Chapitre 12

Sehun poussait rageusement la porte de sa chambre, ne prenant pas une seule seconde pour admirer le luxe dans lequel il venait de tomber. I attrapait sans attendre l'un des nombreux oreillers qui décorait son lit et le lança au travers de la pièce. L'oreiller alla s'écraser contre la vitre sans pour autant calmer sa colère grandissante.

– Bordel, il m'a oublié.

La douleur qu'il avait ressenti avait été si puissante que son corps en avait tremblé. Non, il n'avait pas prévu que ses retrouvailles avec Luhan se passeraient ainsi. Il n'avait pas non plus prévu que celui-ci le regarde avec tant de mépris, comme s'il s'agissait d'un vulgaire étranger, un animal, une bête de foire.

Sehun avait mal. Il souffrait. Luhan avait brisé leur seule et unique promesse : ne jamais s'oublier.

Foutaises.

– Il m'a oublié, il m'a oublié, répétait sans cesse le noiraud en décoiffant, avec colère, ses cheveux.

Sa vie entière n'avait été qu'un bien triste morceau de douleur et de moments difficiles. Lui qui pensait avoir avancé et mis toutes ses peines de côté, se sentait à nouveau submergé.

Ses mains tremblaient tant. Il se sentait faible. Sa meute lui manquait, son campement lui manquait, son territoire lui manquait, ses amis lui manquaient.

Ici, Sehun était seul. Et pour la première fois de sa vie, il détesta cette solitude.

Réalisant alors que plus personne n'était là pour veiller sur lui. Il se laissant tomber assis par terre, collant son dos au mur et ramenant ses genoux au menton. Doucement, il autorisa ses peines à le submerger. Il avait subitement le mal du pays, tout ici était bien trop différent, il n'était pas à sa place. C'était la tâche noire, agressive et vive, sur le doux et léger tableau blanc. Il essuya du revers de mains une traîtresse larme et leva le regard vers la grande fenêtre, les sourcils légèrement froncés et, dans les prunelles, une lueur accusatrice.

– Je ferai en sorte que tu te souviennes de moi.

C'était une promesse qu'il se portait à lui-même. Une volonté qu'il s'engageait à tenir. 

On vint alors toquer à la porte, annonçant l'heure du dîner auquel il était, bien évidemment, convié. Traînant des pieds dans les couloirs, Sehun arriva devant une grande porte de bois. Il n'avait aucune envie d'y aller.

Luhan ne lui avait pas montré la pièce où ils devaient manger, guidé par son instinct et l'odeur qui émanait de la pièce. Sehun s'était retrouvé, sans trop savoir, aux cuisines. Légèrement, voir complément perdu, le noiraud avait finalement demandé de l'aide à un domestique qui passait par là.

Le domestique rigola doucement et demanda à l'invité de le suivre. Enregistrant le chemin à prendre, Sehun découvrait avec surprise les dessins qui ornaient murs et plafonds, félicitant muettement les artistes qui avaient dû durement travailler pour offrir de tels résultats. Les fresques étaient vraiment belles.

– C'est ici que vous trouverez le Roi et le jeune Prince, annonça le garçon avant d'aussitôt s'éclipser, laissant Sehun seul face à une grande porte décorée d'arabesques en or.

Un soupir s'échappa de ses lèvres et il entra à contre cœur. Il réalisa, sans grande surprise, qu'il était en retard.

– Sehun te voilà ! s'exclamait Leeteuk à son attention. Luhan ne cessait de dire que tu n'avais pas faim mais j'étais certain que tu nous ferais l'honneur de ta présence. Viens donc t'installer !

Le noiraud posa son regard sur le blondinet, plissant les yeux. Qu'est-ce que Luhan gagnait auprès de son père en mentant ? Pourquoi avait-il dit qu'il ne viendrait pas ? Le détestait-il à ce point ?

Sans rien dire, Sehun tira une chaise et s'installa face au jeune Prince. Un silence de mort régnait dans la pièce, les couverts claquaient sur la table et Luhan se leva subitement.

– Je vais me coucher. Je n'ai plus faim.

Et il partit. Sans même attendre une réponse de son père. Leeteuk soupira, attirant la curiosité de Sehun qui faisait tourner les morceaux de viande dans son assiette. Le noiraud était très surpris par la quantité de nourriture qui trônait sur la table, certainement plus qu'il n'avait jamais mangé en une seule année.

