Chapitre V♡

parti. Nous roulons depuis plus d'une heure sur une route, près de champs. Pas de nuages en vue, ni d'arbres à l'horizon. La vue est parfaite pour apercevoir ce magnifique ciel aux aurores.
Rassasiée de ma contemplation, je demande à Evan :

— Pourquoi tu ne mets pas de musique comme la dernière fois ?

— Flemme, lâche-t-il.

— T'es ronchon aujourd'hui, Je remarque. Qu'est-ce qu'il y a ?

— Je ne suis pas rassuré c'est tout, avoue-t-il.

— Comment ça ? Si c'est à cause du camp, c'est plutôt moi qui devrais l'être.

— Nan, ce n'est pas ça. C'est juste que je ne suis pas rassuré de conduire sur cette route.

— Ah bon ? Mais tu conduis toujours en ville.

— Ouais, normal comme c'est ma ville. Mais en dehors, je suis ne pas rassuré, c'est tout, lâche-t-il.

— Okay...

— Je peux mettre une playlist ? Je demande soudainement.

— Ouais, je veux bien, accepte-t-il. J'espère que t'es pas le genre à écouter de la musique classique ou Jul.

— Oula, pas du tout, je m'exclame.

— Tant mieux, dit-il en se concentrant sur la route.

— Tu aimes le rap Coréen ?

— Pourquoi ? T'aimes bien toi ? Me demande-t-il surpris.

— Ouais, j'adore, j'avoue timidement.

— Met Agust D alors, suggère-t-il.

— Sérieux ? Je m'écrie surprise. T'aimes aussi ?

À ce moment précis, je ne peux m'empêcher de sourire. Quelqu'un aime Agust D ! Joy n'aime pas alors je suis obligée d'écouter seule ses musiques. Aucune personne que je connais écoute du rap coréen.

— Ouais ouais, j'aime bien. Bon tu mets ? Râle-t-il en souriant discrètement.

Je me connecte au Bluetooth de sa voiture et enchaîne les albums du rappeur. La première chanson démarre : "Daechwita". Dès les premières paroles, je me lâche. Je t'en ai fait la promesse mini moi. Je commence à rapper n'importe comment sous le regard surpris d'Evan. En même temps j'effectue des mimiques de rappeur, qu'Agust D fait souvent lorsqu'il rappe. Le refrain démarre quand soudain je suis surprise d'entendre la voix d'Evan m'accompagner. Pendant quelques secondes je le regarde ébahie. Evan rappe le refrain. Lui aussi a du mal mais il est à fond. Il effectue des mouvements avec une main, tout en gardant l'autre sur le volant. Il me regarde un instant, je comprends vite où il veut en venir. Alors sans attendre, je le rejoins pour un karaoké en voiture.
Nous avons rappé durant tout le trajet. Je coupe la musique, me déconnecte du Bluetooth. Nous arrivons devant une entrée en bois écrit "Teen'S Camp", juste derrière un parking boueux.

— Désolée d'avance pour ta voiture, Compatis-je.

J'entends Evan râler désespérément dans son coin.

— T'inquiètes, Il faudra juste que je la lave..., Se plaint-il.

On parcourt les rangées pour trouver une place mais c'est totalement blindé. Quand soudain, Evan se met à accélérer. Je m'accroche à l'accoudoir. Et je vois une place qui se libère.

— Evan ! Là ! Je crie en pointant du doigt la place.

— T'inquiètes, j'ai vu.

Alors c'est pour ça qu'il a accéléré ? Il a de bons yeux. Et moi non, j'ai repéré la place au dernier moment. Normal, je suis myope.
Une fois garés, on sort de la voiture et on se dirige tous les deux vers le coffre.

— Tiens prends ça, Dit-il en me tendant ma valise, D'ailleurs, c'est la première fois que tu rappes ?

— Non, pourquoi ? Je lui demande étonnée de sa question.

— Pour rien, dit-il en gloussant.

— Evan ? Je t'ai entendu.

