Chapitre 21


Après avoir fait un rapide tour à l'infirmerie, les deux apprentis héros se dirigèrent vers le bureau du proviseur Nezu. Aucun des deux ne parlait. Katsuki était profondément agacé par la situation tandis que Hanako se sentait coupable. Elle avait l'impression d'être un poids pour le jeune homme qui n'avait rien demandé.

Entre la perte de contrôle de son alter et son expression du visage qu'elle savait déprimée, ça n'allait pas du tout. Elle sentait qu'elle devait se ressaisir au plus vite. Enfouir ses sentiments comme elle l'avait déjà fait, c'était pour elle la meilleure solution à l'heure actuelle. C'était ce qu'elle pensait.

Arrivés devant la porte du directeur, Katsuki ne prit même pas la peine de frapper et entra. Hanako le suivit timidement alors que Nezu reposa un dossier sur son bureau.

« Les enfants, je vous attendais. Je vous en prie, asseyez-vous. »

Katsuki grommela quelque chose d'inaudible avant de s'asseoir sur une des deux chaises.

« Pour commencer, je m'excuse au nom de tout le corps enseignant de Yuei pour les événements du camp d'été. Une telle chose est inacceptable et n'aurait jamais dû se produire.

- C'est juste pour ça que vous nous avez convoqué ? On s'en tape sérieux. »

Hanako aurait pensé que Nezu se serait offusqué devant tant d'impolitesse et d'irrespect mais il n'en fut rien. À croire qu'il connaissait le caractère de Katsuki et qu'il s'en fichait royalement.

« Non, ce n'est pas que pour ça que je vous ai fait venir. Je m'inquiète pour vous. Vous avez tous les deux subi une forte attaque, que ce soit moral ou physique. Je veux m'assurer que vous n'en gardiez aucune séquelle. C'est pour cela que je vous ai pris un rendez-vous chez un psychologue. »

Katsuki voulut s'indigner, crier qu'il n'en avait pas besoin et qu'il se fichait de ce genre de conneries. Mais il referma la bouche avant qu'un son ne la franchisse. L'image de sa camarade, effondrée près du corps de sa mère lui était revenue en tête. Si lui n'en avait pas besoin, ce n'était peut-être pas le cas de la jeune fille à ses côtés, qui n'avait pas encore parlé.

Il jeta un oeil vers elle. Ses poings étaient serrés sur ses cuisses alors que sa tête était baissée, dissimulant ses yeux sous sa frange.

« C'est d'accord, fit Katsuki. C'est quand ? »

Nezu sourit. Comme il l'avait anticipé, Katsuki avait compris qu'il devait accepter pour que ce soit plus facile pour Hanako d'en faire de même. Lui faire comprendre que c'était normal de demander de l'aide et de l'accepter. La réaction de Katsuki avait surpris Hanako qui avait relevé la tête vers lui.

Il ne semblait pas de bonne humeur, se contentant de regarder le proviseur les sourcils froncés. Mais aucune injure ne semblait sortir de sa bouche.

« Je suis d'accord aussi... finit par dire la jeune fille.

- Bien. Le rendez-vous est fixé à ce vendredi. Aizawa vous accompagnera. Ne vous inquiétez pas, il s'agit d'un psychologue qui s'occupe principalement de héros. Ce métier est dur, la plupart ont besoin d'aide pour faire la part des choses. Et n'oubliez pas, tout le corps enseignant se tient prêt à vous écouter et vous aider. »

Katsuki se leva et se dirigea vers la porte d'entrée, sans prendre la peine de répondre. Il ouvrit la porte et se tourna une dernière fois.

« Bon, tu viens ? »

Hanako ne se fit pas prier et hocha la tête avant de s'incliner devant le principal, le remerciant de cette entrevue. De nouveau libres, ils se dirigèrent machinalement vers les vestiaires. Ils avaient encore leur costume de héros sur leur dos, et à cette heure-ci, le cours héroïque devait être terminé.

Katsuki ne put s'empêcher de remarquer que la jeune fille semblait encore plus déprimer que tout à l'heure. Cependant, il ne dit rien. Le jeune homme n'avait jamais été proche de Hanako, il ne sentait pas capable de lui remonter le moral. Il ne savait pas comment s'y prendre. S'il voyait son père tuer sa mère devant lui, comment réagirait-il ? Comment se sentirait-il ? Aurait-il encore la foi d'avancer malgré tout ? Il n'en avait aucune idée et ne préférait pas y penser.

« Tu as déjà vu un psychologue ? demanda Hanako, déconcertant un instant Katsuki.

- Non. Parler, c'est pas mon truc.

- Tu vas devoir le faire, répliqua Hanako. Moi, j'ai été suivi pendant plusieurs années après le meurtre de ma soeur. Il va te demander de raconter ce que tu as vécu. Comment l'as-tu vécu. Ce que tu as ressenti à ce moment-là. Et ce que tu ressens actuellement. »

Katsuki ne dit rien. Le franc-parler de Hanako était assez surprenant. Mais désormais que tout le monde savait ce qui lui était arrivé, elle n'en avait rien à faire.

