Chapitre 18
Le jour des funérailles de Hitome Otsuka était arrivé. Hanako avait repris des forces. Sa blessure ne lui faisait pratiquement plus souffrir.
La presse avait communiqué l'innocence de Hanako dans le meurtre de Hitome. Mais les avis étaient encore enflammés à son sujet. Il était alors convenu que Shota Aizawa l'accompagne à la cérémonie. Il sera présent du début jusqu'à la fin. Si des journalistes parvenaient jusqu'à eux, il préférait être présent pour protéger son élève. De plus, il pensait que c'était son devoir d'être présent pour elle dans ce moment difficile.
Le soir même, Hanako partira à l'internat rejoindre ses camarades de classe. Elle pouvait enfin sortir de l'hôpital.
La jeune fille avait revêtu le costume que la famille de son ami lui avait offert. Il s'agissait d'un smoking d'un profond noir. Hanako avait souri en le découvrant. C'était le genre de vêtements que sa mère adorait. Elle savait que sa mère aurait adoré la voir habillée ainsi. Pour aller avec ce costume, elle avait également des chaussures noires, avec un léger talon. Le genre de talon qui claquait sur le sol, indiquant à tout le monde qu'elle arrivait.
Pour finaliser cette tenue, Hanako avait pris le soin de s'attacher les cheveux en un chignon tressé. Ainsi, elle ne paraissait plus être une adolescente de 15 ans. Elle allait montrer aux membres de sa famille qu'ils n'avaient plus besoin de s'occuper d'elle. Qu'ils pouvaient la laisser partir. De toute manière, ce n'était pas comme s'ils se préoccupaient vraiment de la jeune fille.
Désormais que sa mère était partie, il ne restait plus que ses grands-parents ainsi que le frère de sa mère. Cela faisait des années qu'elle ne les avait pas vu. Mais apparemment, Kakeru avait été recueilli par leurs grands-parents maternels. Hanako était un peu rassurée pour lui, il n'était pas seul.
La jeune fille ne ressentait pas grand-chose. Ces derniers jours, elle avait tant pleuré qu'elle se sentait vide de toute émotion. C'était peut-être mieux ainsi, avait-elle songé. Elle savait qu'elle ne serait pas très bien accueillie par sa famille. Fermer ses émotions lui paraissait être une bonne idée. Elle ne pouvait plus faire marche arrière. Elle devait garder la tête haute, c'était primordial.
Hanako avait également pris une décision après avoir longuement discuté avec Takeo. Désormais que la jeune fille était exposée à son statut d'élève à Yuei, elle était devenue une cible facilement repérable pour Akira. Comme il venait de le faire, Hanako avait bien trop peur qu'il s'en prenne à quelqu'un à qui elle tenait.
De ce fait, elle avait demandé dans un premier temps à son professeur de placer sous protection la famille de Takeo, en plus de la sienne. Et dans un second temps, elle avait décidé de rompre tout contact avec le monde extérieur une fois son entrée à l'internat. Si Akira voulait des informations sur elle, il serait obligé de chercher autour de Yuei.
Hanako avait espoir qu'il ne soit pas au courant de ses relations amicales. Sinon, il aurait sûrement essayé de rentrer en contact avec Takeo. C'était son ami le plus proche après tout. Elle espérait sincèrement qu'il avait oublié son ami d'enfance. Et pour n'éveiller aucun soupçon, elle préférait rompre le contact avec lui. Ce n'était pas une décision facile, mais Takeo l'acceptait.
On toqua à la porte de sa chambre d'hôpital. Hanako partit ouvrir et y découvrit son professeur principal. Lui aussi avait revêtu un costume noir et s'était soigneusement attaché les cheveux. Ce dernier sembla surpris de la tenue de son élève mais ne dit rien. Il fut frappé par ses yeux dénudés d'émotions. Serrant le poing, il ne put que constater son impuissance face à la situation.
Hanako partit dans le fond de la pièce, récupérer son sac contenant quelques affaires à elle. Ils se rendirent ensuite à l'accueil de l'hôpital où Aizawa remplit les papiers de sortie de la jeune fille. Une fois cela fait, ils se dirigèrent vers le lieu de la cérémonie, en voiture.
