Chapitre 78

PDV Yuki

Le silence est électrique. Nos respirations sont à l'unisson, le battement de nos cœurs résonne contre les murs. J'ai chaud, très chaud. Je sens cette boule d'envie qui gonfle au creux de mon ventre, celle qui m'enjoint à briser les mètres entre nous et souder nos peaux et nos corps. Pourtant je n'avance pas. Je laisse cette distance, je laisse nos yeux parler pour nous. Je veux sentir ces étincelles que produisent nos désirs respectifs, lorsqu'ils se font attendre. Je veux cette passion insatiable, que je n'ai jamais ressenti avec un autre que lui.

L'effet d'un lien unique et millénaire. De deux âmes qui s'accrochent au travers des siècles.

Sans le quitter des yeux, je laisse ma main descendre en douceur la fermeture éclair de mon gilet. Doucement, sans me précipiter, comme si chaque seconde permettait de rendre la tension de la pièce un peu plus forte. Et ce n'est pas qu'une impression. Il lutte pour soutenir mon regard, lutte pour ne pas passer ses yeux sur mon corps, que je lui dévoile, étape par étape. Quand la veste tombe au sol, je remonte le débardeur sur mon ventre. Le passe au dessus de mon visage pour le jeter un peu plus loin. Il résiste encore. Je me plais à le voir chercher à se contrôler, quand nous savons l'un et l'autre que nous ne tarderons pas à faire sauter toutes les barrières qui nous séparent encore.

Une main dans le dos, j'attrape l'accroche de mon sous-vêtement. Le geste me courbe en avant, mettant ma poitrine en valeur. Et encore une fois, je fais durer, les bretelles glissant lentement sur mes bras, pour ne dévoiler mes seins que plusieurs secondes après. Un supplice qui le fait céder. Ses yeux se posent sur eux, et j'y vois cette lumière de désir briller un peu plus fort. Mais il ne bouge pas. Il observe, le cœur battant un peu plus fort, l'envie montante en lui. Elle monte tout autant en moi.

Je me tourne, pour retirer mon pantalon, et ma lingerie d'un même geste. J'exagère les mouvements, lui laissant volontairement mon fessier en ligne de mire. C'est un jeu amusant, auquel je ne pensais pas me prêter un jour. Et pourtant, je me plais incroyablement à me faire désirer de cette façon.

Son grognement me tire un frisson, et je brûle un peu plus en me relevant, quand nos yeux se croisent dans le reflet du miroir.

Ce n'est pas la première fois que je désire Cyrus. C'est en revanche la première où je ressens cette envie avec une telle intensité. Elle dépasse ce que jusqu'à lors je pensais impossible à surpasser.

Un pivot lent, pour me retrouver devant lui, et je me sens comme l'être le plus désirable au monde. C'est ce que je lis dans ses yeux. Une furieuse envie de me plaquer et de me prendre là, sur cet évier. Mais je veux continuer à jouer. Et le loup semble apprécier tout autant la partie.

J'entends à peine ma voix, mais je sens à quoi elle ressemble. Rauque, impatiente, impérieuse. Je n'attends aucune contestation.

- A toi.

Il obéit. Il ne résiste pas, parce qu'il n'y a pas de bataille d'égo, à ce moment là. Seulement un plaisir sourd qui ne demande qu'à être assouvi.

Il ne prend pas le même temps que moi. Plus impatient, il se débarrasse vite de toutes les couches de vêtements qui recouvrent son épiderme.

Je me trouve presque honteuse d'être satisfaite de ce que j'ai sous les yeux. Encore plus d'être satisfaite d'être la seule à y avoir accès.

Une peau halée, délicieusement musclée. Marquée ici et là, souvenirs de bataille durement menées. Mon corps est tout autant marqué. Une grande brûlure s'étend sur mon bras, une autre sur ma cuisse, mais rien qui ne semble le déranger. C'est notre passé, celui qui nous a construit, celui qui nous définit. Je le trouverais moins incroyable sans.

Je ne parviens pas à ignorer son envie déjà marquée entre ses jambes, et ne peux retenir ce sourire en coin de monter sur mon visage. Satisfaite de l'effet que je lui procure, quand bien même il m'en fait tout autant.