— Quoi ? Moi ? J'ai rien fait, ment-il.

— Menteur, tu te moquais de moi.

— Nan nan, je t'assure, glousse-t-il encore plus.

— Ce n'est pas bien de mentir, Poussin, je le taquine.

— Tu me cherches ? Demande-t-il en se retournant brusquement vers moi.

— Pas du tout, je mens. Et toi ? C'est la première fois que tu rappes ?

— Non..., avoue-t-il.

— Cette fois c'est moi qui commence à rire.

— Haha très drôle, marmonne-t-il.

— Je vais te faire un aveu, personne ne m'a vu chanter ou rapper avant toi.

— Qu'est-ce que je dois faire de cette information ? Me demande-t-il.

— Rien, sens-toi juste honoré, j'affirme en faisant des mimiques de reine.

— Tu ne te lâchais pas avant ? Demande-t-il sérieusement d'un coup.

— Pas du tout, répondis-je.

— Pourquoi ?

— J'avais peur.

Ça y est. C'est fait. J'ai balancé un petit bout de mon histoire. Je n'aurais pas dû. Mais je ne sais pas. J'en avais envie. Rire, rapper avec lui dans la voiture, c'était marrant. Vraiment marrant. Je devais être honnête.

Je me retourne soudainement vers lui, le sourire aux lèvres et lui avoue :

— C'était marrant dans la voiture.

Il sourit et me dit :

— C'était génial.

— Je lui tends ma main puis lui dit :
— Alors recommençons une prochaine fois !

— Avec plaisir, Chaton ! Répond-il en me serrant la main.

Après ça, nous prenons nos affaires puis laissons la voiture pour rejoindre le camp. En arrivant, je le retrouve dans une forêt et au loin j'aperçois un vaste lac avec d'immenses rochers. Plein d'étudiants sont présents. Soudain, une question me vient en tête.

— Dis comment ça ce fait que tu ai pu te procurer cette voiture ?

Son visage devient plus sombre, tel un voile de douleur que j'ai fait ressurgir à cause de ma question débile.

— T'es pas obligé de répondre-

— Elle appartenait à mon grand-père qui est mort il y a quatre ans, lâche-t-il subitement.

— Je suis désolé, je n'aurai pas dû te poser la question.

— Ce n'est pas de ta faute, tu savais pas, soupire-t-il.

Un aveu, entre deux inconnus qui jouent les amoureux. C'est comme une barrière qui se soulève peu à peu. Pour mener à quoi ?

Certains sont de notre université tandis que d'autres viennent d'ailleurs. On suit la foule. Avec Evan, nous arrivons devant une petite scène. J'imagine que comme Camp Rock, il y a quelqu'un qui va débarquer pour nous souhaiter la bienvenue.

Tout le monde parle, discute en attendant quand soudain le brouhaha est interrompu par une dame sur scène. Elle a un style d'exploratrice, c'est assez drôle.

— Bienvenue à tous ! S'exclame-t-elle. J'imagine que vous savez tous comment fonctionne le Teen's Camp ? Mais juste au cas où s'il y aurait des nouveaux arrivants, je vais vous présenter le camp ! Ici, il y aura différentes activités et bien évidemment c'est... G-R-A-T-U-I-T ! Vous pourrez profiter de votre week-end sans être emmerdés par les cours ! Baignade, loisir, sieste, randonnée ! Tout y est ! Nos animateurs ici présents seront vos guides durant votre séjour et feront au mieux pour que ce soit le MEILLEUR week-end de VOTRE VIE !

Tous les étudiants se mettent à hurler de joie.

— Bien ! Maintenant, je passe le micro à celle qui vous aidera à vous installer. Bon week-end à tous et surtout... AMUSEZ - VOUS !!!!

