Chapitre 45
PDV Yuki
- Embrassés ?
Je ne sais pas qui de moi ou de ma sœur est la plus surprise de cette révélation. Il faut dire que je ne m'attendais pas à parler de ça en la rejoignant dans sa chambre. Je comptais évoquer avec elle toutes les interrogations qui me prennent la tête ces dernier temps. La conversation a alors prise une tournure inattendue, alors qu'elle rougissait à vue d'oeil sans raison précise.
Car ce n'est pas moi qui lui ait raconté quoi que ce soit. Mais bien elle. Et je reste presque bouche-bée, alors qu'elle ne s'attendait visiblement pas à m'en parler tout de suite.
- Tu es en train de me dire que Arman et toi, vous vous êtes embrassés ?
Elle se met à jouer avec ses mains, mal à l'aise. D'en avoir parlé ? Ou bien a-t-elle peur de ma réaction ? Je serais foutrement mal placée pour lui faire la morale, mais ça, elle n'en a aucune idée. Quoi que ma sœur me connaît tellement qu'il ne m'étonnerait pas qu'elle sache tout sans me le révéler.
Elle ose à peine soutenir mon regard. Elle devrait pourtant savoir que je ne risque pas de lui faire une leçon de morale. Ce n'est pas mon genre, et puis franchement, tant qu'elle n'est pas avec un abruti de première, je n'ai rien à y redire. Et je ne pense pas qu'Arman rentre dans cette case là.
- Oui...
- Il va falloir m'expliquer.
Elle ne dit rien, alors je place un doigt sous son menton pour qu'elle pose enfin les yeux sur mon visage. Et qu'elle comprenne qu'il n'y a aucun jugement venant de ma personne. Elle semble le saisir bien vite, et un petit sourire s'affiche sur ses lèvres. Elle se détend enfin.
- Tu n'es pas fâchée ?
- Je suis ta sœur. Je n'ai pas à me fâcher parce que tu as embrassé un homme.
- Un loup.
- Ça reste un homme, même si je n'ai pas vérifié ce qu'il avait entre les jambes.
Elle rougit violemment et me met une tape sur le bras, avant de se laisser tomber en arrière. Elle a des étoiles dans les yeux, alors qu'elle me raconte ce qui a pu se produire. Je crois n'avoir jamais vu Maï dans cet état. Je devrais peut-être m'en inquiéter, mais une voix au fond de moi me souffle que tout va bien.
- Il est venu ici, pendant que tu avais disparu. Je ne sais pas si c'est lui ou moi qui avait le plus besoin de présence, après ce qui s'est passé.
Je me retiens de m'excuser une nouvelle fois. Si les loups n'acceptent déjà pas ma culpabilité, que dire de ma sœur.
- On discutait... on riait... et puis je ne sais pas trop comment, mais nos regards se sont accrochés. Et nos lèvres se sont retrouvées collées.
Elle place ses mains sur ses joues, et malgré ses 360 ans, elle m'apparaît comme une adolescente vivant ses premiers émois. C'est amusant, mais je me rassure tout de même de ne pas ressembler à ça. Il faut dire que penser à un certain loup fait naître un tout autre sentiment que de la gêne, en moi... C'est peut-être pire.
- Que ressens-tu pour lui ?
C'est tôt pour lui demander ça, et je me rends compte quand je la vois essayer de réfléchir à la question. Au fond, je me demande si je lui pose vraiment à elle, ou si je cherche à me faire répondre moi-même. Je tente de laisser cette dernière idée dans un coin de ma tête, et de me concentrer sur ma sœur.
- Il est gentil. Drôle. Fort. Il me protège, il est toujours là... je ne sais pas trop quoi dire, à part que j'ai du mal à me dire qu'un jour, on va partir d'ici, et que je ne le verrais plus.
Elle paraît réellement affectée par cette idée, et étrangement, moi aussi. Pas seulement pour Arman, ni pour Cyrus, mais pour l'ensemble de ces loups.
Je tente de la rassurer. Et de me rassurer en même temps.
- Tu le verras encore. Les autres aussi. Je suis héritière, comme Cyrus. Nous devrons travailler ensemble, à l'avenir.
