Chapitre 46 - Plus jamais seule
Point de vue de Gabriella
Mon cerveau a bugué. Papa n'est pas mon père biologique et quand j'y pense, pas mon père du tout au vu de son comportement envers moi. Même si je le comprends mieux, il n'en va pas de même pour le reste. Comment peut-il m'en vouloir pour une chose dont je ne suis pas responsable? Et si j'ai bien compris, il a aussi fait un gosse de son côté... qui n'est même pas de mon sang mais bien de celui de Christophe. Encore et toujours Christophe. Je sais que je ne devrais pas lui en vouloir, il est victime autant que moi mais je ne peux pas m'empêcher de le jalouser. Il n'y a que lui qui existait pour eux et maintenant il a une demi-sœur en plus tandis que je me retrouve seule. Je ne pourrai même pas connaître mon vrai père puisqu'il est décédé. Christophe et sa demi-sœur ont de la chance d'un côté, ils ont encore leurs deux parents alors que je n'en ai plus. Je sais que maman n'est pas morte mais c'est tout comme, elle a tout fait pour depuis plus de vingt ans.
La conversation continue autour de moi mais je n'entends pas ce qu'ils disent, je ne veux plus entendre leurs conneries. Mon cerveau s'est mis en mode vacances. À un moment, je sens qu'on me prend et qu'on me fait bouger. Je sens l'air frais sur moi, ça me reconnecte un peu avec la réalité mais ça ne suffit pas à me réveiller entièrement. Ça doit être un cauchemar, ce n'est pas possible autrement. On me dépose sur ce que je suppose être un siège et j'entends le claquement d'une portière suivi quelques secondes après par une autre. Quelqu'un prend ma main et la serre fort. Aucun mot n'est prononcé. De toute façon, je ne répondrais pas donc c'est inutile. Après un temps qui me paraît être une éternité, la voiture s'arrête enfin. En tant normal, je me serais probablement endormie mais je suis tellement sous le choc que je me suis contentée de regarder par la fenêtre.
- Ma chérie...
Je reconnais cette voix. C'est Logan. Je tourne ma tête vers lui et je le vois soupirer. Il a l'air un peu soulagé mais de quoi? Mystère.
- Ma chérie, on ira plus jamais là-bas, tu n'auras plus à supporter tout ça, je te le promets, me dit-il doucement.
Je me faufile dans ses bras. J'ai besoin de sa chaleur. Je sais qu'il en me laissera pas. Il est ma famille maintenant.
- Dis quelque chose, je t'en supplie. Parle-moi, murmure-t-il.
- Je t'aime.
C'est tout ce que je trouve à dire. Je le sens resserrer son étreinte, c'est juste ce dont j'ai besoin en ce moment.
- Je t'aime aussi ma belle. Plus que ma vie. Si on rentrait chez nous?
J'acquiesce mais je ne quitte pas ses bras. Je l'entends rire.
- Ça ne va pas être facile dans cette position. Tu te sens capable de marcher?
- J'ai peut-être bugué mais mes jambes fonctionnent encore, dis-je en souriant.
- Je te préfères comme ça que complètement amorphe pour être franc. Viens, on y va. On sera mieux là-haut.
Il sort de la voiture et vient rapidement m'ouvrir la portière. Je sors et j'en profite pour attraper sa main et ne plus la lâcher. Elle me maintient dans la réalité. Ma réalité. Le trajet jusqu'à l'appartement me paraît durer une éternité et pourtant il ne doit pas durer plus de quelques minutes. Une fois arrivés à bon port, nous enlevons nos vestes et je vais m'asseoir dans le divan. Logan est parti faire je ne sais quoi. À vrai dire, ça m'importe peu à cet instant. Tout ce qui compte est que je sois là où je me sentes en sécurité. Je regarde autour de moi. Mon premier chez moi, mon cocon. Rien n'a changé ou presque depuis que j'ai emménagé. C'est le premier endroit où je me suis sentie libre, heureuse. C'est ici que j'ai commencé à correspondre avec Logan. C'est ici que ma véritable vie a commencé. Elle a démarré en douceur avec mon stage au centre pour véritablement débuter quand Logan est venu vivre avec moi. Je ne peux m'empêcher de sourire à cette pensée. Envoyer cette première lettre a été la plus belle chose qui me sois arrivée. Qui aurait dit qu'elle m'aurait amenée là où j'en suis?