— Salut tout le monde ! Je m'appelle Sophie. Les autres animateurs et moi allons vous donnez la clé de votre chalet. Vous pouvez choisir avec qui vous voulez être mais attention ! Pendant les activités ce sera différent. Nous serons les seul à faire les équipes. Pour y participer, il vous suffira de vous inscrire, rien de plus. Tous les soirs, on se réunira au feu de camp. Pour vos clés rejoignez-nous à l'accueil et idem pour vous s'inscrire aux activités. Bon séjour à tous !

Les autres étudiants partent aussitôt à l'accueil. Nous n'étions plus que tous les deux, en plus de quelques autres personnes près de la scène. Evan me dit que l'on devait faire pareil, aller prendre notre cabanon avant qu'ils ne soient tous pris. Apparemment c'est limité.

On arrive à l'accueil, c'est bondé. Ils sont tous regroupés près des animateurs qui ont l'air déjà surchargé de boulot. Evan ne perd pas de temps pour se faufiler dans la foule. Je me retrouve seule, près de la porte d'entrée. Je regarde pour voir s'il arrive. Quand d'un coup mon regard se fige sur un groupe de filles que je connais bien. Kessy et ses amies, Erika et Anouck. Je pensais qu'elles étaient trop superficielles pour venir ici mais je me suis trompée. Allez ma grande. C'est l'occasion de t'affirmer et de montrer de quoi t'es capable. Je suis cap' de me défendre. J'espère. Je ferais de mon mieux en tout cas même si je ne suis pas très douée. Je suis nulle pour râler, m'exprimer et les punchlines. Kessy crie à quelqu'un de venir avec un geste rapide de la main. Je regarde dans la direction, Ambre. Pourquoi elle traîne avec ses filles d'un coup ? À tous les coups, elle est partie du côté obscur. Elle s'est excusée, mais je crois que j'ai bien fait de me méfier. Je commence à rire doucement. C'est vrai quoi. Après m'avoir torturé, pourquoi revenir comme une fleur pour s'excuser ? C'est louche. Elle a dû comploter un truc avec le Gang Girls de Kessy. Ce serait... trop irréel que ses excuses soient réellement sincères. Je ne suis pas assez folle pour y croire naïvement.
Je dérive mon regard vers l'endroit où Evan s'est enfoncé, dans le troupeau d'étudiants. Une minute plus tard, je l'aperçois, poussant quelques élèves au passage pour s'extirper. Il arrive une clé à la main avec une étiquette. Il se dresse devant moi et me dit :

— J'ai les clés, prend ta valise. On y va.

En disant ça, il était essoufflé, le visage légèrement rougi et quelques gouttes de sueur sur son front et son cou. Je fais ce qu'il me dit, et prends ma valise pour le suivre. Je ne prends même pas la peine de jeter un rapide coup d'œil sur le Gang Girls et la nouvelle. Mais, je sens quand même un regard sur moi.

On sort d'un petit chemin étroit pour arriver à notre cabanon. Pas si mal. Fait de bois. C'est beau. Faces à la porte. Evan tourne la clé dans la serrure avant d'ouvrir la porte. On tombe face à un petit couloir étroit qui s'ouvre ensuite au salon. Il y a une magnifique cheminée, un tapis... Picasso ? Pas très beau en tout cas.

— Ta chambre est au fond du couloir, m'indique-t-il.

— Merci. T'es déjà allé dans ce cabanon ?

— Ouais, une fois.

Je hoche simplement de la tête quand d'un coup quelque chose me turlupine.

— Mais tu m'as dit que c'était réservé qu'à ceux qui sont à l'université.

Il se tourne vers moi, puis me dit :

— J'ai redoublé.

— Ah désolé...

— T'inquiètes.

Je me dirige vers ma chambre avec ma valise. J'ouvre celle-ci puis range mes affaires aussitôt dans l'armoire au fond de la pièce.
Le soleil commence à tomber, on aperçoit les rayons illuminer le ciel ainsi que les nuages. La vue est magnifique lorsqu'on regarde du côté de la forêt.

