Chapitre 4
En fin de compte, j'aurais sans doute mieux fait de refuser. J'ai bien cru que Novan allait sauter sur Mayleen dès qu'iel nous a aperçues et je crois pouvoir affirmer que seule ma présence l'a empêché·e d'arracher son débardeur à ma meilleure amie.
Déjà, j'ai été surprise lorsque Mayleen m'a entraînée à l'extérieur de la ville. Visiblement, elle n'a pas jugé utile de m'informer que le rendez-vous se ferait dehors, non loin du camp militaire parce « No' trouvait ça plus excitant ».
Mon œil, oui. Le seul truc qui a l'air d'exciter No' c'est Mayleen. Sincèrement, il paraît sur le point de la manger. Littéralement. On dirait que sa bouche cherche à avaler le moindre bout de peau de ma meilleure amie et en tant qu'être humain, il faut avouer qu'elle a beaucoup de peau.
J'ai bien essayé de me prêter au jeu, mais quand j'ai réalisé que la seule chose qui me touchait était une branche sèche tombée de l'arbre mort sur lequel No' embrassait furieusement Mayleen, j'ai lâché l'affaire.
Ma meilleure amie a tenté de m'intégrer à leurs ébats au début, mais Novan parcourait tellement le corps de Mayleen qu'il ne me restait plus rien. Et cette dernière semble prendre trop de plaisir désormais pour ne serait-ce que m'accorder une pensée.
Exit le plan à trois, je pourrais me faire plaisir toute seule, mais l'image de Novan en train de dévorer le sein de Mayleen m'a coupé toute envie.
Finalement, je décide de m'éloigner et, quitte à être à côté du camp, décide d'en profiter pour glaner quelques infos. Après tout, je ne sais toujours pas pourquoi ils sont là et leur présence m'intrigue beaucoup.
Je me glisse entre les arbres derrière lesquels nous nous étions dissimulés et me retrouve vite près du camp. Mes habits, pourtant légers, collent rapidement à ma peau et me paraissent trop lourds sous ce soleil. J'attache mes cheveux, tant pis pour les coups de soleil et avance discrètement jusqu'aux premières tentes.
Je croise presque les doigts pour croiser un guerrier trop bavard qui me fournirait les réponses à mes questions sur un plateau. Bien sûr, je sais faire preuve de patience, mais pas sous une chaleur pareille.
J'ai bien plus envie d'ôter mes vêtements un à un avant de me plonger dans la rivière fraîche et... je secoue la tête pour chasser l'image de Sûm qui me rejoint, nu, dans l'eau clair. C'est quoi mon problème avec ce garçon ?
Je me retiens de sauter de joie lorsqu'un groupe de soldats arrive à ma hauteur et me délivrent de mes pensées. Mieux que ça : ils discutent justement du sujet qui m'amène.
— Il va falloir se dépêcher.
C'est une femme âgée qui vient de parler. Grande et fine, des cheveux grisâtres et bouclés descendent au creux de ses reins. Je ne la distingue que de dos, mais je remarque son accoutrement singulier. Elle n'est vêtue que de bouts de tissus à la poitrine et aux hanches. Le reste de son corps est exposé au soleil et elle tient une épée à la main. Sa peau semble luisante de sueur, comme si elle sortait de l'entraînement.
Je jette un coup d'œil rapide aux autres personnes présentes et me rends compte qu'ils sont tous plus ou moins dans la même situation. Tous, sauf un, qui paraît les avoir tirés de leur activité.
C'est lui qui reprend la parole :
— Je sais. On a déjà exploré beaucoup d'endroits, pourtant. Elle ne doit pas être loin.
— À moins qu'elle ne se déplace.
L'observation provient d'un homme d'environ quarante ans qui, arc à la main, semble s'ennuyer ferme. Il couve du regard la dernière personne du quatuor : une femme du même âge, aux yeux perçants et aux cheveux broussailleux.
— Kaylan, on ne va pas pouvoir la chercher pendant des années. La plupart de nos soldats ont déjà la leur. On ne peut pas arrêter une armée pour un seul homme. Même si c'est toi.
La femme âgée a parlé à nouveau. Sa voix est forte et assurée. Elle dégage une prestance intimidante. J'en viens presque à l'admirer.
Je me recroqueville derrière la toile qui me sert de cachette et observe le dénommé Kaylan. Si je comprends bien, c'est celui qui est le mieux habillé des quatre. Il se tient droit, les bras croisés mais le regard un peu fuyant. On dirait qu'il cherche quelque chose.
Je m'accroupis de justesse quand ses yeux se tournent dans ma direction. J'espère qu'il ne m'a pas vue.
— Je sais bien.
Un soupir transparaît dans sa voix et je me relève juste à temps pour le voir passer la main dans ses cheveux sombres.
— C'est juste que...
— Oui, le coupe la femme plus jeune. On sait, Kaylan. On est derrière toi. Mais Alora a raison : on ne peut pas rester trop de temps au même endroit.
— Si tu sortais du camp, ce serait sans doute plus simple pour toi de la trouver.
La raillerie provient de l'autre homme, qui reçoit un regard noir en réponse. Il hausse les épaules comme si ça ne l'intéressait pas et déclare :
— Bon, les gars, c'est l'heure de l'apéro. Je vais m'entraîner au sabre sur un bon bout de viande, on se revoit tout à l'heure.