- Ça sera différent.
- Si tu veux continuer à voir Arman, rien ne t'empêche.
Elle reste silencieuse, et je pense presque qu'elle a terminé de parler, quand elle me surprend avec sa question.
- Est-ce que tu crois aux coups de foudre ?
L'amour au premier regard. C'est sympa, dans les films. Dire que j'y crois dans la réalité est compliqué. Parce que je n'ai jamais vu personne le vivre, en 400 années. Mais il y a une première fois à tout. Et je crois bien que ma première fois, elle est juste devant moi.
- Je ne peux pas l'affirmer. Mais je crois que rien n'est impossible tant que l'on a pas prouvé le contraire.
- Je... je ne sais pas trop si ça me concerne mais... depuis que j'ai croisé son regard, dans le bâtiment du Conseil, je pense à lui. Je suis attirée par lui. C'est plus fort que moi.
- Alors pourquoi tu cherches à trouver des excuses pour ne pas profiter avec lui ?
- C'est un loup ! Je suis une vampire. Nos espèces ne sont pas faites pour être ensemble.
Je lui adresse un sourire à la fois moqueur et compatissant.
- Je ne te pensais pas aussi réac. Les vieilles traditions sont faites pour être modifiées. Tu n'as qu'une seul question à te poser, petite sœur : est-ce que tu as envie d'être avec lui ?
Je ne la laisse pas me répondre. Elle n'en serait pas capable, pour l'instant. Elle a besoin d'y réfléchir, et je crois bien que moi aussi. Mais cela me fait peur, alors je me refuse à m'appliquer mes propres conseils, et sors de sa chambre pour rejoindre la mienne.
Deux espèces différentes. Est-ce vraiment aussi simple de les mélanger comme je viens de l'affirmer à Maï ? C'est l'impression que j'ai, depuis que je les côtoie. L'impression que nous sommes tous les mêmes, sans différences notables. Et donc qu'à partir de là... rien ne nous empêcher d'être tous ensemble.
Si seulement c'était vrai. Je n'arrive pas à m'en persuader moi-même. Parce qu'il y a des siècles et des siècles de conflits derrière nous qui prouvent le contraire.
C'est peut-être bien plus facile de se dire que c'est impossible, que d'aller contre un fait admis de tous depuis des millénaires. Et pourtant, quelque chose me pousse à aller contre. Je ne sais pas quoi. Et c'est sûrement ce qui me dérange le plus.
Comme si il sentait qu'il devait aller devant la fenêtre, mon corps s'avance de lui-même jusqu'à elle. Et mon regard est inexorablement attiré vers lui. Un magnifique loup, que je reconnaîtrais facilement entre mille. Nos yeux s'accrochent, et son regard verdoyant me fait autant d'effet à cette distance que si il se trouvait en face de moi. L'animal me regarde sans me quitter une seconde des yeux, et c'est plus fort que moi, je suis obligée de quitter la pièce et la maison, pour me diriger vers l'orée de cette forêt.
Il me regarde m'avancer et ne bouge pas d'un poil. Sans me retenir, je passe une main sur son pelage, incroyablement doux. Un sourire monte sur mes lèvres, moqueur, joueur.
- Tu aimes mes caresses, Alpha ?
Le loup émet un petit jappement, avant de se changer et de laisser place à sa forme humaine. Tout aussi incroyable que l'autre, il faut le dire.
- Autant que tu aimes les miennes, Shadow.
Il marque un point, qui fait se serrer mon estomac. Il me retourne de l'intérieur avec cette simple phrase, et je vois dans ses yeux que ça lui plaît. Et je ne peux pas dire que ce n'est pas aussi mon cas.
- Je te retrouve souvent sous ma fenêtre. Te prends-tu pour Roméo ?
- Cela dépend, tu veux être ma Juliette ?
Je laisse un rire couler, alors que nous nous mettons à avancer un peu à travers les bois. Malgré la pénombre, je distingue tout chez lui. La forme de son visage, la couleur de ses yeux, ses muscles qui se contractent au fur et à mesure de ses mouvements. J'ai affreusement conscience de l'entièreté de son corps.