Evan était trop fatigué à cause de la route, alors il dort depuis au moins deux bonnes heures. Tandis que moi je commence à me tordre de douleur. Satanées règles de malheur putain ! Quelle connerie c'est truc ! Et ceux qui croquent la vie à pleine dent diront : Mais non c'est beau les règles ! Grâce à ça on a le don de créer la vie ! C'est un sacrifice à prendre, une douleur à accueillir pour enfanter. Quelle belle connerie ! Un don mon cul, ça fait hyper mal !

Je me lève de mon lit, direction la salle de bain où j'avais rangé mes médicaments. La douleur me donne un coup de poignard dans le bas ventre. Le dos rond, je m'avance vers la salle de bain quand d'un coup je crois Evan qui vient de revenir de sa sieste. Il me regarde, sans comprendre ma position.

— Euh... Ça va ? Demande Evan.

— J'ai l'air de respirer la joie de vivre ? Je lâche sèchement.

— OK, OK... T'as quoi du coup ?

— J'ai mes règles DUCON !

— Je dois faire quoi alors ? Commence-t-il paniqué.

— Bouillotte, IBUPROFEN ! Je me lamente en gueulant.

— C'est où ça ?! Panique-t-il.

— Placard, salle de bain !

— OK, OK va dans ta chambre, j'arrive ! Bredouille-t-il en se précipitant dans la salle.

— T'arrives ?! Je m'écrie après m'être allongé.

— Je suis là ! Il crie en débarquant dans la chambre.

— Passe-moi ça... MY PRECIOOOUS ! Je soupire.

J'avale aussitôt mon médicament. Je me mets en boule le temps que la douleur se calme.

— Ça va aller ? Demande-t-il.

— Apporte-moi une bouillotte... Je demande calmement.

— OK... Dit-il avant de partir.

— Tiens. Il me tend la bouillotte.

— Merci... Je soupire.

— De rien. C'était... intéressant, cette facette de toi., rigole-t-il légèrement.

— Comment ça ?

— Je ne t'ai jamais vu t'énerver ou dire des insultes aussi mémorables que "Ducon".

— C'est une réf à Lucifer... Tu ne peux pas comprendre.

— Lieutenant Ducon ! Dit-il en imitant la voix de l'acteur Tom Ellis.

— Oh pétard ! Je m'exclame. Tu connais ?

— Bah ouais, elle est ouf cette série ! S'exclame-t-il à son tour.

— Je ne pensais pas que tu aimais.

— Il y a plein de chose que tu ne sais pas chaton..., sourit-il en commençant à me caresser la tête.

— Toi aussi..., répondis-je avant de fermer les yeux.

Son sourire s'est estompé, laissant place à un regard intrigué. Suite à ses caresses soudaines, je me suis aussitôt endormie. Mes douleurs se sont apaisées grâce à la bouillotte et au médicament. En espérant que demain, le saignement ne soit pas abondant. J'aimerais bien profiter de mon week-end ! Ça ne l'a pas dérangé que je lui crie dessus ? Ça me surprend. J'ai changé radicalement face à lui et à part être paniquée, il ne s'est pas braqué ou autre. Et ses caresses... Pourquoi ? Il y a de quoi faire flancher n'importe quelle fille avec ce geste !

Bon, ça fait longtemps que j'ai les yeux clos. Il serait temps que je me réveille. Je commence à ouvrir les yeux, je ne sens plus la douceur de mon lit. À la place, je sens quelque chose de piquant. Ça ne fait pas mal, au contraire. C'est plutôt la sensation serviette de toilette que je sens sous mes fesses. Je me redresse à l'aide de mes mains... Mais qu'est-ce qu'elle fout là cette serviette ? Elle n'y était pas hier ! Je me lève de mon lit, ça y est ça coule déjà... Je sors de la chambre, cherche Evan mais je ne vois personne. Dans sa chambre, non. Dans le salon, non. Salle de bain, non. Toilette, personne. Mon ventre se met à gargouiller. J'ai faim. Je me dirige vers la cuisine quand je le vois en face de moi. Dos à moi, tablier sur lui... Qu'est-ce qu'il fiche ?

