Chapitre 16

     Les marches de pierre ne lui avaient jamais parues aussi glissantes. Il avait l'impression qu'elles le poussaient vers le bas. Cependant Ron n'était pas si pressé de rejoindre la Grande Salle. Un poids avait pris place dans son estomac et il avait l'impression qu'un étau lui serrait la gorge. Ils avaient déjà, avec Allan, plus ou moins montrer quelques signes visibles depuis le jour de l'an, mais ils étaient restés relativement discrets. Les cours reprenaient aujourd'hui et il assumait devant tout le monde sa relation avec Allan. Néanmoins, cela restait théorique et il restait difficile pour lui de passer cette étape. Il ne doutait pas qu'une fois Allan à ses côtés tout serait plus facile, mais pour le moment il demeurait tout seul et il avait l'impression que le courage lui manquait. Mais sa volonté était toujours présente et Ron n'était pas décidé à abandonner Allan.

     Les portes de la Grande Salle lui apparurent bien vite. Il prit une grande inspiration et descendit la dernière marche -cette même marche d'où il s'était disputé avec Allan quelques mois plus tôt. Il aperçut Allan à sa table qui avait déjà commencé à manger et s'apprêtait à le rejoindre. Il n'avait qu'une vague idée de l'embrasser devant tout le monde mais ne put franchir les portes, bloqué par un Serpentard. Commençant à être habitué à le voir, Ron s'autorisa à soupirer bruyamment. Blaise n'en tint pas compte et lui fit remarquer d'un ton agressif :

« Ta maman sait que tu passes tes temps libres à embrasser des garçons ? C'est bizarre, on n'a pas encore vu de beuglante à la table des Gryffondor. A moins qu'elle accepte, ce qui vous rend tous encore plus humiliant. »

     Ron était rouge, comme souvent mais cette fois la colère coulait dans ses veines. Ce n'était pas la même colère que lorsque ses frères l'embêtaient ou que les lions perdaient pendant un match de Quidditch. Ça ne se rapprochait même pas de celle qu'il ressentait quand sa mère l'accusait injustement d'une bêtise qu'il n'avait pas faite. Ce garçon stupide s'en prenait à lui mais aussi à toute sa famille et il ne pouvait pas le supporter. Serrant les poings, il le regarda sans cligner des yeux, sa fureur naissante dans ses pupilles. Il sentait les cheveux sur sa nuque se hérisser.

« Occupe-toi de tes affaires, Zabini.

-Tu ne sais pas t'occuper des filles, c'est pour ça que tu t'occupes des garçons ? Et d'un Poufsouffle en plus, il doit être content d'avoir un peu d'attention le blaireau. »

     Ron n'eut pas le temps de réagir -et Merlin seul savait comme il en avait eu envie ! Zabini était soudain tombé en avant, poussé par Allan qui avait visiblement entendu ce qu'il lui avait dit. Le Gryffondor recula de quelques pas, trop surpris pour réagir. Son copain venait de se jeter sur le Serpentard et lui donnait à présent un coup de poing au visage. Mais Zabini ne se laissa pas faire et empoigna Allan pour le retourna et le frapper à son tour. Ron voulait s'y mêler mais les deux garçons n'arrêtaient pas de bouger. Beaucoup d'élèves commençaient à se rassembler autour d'eux, également des élèves de Beauxbâtons et de Durmstrang. Alors qu'Allan lui donnait un coup dans les côtes, le professeur McGonagall apparut, le regard horrifié. Elle donna un coup de baguette et sépara les deux adversaires.

« Seraient-ce là des manières de se comporter ? »

      Même Zabini n'osa rien rétorquer face au ton glacial de leur professeur.

« J'enlève cinquante points à Serpentard et à Poufsouffle pour ce comportement plus que déplorable. »

      Son regard se posa sur Ron qui devina ce qu'elle allait dire avant même qu'elle n'ouvre la bouche.

« Je suppose que vous n'y êtes pas pour rien. Vingt points en moins pour Gryffondor, et estimez-vous heureux que je ne vous en enlève pas davantage. »

      Ron n'aurait de toute façon rien rétorqué, trop anxieux de voir le nez d'Allan en sang.

« Il y a d'autres moyens que la violence pour régler les conflits, vous devriez le savoir. Et voir un professeur quand on a un problème n'est pas exclu, jeunes hommes. Vous me décevez beaucoup, j'en attendais plus de votre part. »

      Elle tourna les talons en ordonnant à Ron d'accompagner Allan à l'infirmerie et ne leur accorda plus un regard. Ron s'approcha d'Allan, croisant le regard horrifié d'Hermione et inquiet d'Harry. Il prit délicatement le bras d'Allan qui se laissa faire alors qu'il n'avait visiblement pas besoin d'aide, et se dirigeaient vers l'infirmerie. Il saignait du nez et gardait la tête tournée vers le haut afin de stopper le flux sanguin. Il avait également la joue rouge et Ron devinait la formation d'un bleu à sa pommette.