Logan arrive avec un regard interrogateur. Il ne devait pas s'attendre à me voir sourire après la soirée que nous venons de passer.
- Qu'est-ce qui te fait sourire? me demande-t-il.
- Je repensais à cette première lettre que j'ai écrite, ici dans cet appartement.
- Je suis bien content que tu l'ais écrite d'ailleurs. Figure-toi que j'ai failli ne pas la lire, me dit-il en riant.
- Alors que j'avais mis tant de coeur à l'ouvrage? T'aurais pas osé quand même? lui dis-je en lui tapant sur l'épaule.
- Et bien, j'étais sur le point de la mettre à la poubelle quand je me suis dit que ça ne m'engageait à rien de la lire. Elle a donc eu chaud.
- Et maintenant, ce serait à refaire, tu la jetterais ou tu la lirais?
- Je la jetterais évidemment. Je m'ennuie trop avec toi, me dit-il hilare.
- Très bien, puisque tu t'ennuies autant, tu vas pouvoir tester le confort du divan, lui dis-je mutine.
- Tu n'oserais pas hein? me dit-il tout penaud. Regarde, je t'ai amené Éléphant pour te réconforter.
Je prends ma peluche et la serre dans mes bras. Quand je le regarde, je ne peux m'empêcher d'éclater de rire. Vous auriez vu sa tête de cocker, à mourir de rire.
- J'ai trop besoin de toi mon cœur. Viens là, lui dis-je en ouvrant mes bras.
Il ne se fait pas prier et fonce sur moi avant que je ne change d'avis. Nous restons enlacés pendant un bon bout de temps. À l'instant où je pensais qu'il était tombé endormi, il a repris la parole.
- Moi aussi j'ai besoin de toi. Tu ne sais pas à quel point. Tu es arrivée dans ma vie juste au bon moment. Tu m'as permis de remonter en selle et de remettre ma vie sur des rails.
- Finalement, je pourrai dire merci à l'armée. S'il n'y avait pas eu ce nouveau programme, on ne se serait jamais connu.
- Tant qu'on y est, tu peux remercier Julien aussi. C'est lui qui faisait le facteur, me dit-il en riant.
- Si tu continues comme ça, on va devoir remercier l'inventeur du papier, du stylo et des enveloppes, lui répondis-je hilare.
- Exactement.
Il se redresse et me regarde droit dans les yeux. Nous éclatons de rire devant tant d'absurdités. Ça fait du bien. Encore une fois, il est là pour moi. Je me rends compte à cet instant que je ne serai plus jamais seule. Tant qu'il sera à mes côtés, je pourrai vaincre les obstacles qu'on mettrait sur ma route. En parlant des points négatifs, le souvenir de la soirée revient me hanter et j'ai beau être avec l'homme que j'aime le plus au monde, il me manque deux personnes pour guérir de mes blessures. La première doit d'abord panser ses propres plaies avant de m'aider avec les miennes mais pour la seconde...
- Tu crois que Franck pourrait venir?
- Pourquoi mon cœur?
- J'ai besoin de lui.
Il ne me demande rien de plus et appelle Franck. Heureusement il n'habite qu'à une demi-heure d'ici sinon je ne me serais pas permise de l'appeler. Enfin, je l'aurais fait un peu plus tard disons.
- Il arrive tout de suite. Je lui ai quelque peu résumé la situation et je n'ai même pas eu à lui demander quoi que ce soit. Il a décrété qu'il partait immédiatement.
- Ce n'est pas un militaire pour rien, lui répondis-je avec un sourire.
- Un problème avec les militaires? me demande-t-il suspicieux.
- Non non aucun.
Il se jette sur moi et m'embrasse tendrement. Ses mains frôlent mon corps et me donnent des frissons partout. C'est avec lui que j'ai découvert l'amour et il ne cesse de me surprendre. Chaque jour me montre une autre facette de lui et de ses caresses. Tantôt tendre, tantôt avide, il m'aime comme je suis et ne me demande pas de changer. Ce moment magique est interrompu par quelqu'un qui frappe à la porte d'entrée. Logan se lève et va accueillir Franck.
- Tu as fait vite dis-moi, lui dit Logan.