— Evan ? Il se retourne face à moi.

— Oh ! T'es debout ? J'ai cherché sur internet des trucs à faire au p'tit déj pour les filles qui ont leurs règles.

— Et tu fais ça... pour moi ?

— Bah ouais. Hier j'ai regardé des vidéos de filles qui ont leurs... règles. J'ai vue aussi une vidéo qui les expliquaient. J'ai aussi vu des machines qu'on mettait sur des gars comme moi qui fait ressentir vos douleurs. C'était juste horrible ! S'exclame-t-il.

— Et tu as fait tout ça aussi parce que... tu t'inquiètes ? Si je me mets bien à ta place.

— Ouaip. Jamais j'aurais cru faire ça un jour, se plaint-il.

— Et t'as trouvé quoi sur internet pour le petit déjeuner ?

— Rien, mais je crois qu'il faut que vous mangiez beaucoup. Alors, je t'ai fait ça.

Je m'approche du plan de travail. Il a fait griller des toasts, dix au moins, qu'il a tartiné de Nutella. Une sonnerie me fait sursauter. Je me retourne, c'est le micro-ondes. Il m'a fait un chocolat chaud !

— Décale-toi, je vais sortir les pains au chocolat du four ! Se précipite-t-il.

— Nan...sérieux ? Dis-je en me décalant.

— Bah ouais, dit-il en les sortant du four.

— Evan ! Lâche ce gant ! Je crie aussitôt.

Je m'approche de lui, prends sa bouille d'hamster pour le rapprocher de moi et lui dit :

— T'es sûr que t'es pas malade toi ?

— Hein ? S'étonne-t-il. Pourquoi je le serais ?

— Tu n'agis pas comme ça d'habitude. Seulement en public, mais là, on est que tous les deux.

— Et... c'est un mal ? Demande-t-il.

— Non, juste louche venant de toi.

— La prochaine fois je ne ferai rien alors, je te laisserais agoniser. Lâche-t-il.

— Quoi ?

— Je rigole. Sourit-il en me tapant gentiment la tête. Bon, on mange ? Je n'ai pas fait tout ça pour rien ! S'exclame-t-il.

C'est la première fois que je me sens aussi proche de lui. Du vrai lui. Pas un mensonge. J'ai l'impression et j'espère que c'est sincère venant de lui. Cette part de lui attentionnée, me surprend mais ne me déplaît pas pour autant.

Après nous être préparés, Evan me dit qu'il nous a inscrit tous les deux à une randonnée dans la forêt. À ce moment-là, j'ai fait ma plus belle tête bizarre. Je n'aime pas trop la forêt. Enfin si, c'est joli, c'est vert, c'est grand... Mais il y a aussi les insectes ! Et eux, c'est les pires...

On se dirige tous les deux vers le moniteur qui nous accompagne pour l'activité. Il fait l'appel. Je remarque qu'Ambre est là. Malheureusement, les deux pots de colle de Kessy sont là, heureusement cette dernière, non. On reste attentifs jusqu'à ce que le prof commence à crier :

《C'est parti ! 》

Ça fait déjà trente minutes qu'on marche, je suis loin derrière. Les autres ne sont même pas épuisés, c'est inhumain ! Ou alors je suis déjà dans la phase "vieillesse" de ma vie. J'ai un point de côté en plus. Si je m'arrête, je suis perdue car je n'ai pas de carte. Je à m'arrête pour m'essouffler, mains sur les hanches. J'en peux plus, ralentissez ! C'est ce que j'aimerais crier si je n'étais pas à bout de souffle. Des pas courent dans ma direction, par automatisme je lève la tête. Evan, ses cheveux qui bougent dans tous les sens, ses joues rouges, la sueur qui coule le long de son cou. Il est entrain de courir vers moi ou je rêve ? Qu'est-ce qui me prend de dire le mot "rêve" ? Je me connais, je vais m'imaginer plein de film après et je vais l'idéaliser !

— Ça va ? Me demande-t-il essoufflé.