*****
Shoto regardait son bol de sobas, sans y toucher. Il savait qu'aujourd'hui était le jour des funérailles de Hitome, la mère de son amie. Hanako reviendra d'ailleurs le soir même. Mais il avait peur de découvrir son état. Leur professeur principal ne leur avait rien dit, leur demandant juste d'arrêter avec leurs questions indiscrètes.
« Tu ne manges pas Shoto ? »
Le ramenant à la réalité, Shoto se saisit de ses baguettes et commença à manger. Il devait prendre des forces pour cet après-midi et pour accueillir Hanako, quel que soit son état.
« Shoto, tu connais Hanako depuis le collège, c'est ça ? demanda Izuku.
- Ah bon ? s'écria Ochaco. Pourtant, vous n'aviez pas l'air proche du tout en début d'année...
- Oui. Je la connais depuis longtemps. Mais à cette époque... Je ne m'intéressais à personne. Et puis, elle ne parlait à personne non plus. On n'a jamais eu l'occasion de devenir ami.
- Oh je vois... C'est dommage. »
Shoto ne rajouta rien de plus. Déjà que tout le monde connaissait une bonne partie de son passé, il n'allait pas en rajouter en avouant qu'elle se faisait harceler.
Après les événements du camp d'été, il s'était souvenu de plusieurs choses datant de l'époque du collège. Il avait eu plusieurs interactions avec la jeune fille. Du moins, si on pouvait appeler ça des interactions.
Lors de la cérémonie de leur première année, il avait rencontré pour la première fois Hanako. Elle avait les cheveux plus courts que maintenant, lui arrivant aux épaules. Elle était déjà accompagnée par Takeo. Ils étaient tous les trois côte à côte dans le gymnase, écoutant le proviseur réciter son discours.
La chose qui avait marqué Shoto était sa taille. Elle était vraiment petite comparée aux autres. Rien de plus, rien de moins. Il avait passé son chemin.
Puis, il l'avait revu quelques heures plus tard, au sein de sa classe. Elle s'était présenté aux autres, la tête basse. Plusieurs chuchotements s'étaient levés lors de sa présentation. La deuxième chose que Shoto avait remarquée était ses yeux. Ils étaient sombres, bien trop sombres. Il songea qu'elle était étrange et qu'elle était sûrement une source de problèmes. Il détourna alors le regard. Il ne voulait rien savoir d'elle et surtout ne pas se mêler de ses affaires.
Son objectif était de devenir le numéro 1. Alors il était hors de question d'être mêlé à des affaires étranges d'une fille qu'il ne connaissait pas.
Ainsi, il avait assisté à plusieurs scènes alarmantes. Souvent, il la voyait le matin tôt, en train de nettoyer son bureau. En général, il rebroussait chemin, faisant mine de n'avoir rien vu et revenait quelques minutes plus tard. Son bureau nettoyé, Hanako était assise et lisait un livre. Ainsi, il pouvait s'asseoir à sa place à son tour.
Pendant toutes ces années, Shoto avait ignoré la situation de Hanako. Au point d'oublier les choses qu'il voyait. Il la considérait simplement comme une fille à problèmes. Ça n'allait pas plus loin.
Il n'y a eu qu'un seul et unique jour où il avait eu un geste de sympathie envers elle. Shoto souhaitait avoir de la tranquillité. Alors même si c'était interdit, il était monté sur le toit de l'école. Il y découvrit alors Hanako, assise contre une porte menant à un local. Elle avait la joue gonflée et rouge, ainsi que des égratignures sur les bras. Et elle semblait dormir.
Shoto s'était approché, sans trop savoir pourquoi. Ses yeux étaient fermés, son visage était serein. Mais pourtant, des larmes s'échappaient de leur prison et roulaient sur ses joues. Était-ce seulement possible de pleurer en dormant ? Il n'en savait rien.
Mais ce fut la première fois qu'il la vit pleurer. Ce fut la première fois qu'il songea qu'elle n'était pas une fille à problèmes. Elle avait juste l'air profondément triste.
Shoto déposa alors un mouchoir en tissu à côté d'elle. Et il partit, la laissant de nouveau seule. Maintenant qu'il se rappelait de tout ça, Shoto était honteux d'être resté indifférent à la situation de Hanako. Surtout maintenant que son passé avait été dévoilé lui permettant de faire le lien avec ce que lui avait dit la jeune fille à l'hôpital.