« Par Merlin, vous n'avez pas dû vous faire ça en tombant dans les escaliers ! »

      Madame Pomfresh, à leur arrivée, n'avait pas attendu une seconde pour se précipiter sur eux. Les conduisant à un lit, elle sortit du tiroir dans la table de chevet à côté différents produits à appliquer. Elle ferma les rideaux autour du lit d'un coup de baguette magique et, apportant un tabouret de la même façon, pris place face au Poufsouffle. Ron s'était assis à côté d'Allan sur le lit, lui tenant la main pour lui apporter son soutien et parce qu'il ne supportait pas de le voir comme ça.

« Attention, ça va piquer un peu. »

      Madame Pomfresh prononça une formule magique et Allan redressa soudainement la tête. Le sang avait arrêté de couler. Elle entreprit de nettoyer le sang séché avec une compresse et un liquide violet dessus et posa une poche de glaçons sur la joue endoloris du jeune homme qui l'avait pris dans sa main. Ron vit son regard s'arrêter sur leur mais liées et, alors qu'elle continuait d'enlever le sang séché avec des gestes doux, elle soupira :

« C'est à croire que les intolérants ne cesseront jamais d'exister. »

      Ron, ayant l'habitude de cette déduction rapide avec Hermione, n'était pas étonné de voir qu'elle avait tout compris. Allan, lui, semblait surpris. L'infirmière continua :

« Je souhaite bon courage aux tolérants pour continuer à les accepter.

-Pourquoi on devrait être tolérants envers eux ? s'insurgea Ron.

-Tu continuerais à te dire tolérant si tu ne l'es pas avec tout le monde ? »

      Le jeune homme préféra mûrir ces paroles que de se lancer dans un débat avec l'infirmière. Elle se leva alors et rassembla son matériel.

« Et comment les faire changer si vous agissez envers eux comme ils agissent envers vous ? »

     Allan et Ron échangèrent un regard alors que l'infirmière ouvrait les rideaux et donna au Poufsouffle une mixture à appliquer tous les soirs sur ses bleus, puis elle se dirigea vers le nouveau venu, Zabini aussi était venu se faire soigner. Ils passèrent devant eux en sortant de l'infirmière, remerciant madame Pomfresh et ignorant le Serpentard.

      Arrivés au point fatidique où ils devaient se séparer, rejoignant chacun leur cours, Ron prit Allan dans ses bras, délicatement pour ne pas lui faire mal.

« On parlera après les cous. »

      Son copain hocha la tête et ils se séparèrent.

*

      En revenant en cours, Hermione avait presque sauté sur lui pour lui demander si tout allait bien. L'ayant rassuré du mieux qu'il le pouvait, elle continuait pourtant toujours lors du déjeuner. Ron ne mangeait pas de bon cœur et la vue d'Allan le décida à arrêter tout de suite le gâchis. La joue du Poufsouffle n'était plus rouge mais bleu et Ron aurait bien donné tout son argent de poche pour assommer Zabini. Il le vit accompagner son amie de Serdaigle et Hannah Abbot à leur table avant de se diriger de nouveau vers la sortie. Juste avant il se tourna vers Ron qui s'était déjà levé et lui fit un signe de la tête pour qu'il le suive.

      Ils se retrouvèrent dans le parc, profitant du froid qui faisait fuir tout le monde. Ils s'arrêtèrent près d'un mur du château afin de s'y adosser.

« Je ne veux plus qu'il se passe quelque chose comme ça. »

     Allan hocha la tête, visiblement d'accord avec lui. Ron posa délicatement sa main sur sa joue valide et, sous ce contact, Allan ferma les yeux. Il lui caressa la peau avec son pouce, détaillant ce visage qu'il aimait tant.

      Quand Allan rouvrit les yeux, Ron reprit :

« Si on le révèle, ça va comporter des risques de ce genre. »

     Le Poufsouffle soupira, visiblement d'accord avec lui.

« Y'a déjà eu des comme nous, avant ? »

      Allan avait surtout dit cela pur détendre l'atmosphère. Ils réussirent à sourire et Ron le prit dans ses bras. Il comprenait qu'il n'ait pas envie d'en parler, il refusait qu'on ose lui faire du mal. Il l'embrassa tendrement, essayant de lui transmettre par ce contact tout l'amour qu'il ressentait pour lui.

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