Quand j'avance, c'est presque un supplice de ne pas aller vers lui, mais vers la douche. L'eau qui tombe rapidement sur ma peau ne refroidit pas mes ardeurs, au contraire, sa chaleur ne fait qu'accentuer la mienne.

Je le sens derrière moi, suffisamment loin pour ne pas me toucher, mais assez près pour que je sente son membre contre ma peau, à chaque mouvement que je peux effectuer.

Son bras passe devant moi et attrape une bouteille de gel douche, et je sens ses mains quelques secondes après sur mon dos, en train d'étaler le liquide parfumé. Je me bouge pas. Mais à l'intérieur de moi, j'appréhende avec envie chacun de ses mouvements.

Il caresse le bas de mon dos, puis remonte. Mes hanches, et s'écarte encore. Mes épaules, mes bras, et malgré moi, j'attends qu'il passe à certains endroits.

Mon fessier, tout d'abord, sur lequel il s'attarde un moment. Puis il avance d'un pas, pour passer ses bras autour de moi.

Je ne sais plus où me concentrer. Sur ses doigts, affreusement bas sur mon ventre, à la lisière de cet endroit ? Ou bien sur sa virilité, qui se colle contre moi ?

J'ai initié le jeu. Mais je ne sais plus vraiment qui mène la partie.

Je me laisse aller entre ses doigts, qui savonne ma poitrine, mon ventre, mon aine. Je le laisse me retourner, et se baisser devant moi, pour laver mes cuisses, et mes mollets.

Je ne retiens pas un souffle de satisfaction, quand il dépose un petit baiser, juste un, sur mon intimité.

Je crois que je me serre moi-même du savon dans la main pour lui en passer sur le torse, quand il se relève. Mais au milieu de la buée dans la pièce, et du désir qui m'assaille, je ne sais plus vraiment ce que je fais.

Ses muscles passent sous mes doigts, mes yeux se posent sur tout ce corps qui m'appelle sans que je ne puisse y résister.

A quel moment craquons nous ? Je ne saurais pas le dire. Je sais juste qu'à un moment, la passion explose. Nos corps butent l'un contre l'autre, nos bouches se soudent. Les baisers sont affamés, voraces presque, les mains griffent, serrent, attirent nos peaux toujours plus près l'une de l'autre.

Il n'y a aucune raison, dans nos actions. Seulement des sentiments, qui s'entremêlent, se déchaînent, jusqu'à ce qu'il soit impossible de les distinguer.

La douleur perce dans mon dos quand il me plaque contre le carrelage du mur. Elle est vite remplacer par l'extase de le sentir au fond de moi.

Ne faire qu'un. Une expression que j'ai toujours trouvé stupide mais qui s'avère plus que véridique. Nos souffles, nos cœurs, nos corps, chaque partie de nos êtres dansent à l'unisson.

Ses doigts se referment si fort sur ma cuisse que je visualise déjà les bleus qui doivent l'orner. Mes ongles griffent son dos quand il s'enfonce toujours plus profondément dans mon intimité. Si nous n'étions pas des êtres surnaturels, nos corps en resteraient marqués pendant des jours.

Mais cette bestialité n'est pas douloureuse. Elle est salvatrice, libératrice. Le paroxysme du plaisir. De l'union.

- Qu'est-ce que tu es ?

Il n'a pas réfléchi, avant de poser la question. Et je ne le fais pas plus avant de répondre.

- Ta compagne.

L'avais-je déjà dit à voix haute ? L'avais-je déjà pensé avec tant d'intensité ?

Je n'en suis pas certaine. Mais cette révélation s'impose à moi et me fait saisir toute l'importance de ce lien qui s'épanouit entre nous. Je découvre la force de ce que je ressens, même si je ne suis pas capable de le définir. J'ai l'impression que le lien n'en devient que plus puissant, plus vivace.

C'est plus que juste deux mots. Et c'est le point culminant de notre désir.

Nos corps retombent l'un contre l'autre, fatigués. Mais complets. C'est ainsi que je me sens. Nos regards s'accrochent, nos fronts se collent, et nos respirations se calment doucement.

Sa compagne. Mon compagnon.

Maintenant, ce n'est plus juste dans mes pensées, ou dans les siennes. C'est réel, au fond de mon être. Une sensation de plénitude folle explose en moi. C'est comme si j'étais une louve. Sa louve.