Son père avait tué la sœur aînée de Hanako. Tous avaient pris peur d'elle et avaient commencé à la harceler pour avoir de l'emprise sur la jeune fille. Il trouvait tout ça écoeurant. Il se trouvait écoeurant.
Il ne comprenait même pas pourquoi Hanako l'avait pardonné aussi facilement. Pendant trois longues années, il avait laissé la jeune fille souffrir. Si Hanako lui pardonnait, lui ne se le pardonnerait jamais.
*****
Lorsque Hanako entra dans la salle de cérémonie, tous les regards se posèrent sur elle. Prenant une grande inspiration, elle remonta la longue allée, faisant claquer ses talons sur le marbre. La tête haute, elle avançait sans regarder personne. Son professeur la suivait, sans un regard pour ceux qui étaient venus.
Ils s'installèrent au premier rang, aux côtés de Kakeru qui la fusillait du regard. Mais pour le respect de sa mère, il ne dit rien, et ne fit rien. La cérémonie se déroula sans accroc, chacun rendant hommage à la personne qu'était Hitome. Il n'y avait pas beaucoup de personnes mais Hanako était touchée de reconnaître quelques amis et collègues à sa mère. Tous ne l'avaient pas oublié. Peut-être qu'ils détestaient la jeune fille, qu'ils lui rendaient responsable des événements. Mais au moins, sa mère ne partait pas seule.
Hanako déposa des roses blanches, tout comme le reste de sa famille. Nul ne s'échangeait de mots. Le silence était complet.
La cérémonie dura longtemps. Elle dura jusqu'au soir. Lorsque la cérémonie prit fin, Kakeru explosa.
« Pourquoi es-tu venue Hanako ? Comment as-tu trouvé le culot de venir ? »
La jeune fille se retourna vers son frère ainsi que vers le reste de sa famille. La plupart n'osaient pas la regarder dans les yeux. Serait-ce à cause de la peur ? De la lâcheté ? Hanako ne savait pas et ça lui importait peu.
Alors que son frère lui faisait des reproches, Hanako ne disait rien. Elle le laissait défouler sa haine et sa tristesse sur elle.
« Pourquoi tu ne dis rien ? Tu vas retourner à Yuei n'est-ce pas ? Comme s'il ne s'était rien passé ? Comment peux-tu supporter une chose pareille ? »
Hanako ne répondit pas.
« Réponds-moi ! »
Il essaya de se jeter sur elle mais son professeur s'interposa. Il s'était glissé derrière lui et le maintenait par les poignets. Kakeru essaya de se débattre, mais la poigne du héros professionnel était trop forte.
« De quoi tu te mêles toi ? hurla Kakeru. Tu vas rien dire toi non plus ? Rester silencieux ? Vous me répugnez tous autant que vous êtes ! »
Honnêtement, Eraserhead aimerait parler à Kakeru de ce comportement plus que déplacer. Mais ce n'était pas à lui de le faire. Il regarda son élève qui finit par s'approcher.
« Kakeru. »
Tous ceux qui étaient présents relevèrent la tête en direction de la jeune héroïne. Elle qui n'avait laissé paraître aucune émotion, le timbre de sa voix avait fini par trahir sa tristesse.
« Je suis désolée. Je vais retourner à Yuei.
- Pas besoin de me dire, je le savais déjà. Tu n'es qu'une sale...
- Kakeru ! le coupa-t-elle. Si je ne retourne pas à Yuei, maman et Rika seront définitivement mortes pour rien... Ce n'est pas ce que je veux... »
Kakeru se calma légèrement, dépassé par cette déclaration. Pour lui, tout ça ne rimait à rien. Il ne comprenait pas sa sœur.
« Tu vas tous nous faire tuer... souffla-t-il.
- Non. Je l'arrêterai avant. Akira n'aura plus aucune occasion de vous faire du mal. Je vous donne ma parole. »
Encore une fois, le silence accueillit sa déclaration. Kakeru voulut répliquer quelque chose mais sous la surprise de Hanako, son grand-père posa une main sur l'épaule de son petit-fils.
« Ça suffit Kakeru. Ça suffit comme ça... »
Il plongea son regard dans celui de sa petite-fille qui ne sut quoi dire. Elle ne voyait pas de terreur ou de haine. Juste... de la tristesse et des regrets.
Aizawa finit par lâcher Kakeru et se dirigea vers sa voiture, incitant son élève à le suivre. Hanako s'inclina devant le reste de sa famille, leur disant au revoir.