- Toujours quand il s'agit de Gabriella. Alors ma belle, me dit-il, soirée mouvementée?
- C'est le moins qu'on puisse dire, soufflais-je.
- Logan m'a brièvement expliqué la situation. À te voir ceci dit, je pense que Logan gérait bien la situation. En quoi est-ce que je peux t'aider? me demande-t-il en s'asseyant à mes côtés.
- J'avais besoin de toi. Je viens de perdre ce qu'il me restait de famille et j'ai besoin de mon père de cœur.
Une larme coule sur ma joue mais à y regarder de plus près, je ne suis pas la seule dans cet état. Il me regarde un sourire bienveillant aux lèvres.
- Viens ici ma fille, me répond-il après quelques secondes.
Je ne me fais pas prier et lui fais un énorme câlin. Nous sommes encore dans les bras l'un de l'autre quand Logan reçoit un coup de téléphone. Il ne met pas longtemps à raccrocher et à sa tête, je vois bien que quelque chose le chiffonne.
- Qu'est-ce qu'il se passe?
- Ton frère. Il a du mal à digérer la situation apparemment et a un peu trop forcé sur la bouteille. Il n'est pas en état de conduire et a eu la conscience de m'appeler.
- Va le chercher. Il n'est pour rien dans tout ça.
- C'est bien ce que je compte faire. Franck, demande-t-il en se tournant vers ce dernier, ça t'ennuie de rester un peu, le temps que j'aille reconduire Christophe chez lui?
- Bien sûr que non. Ramène-le en entier surtout, c'est un bon gars.
- Je fais vite promis.
Il m'embrasse, prend ses clés et sort de l'appartement.
- Comment te sens-tu Gaby? Je veux dire par rapport à tout ça?
- Et bien, c'est difficile à dire. Dire que je suis sous le choc est un euphémisme. Bien que j'aurais dû me douter de quelque chose bien avant ce soir. En tout cas en ce qui concerne mon père. Je ne sais même plus comment je dois l'appeler pour être franche. J'ai été tellement habituée à l'appeler papa... mais maintenant ça sonne faux. Surtout qu'il ne s'est jamais comporté comme tel, du moins avec moi. En fait, tu as plus agi en père sur ces derniers mois que lui depuis que je suis née.
- Et pour ce qui est du reste? me demande-t-il doucement.
- Le reste, soupirais-je, c'est plus dur à avaler. En ce qui concerne maman, je peux comprendre qu'elle est passée par une période difficile mais je ne pourrai jamais me faire à l'idée qu'elle a préféré me sacrifier pour sauver son mariage. Elle m'a fait vivre un enfer Franck et je ne suis pas prête de lui pardonner.
- Le contraire ne serait pas normal. Je ne cautionne pas non plus un tel comportement. Comment une mère peut agir ainsi? Ça dépasse l'entendement. Et ton père, enfin, Henry... qui a une fille avec une autre femme... Pauvre Christophe, ça lui en fait des choses à gérer.
- Je plains cette fille même si elle a eu la chance d'avoir l'attention d'Henry depuis sa naissance. Mais je ne peux m'empêcher d'être jalouse d'elle et de Christophe.
Franck m'écoute attentivement mais je vois qu'il ne comprend pas ce que je veux dire et attend patiemment que je développe.
- Ils ont tous les deux leurs parents encore en vie. Ma mère a tout fait pour que je la considère comme morte et y est très bien parvenue. Quant à mon père, je n'aurai jamais l'occasion de le connaître.Et Christophe...
- Il est ton frère avant toute chose Gaby, il a beau être du même sang que ta mère et Henry, je crois qu'il te considère plus comme sa famille. J'ai pu le constater quand il y a eu l'incident avec Kevin. Il tient à toi plus que n'importe qui, à part peut-être Logan et moi.
- Je sais, soupirais-je. C'est injuste de dire ça mais
- Mais il a toujours été le centre de leur monde et encore maintenant, il en est la pièce principale.
- C'est ça. C'est bête je sais.
- Ce n'est pas bête Gaby. Je dirais même que c'est normal comme réaction. Tu as décidé de lui laisser une chance il y a quelques mois. Ce serait idiot de le punir maintenant pour quelque chose dont il n'est pas responsable. Il souffre autant que toi voir même plus. Tout son monde s'est écroulé d'un coup.