*

Je sais avant même d'avoir fini de descendre les escaliers au petit matin quel genre de réflexion vont faire les loups. Il suffit de croiser le regard de Ramin pour comprendre que notre douche à deux n'est pas passée inaperçue. Ni les paroles qui ont pu y être échangées.

- Qu'est-ce que tu es, Sha' ?

Je lui balance un coussin que j'attrape en passant devant un fauteuil, et son rire m'accompagne jusqu'à ce que je passe la porte de la cuisine. Emna me regarde avec un sourire dans les yeux, en me tendant un croissant. J'attends en silence qu'elle se décide elle aussi à sortir une connerie, qui ne vient pas, à mon grand étonnement.

- Ta gueule Ramin.

Cyrus entre dans la pièce en grognant, et je me doute que son loup a dû l'accueillir comme il se doit quand il est descendu après moi.

Il s'avance jusqu'à moi et se penche pour croquer dans la viennoiserie que je tiens.

- Qu'ai-je fait pour avoir un loup pareil dans ma meute ?

- Et qu'ai-je fait pour qu'on me pique mon petit déjeuner ?

Il hausse les épaules et se penche à nouveau vers le croissant, mais je l'écarte avant, lui assénant dans le même temps une petite tape sur la nuque. On ne touche pas à mon gâteau du matin. Emna rit avant de tendre une autre viennoiserie à son alpha.

Elle nous annonce qu'elle va aller mettre en place les décorations, mais se tourne à demi vers nous avant de partir.

- Évitez de prendre une douche ce matin, vous avez usé assez d'eau hier.

Elle s'enfuit avant que nous ayons le temps de répondre, et je ne retiens pas un rire. Cyrus finit par sourire en me regardant. J'observe du coin de l'œil Tala rejoindre sa comparse, et Ramin les suivre. Ou plutôt la suivre.

Quand ils sont suffisamment à distance de la maison pour éviter toute conversation entendue, je me tourne vers l'alpha.

- Il faut que tu parles à Jeiran.

Il hausse un sourcil, intrigué, tandis que je lui fais part de la discussion que j'ai pu avoir avec Emna. Malgré le fait qu'elle pense que ce soucis ne les concerne qu'eux, il est en réalité bien complexe. Il risque de se répercuter tôt ou tard sur la toile et d'impacter l'ensemble des loups. Il finit par souffler et secouer la tête, comme déçu par le comportement de Jeiran.

- Quel imbécile.

- Il a vécu un fort traumatisme.

- Je parlais de moi. J'aurai dû m'en rendre compte. Que ce soit la dégradation de son état, ou de celui d'Emna, je n'ai rien remarqué.

- C'est une période particulière. Tout le monde est préoccupé par différents problèmes.

Mais l'excuse ne le satisfait pas. Pourtant, elle est vraie. Entre Maï, les Sancœurs, l'histoire avec Negin, nous avons tous de quoi nous tourmenter l'esprit. Mais ce sont ses loups depuis des centaines d'années. Je suppose que passer à côté de ce genre de problème doit le préoccuper d'une manière que je ne peux pas encore saisir. Je me demande si un jour, je le ressentirais moi-même avec autant d'intensité, ou si ma condition de vampire mettra des barrières aux liens entre nous.

- J'y vais.

Il le grogne presque, et disparaît rapidement à l'extérieur. Mon regard se pose à travers la fenêtre sur les louves, un peu plus loin, qui trace un chemin au sol avec des pétales d'une multitude de couleurs. Je ne cherche pas comment entre leur choix hier soir et ce matin, elles ont pu trouver tout ce dont elles avaient besoin. L'important étant que tout soit prêt à temps.

Mes sourcils se froncent, sans que je ne le comprenne. A quelques heures de ce moment si important pour Arman, et pour ma sœur, un étrange pressentiment monte au creux de mon cœur.

Je voudrais l'ignorer, mais je connais suffisamment mon instinct pour savoir qu'il ne se trompe pas. Reste en revanche à découvrir ce qu'il signifie. Et quand cela concerne Maï, je ne peux que m'en alerter. J'espère que ce ne sera pas trop mauvais.

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