Il était minuit passé et les deux jeunes hommes étaient toujours là à discuter. Ils ne s'étaient pas rendu compte que la plupart des invités étaient déjà partis, ni même qu'ils s'étaient petit à petit rapprochés l'un de l'autre au fur et à mesure de la soirée.

Ils étaient assis sur leurs chaises et restèrent silencieux pendant un instant, appréciant simplement la présence de l'autre. Ils avaient passé des heures à discuter de tout et de rien, à échanger des banalités puis à aborder des sujets sérieux la seconde d'après.

― Pourquoi vous vous regardez dans le blanc des yeux comme ça, vous êtes bloqués ? - plaisanta Jackson, faisant sortir les deux garçons de leur transe.

― Oh wow, il est quelle heure ? - demanda San en raterrissant sur Terre.

― Minuit vingt. Vous avez bien papoté vous deux !

― Déjà ? Il va falloir que je rentre - annonça le brun en se redressant sur sa chaise.

― Ok Cendrillon, c'était un plaisir de te voir ce soir - répondit Jackson avec un large sourire.

― Merci pour l'invitation, j'ai passé un super moment !

Il avait bien bu mais l'alcool avait eu le temps de redescendre un peu. San pensa qu'il avait bien fait de venir. À cet instant, il était très heureux. Son cœur était conquis et son esprit apaisé par la soirée qu'il venait de passé aux côtés de Jung Wooyoung.

― Je te ramène ? - demanda finalement ce dernier.

― Oui, si ça te va toujours.

― Ça me va toujours.

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Wooyoung était au volant de son pick-up, accueillant comme passager le fabuleux Choi San. Celui-ci ne semblait pas plus stressé que ça par la situation. C'était probablement lié à l'alcool qu'il avait bu, mais Wooyoung fut tout de même heureux de remarquer que le brun pouvait se sentir à l'aise même seul dans une voiture avec lui.

San avait eu l'air de passer un bon moment en sa compagnie et de l'apprécier, mettant Wooyoung et son chien intérieur dans tous ses états. Il avait pu sentir les hormones de désir émaner du garçon durant une bonne partie de la soirée, créant en lui une envie irrésistible de s'offrir à son humain préféré.

Il se gara dans l'allée et tourna sa tête vers San. Il avait vraiment très envie de l'embrasser. Mais d'un autre côté, il ne voulait pas le brusquer. Après tout, San ne l'avait rencontré sous sa forme humaine que quelques fois, et puis il commençait tout juste à s'ouvrir à lui. Sans compter le fait que le jeune homme était toujours partiellement alcoolisé, probablement non maître de la totalité de son esprit. Wooyoung ne voulait pas tout gâcher.

― Bon eh bien... Merci de m'avoir raccompagné - lâcha finalement le brun en posant sa main sur la poignée de la portière.

― Je t'en prie. Tu... Rentre bien. Enfin je veux dire, jusqu'au porche...

San laissa échapper un rire, Wooyoung était vraiment pas doué pour parler avec les gens.

― Il n'y a que dix mètres, ça devrait aller.

Wooyoung ne répondit rien et fixa simplement San de ses yeux bleus perçants. Il ne voulait pas qu'il parte. Il voulait continuer de passer du temps avec lui et se délecter de ses effluves enivrantes. Et vu la façon dont San répondit à son regard, lui aussi semblait vouloir l'embrasser et le tirer jusqu'à son lit.

― Bon... À une prochaine fois alors - dit le jeune homme en ouvrant finalement la portière.

― Ouais... N'oublie pas ton vélo à l'arrière.

San descendit de la voiture et Wooyoung attendit qu'il soit arrivé jusqu'à la porte de son chalet pour faire demi-tour dans l'allée.

Raaah j'aurais dû l'embrasser ou pas ??

Il se remit à rouler et hésita quelques instants. Il tourna sur la gauche, continua quelques dizaines de mètres puis gara à nouveau sa voiture. Il retira ses vêtements et se transforma avant de se mettre à courir jusqu'à l'endroit qu'il venait de quitter.

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San retourna dans le salon après être allé enfiler son pyjama et entendit gratter à la porte. Il sourit instantanément.

― Wooh ! Désolé mon vieux, tu m'as attendu toute la soirée ??

Le chien entra à l'intérieur en remuant la queue joyeusement. Il avait l'air très heureux ce soir. Ou peut-être que c'était San qui interprétait les choses ainsi car c'était lui qui était particulièrement de bonne humeur ? Il se baissa pour caresser son compagnon.

― Il est tard, je pensais que tu serais déjà en train de dormir je ne sais où ! Je suis content de te voir, j'ai passé une soirée géniale, il faut que je te raconte !

Il s'installa sur le canapé avec Wooh et se mit à lui faire un debrief de sa soirée au bar.