- Il y en a deux autres ici qui jouent aux personnages de Shakespeare.
Il fronce les sourcils en tournant le visage vers moi. Il comprend sans soucis de qui je parle, ça j'en suis certaine. Mais il semble n'avoir pas tous les éléments en main. Je me fais un plaisir de le faire languir avant de lui révéler.
- Attends, Arman m'a dit tout à l'heure avoir enlacé Maï, chez vous. Il y a autre chose ?
Je souris, et il se rapproche de moi pour me bloquer contre un arbre, entre ses bras. Je le laisse faire, pas franchement dérangée par notre proximité.
- Ne me fais pas languir vampire.
- Pourtant j'adore ça.
Je lui tire la langue et passe sous ses bras pour me dégager et continuer à avancer. Je l'entends grogner, mais il me suit tout de même, attendant patiemment que je lui offre ce qu'il désire. Ce que je finis par faire.
- Ils se sont embrassés. Aujourd'hui.
Je ne lui laisse pas le temps de réagir que je me tourne vers lui, m'arrêtant dans ma marche. Mon visage redevient sérieux.
- Peux-tu m'assurer qu'il ne fera pas de mal à ma sœur ? J'ai beau apprécier tes loups, quiconque la touche finira entre mes crocs.
- Penses-tu Arman en être capable ? Il a l'air d'un enfant face au jeu de ses rêves, quand il la regarde. Il ne risquerait pas de le casser.
- Ma sœur n'est pas un jouet.
- Tu as compris ce que je voulais dire.
Je ne lui réponds rien, et me contente de le regarder. Son regard me suffit. C'est étrange, d'observer quelqu'un sans jamais s'en lasser. De se laisser être observé sans se sentir mal à l'aise.
Il s'avance d'un pas, rapprochant une nouvelle fois son corps du mien.
- Tu as dis apprécier mes loups.
- Tu entends bien, félicitation.
Il m'offre un sourire moqueur avant de se pencher vers moi. Son visage se retrouve en face du mien, près, bien près.
- Et leur Alpha, l'apprécies-tu ?
- Pour réponse, tu préfères un mot, ou un geste ?
Sa main glisse sur ma hanche dans une caresse électrisante.
- Il paraît qu'un acte vaut mille mots.
Mes doigts viennent chatouiller la peau dégagée de son cou, avant que je ne replonge mes yeux dans les siens. Et je fais l'acte qu'il attend. Je plante mes lèvres sur les siennes, ce qui commence à devenir une habitude. Une délicieuse habitude.
Elles se caressent. Elles dansent ensemble. Ballet endiablé, mais contrôlé. Sa main sur ma hanche me rapproche de lui. Je voudrais me fondre un peu plus contre son corps. Il y a trop de chose entre nous. D'un bras, il me soulève. Il me plaque contre un arbre, continuant de m'embrasser. Nos bouches s'entre-ouvrent. Nos langues se cherchent, puis se trouvent. Elles s'apprivoisent, une nouvelle fois, se redécouvrent avec la même impatience que les fois précédentes.
Et c'est tout aussi électrisant. Cela me transporte dans un tourbillon de sentiment. Oui, c'est un loup. Oui la tradition ne voudrait pas d'un « nous ». Je ne sais pas si nous en sommes un. Mais je m'en fous. Les conservateurs peuvent bien penser ce qu'ils veulent. C'est beaucoup trop bon pour que je ne veuille arrêter. Je ne pense même pas que je puisse arrêter.
Plus fort que moi, plus fort que lui. Plus fort que tout.
Et je n'ai pas envie de résister. Je veux ses lèvres, je veux son corps. Je veux le plaisir et tout ce qui va avec, quand c'est lui et moi, moi et lui.
Il m'embrasse exactement de la façon dont je le désire. Il me possède de la même manière. Et je peux aussi affirmer le contraire.
Parce que ce n'est pas un loup. C'est mon loup.
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Arman et Maï ne sont que des persos secondaires, mais que pensez-vous de ces deux-là ?
La suite mercredi,
Kiss :*
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