Chapitre 19

        Le crépuscule allait bientôt arriver. Les derniers rayons du soleil faisaient apparaître les couronnes dorées dans les yeux d'Allan. Ron ne les vit plus lorsqu'il ferma les yeux, savourant leur baiser dans le silence de l'école et de ses pensées. Ils se trouvaient dans l'aile droite du château, à une intersection et légèrement dissimulés par une alcôve. De grands vitraux leur montrant l'extérieur, mais ils étaient pour le moment bien trop occupés pour y faire attention. Les mains de Ron passaient sur le torse d'Allan, au-dessus de sa chemise. Alors qu'ils pouvaient s'habiller comme ils le voulaient, son petit copain lui avait fait plaisir en continuant à porter cette pièce de son uniforme. Il sentait ses formes sous sa main, la rondeur de ses pectoraux, la ligne qui les séparaient, le creux de son nombril. Son autre main se trouvait sur son dos, au-dessus des omoplates pour pouvoir continuer à l'attirer à lui. Allan, quant à lui, gardait les siennes sur son cou, maîtrisant ainsi leur baiser selon sa volonté. Posant finalement ses mains sur sa taille, Ron finit par se décaler en posant son front contre le sien. Dans cette position ils avaient l'impression d'être dans leur bulle, et cela devait être vrai car plus rien autour d'eux n'existait.

« J'ai peur pour Harry. »

       Allan lui fit un sourire compatissant, discret. Dans quelques heures le survivant passerait, en compagnies des autres champions, la dernière épreuve du Tournoi. Le rouquin ne se sentait pas bien, il avait l'impression qu'un poids étanche avait pris place dans sa poitrine, l'empêchant d'être serein. Allan passa alors sa main sur sa joue, le caressant doucement. Il tenta de le rassure d'une voix douce :

« Ça va aller, ne t'en fais pas. Il arrive toujours à se sortir des situations compliquées. »

        Ron pouffa un instant.

« C'est vrai, tu as raison. »

       Sa sensation n'avait pas disparu mais elle s'était quelque peu atténuée. Il observa Allan qui faisait de même et ne put s'empêcher de sourire. Il avait en lui une confiance presque surnaturelle qu'il ne pouvait qu'admirer. Il avait l'impression de réaliser régulièrement à quel point il l'aimait. Ce qu'il ressentait à son égard était si fort qu'il ne trouvait pas toujours des mots pour lui dire. Il détailla chaque partie de son visage, plus heureux qu'il avait un jour pu l'être en étant à ses côtés. Pouvoir lui tenir la main, l'embrasser et l'écouter faisaient partie des choses qu'il avait aimé dès le début et qu'il préférait le plus au monde. Il ne le remercierait jamais assez d'avoir insisté pour qu'ils se voient. Maintenant, depuis cette nuit dans les cuisines, Ron se sentait prêt à tout pourvu que ce soit avec Allan.

*

        Comme lors de la Coupe du Monde de Quidditch, Ron ne pouvait pas parler normalement en espérant qu'on l'entende. Pour discuter avec Hermione, il devait crier pour couvrir le bruit des acclamations. La foule était enthousiaste et il avait lui-même l'impression de réaliser complètement qu'il fait partis d'un évènement qui serait à jamais gravé dans l'Histoire. Il pourrait plus tard dire qu'il y était, qu'il avait tout vu et qu'il avait cru devenir sourd avec tout ce vacarme. Néanmoins le silence revint rapidement quand le professeur Dumbledore prit la parole.

       Ron observait Harry. A côté de leur professeur de défense, il ne paraissait pas fier. Plus petit que l'adulte et les cheveux en bataille, Harry ne payait pas de mine. Il portait son maillot aux couleurs de Gryffondor et tenait dans sa main sa baguette qu'il semblait avoir peur de perdre si on en croyait la blancheur de ses phalanges. Ron observa rapidement les autres champions et soupira. Le poids à son cœur ne disparut cependant pas.

       Allan lui prit la main et lui offrit un sourire réconfortant. Ron tenta de le lui rendre, sans succès, mais serrant tout de même sa prise sur les doigts de son petit ami. Il se pencha doucement vers lui afin de déposer délicatement ses lèvres sur les siennes, simplement. Quelques mots furent prononcés par leur directeur et le coup de canon résonna entre les montagnes. Ron déglutit avec difficulté et faisant un signe d'encouragement à Harry qui avait pendant un instant regardé ses amis. Quand il disparu alors de son champ de vision et que les haies du labyrinthe se refermèrent, Ron eut l'impression de ressentir la pression à son cœur de manière encore plus vive, presque brûlante.

        Alors qu'il tenait toujours la main d'Allan, une tête venant du gradin supérieur au leur se pencha vers eux. Il reconnut Padma qui leur souriait et qui leur demanda :

« Si c'est un de nos champions qui gagne, l'un de vous sera forcément déçu étant donné qu'ils sont dans nos maisons. »

       Visiblement elle ne lui en voulait plus pour le bal et Ron fut soulagé, bien que cela ne l'avait pas beaucoup tracassé. Ils échangèrent un regard avec Allan avant de lui répondre :

« On n'y avait pas vraiment réfléchis.

-Je serais content si c'est Cédric qui gagne, avoua Ron.

-Je serais content aussi si c'est Harry.

