas Jackson. Ce dernier n'était pas dupe.

Ce qu'il savait de Choi San était qu'il avait menti sur son nom et qu'il menait des recherches sur les phénomènes d'hybridation. Il connaissait bien Wooyoung et savait que son instinct était plus que fiable. Il l'avait prouvé plus d'une fois par le passé. Alors s'il avait soupçonné Choi San en premier lieu, c'était qu'il y avait une bonne raison à cela.

Mais Jackson l'avait vue. Il avait vu cette petite étincelle briller dans les yeux de Wooyoung lorsqu'il avait évoqué la manière dont San ne lui ferait jamais de mal. Et il craignit une chose. Que l'homme au cœur de pierre, celui qui ne s'était jamais laissé influencer par ses sentiments, soit aveuglé par son affection naissante pour le jeune homme.

Le chef de gang avait probablement trouvé en lui un réconfort qu'il n'avait jamais su trouver ailleurs depuis la mort de ses parents, et Jackson en était profondément heureux. Heureux de constater que son frère de cœur était capable de penser à quelqu'un avec des yeux si brillants. Qu'il était capable de détourner le regard en rougissant. Qu'il n'était pas seulement ce chef sérieux, dévoué à rien d'autre qu'à son devoir et à sa communauté.

Malheureusement, rien n'excluait la possibilité que Choi San joue les bons maîtres pour tromper Wooyoung. Peut-être se servait-il de lui, depuis le début. Si c'était le cas, si San venait à trahir le chef de gang, alors ce ne serait pas Wooyoung qui le tuerait mais bien lui. Jackson. Et lui le pensait vraiment.

Si le jeune homme venait à briser le cœur de son frère malgré à quel point il était forgé dans la pierre, alors Jackson réduirait cet homme en miettes.

― Il se fait tard - lâcha finalement le Berger Allemand en se levant de son tabouret. Tu vas aller retrouver ce garçon ce soir encore, n'est-ce pas ?

― Oui, je te l'ai dit. J'irai tant que je ne serai pas certain de ce qu'il fait pousser dans son laboratoire.

― Alors à demain - dit Jackson avant de lâcher un long soupir. Wooyoung, reste prudent. Je sais que tu as confiance en lui, mais ne baisse pas ta garde. On est jamais trop prudent.

Wooyoung soupira légèrement à son tour et afficha un petit sourire attendri. Tout ce que voulait Jackson, après tout, c'était qu'il ne lui arrive rien.

― Je ferai attention, t'en fais pas. Et toi... Ne te mêle pas de ça, compris ?

― Ouais.

𝐂𝐎𝐍𝐂𝐋𝐔𝐒𝐈𝐎𝐍 𝐃𝐔 𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟖 :
Wooh n'est pas un papi.