― J'ai passé des heures à discuter avec Jung Wooyoung ! Je crois que j'arrive mieux à le cerner maintenant. Il n'est pas méchant, juste un peu sur la défensive. Mais il s'est vachement ouvert à moi et il m'a parlé de son passé, ça explique pas mal de choses.

Il regarda Wooh comme s'il attendait qu'il réponde quelque chose et le chien aboya un coup alors San continua.

― J'ai cru qu'il allait m'embrasser dans la voiture tout à l'heure, mais il n'a rien tenté. Ça m'aurait pas déplu... Mais d'un autre côté, je suis content qu'il ne m'ait pas sauté dessus comme l'aurait fait la plupart des hommes. Tu crois qu'il m'aime bien, toi ?

Wooh aboya deux fois d'approbation puis se mit à sourire de toutes ses babines.

― Personne ne m'a jamais vraiment aimé. Profondément je veux dire, tu vois ? À part toi bien sûr ! - dit-il en fourrant son nez dans le pelage de son chien et en secouant la tête tout en lui faisant des bisous. Je me demande ce que pense Wooyoung de moi. Est-ce qu'il m'apprécie vraiment...? - marmonna-t-il, le visage toujours enfoncé dans la fourrure de Wooh.

Ce dernier tourna la tête et lui lécha la joue.

― Je devrais essayer de faire un pas vers lui, non ? Et puis au pire s'il me rejette, toi tu seras là pour me réconforter, hein mon chien ?

Wooh aboya. Il n'allait pas le rejeter. San n'aura pas besoin du réconfort de son chien, Wooyoung serait là pour lui, maintenant.

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Le jour était en train de se lever et la conscience de Wooyoung s'éveilla lentement. Il émergea doucement de ses rêves même s'il ne voulait pas en sortir. Il avait rêvé de San, mais il ne se rappelait plus s'il y était humain ou chien.

Il se retourna dans le lit et se colla contre le jeune homme. Il avait dormi avec lui ? Il s'en rappelait vaguement. Il profita de cet instant pour passer un bras autour de San qui était toujours endormi à côté de lui, vêtu d'un t-shirt et d'un caleçon.

Le corps du garçon était chaud et sa peau était douce, réchauffant celle de Wooyoung. Il avait une odeur divine et le chef de gang se dit qu'il pouvait bien mourir à cet instant que ça lui irait.

Wooyoung pressa son corps un peu plus fort contre San et son membre vint s'appuyer contre la cuisse nue de ce dernier. Ce contact fit monter en lui une légère excitation.

Il ouvrit tout à coup les yeux en grand, pris d'une panique incomparable.

Il était dans le lit de Choi San. Sous sa forme humaine. Nu. Contre lui.

Comment avait-il pu se retransformer dans son sommeil ?? C'était un processus plutôt imposant et douloureux. C'était la première fois que ça lui arrivait, et il n'aurait pas pu souhaiter pire timing.

Wooyoung fit tout son possible pour rester calme et ne pas bondir du lit ou hurler. Heureusement, San semblait profondément endormi. Que penserait-il s'il découvrait que le chef de gang était allongé nu contre lui alors qu'il s'était endormi aux côtés de Wooh ?

Il penserait probablement que l'homme s'était introduit chez lui contre sa volonté et aurait abusé de lui. Ce scénario terrifia Wooyoung et il pria pour que le jeune homme ne se réveille pas. Il glissa très doucement hors du lit et sortit de la chambre avec la discrétion d'un chat. Il se dépêcha de quitter la maison et se retransforma en chien pour courir jusqu'à son pick-up où il se rhabilla.

Il s'installa à la place du conducteur mais attendit de retrouver entièrement ses esprits avant de prendre le volant.

Il n'en revenait toujours pas. Il avait été si proche de tout gâcher, sa gorge se serra. Il réalisa que ce qu'il faisait était plus qu'éthiquement douteux. C'était vicieux et tordu. C'était immoral. C'était mal.

Wooh devait disparaître.

C'est à cet instant qu'il reçut un appel de Aaron. Ce dernier lui demanda de passer le voir et Wooyoung se mit en route vers le manoir du baron. Il lui fallut quinze minutes pour arriver à destination, il descendit de sa voiture et se fit conduire jusqu'à Aaron par ses hommes de main. Celui-ci était assis dans un grand fauteuil à lire son journal qu'il baissa en entendant le chef de gang arriver.

― Bonjour Aaron.

― Wooyoung. Comment vas-tu ?

― Ça va. Tu voulais me parler ?

― Tu m'as l'air bien pressé. Viens, assieds-toi - dit calmement Aaron en montrant de sa main le fauteuil en face du sien.

Wooyoung dévisagea un instant l'objet, réprimant une grimace. Il s'avança finalement et s'installa dans le fauteuil sans coller son dos au dossier, reposant ses bras sur ses cuisses.