— Point de côté, mais ça va.

— Tu veux que je te porte ? Suggère-t-il.

— Hein ? Je m'exclame les joues rouges. Non t'inquiètes, pas ça va aller ! Je panique.

Avec ça et son comportement de ce matin, comment éviter de me faire des scénarios ? C'est impossible avec ce mec. Aussi attentionné malgré sa froideur du début d'année. Protecteur, serviable, gentil...
Je dois me le répéter encore et encore : nous deux, c'est du faux.

On marche un peu mais j'ai vraiment mal, Evan l'a senti comme je marche derrière lui. Le voilà qui se retourne :

— Bon ça suffit, je te porte. Dit-il soudainement.

Il s'accroupie devant moi puis dit :

— Aller monte ! M'ordonne-t-il.

Il est fou ? Il est épuisé, lui aussi, et il veut supporter mon poids en plus du sien ?

— Non, je ne montrai pas.

— Pourquoi ?

— Tu es fou, je suis lourde et t'es épuisé, alors relève-toi !

— Tu ne me laisses pas le choix alors...

Il se remet debout, face à moi, se penche légèrement pour me prendre par la taille. Me voilà sur l'une de ses épaules avec une vue sur son dos et... une vue imprenable sur son postérieur ! D'habitude je m'en fou, ça ne m'intéresse pas. Mais là, c'est les hormones qui parlent.
On rejoint les autres, je sens le regard d'Ambre sur moi. Le moniteur s'arrête, on se met tous autour de lui.

— Bien, on va faire plusieurs groupes de quatre.

— Je peux te parler ? Me demande Ambre qui est venue me voir, elle regarde Evan pour lui faire signe de partir. Seule..., précise-t-elle.

— OK. Répondis-je.

— Qu'est-ce que tu me veux ? Je demande enfin après qu'on se soit mise à l'écart.

— J'ai parlé avec Kessy, avoue-t-elle.

— OK, et ?

— Elle m'a dit que tu lui avais piqué son copain, Evan. C'est vrai ?

— Non. Ils ne sont plus ensemble.

— Donc, Kessy ment ?

— Oui, pourquoi je mentirais ?

— Je ne sais pas. Et elle t'embête ?

— Quoi ? Je ne comprends pas. Tu me soupçonnes de piquer son copain puis tu me demandes si elle m'embête ? Ça n'a pas de sens ou c'est moi ?

— Ouais pardon, c'était pour être sûre mais je n'ai pas confiance en elle t'inquiètes, dit-elle en partant.

— Ambre ! Je t'interpelle et elle se retourne. Je t'avais dit de plus me parler, t'as oublié ?

— Non, je n'ai pas oublié, dit-elle avant de partir.

Evan me rejoint aussitôt croisant Ambre qui commence à partir.

— Elle t'a dit quoi ?

Je m'apprête à répondre quand je vois le moniteur nous rejoindre suivie de deux filles, interpelle Ambre au passage et dit :

— Vous m'avez l'air proches.

— Pas du tout, dit Ambre.

— Mettez-vous avec ses deux filles, s'il vous plaît, la coupe-t-il.

— Je n'ai pas envie. se plaint Evan froidement.

C'est normal qu'il réagisse comment ça. Je pense pareil. Ces deux filles sont simplement : Anouck et Erika.

— Et bien Evan ? S'exclame le moniteur. Où est passé ton goût pour l'aventure ?

Je le regarde étonnée. J'avais oublié qu'il était déjà venu ici comme il a redoublé. Ambre commence à rire légèrement en demandant :

— Je suis curieuse, racontez-nous monsieur !

— L'année dernière ce petit Evan était un vrai aventurier. Rigole le moniteur. Ça lui arrivait même de grimper dans les arbres, un vrai gamin.

Je commence à pouffer de rire. Lui ? Faire le fou dans les arbres ? C'est totalement inimaginable quand on sait qu'il est souvent glacial.