-Ce qui serait encore mieux c'est que les deux remportent le Tournoi, à égalité. »

       Les garçons approuvèrent et Padma retourna près de sa sœur. Allan plaça alors un bras autour des épaules de Ron et, s'installant un peu plus confortablement sur le banc, le Gryffondor se laissa aller contre lui. L'attente commença alors et elle lui parut interminable. Beaucoup criaient encore et discutaient avec enthousiaste, mais quelques groupes restaient silencieux, comme le leur. Il échangeait quelques mots avec Hermione ou Allan, parfois avec Neville et Luna qui se trouvaient sur le banc face à eux, mais la tension était trop palpable pour qu'ils puissent tous vraiment se détendre. Ron vit les jumeaux près de leur sœur et d'Hermione, Lee avec eux plus silencieux que d'habitude.

        Une étincelle rouge brilla dans le ciel, signe qu'un des participant abandonnait la dernière tâche. Ron vit Cho froncer les sourcils. Cette dernière se retourna un instant et leur regard se croisèrent. Ils n'échangèrent aucun mot, ni aucun signe particulier, mais ils se comprenaient. Tous les deux avaient une personne chère à l'intérieur de ce labyrinthe et tous les deux avaient peur pour cette personne. Les paroles d'Hermione prononcées un peu plus tôt lui revinrent en mémoire : « La dernière tâche est censée être celle qui vous mettra le plus à l'épreuve. Elle ne fera pas que tester votre intelligence ou votre endurance, elle fera les deux. Et elle ne fera pas que ça. ». Il déglutit avec difficulté et s'avachit un peu plus sur le banc.

        Puis après avoir eu l'impression d'attendre des heures -ce qi était sûrement le cas- une onde de choc surgit au milieu du cercle. Ron vit Harry, du sang sur le visage, une manche de son t-shirt déchirée, la peau sale. Le trophée, qu'il revoyait après ces longs mois, avait rebondit sur le sol, à quelques mètres du gagnant. Et Cédric, allongé près d'Harry. Immobile. Et tout se passa alors très vite.

       Le cri de Fleur fut le plus bruyant. Le silence de Cho fut le plus frappant. La précipitation d'Hermione fut l'élément déclencheur. Ron se leva à sa suite. Déjà une foule s'était formée, déjà il ne pouvait plus voir son meilleur ami. Allan lui tenait la main, agrippait ses doigts. Pas une seconde Ron ne songea à le lâcher. Il s'avança vers le groupe. Les professeurs les retenaient, Ron n'arrivait pas à le voir. Il commençait à l'appeler, il voulait savoir s'il allait bien, il comprenait que quelque chose de terrible s'était produit mais, plus terrible encore, comprenait qu'il ne pouvait pas encore en réaliser l'importance.

       La voix d'Harry fit naître le silence :

« Il est mort ! »

       Le poids à sa poitrine se serra et Ron croisa le regard d'Allan. Ce dernier ne serrait plus du tout sa main. Si elle se trouvait encore dans la sienne, c'était uniquement parce que Ron s'y accrochait. Il le prit alors dans ses bras, posa sa tête sur son torse tout en caressant ses cheveux. Allan ne réagissait plus.

        Puis tout se déroula alors très vite. Il y eut un mouvement de foule et Ron fut séparé du reste du groupe avec Allan. D'autres adultes débarquèrent et mirent en place un périmètre de sécurité. Le temps commença alors à défiler sans que Ron ne sache quoi faire. Il retrouva alors Hermione et ils se mirent à chercher Harry, la main d'Allan toujours dans la sienne. Ron paniquait. Il avait peur, terriblement peur, parce qu'il ne pouvait que supposer. Parce qu'il se retrouvait devant des faits, devant un corps sans vie d'une personne qu'il avait connu et même jalousé à un moment. Il serra d'autant plus la main d'Allan tout en continuant à chercher son meilleur ami. Le ciel s'assombrit d'un seul coup, recouvrant la nuit déjà présente de nuages plus noirs encore. Ron et Hermione virent alors le directeur partir vers le château, s'engouffrant par un passage qu'ils ne pouvaient emprunter. A cet instant, il ne réalisait pas encore que la suite serait bien pire à supporter.

       Bien pire car voir tous ces regards tristes lui étaient insupportables. Ron n'avait pas l'impression d'être sortis de la bulle qui l'avait emprisonné quand Harry été revenu de la troisième tâche. Il le voyait encore en pleure, en pleine crise, ne voulant pas lâcher Cédric. Maintenant, ils écoutaient tous Dumbledore qui annonçait le retour de Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom. Les heures étaient passées, les évènements aussi, et Harry avait tout raconté à Hermione et à lui. Ils avaient alors essayé de le consoler, mais, Ron le savait, seul le temps pourrait réellement l'aider. Depuis, une atmosphère qu'il n'avait jamais connue régnait dans le château. Même les écoles invitées semblaient avoir perdues de leur magie. Ron ne croisait aucun sourire, ne rencontrait aucune parole légère, n'avançait plus sans se soucier de ce qu'il y avait autour. L'air lui semblait lourd et il ne savait plus exactement combien de temps était passé depuis le tragique évènement.

        La salle de classe du premier étage les accueillait de nouveau, encore en pleine nuit. Peeves avait arrêté ses farces depuis... Ron serra Allan dans ses bras. Il détestait le voir ainsi. Cédric avait été l'un de ses amis. Pas le plus proche, mais il l'avait côtoyé tous les jours depuis sa rentrée à Poudlard, l'avait supporté lors des matchs de Quidditch, avait parfois longuement parlé avec lui sur des sujets communs et passionnant. Connaître ça à quatorze ans... Ron n'osait imaginer ce que devait ressentir Harry. Il serra son copain dans ses bras aussi fort qu'il le put, sachant déjà qu'il serait présent pour lui et pour son meilleur ami.

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