« C'est débile, souffla-t-elle en s'arrêtant. Faut-il vraiment être un spécialiste pour savoir ce que je ressens ? Mon père a assassiné ma mère, sous mes yeux. Et je n'ai rien pu faire pour l'en empêcher. Alors que vais-je bien pouvoir lui répondre ? Que je suis triste ? Anéantie ?

- Et que tu es manifestement en colère. »

Hanako leva les yeux vers Katsuki. Dans ce long couloir où ils étaient seuls, ses cheveux blonds volaient à cause du vent. Elle se rendit compte qu'elle avait activé son alter, sans même s'en rendre compte. Elle posa une main sur son front en soufflant, et le vent cessa.

« Désolée. »

Katsuki ne dit rien et reprit sa route. Pourtant, Hanako l'arrêta encore une fois.

« Est-ce que... Tu as parlé aux autres de ce que tu as vu ?

- Non, ça les regarde pas, qu'ils se mêlent de leur cul. »

Hanako ressentit un petit soulagement. Peut-être que pour certains, cela ne faisait pas une grande différence. Mais entre le fait de nous annoncer la mort d'une personne, et le fait d'assister au meurtre de ladite personne... C'était radicalement différent. Et la jeune fille ne voulait pas que ses camarades soient au courant. Elle savait désormais que Katsuki ne révélerait pas ce secret. Ne rajoutant pas un mot de plus, elle suivit Katsuki jusqu'au vestiaire puis les deux rentrèrent au dortoir.

Quelques élèves étaient dans la salle commune tandis que d'autres étaient sûrement dans leur chambre. Fatiguée et n'ayant pas envie de leur parler pour le moment, Hanako s'éclipsa à l'étage en direction de sa chambre. Lorsqu'elle ouvrit la porte, la jeune fille découvrit une vision d'horreur.

Sa mère était allongée sur le dos, la tête renversée vers la porte, les yeux vides. Rika se trouvait sur elle, inerte. Les deux victimes étaient recouvertes de sang. Hanako poussa un cri avant de porter sa main à sa bouche. L'odeur du sang lui monta aux narines lui provoquant des nausées. Ne pouvant détourner le regard, elle regardait les yeux dénués de vie de sa mère. Sa respiration s'accéléra et une terrible douleur s'empara de son coeur.

« Eh oui ma belle... Tout ça, c'est de ta faute. »

Akira se tenait juste à côté, un sourire malsain dessiné sur les lèvres. Elle hurla de nouveau et recula. Son dos claqua contre le mur et elle s'écroula sous la terreur.

« Ceci n'est que le début, reprit Akira. Ce petit tas de cadavres constituera la base de la montagne que tu engendreras. Si tu n'étais pas là, tout ça ne serait jamais arrivé. »

Hanako ferma les yeux, se boucha les oreilles mais rien à faire. La voix d'Akira résonnait dans sa tête.

« Ça suffit ! »

Puis, elle sentit une main la saisir par l'épaule. Affolée, elle se débattit mais cette main ne voulait pas la lâcher.

« Eh, eh, eh... Calme-toi, tout va bien... »

Ces paroles prononcées par une voix chaude et familière la firent rouvrir les yeux. En découvrant Shoto face à elle, sa respiration se calma d'un coup. Mais la douleur était encore présente.

« Hanako... »

Shoto était inquiet. Il savait que la jeune fille allait mal, même si elle faisait de son mieux pour le camoufler. Mais maintenant qu'elle avait les yeux remplis de larmes... Il ne pouvait que comprendre la douleur, la tristesse et la peur qui la submergeait.

« J-J'ai cru... balbutia-t-elle... Dans ma chambre... »

Doucement, Shoto l'attira contre lui et lui frotta délicatement le dos. Patiemment, il attendit qu'elle se calme.

« Il n'y a rien, affirma-t-il. Je peux te le garantir. »

Pourtant, elle était convaincue de ce qu'elle venait de voir. Le jeune homme prit la main de Hanako et la releva.

« Fais-moi confiance. »

Il semblait si sûr de lui que l'apprentie héros se laissa guider jusque devant sa porte. Aux côtés de son ami, elle découvrit qu'il n'y avait rien, ni personne. Akira, les cadavres de sa mère et de Rika, les traces de sang... Tout avait disparu. Seul son chat était roulé en boule dans son panier, au fond de la pièce. Ses larmes coulèrent de nouveau.

« Je ne suis pas folle... J'ai réellement vu quelque chose...

