"Les moins de vingt temps ne peuvent pas connaître"


Une, deux, trois, ...

... Quarante-neuf, cinquante... 

... Cent!

Il lacha, épuisé, la barre de traction. Il s'allongea sur le dos, au sol, bras en étoile. Il transpirait, il n'en pouvait plus. Sa respiration, alletante, emplissait sa chambre.

Isaac souffla un coup et se releva subitement. Prenant ces habits, il alla prendre sa douche. Une fois terminée, il quitta l'immeuble. Armée de son chapeau, de sa chemise bleu et de sa veste semblable à celle d'un garçon de café, il marcha jusqu'au café Le Canard rouge. Il se trouvait dans une petite ruelle peu touristique mais pourtant follement attirante. Elle avait concervé ces airs des années 20, un brin bucolique et romantique. Les immeubles étaient tous en pierre. Les volets colorés qui arboraient fiérement leur parure végétale attiraient les oiseux chanteurs. En bas des habitations, on pouvait trouver, par là un barbier utilisant toujours des ciseaux, par ici une bouquinerie. Le propriétaire qui la gérait depuis bientôt cinquante ans n'hésitait pas à parourir la rue, poussant une brouette débordant de livres, pour les offrir aux passants ravis. Deux cafés-restaurant partageaient gaiement la clientèle. Ils ne se l'avouaient pas, mais l'homme qui s'occupait du Canard rouge et la femme du Toto, s'aimaient. Les habitués tentaient de le leur expliquer. Mais tous deux, la soixantaine passée, étaient bornés et ne se laissaient pas convaincre. Ils préféraient garder le souvenir de l'instalation du café d'Evelyne en face de celui de Jacques il y a trente ans de celà. Leur guerre avait commencé dès ce jour. La concurrence était rude, se jouant à coup de rats lâchés parmis les clients chez l'un, et à coup de tonneaux de bière percés chez l'autre. Biensûr, chacun d'eux riaient le soir en repenssant aux supercheries mise en place, autant celle du coupable que celle de la vengeance de la victime. Ils jouaient à se chamailler. Tous les clients s'amusaient de leur bêtise. Ceux-ci avaient vite compris qu'Evelyne et Jacques s'aimaient plus qu'ils n'osaient l'admettre. Et ce jeu continuait depuis 1980. Pour être inventif, ils l'étaient!

Isaac pénétra dans Le canard rouge, la joyeuse terrasse étant pleine.

- Bonjour Jacques! salua-t-il gaiement.

- Hey! Salut Fiston! ils se serèrent dans leur bras un instant. Attends deux minutes. Charlie!! Va chercher notre commande de graine de café qui a si mystérieusement disparue! s'écria Jacques.

- Evelyne, c'est ça? rit Isaac.

- Evelyne... Enfin bon, dis moi, ça fait longtemps que tu n'étais pas venue, il va falloir que tu te fasses pardonner! sourit le vieil homme, inspirant dans sa pipe puis laissant échapper une bouffer de fumer.

- Oui chef! s'exclama Issac, la main contre sa tempe, en signe militaire.

- Minot, va. Tu viendras ce weekend m'aider au café? Il va faire beau et il y aura du monde. Et puis pour prendre la relève, il faut bien que tu pratiques!

- Encore ta foutue idée que je prenne la relève? Je ne sais pas Jacques... Je ne me vois pas servir des cafés toute ma vie.

- Et mais... C'est bien plus que ça! Je sais que ce n'est pas ça qui te tracasse dans cette histoire, précisa Jacques avec son air sérieux.

- Un Death Wish, s'il-te-plaît, demanda Isaac ignorant les parole de Jacques.

- Tu veux mourir ou quoi? Toujours aussi adict... C'est pas bon pour ton corps, tu le sais ça. Et puis je ne fais pas de cette merde dans mon café, donc vas chercher ailleurs si tu en veux.

- Alors fais moi un café aussi fort.

- Tu me fera mourir... Jacques obtempéra finalement et lui servit un café des plus forts. J'ai compris que tu cherchais à éviter notre discussion, gamin, mais la prochaine fois, tu vas y passer.

- La prochaine fois, oui... songea Isaac.

- Alors, ton nouvel appartement? changea de discussion le fumeur.

- Bien.

- Mais encore? Jacques pris un air exaspéré.

- La voisine est divertissante.

- J'aurais préféré ne pas te poser cette question, gémis Jacques en se bouchant les oreils.

- Mais non! Pas dans ce sens, rit Isaac face à la pureté du papi. Divertissante, dans le sens intriguante, tu vois? Distrayante quoi...

- Fait attention à elle. Je te connais, petit.

Un silence s'en suivit, lourd de sens et de non-dis. Isaac s'enfila son café d'une traite, sous le regard lourd de Jacques. La café qu'il lui avait fait n'était tout de même pas léger léger... Isaac devrait réellement se calmer sur la dose de cafeïne qu'il ingurgitait.

- J'aime cette rue. Pourquoi la vie ne peut-elle pas être partout comme ici? Tu sais, sans toute la grisaille qui émane de cette société de consommation. Comme avant. Cette rue c'est Avant. Avant que l'homme ne se détourne des plaisirs simples de la vie.

- Je sais Isaac... Mais dis-toi une chose. Peut-être que tu ne réaliserais pas le bonheur d'être dans ce lieu, un peu comme hors du temps, si c'était partout pareil. Tu sais ce qu'est la joie parce que la tristesse existe, non? C'est la même chose. Cependant, je dis ça comme si ailleurs était triste. Mais c'est faux, ça peut être plein de surprise et de bonheur.

Jacques reprit:

- Et puis, la vie n'a pas toujours était facile ici, tu le sais mieux que personne.

Tout deux se fixèrent du regard. Puis Isaac, d'un pas hésitant, quitta Le Canard Rouge. Jacques recommença à faire le tour des tables et à discuter joyeusement avec les clients, bien qu'il les considéra davantage comme des amis. 

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Une bouteille... Le contenu d'une bouteille d'alcool fort était entré dans son estomac. Cela faisait longtemps. Ça n'était pas de l'alcoolisme, loin de là. C'était juste un besoin de décompresser, d'oublier un instant, rien qu'un instant.

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Sol se réveilla en sursaut. Elle ne sut pas pourquoi. Autour d'elle, tout était silencieux. Elle remarqua, dans la pénombre, Marcelin l'observer de ses yeux brillants. Il ne dormait pas lui non plus... Elle tendit l'oreil afin d'entendre un éventuel bruit, mais toujours rien. Bon... Elle entendit finalement un ronflement profond provenant de chez le voisin. Sol eut un petit sourire au lèvres. C'était celà qui avait dû la réveiller.

Le réveil indiquait 03h24 du matin. N'étant plus du tout fatigué, elle décida d'aller à sa fenêtre. Assise, elle observa la rue vide et sombre. Quelques lampadaires clignotant luttaient pour ne pas s'éteindre. Elle remarqua, surprise, que chez le voisin d'en face la lumière était allumée. Elle espéra qu'il sortit à la terrasse. Celà faisait longtemps qu'elle ne l'avait pas vu. Il lui manquait. L'espace qui séparait les deux immeubles n'étaient pas bien large, seulement sept métres. Sol eut alors l'idée de lancer quelque chose à sa fenêtre pour qu'il l'entende et vienne à la terasse. Puis elle se ravisa, jugeant qu'elle allait sans doute le déranger, et qu'il ne devait pas avoir envie de la voir. Elle ferma finalement sa fenêtre, et se recoucha. 




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