Ambre quant à elle, rigole encore plus fort que moi. Et les deux filles, Erika et Anouck, restent de marbre. C'est dingue ! Elles paraissent beaucoup plus vides quand il n'y a pas Kessy. Lorsqu'elles sont avec elle, elles sont là à rigoler comme des poires et à se coller aux mecs.

Ça fait vingt minutes qu'on marche, c'est Ambre qui a la carte mais j'ai l'impression qu'elle ne sait pas où elle nous mène. Le but est de trouver une rivière et sur notre chemin comme indiqué avec des points fluos sur la carte, on devrait trouver des flèches. Mais jusqu'ici on n'en a trouvé aucune.

— Hey ! S'exclame Erika qui commence à voir route. Tu nous emmènes où là ?

— Oh la ferme, je fais ce que je peux ! Crie Ambre.

— Avoue que tu sais pas lire une carte ! Hurle Erika.

— Bah non, je ne sais pas ! Rétorque Ambre.

— Passe-moi la carte, au lieu de nous faire tourner en rond ! Ordonne Erika.

— Bah viens la chercher ! Provoque Ambre.

— Oh toi... ! Commence Erika en fonçant vers elle.

— Vous allez la fermer bon sang ! S'interpose Anouck en arrêtant Erika. Si vous continuez à vous engueuler on va finir paumés putain !

Moi et Evan, en retrait, on est sur le cul. Jamais je n'aurais pensé qu'Anouck s'interposerait.

— D'accord..., se résigne Erika.

— OK..., dit Ambre en passant la carte à la fille au teint chocolaté.

Tandis que nous marchions avec Erika en tête des commandes, je profite pour aller lui parler. Erika me regarde d'un mauvais œil alors que j'arrive mais détourne rapidement ses yeux vers la carte avant de dire :
— Je sais que tu ne nous apprécies pas Anouck, Kessy et moi. Ne viens pas me reprocher d'avoir interrompu ta rando romantique avec Evan.

— Je ne suis pas venue pour ça.

— Pourquoi alors ?

— Déjà, je ne t'apprécie pas forcément, oui. Mais je n'en sais rien, à vraie dire...

— —OK. Et ?

— En fait je suis surprise que tu saches lire une carte... Voilà pourquoi je suis venue.

— Ça te surprend ? Pourquoi ? Ce n'est pas parce qu'on traîne avec Kessy, qu'on s'habille comme des bimbos pétasses qu'on l'est forcément. On n'est pas des connasses nunuches pour autant.

— Je me suis basée sur des conneries pour vous définir, c'est ça ? Je demande aussitôt gênée.

— Juger par le physique ? Ouais, c'est ce que t'as fait. Mais bon, je ne peux pas te donner tort après la menace que t'a fait Kessy aux toilettes.

— Mouais...

— D'ailleurs, je me demandais. Commence Erika. Comment ça se fait que tu aies eu aussi peur ? Je veux dire que ce jour-là, on ne t'a pas fait grand-chose, il y a pire quoi !

— Je n'ai pas vécu des trucs toujours drôles avant et ce qu'il s'est passé a fait...

— Ressurgir des souvenirs du passé ? Termine-t-elle.

— Ouais, c'est ça.

— Désolée, s'excuse-t-elle en me regardant tristement.

— Sinon, d'où vient ton caractère ? Je ne t'ai jamais vu râler comme ça à l'université.

— Je suis la sœur de cinq frères, tous aussi stupides les uns que les autres et ma mère est trop épuisée pour s'occuper de leur éducation.

— Et ton père ?

— Il s'est barré, c'est un con ce type, lâche-t-elle.

— On arrive quand ? Intervient Ambre.

— Quand tu fermeras ta gueule ! Réplique Erika.

— Je l'ai assez fermé depuis ! Répond la brune.

— Au lieu de commencer une dispute, regardez devant vous ! Intervient Evan.

— Et toi, avance plus vite ! Mais attends... Quoi ? S'exclame Ambre en se souvenant de ce qu'il vient de dire.

