Sous un ciel couleur ambre

Le vent portait encore l'odeur sucrée des magnolias. Ce parfum était plus qu'un simple souvenir, c'était une histoire à lui seul. Aoïse fixait la fontaine, ses éclats d'eau réfractant les derniers rayons du soleil, qui se couchait, fatigué, comme elle. Tout était calme, trop calme. Elle eut envie de tout casser, de briser cette fontaine, de briser tout cette paix ambiante pour que l'environnement ressemble au chaos en elle, froid et destructeur.

Il n'était plus là.

Le banc sur lequel elle était assise semblait attendre quelqu'un d'autre, il y restait une place fraiche. La brise agitait doucement les feuilles du grand platane, mais ce son, autrefois apaisant, n'avait rien d'un réconfort, aujourd'hui. Ses doigts se refermaient nerveusement sur une lettre froissée, celle qu'elle avait laissée glisser sur le sol le jour de leur dernier adieu, tant ses doigts tremblaient. Les mots y étaient simples, mais tranchants : 

"Je ne peux plus rester. Adieu Aloïse"

Pas besoin d'explication supplémentaire, c'était clair, et parfaitement compris. Mais Aloïse ne l'acceptait pas. Elle ne le pouvait pas.

C'était ici que tout s'était achevé. Mais ce jardin, figé dans son éternité, portait aussi les traces d'un autre temps. Un temps où les rires résonnaient entre les allées pavées, où ses joues s'empourpraient sous le regard brûlant de Gabriel, où les seules larmes qui coulaient sur les joues de la jeune femme étaient celles de rire.

Aoïse ferma les yeux. Les souvenirs revenaient, un à un, dans un désordre troublant. C'était douloureux et en même temps réconfortant.

Une nuit d'été, la chaleur alourdissant l'air, il lui avait tendu la main. « Viens », avait-il dit, son sourire éclatant dans l'obscurité. Ils avaient dansé ici, sous la lumière d'une lune pleine, leurs  pieds nus glissant sur les pavés rugueux, les cheveux s'emmêlant dans le vent.

Puis, un instant plus ancien, encore plus doux : leur premier baiser. Gabriel avait frôlé ses lèvres comme on effleure du regard un oiseau effrayé, avec cette crainte qu'il ne s'envole. 

Chaque souvenir la ramenait un peu plus loin, jusqu'à ce tout premier jour où leurs destins s'étaient croisés. Une collision imprévue, un éclat dans la routine, un rayon de soleil dans un monde de ténèbres.

Aoïse rouvrit les yeux. Elle savait qu'elle était prisonnière de cette histoire qui se déroulait à rebours. Mais peut-être, en retournant jusqu'au tout début, pourrait-elle comprendre pourquoi la fin avait dû être écrite ainsi.

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