- Tu as raison, dis-je en nichant ma tête sur son torse.
Je lui propose quelque chose à boire et prend un thé pour moi. Toute cette discussion m'a assoiffée. Je reviens m'asseoir près de lui.
- Finalement, cette histoire a du bon. Elle me permet de faire table rase du passé et de recommencer sur des bases plus saines. On ne choisi pas la famille dans laquelle on naît mais on peut choisir celle dans laquelle on veut vivre. Et j'ai choisi la mienne. Logan, toi, Christophe et tous ceux qui font partie de mon quotidien sont cette famille.
- Je suis honoré d'en faire partie petite. Tu as changé notre vie à tous même si tu peux être enquiquinante quand tu veux, je ne remercierai jamais assez le ciel de t'avoir envoyée dans ce centre.
Je me cale dans le divan, près de lui. Une soirée qui a pourtant si mal commencé se termine bien. Je me sens aimée et en sécurité. C'est sur ce constat que je m'endors, bercée par la respiration de Franck.
À mon réveil, ce n'est pas Franck que je trouve à mes côtés mais Logan. Il dort profondément, marqué lui aussi par les derniers événements. Je le sens remuer. Il est en train de se réveiller. Je n'ose pas bouger pour lui laisser le temps d'émerger. Je sens ses lèvres sur ma tête.
- Bonjour chérie, me dit-il en baillant.
- Bonjour... ça fait longtemps que Franck est parti?
- Il doit y avoir deux heures je pense, il est rentré chez lui quand je suis rentré.
- Et Christophe comment va-t-il?
- Il en tenait une bonne c'est sûr mais il s'en remettra. Quelque chose me dit que le réveil va être plus dur, me dit-il en ricanant. D'ailleurs, je vais aller chercher Gabe pour qu'on puisse rapatrier la voiture de ton frère. Elle est restée au café.
- C'est gentil, tu n'es pas obligé tu sais.
- Je sais mais il a déjà tellement de choses à digérer. Si je peux l'aider un peu...
- Merci mon ange, lui dis-je en l'embrassant.
Avant de partir, Logan prévient Julien que je reste chez nous et téléphone au médecin qui passera rapidement. Pas que j'en ai réellement besoin mais ça le rassure.
La journée se passe lentement mais je n'ai envie de ne rien faire. Je suis en jogging et je regarde la télévision. Ça ne m'arrive jamais mais je dois avoué que ça m'anesthésie bien. Le docteur est finalement passé et m'a prescrit quelques jours de repos avec sortie obligatoire. Logan quant à lui, est revenu à l'appartement après avoir déposé la voiture de mon frère. Nous profitions tous les deux du calme ambiant quand il a reçu un appel de Christophe. Apparemment, il vient ici mais passe prendre le repas. Tant mieux, j'ai trop la flemme pour cuisiner. Moins d'une heure après, j'entends qu'on frappe à la porte. Ça ne peut être que Christophe. Je me dépêche donc d'aller ouvrir et ne lui laisse pas le temps de faire quoi que ce soit et me jette sur lui. Je le serre très fort contre moi. Je sens Logan qui prend ses paquets, nous permettant ainsi de continuer notre étreinte. C'est un raclement de gorge qui nous ramène vers la réalité.
- Je ne veux pas vous déranger, mais je meurs littéralement de faim, nous dit Logan à moitié sérieux.
Nous rions tous les trois en rentrant dans l'appartement. Christophe me retient par la main. Je me tourne vers lui, un air interrogateur sur le visage.
- J'avais peur que tu ne veuilles plus de moi, me dit-il gêné.
- Jamais Christophe, lui répondis-je avec un sourire lumineux. Tu es mon frère et ma seule famille à présent.
Il me regarde droit dans les yeux, rapproche nos visages inondés de larmes et m'embrasse sur la joue.
C'est officiel, je ne serai plus jamais seule.
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Voilà tout le monde, c'est avec une petite larme que je vous annonce que vous venez de lire le dernier chapitre. Il reste cependant encore l'épilogue et j'ai déjà une ou deux idées pour des bonus.
Que pensez-vous de ce dernier chapitre?
Bisouilles.
Chapitre corrigé le 1/07/18
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