Le regard du jeune Hwajae s'attarda ensuite sur la mine peinée qui décorait le visage du chef de la meute voisine. L'attitude de son fils semblait fortement l'attrister, à croire qu'il n'existait aucune complicité entre les deux. Intrigué, Sehun ne put s'empêcher d'aborder le sujet :

– Ça ne semble pas aller fort entre vous et votre fils.

Un énième soupir s'échappa des lèvres du grand homme, il posa ses couverts et essuya sa bouche avant de poser ses coudes sur la table, regardant avec sérieux le noiraud.

– C'est comme ça depuis maintenant sept ans... Le décès de sa mère l'a changé.

Les yeux de Sehun s'arrondirent tandis qu'il regardait subitement autour de lui. Il se sentit alors aussitôt gêné de ne pas avoir réalisé qu'ils n'étaient que trois à table.

– Lorsqu'elle a été emportée par la maladie, Luhan n'a plus supporté rester ici à avancer sans elle. Ils étaient très complices et sa mort a été un choc pour le jeune enfant qu'il était. Il a alors fugué, durant un an nous l'avons cherché, remuant de fond en comble nos terres. Sans jamais le trouver.

Sept ans auparavant... Les battements du cœur de Sehun s'affolèrent.

– Il s'était enfui sur votre territoire, lorsque nous l'avons retrouvé... Il n'était plus le même. Mon fils chéri était mort, il était devenu froid, hautain et insupportable avec moi. Il me déteste très certainement, Leeteuk en souriait tristement. Je sais qu'il est toujours là, quelque part. Luhan est encore un enfant, un enfant de dix ans perdu dans un corps de dix-neuf ans. Il souffre sans rien dire. Je pensais qu'en le promettant à Minhyuk... il trouverait le bonheur ? Puis il y a eu le Tirage et depuis tu es devenu mon seul espoir de ramener Luhan.

Sehun semblait réfléchir. Jamais Luhan ne lui avait parlé de sa mère, de son père, ni même d'où il venait. Ils s'étaient tous les deux rencontrés par hasard dans la forêt et Luhan avait été là pour l'aider à surmonter la perte de sa famille. Peut-être qu'au travers de Sehun, Luhan avait essayé de se soigner lui-même ?

– Qui est ce Minhyuk ?

– Vois-tu... Les Hwajae ne sont pas la seule meute à avoir prôné sa liberté. Récemment un autre groupe est parti plus au nord afin de former une nouvelle meute. Étant le fils de leur meneur, Minhyuk faisait un parfait prétendant auprès de mon Luhan pour créer des alliances avec ce nouveau groupe. Le Tirage lie les Hwajae aux Angae. Mais rien ne nous lie à cette nouvelle meute encore sans nom.

Il porta à sa bouche un morceau de viande rouge tout en regardant le noiraud.

– Disons qu'il s'agissait d'un choix purement stratégique. Et Luhan ne s'y était nullement opposé. Nous ne sommes pas proches, mais jamais il n'a déshonoré mes choix. C'est bien pour cela qu'il ne veut pas de toi. Il sait que cette nouvelle meute peut rapidement devenir une menace et que s'y lier protégera considérablement nos frères et sœurs Angae.

Sehun baissa la tête, Leeteuk n'avait pas tort. Il comprenait peut être un peu plus l'attitude désagréable que Luhan entretenait avec lui.

– Mais si tu es là. C'est que tu es celui qui rendra plus heureux mon fils que quiconque. Le lien d'âme sœur est puissant. Et même si Luhan se bute, il finira par accepter. Laisse lui le temps de comprendre que tu es sa perle rare.

– J'essayerai.

– Tu as deux mois devant toi. Fais au mieux.

Sehun leva un sourcil avant de baisser la tête en direction de son assiette. C'était donc ainsi que les choses se passeraient ? Tout dépendrait de lui et de sa volonté. Il tiqua, encore de lourdes responsabilités qui lui tombaient sur le dos sans qu'il n'ait rien demandé.

Remarquant la gêne de son invité, Leeteuk changea rapidement de sujet.

– Veux-tu de la tarte en dessert ?

Le noiraud posa ses sombres prunelles sur les fruits couleur sang qui composaient la pâtisserie. Son cœur se serra une nouvelle fois et il ne put que se sentir que plus mal. C'était trop, il voulait définitivement partir de ce territoire.

– Excusez-moi, je déteste les tartes aux fraises. 

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top