— Weylin...
La jeune femme soupire, désabusée.
— Nephtys.
Weylin lui lance un clin d'œil appuyé.
— Envie de te joindre à moi ?
La dénommée Nephtys lui lance un regard courroucé et répond :
— Loin de moi l'idée de devenir le bout de viande sur lequel tu aiguises ton sabre.
Weylin commence à s'éloigner en jouant avec son arc et ne se retourne que pour lancer à la cantonade, avec un clin d'œil appuyé :
— Tu ne disais pas la même chose ce matin.
Si j'avais été à la place de l'homme, je me serais sans doute consumée sur place tant le regard de la femme est enflammé. Visiblement, ces deux-là ont une relation explosive.
Toujours aussi calme, Alora raffermit sa prise sur l'épée et plante son regard dans celui de Kaylan.
— Kaylan, écoute. Je ne peux pas nier que Weylin a raison. Tu devrais sortir un peu du camp. Au moins pour un soir. Peut-être que ton frère a loupé quelque chose dans cette ville, il ne peut après tout pas la trouver à ta place.
Elle lève la tête vers le ciel et plisse les yeux, comme si elle cherchait à déterminer ce que le soleil était en train de lui dire.
— On repart demain matin. Et cette décision ne souffre d'aucune objection.
Nephtys hoche la tête avec dévouement avant de se détourner en saluant ses camarades. Kaylan, lui, pince les lèvres avec application.
Alora pose une main sur son bras nu et lui souffle :
— Ne perds pas espoir, Kaylan. Tu la trouveras en temps voulu.
L'intéressé ne répond rien et la femme s'éloigne après l'avoir poliment salué. Comme lui ne semble pas vouloir bouger, je me recroqueville derrière la toile et en profite pour remettre mes pensées en ordre.
Je pensais en apprendre plus sur les raisons de leur présence, mais celles-ci restent vagues. Ils semblent chercher quelque chose, mais quoi ? Que peut-il manquer à cet homme que les autres soldats ont déjà ?
Une idée germe dans ma tête alors que la scène entre Weylin et Nephtys repasse dans mon esprit. Et si ce n'était pas quoi mais qui ? Si ce qu'ils cherchaient était quelqu'un ? Une âme-sœur ? Il me paraît un peu étrange d'engager tout un convoi simplement pour une âme-sœur. N'ont-ils vraiment rien d'autre à faire ?
Les jambes ankylosées, je me relève un peu trop brutalement et me retrouve dans le champ de vision du dernier homme. Il n'a pas bougé d'un pouce. Affolée, je m'apprête à disparaître lorsque son regard rencontre le mien.
Tout en moi se glace d'un seul coup. Une douleur phénoménale éclate dans mon ventre et m'arrache des larmes. J'aimerais bouger, mais mon corps ne répond plus. Mon esprit se heurte aux barrières de mon crâne.
Un bruit parasite enfle dans mes oreilles et je me retiens de hurler lorsqu'il se propage comme une onde dans le reste de mon corps. Je me sens tomber mais je suis incapable de me raccrocher à quoique ce soit. Je hurle dans ma tête avec la sensation d'être enfermée dans une grotte obscure.
Puis, soudain, tout se tait. Un froid immense m'envahit et je me retrouve pantelante, à quatre pattes au ras du sol, couverte de sueur. Je distingue à peine mes mains et mon esprit semble fonctionner au ralenti.
Je me relève tant bien que mal en m'agrippant au bord d'une toile tendue à côté de moi. Le sol tangue sous mes pas. Lorsque j'ai retrouvé assez d'équilibre pour tenir debout toute seule, je dévisage le monde autour de moi, qui me semble soudain plus vif. Dans ma ligne de mire, Kaylan semble dans la même situation que moi.
Il se tient la tête à deux mains et son corps est secoué de soubresauts effrayants. Une certitude enfle en moi et je m'éloigne tout à coup, comme soufflée par un vent glacé. J'ai froid. Mon corps entier tremble.
Il est sans doute trop tard pour reculer, mais c'est ce que je fais. Je rassemble le peu de conscience qu'il me reste et je me mets à courir en direction du village. Sans me retourner une seule fois. Sans parvenir à me défaire du souvenir des yeux brillants de Kaylan qui croisent les miens.
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Hey !
Vous avez survécu aux grandes chaleurs de ce début de semaine ?
Personnellement, je suis allé visiter Dinard, Saint Malo et Dinan en famille ! C'était magnifique et ça m'a redonné envie d'écrire un peu !
Mais entrons dans le vif du sujet ... Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? Les choses sérieuses commencent aujourd'hui !
Je suppose que vous avez deviné ce qu'il vient de se passer... A votre avis, que va-t-il se passer maintenant ? Va-t-elle fuir ? Ou revenir sur ses plus profondes certitudes pour le suivre ?
La réponse dans les prochains chapitres !
On se retrouve la semaine prochaine 😉
Guide de prononciation des nouveaux prénoms :
Kaylan : "caille l'âne"
Alora : (comme ça s'écrit)
Weylin : "ouais ï line"
Nepthys : "nef tisse"
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