Jour 61

Ella a accepté. Je n'ai plus vraiment le choix maintenant. Alors je vais descendre. Et nous allons prendre ma voiture. Partir pour deux heures de route, et nous rendre dans ce village perdu. Dans ce cimetière si familier. Avec un peu de chance n'y croiser personne. Puis reprendre la route pour quelques minutes. Puis entrer. En espérant ressortir indemne.

***

J'ai acheté un bouquet de roses blanches, ses préférées. Elle en réclamait toujours, lorsque nous passions devant le fleuriste, dont elle connaissait la fille. Alors j'entrais, et je claquais la moitié de mon argent de poche dans des roses blanches, une à la fois. Et en sortant, elle s'asseyait sur le banc ornés de dorures que le gérant de la librairie chérissait tant, elle prenait la tige entre ses dents, et je capturais ces instants. La moitié de ma galerie, c'était elle. Mon angelot, ma petite pomme d'amour.

Nous avons marché jusqu'au cimetière, Ella tenant ma main serrée dans la sienne, nez dans son écharpe. Elle était belle. A tel point que je ne me suis pas retenu de l'embrasser. Peut-être parce que ça me donnait du courage, à coup sûr parce que je ne peux plus douter de mes sentiments pour cette femme.

Je connais sa tombe par cœur, cette pierre blanche où son nom, ses dates, et sa phrase favorite sont gravés.

« Tourne toi vers le soleil, et l'ombre sera derrière toi. »

C'était elle le soleil, qui chassait les ombres. Et moi sa Lune.

Je me suis laissé tomber à genoux devant elle, et j'ai déposé les roses une à une, autant que l'âge qu'elle aurait du fêter aujourd'hui. Vingt-et-une roses, et une photo. D'habitude, je ne reste que quelques minutes, puis je vais manger un beignet au chocolat, en buvant un frappé à l'ananas, notre goûter de toujours.

Mais aujourd'hui j'ai bien passé une demi-heure avec elle, et je lui ai parlé. J'ai raconté toutes ces choses que j'écris ici, tout ce qu'elle aurait du savoir, et je l'ai remerciée. Je l'ai remerciée parce qu'elle m'a apporté plus qu'elle ne m'a fait perdre. Et je me suis excusé. De ne pas avoir empli mon rôle jusqu'au bout, ce jour là et toutes les autres fois où elle a pleuré par ma faute, où elle m'a maudit. Et je lui ai dit combien je l'aime, combien je l'aimerais toujours.

Parce que le Soleil et la Lune ne se rencontrent pas souvent, mais que nous l'avons fait. Nous avons assombris le monde pour se trouver, puis nous nous sommes séparés pour éclairer la voie qui nous était destinée. Chacun de notre côté. Mais nous ne sommes jamais bien loin.

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