― Je voulais savoir comment avançaient tes recherches. Qu'en est-il de cette piste prometteuse que tu avais évoquée la dernière fois ?

Le chef de gang soupira.

― Une fausse piste malheureusement. Je dois avouer que nous sommes au point mort ces derniers jours.

― Une fausse piste ? Il est rare que ton instinct te trahisse.

― C'était un jeune homme qui venait d'emménager dans le coin. J'ai découvert qu'il développait des hybrides, d'où mes soupçons, mais il ne s'agit finalement que de croisements floraux. Rien de plus.

Aaron arqua un sourcil.

― Des croisements floraux tu dis ?

― Ouais, j'ai d'abord pensé qu'il s'en servait pour mieux comprendre l'hybridation animale mais j'ai poussé mon investigation et, de toute évidence, ce garçon est innocent. J'en suis certain. Alors je vais me concentrer sur de nouvelles pistes.

― Je vois. Vous devriez peut-être étendre vos recherches au delà de la ville, voire même du pays.

― C'est déjà le cas, j'ai discuté avec le Sergent Yu et il m'a dit qu'il avait pris contact avec des unités externes. Je passerai le voir dans l'après-midi pour savoir s'il y a du progrès de leur côté.

― Parfait. Pense à me tenir informé si vous découvrez quelque chose d'intéressant.

― D'accord. Il y avait autre chose ?

― Non, c'était tout.

― Très bien - dit Wooyoung en se relevant, content de pouvoir repartir si vite.

Il n'aimait pas cet endroit. Une immonde odeur de cigare, de cocaïne et de sexe flottaient dans l'air et donnaient à Wooyoung l'envie de gerber. Il ne préférait pas savoir ce qu'avait fait le chef de la mafia dans ces fauteuils.

Wooyoung passa voir le Sergent Yu dans l'après-midi comme convenu et il se retrouva à enquêter sur de nouvelles pistes peu convaincantes.

Il avait espéré avoir le temps de passer voir Choi San en fin de journée mais il fut trop pris par le travail. Ce qui rendit encore plus compliqué à tenir sa promesse d'arrêter de passer la nuit chez lui sous sa forme canine, car il avait vraiment très envie de le voir.

Malgré tout, il était résigné à cesser ce numéro ridicule de faux chien et réussit à combattre son irrésistible envie de courir jusqu'à chez lui. Ainsi, il n'alla pas chez San cette nuit-là. Ni la nuit suivante.

Il s'en voulait de ne pas réussir à trouver le temps d'être là pour lui en tant que Wooyoung pour compenser l'absence de Wooh. Il pouvait imaginer la détresse du brun en découvrant que son chien ne venait plus le voir, et un bout de son cœur se déchira à cette pensée. Faire souffrir San était la dernière chose qu'il souhaitait.

Le troisième jour s'annonçait finalement plus calme, Wooyoung avait effectué les missions urgentes émises par le Sergent Yu et il n'avait pas la nécessité de courir aux quatre coins de la ville aujourd'hui. Alors dès qu'il se réveilla, il se prépara rapidement et s'empressa de conduire jusque chez San.

Il frappa à la porte de la maison du jeune homme, entendit un peu de mouvement à l'intérieur, et la porte s'ouvrît finalement sur un San aux yeux rouges, humides et gonflés. Il avait pleuré ? Il eut l'air un peu surpris en découvrant que Wooyoung était à sa porte, mais content aussi. Il passa rapidement la main sur ses yeux pour essuyer un potentiel résidu de larmes puis afficha un sourire.

― Oh, salut !

― Est-ce que tout va bien...? - demanda Wooyoung d'un air concerné.

― Oui, ça... - San hésita un instant et perdit finalement son sourire, baissant les yeux vers ses pieds et lâchant un long soupir. Non en fait...

Wooyoung resta planté là quelques instants. Est-ce que quelqu'un avait fait du mal à San ? Son chien intérieur répétait les mêmes mots en boucle dans sa tête : protéger San, protéger San, protéger San. L'imaginer avoir pleuré ainsi et le voir triste lui fit l'effet d'un torrent de compassion, lui serrant la gorge et les tripes. Et ce sentiment s'accentua quand il pensa que c'était peut-être lui qui l'avait mis dans cet état. C'était peut-être la disparition de Wooh qui avait fait pleurer son humain.

― Est-ce que... je peux entrer ? - essaya d'articuler le chef de gang.

Quelle que soit la cause du chagrin du jeune homme, Wooyoung voulait l'aider à surmonter ça. À trouver des solutions. Le rassurer et le réconforter.

― Oui, je t'en prie - répondit San en se décalant pour laisser passer l'homme aux yeux bleus.

𝐂𝐎𝐍𝐂𝐋𝐔𝐒𝐈𝐎𝐍 𝐃𝐔 𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟏 :
Ça pue dans le manoir.