Chapitre 4


J U S T I N E 

Je gesticule dans tous les sens pour enfiler ma robe de demoiselle d'honneur quand on frappe à ma porte. On a élu domicile dans la nouvelle maison d'Éva pour s'habiller tranquillement. Je dois dire que ces quelques heures de calme après avoir couru partout avec elle pour les derniers préparatifs me font un bien fou.

— Une seconde, m'écrié-je la tête à moitié enfouie dans une tonne de tulle.

Je reprends ma respiration quand j'ai réussi et marche d'un pas rapide pour ouvrir. De l'autre côté se trouve Elliott, les cheveux ébouriffés. Mon regard se porte sur sa chemise blanche cintrée dont le col est ouvert puis son pantalon de costume gris qui met en valeur des cuisses parfaites. Je retiens un gémissement et m'appuie contre le chambranle l'air totalement décontracté. Ses yeux me détaillent à son tour et ma peau s'enflamme. La coupe de la robe est parfaite, bustier en cœur, elle s'évase à partir de ma taille, mais la couleur... Je n'ose même pas appeler ça une couleur. La vendeuse nous a confirmé que c'était du saumon, j'ai failli m'étouffer en la portant la première fois. J'ai vraiment la sensation d'être ce poisson victime de surpêche, qu'on a élevé en cage et trop gavé. Si ma mère a l'âge d'un mammouth, j'en ai presque la forme. Pourtant, Elliott me regarde avec gourmandise et les battements de mon cœur s'accélèrent. Merde ! Je me racle la gorge.

— Il y a un problème ?

— Éva a apparemment besoin de toi. Je n'ai pas vraiment compris la raison.

— D'accord, une seconde je finis de m'habiller.

— Besoin d'aide ? souffle-t-il.

La braise ne demande qu'à devenir un feu ardent.

— Non, lâché-je sèchement en claquant la porte.

J'entends son éclat de rire derrière le battant. Je vais le tuer. Pas tout de suite. Après la cérémonie, sinon Éva me fera la peau s'il manque quelqu'un dans le cortège. Je prends mes chaussures à la main et me dépêche de la rejoindre dans sa chambre. Les personnes censées s'y trouver pour l'aider sont dans le couloir, en train de chuchoter. Quand elles me voient, leurs regards se voilent d'appréhension et de soulagement comme si j'étais le messie. J'ouvre la porte, inquiète, et découvre Éva assise et en pleurs sur une chaise. Elle triture la ceinture de son peignoir, incapable de contrôler les tremblements de son corps. Je me précipite vers elle.

— Qu'est-ce qui se passe ?

Elle redresse le visage, j'ai un coup au cœur en voyant sa détresse.

— Et si je faisais une connerie ? sanglote-t-elle.

— Je me demandais quand tu allais craquer, dis-je d'un ton attendri.

Elle me regarde avec ses yeux bouffis et rouges, grands ouverts.

— Depuis que tu as commencé les préparatifs, tu n'as pas paniqué une seule seconde, pas même il y a deux jours quand tu as appris qu'il y avait un problème avec le DJ. Tu as toujours eu le sourire. Ce qui t'arrive n'est dû qu'au contrecoup. Vous vous aimez tous les deux, vous allez avoir une vie merveilleuse, avec ou sans enfant. Tu pourras t'empiffrer de nourriture dégueulasse pour ta santé et il t'aimera toujours.

— C'est vrai ?

— J'en suis certaine, Mimie Fox.

Je la prends dans mes bras et quand elle est calmée, je rappelle la horde de coiffeuses, maquilleuses. Je recule alors que tout le monde s'affaire auprès d'elle et j'en profite pour mettre mes chaussures. Aujourd'hui est un des plus beaux de sa vie et je vais veiller à ce que tout se passe bien. Elle l'a mérité.

Jeannine, sa mère arrive une heure plus tard, suivie par d'autres demoiselles d'honneur. J'aperçois Laurence, une collègue d'Éva avec qui j'ai déjà passé quelques soirées. J'ai l'impression que sa robe a été faite pour elle, pourtant nous portons la même. À l'instant où je m'arrête près d'elle, je me fige quand je comprends qu'elle parle d'Elliott.

— Je n'arrive pas à croire qu'il m'a demandé de l'accompagner.

— Tu es sa cavalière ? lui demandé-je d'un ton sec.

Pourquoi n'étais-je pas au courant ? Laurence qui n'a pas remarqué que j'étais dans une tout autre humeur que celle de lui faire un câlin m'étreint.

— Comment vas-tu Justine ?

Elle enchaîne sans me laisser le temps de répondre.

— Oui, je suis sa cavalière. N'est-ce pas une journée magnifique pour mettre la main sur le célibataire le plus convoité de France ?

— Mmpf.

Laurence interprète ma réponse comme un acquiescement. Alors qu'elle continue son balbutiement, j'intercepte le regard pensif d'Éva à travers le miroir. Je lui ai parlé de ce qui ne s'était pas passé entre Elliott et moi. Depuis, nous n'en avons pas reparlé. Je préférais oublier ce qui s'était produit, une bonne solution pour conserver ma dignité.

— Je vais voir si le père d'Éva n'a pas besoin d'aide.

Heureusement, personne ne se propose pour m'accompagner, j'aurais eu bien du mal à trouver une excuse valable pour refuser. Je m'éclipse discrètement de la pièce et sors de la maison. Dans un coin du jardin, je découvre un banc et m'assieds en soufflant bruyamment.

— Tant que ça ? me demande une voix en me rejoignant.