« Portez-vous bien. »
Elle leur tourna le dos pour s'en aller mais fut rattrapée par son ami Takeo qui la serra une dernière fois dans ses bras.
« Porte-toi bien Hanako... Sois courageuse. »
Elle hocha la tête et répondit à son étreinte, avant de partir définitivement.
Lorsqu'elle referma sa portière et que son professeur démarra la voiture, elle crut que son cœur allait exploser. Elle serra ses poings, se retenant de pleurer. Toutes les décisions qu'elle avait prises suite aux récents événements lui étaient douloureuses. Elles n'étaient pas faciles à accepter. Mais Hanako espérait avoir fait les bons choix et ne pas les regretter.
« Tu as été courageuse, finit par avouer Aizawa.
- Pourtant, j'ai terriblement peur.
- Si tu disais le contraire, je ne te croirais pas. Mais n'oublie pas que Yuei est avec toi. »
Hanako hocha la tête et laissa ses larmes couler. Elle regarda par la fenêtre de la voiture, et admira le coucher de soleil qui pointait le bout de son nez. C'était magnifique, mais la jeune fille ne pouvait pas apprécier ce moment.
*****
Une dernière épreuve se dressa devant Hanako. Elle qui pensait qu'elle allait enfin rejoindre l'internat, et pouvoir se reposer dans une chambre, elle était loin de se douter qu'une armée de journalistes l'attendait à l'entrée de l'établissement.
« Merde, jura Aizawa. Voilà pourquoi je déteste les médias, toujours présents au pire moment... »
Hanako les regarda alors que son professeur tentait de joindre le proviseur par téléphone. La jeune fille souffla et commença à enlever délicatement les épingles de ses cheveux.
« C'est bon. C'est maintenant ou jamais.
- Qu'est-ce que tu veux faire ?
- Les affronter. Si je ne le fais pas maintenant, il sera trop tard. »
Encore une fois, il était impressionné par le courage de son élève. Mais ça l'inquiétait. Depuis le début, elle prenait bien trop sur elle. Ce n'était pas bon.
Une fois les épingles retirées, ses cheveux descendirent en cascade dans son dos. Elle les rangea dans une poche de son costume.
« Allons-y. »
Après s'être garé non loin de l'entrée, ils sortirent de la voiture et se dirigèrent vers l'entrée. Un journaliste les remarqua, sitôt suivis des autres. Ils se retrouvèrent entourés et submergés de questions, au point que cela donnait des vertiges à Hanako.
Elle ne comprenait pas qu'autant de personnes s'intéressaient à sa vie. Qu'y avait-il d'amusant à ça ? Qu'est-ce que ça pouvait faire aux autres de savoir ce qu'elle vivait ? Avaient-ils peur d'elle ? Avaient-ils pitié d'elle ?
Aizawa fit reculer les journalistes tout en poussant Hanako par les épaules. La prestance de son professeur leur permettait d'atteindre l'entrée de Yuei sans trop de difficultés.
« Otsuka Hanako ! Répondez à nos questions !
- Otsuka Hanako ! Avez-vous encore des relations avec votre père ?
- Otsuka Hanako ! Que ressentez-vous face à ses événements ? Quelles étaient vos relations avec votre sœur et votre mère ? Et votre frère ? »
Hanako comprenait doucement pourquoi Aizawa évitait si soigneusement les médias. La seule chose qui les intéressait était des choses intéressantes à publier, sans prendre en compte le ressenti des personnes qu'ils interrogeaient.
Pourtant, alors qu'elle avait la tête baissée, elle arrêta d'avancer. Hanako ne voulait pas leur laisser le plaisir de spéculer à son sujet, au sujet de sa famille. Elle se retourna donc, affrontant les caméras. Les questions s'arrêtèrent, tous attendaient avec impatience ne serait-ce qu'une parole de la jeune fille.
« Je suis Boreas, déclara-t-elle. Boreas, l'héroïne du vent. Et c'est en ce nom que je jure d'arrêter Otsuka Akira. »
Cette affirmation eut le mérite de perturber les journalistes qui ne répliquèrent pas. Ils étaient étonnés que ses yeux reflétassent autant de détermination. Aizawa entraîna Hanako dans l'enceinte de l'établissement, et alors que les journalistes revenaient à la charge, les portes se refermèrent.
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