- Je te crois, fit Shoto. Tu n'es pas folle Hanako. Mais tu as besoin d'aide pour surmonter ce qu'il s'est passé. Tout le monde est là pour toi, tu n'as pas à t'inquiéter. »

Essuyant ses larmes, Hanako serra un peu plus la main de Shoto. S'il n'était pas arrivé, pendant combien de temps aurait-elle subi ces visions ? Elle ne préférait pas l'imaginer.

Vivre une première fois ce qu'elle avait vécu était suffisamment traumatisant pour elle. Alors pourquoi son esprit fabriquait de telles visions ? Comme s'il voulait se briser davantage ? Pour elle, cela n'avait aucun sens.

*****

La voiture était silencieuse alors qu'elle roulait entre les rues bondées de la ville. Katsuki et Hanako ne disaient rien, et Aizawa n'avait pas plus de choses à leur dire. La jeune fille regardait par-delà la vitre teintée. Elle pouvait voir des hommes et des femmes d'affaires marcher d'un pas pressé, des lycées et des collégiens parler joyeusement, des petits écoliers courir joyeusement.

La vie semblait normale. Et pourtant, si Hanako descendait dans la rue, combien d'entre eux la reconnaîtrait ? Combien d'entre eux la pointerait du doigt en l'accusant de meurtre ? Elle s'agrippa à la poignée de la portière, sentant la peur monter petit à petit en elle. Très vite, la voiture quitta les rues bondées et s'engouffra dans les petites ruelles de Musutafu. Quelques minutes plus tard, la voiture s'arrêta.

« Attendez-moi deux minutes. »

Leur professeur sortit et examina la ruelle rapidement. Il voulait être sûr de n'avoir pas été suivi. La sécurité de ses élèves était sa priorité. Une fois rassuré, il autorisa ses deux élèves de sortir. Il les emmena dans une bâtisse un peu vieille mais l'intérieur était très bien entretenu. Dans ce qui semblait être la salle d'attente, il y avait de nombreux tableaux représentant des paysages. La pièce était éclairée par quelques lampes, offrant une ambiance tamisée. De l'encens semblait se disperser dans l'air. Hanako ne reconnut pas la senteur, mais elle appréciait.

Ce n'était pas le cas de Katsuki qui râla encore une fois. Ce genre d'ambiance n'était sûrement pas son genre. La porte du fond s'ouvrit avant même qu'ils aient annoncé leur présence. Sûrement les avait-il entendus. Hanako ne put s'empêcher de détailler le psychologue qui s'avançait vers eux. Cette personne allait tout découvrir d'elle, la première impression était importante.

Il paraissait assez jeune, une trentaine d'année peut-être. Ses cheveux bruns étaient courts, un peu ébouriffés. Il n'était pas du genre à plaquer ses cheveux sous une tonne de gel. Ses yeux noirs, dissimulés partiellement derrière une paire de lunette, n'exprimaient rien en particulier. Pas de joie, pas de pitié, absolument rien. Pour autant, ils n'étaient pas vides. Hanako songea qu'elle n'arrivait juste pas à interpréter ce regard.

Il portait une chemise blanche, à moitié rentré dans son pantalon noir. Au final, il était banal. Ni trop grand, ni trop petit. Il avait une corpulence un peu plus imposante que celle de son professeur. Il ne soignait pas spécialement son apparence, se montrant juste présentable aux yeux de ses clients. Il était en tout point différent de la psychologue qui avait suivi Hanako durant son enfance.

C'était une femme beaucoup plus âgée, tirée à quatre épingles, aux regards qui vacillaient entre la douceur et la compassion. Hanako ne l'avait jamais vraiment apprécié, bien qu'elle fasse du bon travail. Elle l'avait aidé, elle devait bien se l'avouer.

« Bonjour docteur Kawasaki. Merci encore pour ce rendez-vous.

- Il n'y a pas de quoi. »

Les deux hommes s'échangèrent une poignée de main avant que le dénommé Kawasaki se plante devant les deux adolescents. Il tendit sa main à Katsuki.

« Je suis le docteur Shun Kawasaki. Enchanté de faire votre connaissance.

- Ouais, ouais c'est ça... Bakugo Katsuki. »

Il serra sa main brièvement, agacé par tout ça. Le psychologue se tourna vers la jeune fille et lui tendit la main. Hanako lui serra et remarqua que sa poigne n'était ni trop forte, ni trop faible.

« Otsuka Hanako.

- Bien. Qui de vous deux veut venir me parler en premier ?

- Moi, déclara Katsuki. Je veux en finir rapidement.

- Bien. Monsieur Aizawa, mademoiselle Otsuka, vous pouvez vous installez confortablement en nous attendant. »

Alors que Katsuki disparaissait dans la pièce, Hanako s'assied sur l'un des fauteuil en velours. Ils étaient très confortables mais le stress empêchait la jeune fille de se détendre. Les minutes qui suivirent paraissaient se transformer en heures et en jours. Hanako aussi voulait en finir rapidement et se reposer dans sa chambre, éloignée des gens et du bruit.

Elle était fatiguée.

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