Erika et Ambre se mit aussitôt à regarder devant elle. Face à nous, à quelques mètres de notre position, se trouve un vaste espace creux et en bas il y a le fameux lac. On a réussi ! Nous avançons au bord de la colline, et repérons au loin les autres.

— Bon. Soupire Anouck. On fait comment pour les rejoindre ?

— C'est maintenant que tu parles ? Souffle Ambre.

— Ne souffle pas à ma pote, rétorque Erika.

— Ça suffit, arrêtez de vous chamaillez ! J'interviens.

— Ça devient soûlant à force, confirme Evan.

— On peut essayer de passer par les arbres pour contourner la rivière. Je propose en pointant la direction du doigt.

— Et pourquoi on ne prendrait pas un chemin avec moins... de feuilles hautes ? Propose Anouck d'un air dégoûté.

— Ça va, tu ne vas pas faire ta chochotte. Puis, on a un aventurier avec nous ! S'exclame Ambre en taquinant Evan.

— Ne me soule pas avec ça ! Râle ce dernier.

— Bon, moi j'y vais ! S'exclame Erika déjà en train de partir.

Nous finissons par rejoindre les autres sans disputes. On a fait le reste du chemin avec le moniteur pour revenir au camp. Nous rentrons de la randonnée pile à l'heure du goûter, j'avais trop faim. Je n'ai pas compris pourquoi Ambre est venue me voir. Tant qu'elle ne revient pas m'embêter, ça va. J'imagine. Découvrir une nouvelle facette d'Erika me fait penser qu'elle n'est peut-être pas si méchante qu'elle en a l'air. Du moins, je crois et je l'espère. Je ne veux pas que son regard de tout à l'heure soit de l'hypocrisie. L'hypocrisie est réellement quelque chose d'horrible que je ne supporte pas devoir affronter. Car je le sais, je suis trop gentille, je pourrais tout excuser même si je sens que la personne est fausse avec moi. C'est l'un de mes points faibles d'ailleurs.

— Qu'est-ce qu'elle était soûlante à me taquiner avec ça ! S'exclame Evan lorsqu'il s'avachi sur canapé.

— Elle t'embête, ce n'est rien. Je rie en posant mon sac.

— Ouais ouais. À part ça, ce n'était pas si mal, concède-t-il finalement. D'ailleurs, vous avez parlez de quoi toi et la Black ?

— Erika ?

— Ouais, je crois. Je sais plus, je ne suis pas doué pour retenir les prénoms.

— Et bien.... Mais attends ! Tu te souviens de mon nom j'espère ?

Il fait mine de chercher.

— Je crois que j'ai oublié ! Avoue-t-il en rigolant.

— Menteur ! Je crie en le tapant.

— Hey ! C'est que tu fais mal pour une petite !

— —Comment ça je suis petite ? Je tape encore plus fort, cette fois-ci avec un oreiller.

— Hey arrête ! Arrête ! Rigole-t-il.

— Alors dit mon prénom ! J'ordonne.

Alors qu'il commence à prendre en main mes poignées il tombe, je me retrouve sur lui.

— Eileen. Dit-il aussitôt, essoufflé.

J'ai l'impression que mon cœur va sortir de ma poitrine et cesser de battre. Il m'a appelé par mon prénom, enfin ! Mes joues ont dû atteindre la touche maximale du rouge ! Notre proximité... On est si près. Je peux voir ses yeux, d'un marron intense, quelques éclats de bleu près de la bordure de ses iris. La bille noire au centre de son œil grossit. C'est hypnotisant. Il commence à tousser.

— Oh pardon ! Je me dépêche de dire en me levant maladroitement.

— Ce n'est rien, c'est ma faute, dit-il gêné.

— Je vais me coucher, je bégaie.

— OK, bonne nuit Eileen..., dit-il dans la lune, les joues légèrement rouges.

Je me mets aussitôt dans le lit, oubliant d'ôter mes vêtements. Je ne sais pas si j'oublierai aussi facilement ce qu'il s'est passé.

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