Je lâche un grognement. Pourquoi l'univers est-il contre moi ? Ai-je tué un chaton dans une autre vie ? Maltraité une otarie ?

— Tu ne devrais pas être en train de rassurer le futur mari ?

Il sourit en s'installant à côté de moi.

— Je l'ai laissé avec mon père pour la partie menace s'il fait du mal à ma sœur.

— Dommage que Louise n'a pas eu le même sermon te concernant.

Mince ! J'ouvre la bouche pour m'excuser, mais il se met à rire. J'en oublie aussitôt la raison de mon exil, de la distance que je mets avec lui. À cet instant, j'oublie tout et profite de ce son si mélodieux. Plus tard, j'aurais sûrement envie de me frapper.

— Je ne sais pas si ça aurait changé quoi que ce soit.

— Ça aurait permis à Éva de passer à l'acte en toute légitimité. Genre un peu comme la mafia.

Je me racle la gorge et prends un mauvais accent italien.

— Tu es entré dans le clan et tu n'as pas respecté nos règles. Tu vas devoir en subir les conséquences. Tonio apporte le tonneau.

Le fou rire d'Elliott est contagieux. Je ris aux larmes, pliée en deux.

— Mon Dieu, ton accent est vraiment pourri.

— Hey ! Je suis certaine que Sean me recommanderait pour l'un de ses films.

— Seulement si tu fais partie des personnages qui meurent en premier.

Je lui donne un méchant coup de coude et il fait mine de se tordre de douleur. C'est la première fois depuis cette fameuse nuit que nous nous parlons sans ambiguïté ni gêne. Je me trémousse sur le banc et prends une vif inspiration quand je sens la cuisse d'Elliott toucher la mienne.

— Alors grand frère, qu'est-ce que ça fait de voir sa petite sœur voler de ses propres ailes ?

Il prend son temps avant de répondre. Son visage est levé vers le ciel, il a revêtu sa veste de costume et une écharpe. Moi qui suis sortie simplement habiller de ma robe, je commence sérieusement à me les geler. Je croise les bras et attends qu'il me réponde. Son regard s'arrête sur la chair de poule qui couvre ma peau, il secoue la tête puis pose sa veste sur mes épaules. Je devrais rechigner, mais il caille et je n'ai pas envie de passer la semaine prochaine la morve au nez. Ça n'a rien à voir avec le fait que je puisse sentir son parfum sans passer pour une psychopathe.

— C'est étrange, mais je crois que d'un côté ça me fait du bien. Ça m'aide à positiver et à me dire que ce n'est pas parce que ma relation a foiré qu'elles sont toutes destinées à l'être.

Et dire que je suis dans l'état d'esprit inverse. Avec le divorce de mes parents et l'échec de toutes mes précédentes relations, je pense que je vais finir vieille fille avec son programme télévisé préféré. Peut-être qu'Éva me rendra visite. Je lève à mon tour mon regard sur le ciel bleu sans nuages.

— C'est une belle journée pour se marier.

— C'est une belle journée pour beaucoup de choses, murmure Elliott.

Je baisse les yeux et les plonge dans ses iris verts. Je suis happée, je me demande si j'ai envie d'être secourue. Nos hanches se touchent quand il se rapproche et mon corps est parcouru de frissons.

— Est-ce que..., commence Elliott.

— Elliott ! s'écrie une voix féminine.

Je m'écarte d'un bond et observe Jeannine, sa mère, arriver vers nous à grands pas. Sa robe bleue en mousseline qui s'évase à ses pieds lui va parfaitement. Elle est sublime et quand je regarde Elliott je vois bien d'où il tient toute sa douceur.

— Ton père te demande, déclare-t-elle quand elle parvient à notre hauteur.

C'est la deuxième fois qu'une personne m'empêche de faire une énorme connerie. Je me redresse vivement.

— Je vais finir de me préparer. Il est hors de question que je subisse la colère d'Éva le jour de son mariage.

Je commence à m'éloigner quand Elliott m'appelle.

— Cette discussion est loin d'être terminée.

Quoi ? Bien sûr que si. Sa mère me jette un regard intrigué que je fais mine de ne pas remarquer.

— Je ne vois pas de quoi tu parles. Désolée, je dois me dépêcher.

Pour le lui prouver, je lui tourne le dos et accélère. J'espère que sa mère va rapidement oublier mon comportement étrange et cette soi-disant discussion. J'espère surtout que cette journée va se dérouler sans que j'aie à croiser plus qu'il ne faut Elliott et que je pourrais continuer à le fuir. Éternellement. Je rejoins les autres demoiselles d'honneur et me laisse attraper par une maquilleuse. J'inspire un grand coup et sors de ma tête toutes les choses que j'aimerais faire avec Elliott en cette si belle journée. Malheureusement, les images ne veulent pas s'effacer si facilement. Je lâche un juron et la jeune femme se fige.

— Désolée, ce n'était pas pour vous.

Son sourire est crispé, mais elle se remet au boulot sans commentaires. Vivement demain ! Éva sera partie en voyage de noces et je n'aurai pas peur de croiser Elliott à chacune de ses invitations. Malheureusement avant ça, je vais devoir supporter Wilfrid, parce que oui, j'étais désespérée au point de l'inviter. Je commence déjà à le regretter lorsque je lis son SMS. Il me prévient qu'il aura un peu de retard parce qu'il pensait pouvoir faire le trajet en utilisant sa réserve, comme il n'a pas de carte bleue sur lui, sa mère vient le dépanner. Sérieusement ? Est-ce que je suis tombée sur un fils à maman ou il n'a vraiment pas de chance ?

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